LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 29 septembre 2021
Cassation partielle
M. CATHALA, président
Arrêt n° 1101 FS-B
Pourvoi n° T 20-16.518
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 29 SEPTEMBRE 2021
M. [O] [Z], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 20-16.518 contre l'arrêt rendu le 26 mars 2020 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l'opposant à la société Clariteam services, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [Z], de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Clariteam services, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 juillet 2021 où étaient présents M. Cathala, président, M. Barincou, conseiller rapporteur, Mme Leprieur, conseiller doyen, M. Pietton, Mmes Le Lay, Mariette, M. Seguy, conseillers, Mme Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Marguerite, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 26 mars 2020), dans une instance opposant M. [Z] à la société Clariteam services, son employeur, un conseil de prud'hommes a rendu un jugement qui a été notifié le 20 juin 2019.
2. Le 27 juin 2019, le salarié en a personnellement interjeté appel. Le 19 août 2019, un nouvel appel a été formé en son nom par un défenseur syndical.
3. Par ordonnance du 9 décembre 2019, le conseiller de la mise en état a jugé irrecevables ces deux déclarations d'appel.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le salarié fait grief à l'arrêt de juger irrecevables la déclaration d'appel formée par lui le 27 juin 2019 ainsi que celle formée le 19 août 2019 par un défenseur syndical, alors « que l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités a pour effet de ne pas faire courir le délai de recours ; que, pour déclarer irrecevable l'appel formé par lettre recommandée avec accusé de réception en l'absence d'un avocat ou d'un défenseur syndical et dire qu'il s'ensuit que la déclaration d'appel formée le 19 août 2019 par le défenseur syndical, au-delà du délai de recours qui était ouvert jusqu'au 20 juillet 2019, est également irrecevable et n'a pu régulariser la première déclaration d'appel, l'arrêt retient que le jugement a été régulièrement notifié au salarié dès lors que l'article 680 du code de procédure civile ne prévoit pas de précisions sur le périmètre territorial d'intervention des défenseurs syndicaux ; qu'en statuant ainsi, alors que l'acte de notification d'un jugement rendu en premier ressort doit, pour faire courir le délai de recours, comporter l'indication que le défenseur syndical que doit constituer l'appelant, ne peut être qu'un défenseur syndical autorisé à exercer ses fonctions devant la cour d'appel compétente, la cour d'appel a violé l'article 680 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 1453-4 du code du travail. » Réponse de la cour
Vu l'article 680 du code de procédure civile et l'article L. 1453-4 du code du travail :
5. Il résulte du premier de ces textes que l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités a pour effet de ne pas faire courir le délai de recours.
6. Selon le second de ces textes, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel (décision QPC n° 2019-831, 12 mars 2020), le défenseur syndical intervient sur le périmètre d'une région administrative, la partie ayant choisi de se faire assister par un défenseur syndical devant le conseil de prud'hommes pouvant toutefois continuer à être représentée par ce même défenseur devant la cour d'appel compétente.
7. L'acte de notification d'un jugement de conseil de prud'hommes rendu en premier ressort doit donc, pour faire courir le délai de recours, indiquer que le défenseur syndical que peut constituer l'appelant est soit celui qui l'a assisté en première instance soit un défenseur syndical territorialement compétent pour exercer ses fonctions devant la cour d'appel concernée.
8. Pour déclarer irrecevable comme tardif l'appel formé par le défenseur syndical, l'arrêt retient que le jugement a été régulièrement notifié, peu important que le périmètre territorial d'intervention des défenseurs syndicaux ne soit pas précisé par l'acte de notification.
9. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
10. La cassation prononcée entraîne, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif relatifs aux dépens et aux demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il confirme le chef de dispositif de l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 9 décembre 2019 ayant déclaré irrecevable la déclaration d'appel formée par le salarié le 27 juin 2019, l'arrêt rendu le 26 mars 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société Clariteam services aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Clariteam services et la condamne à payer à M. [Z] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille vingt et un.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [Z]
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevables la déclaration d'appel formée le 27 juin 2019 et la déclaration d'appel formée le 19 août 2019 par M. [Z].
