Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association Tarz Heol, M. et Mme D... et Danielle M..., M. et Mme F... et Lucienne E... et M. et Mme L... et Marie-Claire G... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le maire de la commune de Ploemeur a délivré à Mme H... un permis d'aménager un lotissement sur les parcelles cadastrées section ED n°s 76p et 77p, situées au lieu-dit " Kerpape ".
Par un jugement n° 1901704 du 14 février 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 14 avril 2020, 29 juin 2020 et 21 décembre 2020, et par un mémoire récapitulatif enregistré le 23 mars 2021, l'association Tarz Heol, M. et Mme D... et Danielle M..., M. et Mme F... et Lucienne E... et
M. L... G..., représentés par Me I..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le maire de la commune de Ploemeur a délivré à Mme H... un permis d'aménager un lotissement sur les parcelles cadastrées section ED n°s 76p et 77p, situées au lieu-dit " Kerpape " ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Ploemeur le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ;
- l'arrêté contesté ne respecte pas les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 mai 2020, 30 novembre 2020 et 18 janvier 2021 et par un mémoire récapitulatif, enregistré le 24 mars 2021, Mme J... H..., représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et de l'intervention et demande à la cour de mettre à la charge des requérants la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à contester le permis d'aménager litigieux ;
- l'intervention volontaire de l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan est irrecevable ;
- aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 novembre 2020 et 19 janvier 2021, et par un mémoire récapitulatif, enregistré le 24 mars 2021, la commune de Ploemeur, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et de l'intervention et demande à la cour de mettre à la charge de chacun des requérants la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est irrecevable, faute de critiquer la régularité du jugement ;
- les requérants ne justifient pas d'un intérêt à contester le permis d'aménager litigieux ;
- l'intervention volontaire de l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan est irrecevable ;
- aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.
Par des mémoires en intervention, enregistrés les 21 décembre 2020 et 20 janvier 2021 (non communiqué), l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan, représentée par Me I..., demande à la cour de faire droit aux conclusions de la requête n° 20NT01323.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué ne respecte pas la coupure d'urbanisation que constitue le vallon de Kergalan ;
- l'arrêté contesté est contraire aux orientations du schéma de cohérence territoriale du pays de Lorient du 18 décembre 2006 qui prévoient notamment la préservation des " fenêtres littorales " de part et d'autre du centre de rééducation de Kerpape ;
- le plan local d'urbanisme de Ploemeur approuvé le 14 mars 2013 ne respecte pas la " fenêtre littorale " inscrite dans le schéma de cohérence territoriale de 2006 ;
- le permis d'aménager contesté a été pris en méconnaissance des articles L. 121-8 et L. 121-13 du code de l'urbanisme ;
- le classement de la parcelle d'assiette du projet en zone Uc par le plan local d'urbanisme de Ploemeur est entaché d'illégalité à défaut de continuité avec le vallon ;
- le schéma de cohérence territoriale du pays de Lorient approuvé en 2018 intègre illégalement le vallon de Kergalan à une centralité urbaine ;
- le permis d'aménager contesté, qui prévoit à terme la construction d'une centaine de logements présente un risque de pollution de la plage située en aval par les eaux de pluie et les eaux usées et un risque pour la sécurité des usagers du chemin longeant la plage, notamment les patients du centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelle de Kerpape.
Par un mémoire enregistré le 19 février 2021, Mme J... H..., représentée par Me B..., demande à la cour de condamner l'association Tarz Héol à lui verser une indemnité d'un montant de 20 000 euros en application des dispositions de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Elle soutient que l'action de l'association Tarz Héol est manifestement abusive et lui a causé un préjudice dans la mesure où elle a été empêchée de mener à bien le projet autorisé par le permis d'aménager contesté.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Mas, rapporteur public,
- les observations de Me I..., pour les requérants et l'association intervenante, celles de Me K..., substituant Me C..., pour la commune de Ploemeur et celles de Me N..., substituant Me B..., pour Mme H....
Une note en délibéré, présentée par la commune de Ploemeur, a été enregistrée le 6 juillet 2021.
Considérant ce qui suit :
1. L'association Tarz Heol, M. et Mme D... et Danielle M..., M. et Mme F... et Lucienne E... et M. L... G... relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Rennes du 14 février 2020 rejetant leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 février 2019 par lequel le maire de la commune de Ploemeur a délivré à Mme H... un permis d'aménager un lotissement sur les parcelles cadastrées section ED n°s 76p et 77p, situées au lieu-dit " Kerpape ".