AUX MOTIFS propres QU'il résulte des dispositions des articles R 1453-2-2° et R 1461-1 et 2 du code du travail issus du décret n°2016-660 du 20 mai 2016 applicables aux instances et appels introduits à compter du 1er août 2016 qu'en matière prud'homale le délai d'appel est d'un mois ; qu'il est formé, instruit et jugé suivant la procédure avec représentation obligatoire et qu'à défaut d'être représentées par un défenseur syndical, les parties sont tenues de constituer avocat ; que s'agissant du contenu de l'acte de notification, il convient de se référer aux mentions exigées par l'article 680 du code de procédure civile sur le délai d'appel et les conditions de représentation obligatoire devant la chambre sociale de la cour d'appel ; que ce texte ne prévoit pas de précisions sur le périmètre territorial d'intervention des défenseurs syndicaux ; qu'il se déduit de ces dispositions que le jugement a été régulièrement notifié à M. [Z] et que l'appel formé par celui-ci par lettre recommandée avec accusé de réception en l'absence d'un avocat et/ou d'un défenseur syndical ne répond pas aux exigences de la loi et doit être déclaré irrecevable ; qu'il s'ensuit que la déclaration d'appel formée le 19 août 2019, soit au-delà du délai de recours qui était ouvert jusqu'au 20 juillet 2019, est également irrecevable et n'a pu régulariser la première déclaration d'appel ;
AUX MOTIFS adoptés QU' il résulte des dispositions des articles R. 1453-2, 2° et R. 1461-1 et 2 du code du travail dans leur rédaction issue du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016, applicables aux instances et appels introduits à compter du 1er août 2016, qu'en matière prud'homale le délai d'appel est d'un mois, que l'appel est formé, instruit et jugé suivant la procédure avec représentation obligatoire et qu'à défaut d'être représentées par un défenseur syndical, les parties sont tenues de constituer avocat ; que s'agissant du contenu de l'acte de notification du jugement, sans qu'il y ait lieu de suivre l'appelant dans ses considérations sur les vicissitudes qu'a connu l'élaboration des dispositions relatives au champ territorial de l'exercice de la fonction de défenseur syndical, il suffit de constater que l'acte de notification du jugement comporte bien les mentions exigées par l'article 680 du code de procédure civile et notamment, le délai d'appel ainsi que les modalités de la représentation obligatoire devant la chambre sociale de la cour d'appel, peu important que le périmètre territorial d'intervention des défenseurs syndicaux, n'y soit pas précisé ; que s'agissant des circonstances de la notification, il sera constaté que le jugement a été notifié à l'adresse mentionnée par le jugement dont M. [Z] précise lui-même que c'était l'adresse qu'il avait déclarée devant le conseil de prud'homme ; et, s'il établit que la signature figurant sur l'avis de réception en date du 25 juin 2019, après avis de passage laissé par La Poste le 22 juin, est celle de sa mère, le courrier de notification n'a pu être remis à cette dernière que sur présentation d'une procuration de sa part ; qu'ayant relevé appel dès le 27 juin 2019, il ne peut contester avoir eu connaissance de la décision en temps utile ; qu'il s'ensuit que, le jugement ayant été régulièrement notifié et les modalités de recours dûment portées à la connaissance de M. [Z], l'appel, formé le 27 juin 2019 par lettre recommandée avec avis de réception, sans représentation par un avocat ou un défenseur syndical, n'a pas été fait dans les formes prescrites ; que l'irrégularité qui en résulte ne peut être réparée par un nouvel acte au delà du délai d'appel ; que la deuxième déclaration d'appel formée le 19 août 2019, soit au delà du délai de recours qui expirait le 25 juillet 2019, est irrecevable comme tardive et n'a pu régulariser la première déclaration d'appel.
ALORS QUE l'absence de mention ou la mention erronée dans l'acte de notification d'un jugement de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités a pour effet de ne pas faire courir le délai de recours ; que, pour déclarer irrecevable l'appel formé par lettre recommandée avec accusé de réception en l'absence d'un avocat ou d'un défenseur syndical et dire qu'il s'ensuit que la déclaration d'appel formée le 19 août 2019 par le défenseur syndical, au-delà du délai de recours qui était ouvert jusqu'au 20 juillet 2019, est également irrecevable et n'a pu régulariser la première déclaration d'appel, l'arrêt retient que le jugement a été régulièrement notifié à M. [Z] dès lors que l'article 680 du code de procédure civile ne prévoit pas de précisions sur le périmètre territorial d'intervention des défenseurs syndicaux ; qu'en statuant ainsi, alors que l'acte de notification d'un jugement rendu en premier ressort doit, pour faire courir le délai de recours, comporter l'indication que le défenseur syndical que doit constituer l'appelant, ne peut être qu'un défenseur syndical autorisé à exercer ses fonctions devant la cour d'appel compétente, la cour d'appel a violé l'article 680 du code de procédure civile, ensemble l'article L. 1453-4 du code du travail.