Sur l'intervention de l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan :
2. L'intervenant en première instance qui a qualité pour faire appel ne peut être intervenant en appel. La personne qui intervient en première instance, soit en demande soit en défense, a qualité pour faire appel du jugement rendu contrairement aux conclusions de son intervention si elle aurait eu qualité, soit pour introduire elle-même le recours sur lequel statue ce jugement, soit pour former tierce-opposition à ce dernier. Il ressort de l'article 1er de ses statuts que l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan, intervenante en demande en première instance, a pour but, dans le département du Morbihan, de promouvoir et défendre les sentiers côtiers, passages piétons et chemins des communes littorales et communes d'estuaires, et de sauvegarder leur environnement. Le point 5 de l'article 2 de ses statuts précise que l'association a pour objet de veiller à la préservation du patrimoine naturel et du patrimoine paysager de l'ensemble du territoire des communes littorales du Morbihan. Le terrain d'assiette du permis d'aménager contesté, d'une superficie totale de 2,3 hectares, se situe dans les espaces proches du rivage de la commune de Ploemeur et, eu égard à l'importance du projet portant sur la réalisation de cinquante-neuf logements, l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan justifiait ainsi d'un intérêt suffisamment direct lui donnant qualité pour contester elle-même le permis d'aménager du 8 février 2019. Elle avait ainsi qualité pour faire appel du jugement du tribunal administratif de Rennes du 14 février 2020, rendu contrairement aux conclusions de son intervention. Dès lors, son intervention devant la Cour ne peut être regardée que comme un appel.
3. Il ressort des pièces du dossier que la notification du jugement a été faite conformément aux dispositions de l'article R. 751-3 du code de justice administrative à l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan, par pli recommandé avec accusé de réception et a été réceptionné par l'intéressée le 18 février 2020. La lettre de notification du jugement mentionnait les voies et délais d'appel. Cette notification a ainsi fait courir le délai d'appel Par suite, la commune de Ploemeur et Mme H... sont fondées à soutenir que " l'intervention " de l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan, enregistrée le 21 décembre 2020, est irrecevable pour tardiveté.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Ploemeur à la requête d'appel :
4. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ". Une requête d'appel qui se borne à reproduire intégralement et exclusivement le texte du mémoire de première instance ne satisfait pas aux prescriptions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, en vertu desquelles la requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des faits et moyens ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge et ne peut être régularisée que jusqu'à l'expiration du délai d'appel.
5. Il ressort des pièces du dossier que les requérants ne se sont pas bornés à présenter la seule reproduction littérale de leurs écritures de première instance et énoncent à nouveau, de manière précise, des critiques quant au permis d'aménager litigieux et aux motifs retenus par les premiers juges. Une telle motivation répond aux exigences de l'article R. 411-1 du code de justice administrative. La fin de non-recevoir tirée du défaut de motivation, opposée par la commune de Ploemeur, ne peut donc être accueillie.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées en première instance :
6. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. (...) ".
7. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme M... et M. et Mme G... sont des voisins immédiats du terrain d'assiette du projet de lotissement autorisé et que M. et Mme E... se situent à proximité du projet contesté comprenant cinquante-neuf logements pour une surface de plancher de 7 920 m². En outre, les requérants se prévalent de ce que le projet, par son importance, est de nature à porter atteinte aux conditions de jouissance de leurs biens en raison de l'augmentation de la circulation dans la rue de Rohr Mez et plus généralement dans le quartier et de l'atteinte à leur vue sur la mer. Par suite, les requérants justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir contre le permis d'aménager litigieux.
9. Aux termes de l'article L. 600-1-1 du code de l'urbanisme : " Une association n'est recevable à agir contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation des sols que si le dépôt des statuts de l'association en préfecture est intervenu au moins un an avant l'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. ". En outre, aux termes de l'article L. 141-1 du code de l'environnement : " Lorsqu'elles exercent leurs activités depuis au moins trois ans, les associations régulièrement déclarées et exerçant leurs activités statutaires dans le domaine de la protection de la nature et de la gestion de la faune sauvage, de l'amélioration du cadre de vie, de la protection de l'eau, de l'air, des sols, des sites et paysages, de l'urbanisme, ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances et, d'une manière générale, œuvrant principalement pour la protection de l'environnement, peuvent faire l'objet d'un agrément motivé de l'autorité administrative. / (...) Ces associations sont dites "associations agréées de protection de l'environnement". / (...) Les associations exerçant leurs activités dans les domaines mentionnés au premier alinéa ci-dessus et agréées antérieurement au 3 février 1995 sont réputées agréées en application du présent article. (...) ". Aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'environnement : " (...) / Toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 (...) justifient d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec leur objet et leurs activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elles bénéficient de l'agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de leur agrément. ". Il résulte de l'article L. 142-1 du code de l'environnement que toute association agréée de protection de l'environnement justifie d'un intérêt présumé pour agir contre les autorisations d'urbanisme produisant des effets dommageables sur tout ou partie du territoire pour lesquels elle bénéficie de l'agrément.
10. Il ressort des pièces du dossier que, le 29 janvier 2013, l'association Tarz Heol a déposé à la sous-préfecture de Lorient ses statuts modifiés, soit plus d'un an avant l'affichage en mairie intervenue le 4 juin 2018 de la demande de permis d'aménager déposée par Mme H... le 31 mai 2018. Il ressort de ses statuts que l'association Tarz Heol, dont le siège social est à Ploemeur, a pour objet la protection et la mise en valeur de l'environnement ainsi que la promotion, auprès de la population, du cadre de vie et du respect de la nature. Il ressort également des pièces du dossier que l'association Tarz Heol a été agréée par un arrêté préfectoral du 1er avril 1985, en application notamment du décret n° 77-760 du 7 juillet 1977 relatif aux associations exerçant leurs activités dans le domaine de la protection de la nature, de l'environnement et de l'amélioration du cadre de vie. En application de l'alinéa 6 de l'article L. 141-1 du code de l'environnement, l'association Tarz Heol est réputée agréée en application de cet article, ce que confirme au demeurant le préfet du Morbihan dans un courrier du 8 février 2019 produit par les requérants. Compte tenu de son objet statutaire, de sa qualité d'association agréée de protection de l'environnement et de l'importance du projet autorisé d'aménager un lotissement comprenant cinquante-neuf logements sur un terrain d'une superficie de 2,3 hectares, situé dans un espace proche du rivage, l'association Tarz Heol justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le permis d'aménager litigieux. Enfin, le représentant légal de l'association était régulièrement habilité à agir en justice en vertu de la délibération du conseil d'administration du 25 mars 2019.
En ce qui concerne la légalité du permis d'aménager du 8 février 2019 :
11. Il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral.
12. Aux termes de l'article L. 131-1 du code de l'urbanisme : " Les schémas de cohérence territoriale sont compatibles avec : / 1° Les dispositions particulières au littoral et aux zones de montagne prévues aux chapitres I et II du titre II (...). " Aux termes de l'article L. 131-4 du même code : " Les plans locaux d'urbanisme (...) sont compatibles avec : / 1° Les schémas de cohérence territoriale prévus à l'article L. 141-1 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 131-7 du même code : " En l'absence de schéma de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme (...) sont compatibles, s'il y a lieu, avec les documents énumérés aux 1° à 10° de l'article L. 131-1 (...) ", c'est-à-dire, notamment, avec les dispositions particulières au littoral.
13. En outre, aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions. En revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages.
14. Enfin, aux termes de l'article L. 121-13 du même code : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage (...) est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. / Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer (...) ". Il résulte des articles L. 121-13 et L. 131-1 du code de l'urbanisme, qu'une opération conduisant à étendre l'urbanisation d'un espace proche du rivage ne peut être légalement autorisée que si elle est, d'une part, de caractère limité, et, d'autre part, justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme selon les critères que ces dispositions énumèrent. Cependant, lorsqu'un schéma de cohérence territoriale ou un des autres schémas mentionnés à l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme comporte des dispositions suffisamment précises et compatibles avec ces dispositions législatives qui précisent les conditions de l'extension de l'urbanisation dans l'espace proche du rivage dans lequel l'opération est envisagée, le caractère limité de l'urbanisation qui résulte de cette opération s'apprécie en tenant compte de ces dispositions du schéma concerné. Doivent être regardées comme une extension de l'urbanisation au sens de ces dispositions l'ouverture à la construction de zones non urbanisées ainsi que la densification significative de zones déjà urbanisées. Le caractère limité de l'extension de l'urbanisation dans un espace proche du rivage, au sens de ces dispositions, s'apprécie eu égard à l'implantation, à l'importance, à la densité, à la destination des constructions envisagées et à la topographie des lieux.
15. D'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment des photographies aériennes et des documents cartographiques que le lieu-dit " Kerpape ", situé à plusieurs kilomètres du centre-bourg de Ploemeur, comprend un centre de vacances et une trentaine de maisons d'habitation implantées le long de la rue de Rorh Mez, voie publique menant à la plage de Kerpape, ainsi que le centre nautique de Kerguélen, situé à l'est du lieu-dit et sur le territoire de la commune de Larmor-Plage voisine. A l'ouest du lieu-dit " Kerpape ", est implanté le centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelle de Kerpape, composé de nombreux bâtiments de taille importante, lesquels sont toutefois séparés des constructions composant le lieu-dit " Kerpape " par le vallon de Kerpape, large espace d'environ trois hectares, demeuré à l'état naturel ou exploité à des fins agricoles, s'élargissant progressivement jusqu'à la plage de Kerpape, située en aval. Ce centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelle ne peut être regardé à lui seul comme une agglomération ou un village au sens de la loi Littoral. En outre, en l'absence d'un nombre et d'une densité significatifs de constructions, le lieu-dit " Kerpape ", situé à l'est, ne peut être qualifié d'agglomération ou de village, au sens des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, et constitue une zone d'urbanisation diffuse en continuité de laquelle aucune nouvelle construction ne peut être autorisée. Par conséquent, c'est par une inexacte application des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme que le permis d'aménager litigieux a été délivré.
16. D'autre part, il est constant que le terrain d'assiette du projet contesté se trouve dans un espace proche du rivage. Il ressort des pièces du dossier que le territoire de la commune de Ploemeur est couvert par le schéma de cohérence territoriale du pays de Lorient, approuvé le 16 mai 2018, lequel identifie des centralités urbaines ainsi que des agglomérations et villages au sens des dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme citées au point 13. S'agissant de la commune de Ploemeur, a été identifiée la centralité urbaine de Kerroc'h - Lomener - Kerpape, longeant le littoral sur près de cinq kilomètres. Le lieu-dit " Kerpape " et le centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelle ont été intégrés à cette centralité urbaine, identifiée également comme agglomération ou village au sens de la loi Littoral et dans un espace proche du rivage. Ainsi qu'il a été exposé au point 15, le lieu-dit " Kerpape " est séparé du centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelle par le vallon de Kerpape non bâti. Il ressort en outre des documents cartographiques et des photographies aériennes que le centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelle est lui-même séparé de la zone urbanisée de Lomener, située à l'ouest, par le vallon de Kergalan, large zone demeurée à l'état naturel ou exploitée à des fins agricoles, allant de la route départementale 152 au nord-est jusqu'au rivage de l'Anse du Stole au sud-ouest. Il suit de là que l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan est fondée à soutenir, alors, d'ailleurs, que l'ancien schéma de cohérence territoriale de 2006 avait créé une " fenêtre littorale " à Kerpape, que le schéma de cohérence territoriale du pays de Lorient approuvé en 2018 est incompatible avec les dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme, en tant qu'il intègre le lieu-dit " Kerpape " et le centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelle à la centralité urbaine et à la zone déjà urbanisée de Kerroc'h et Lomener, dès lors que ce schéma de cohérence territoriale ne peut être regardé comme autorisant ainsi une extension de l'urbanisation ayant un caractère limité au sens des dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme. Il en est de même du plan local d'urbanisme de 2013 qui classe en zone urbaine l'ensemble du secteur. Par suite, en délivrant le permis d'aménager contesté, qui porte sur la création de seize maisons d'habitation et de trois immeubles d'habitat collectif, soit cinquante-neuf nouveaux logements sur une surface de plancher de 7 920 m², dans une zone d'urbanisation diffuse, le maire de Ploemeur a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme.
17. Aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ". Pour l'application de ces dispositions, aucun des autres moyens invoqués n'est susceptible, en l'état du dossier, de fonder l'annulation de l'arrêté du 8 février 2019 du maire de Ploemeur portant permis d'aménager.
18. Il résulte de tout ce qui précède que l'association Tarz Heol est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.
Sur les conclusions de Mme H... tendant à l'application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :
19. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en œuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel ".
20. Il résulte de ce qui précède que l'association Tarz Heol, qui est fondée à demander l'annulation du permis d'aménager du 8 février 2019, ne peut être regardée comme ayant mis en œuvre son droit de former un recours dans des conditions traduisant un comportement abusif. Par suite, les conclusions présentées par Mme H... au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des requérants, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la commune de Ploemeur et à Mme H... des sommes qu'elles demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Ploemeur le versement aux requérants d'une somme globale de 1 500 euros au titre des mêmes frais.
D E C I D E :
Article 1er : L'intervention de l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan n'est pas admise.
Article 2 : Le jugement du 14 février 2020 du tribunal administratif de Rennes et l'arrêté du 8 février 2019, par lequel le maire de la commune de Ploemeur a délivré à Mme H... un permis d'aménager au lieu-dit " Kerpape ", sont annulés.
Article 3 : La commune de Ploemeur versera à l'association Tarz Heol, M. et Mme M..., M. et Mme E... et M. G... une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Ploemeur et par Mme H... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les conclusions présentées par Mme H... au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Tarz Heol, à M. et Mme D... et Danielle M..., à M. et Mme F... et Lucienne E..., à M. L... G..., à l'association des Amis des chemins de ronde du Morbihan, à la commune de Ploemeur et à Mme H....
Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Morbihan et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Lorient.
Délibéré après l'audience du 2 juillet 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme Buffet, présidente assesseure,
- Mme A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juillet 2021.
La rapporteure,
C. A...
Le président,
T. CELERIER
La greffière,
C. POPSE
La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT01323
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