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18/12/2020 | FRANCE | N°19VE03251

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 1ère chambre, 18 décembre 2020, 19VE03251


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société UBIQUE, venant aux droits de la société Itaque, a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la restitution de crédits d'impôt recherche pour un montant de 135 234 à raison des dépenses engagées au cours de l'année 2014 et de désigner un expert indépendant.



Par un jugement n° 1604752 du 25 juillet 2019, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa requête.



Procédure devant l

a Cour :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le

25 septembre 2019 et le 23 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société UBIQUE, venant aux droits de la société Itaque, a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la restitution de crédits d'impôt recherche pour un montant de 135 234 à raison des dépenses engagées au cours de l'année 2014 et de désigner un expert indépendant.

Par un jugement n° 1604752 du 25 juillet 2019, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le

25 septembre 2019 et le 23 juillet 2020, la société UBIQUE, représentée par Me A... et

Me B..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la restitution des crédits d'impôt-recherche litigieux ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la minute du jugement n'a pas été signée, en méconnaissance des disposition de l'article R. 741-7 du code de justice administrative

- une instance distincte est pendante devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, portant sur des redressements opérés par l'administration fiscale relatifs aux crédit impôt dont elle a bénéficié au titre des années 2011, 2012 et 2013 ; la référence, pour considérer le projet de recherche qu'elle a présenté au titre de l'année 2014, à l'avis technique du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche relatif à ses projets de recherche ayant donné lieu à la déduction du crédit impôt recherche pour les années 2011, 2012 et 2013, méconnaît l'autorité de la chose jugée de la décisions à intervenir du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

- la référence, par l'administration et par les premiers juges, à l'avis technique du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche portant sur ses projets de recherche des années 2011 à 2013, pour se prononcer sur l'éligibilité au crédit impôt recherche de ses dépenses de recherche au titre de l'année 2014, méconnaît le principe d'impartialité et du droit à un procès équitable, tiré de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les dépenses de recherche qu'elle a exposées au titre de l'année de 2014 sont éligibles au crédit impôt recherche ; elles portent sur un projet de recherche nouveau, distinct du projet mené au cours des années 2011 à 2013, et en constitue la continuité ; l'administration comme les premiers juges ont à tort estimé que ce projet ne remplissait par les critères posés par l'article 244 quater B du code général des impôts et par l'article 49 septies F de l'annexe III à ce code pour l'éligibilité au crédit impôt recherche.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1405 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Beaujard, président ;

- et les conclusions de M. Met, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La société UBIQUE, qui exerce une activité de concepteur de solutions logicielles pour la restauration rapide, a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la restitution de crédits d'impôt recherche pour un montant de 135 234 euros à raison des dépenses engagées au cours de l'année 2014, et de désigner un expert indépendant. Elle relève appel du jugement du 25 juillet 2019 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il résulte de l'instruction que la minute du jugement attaqué a été signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque dès lors en fait.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. ". Aux termes de l'article L. 45 B du livre des procédures fiscales : " La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt défini à l'article 244 quater B du code général des impôts peut, sans préjudice des pouvoirs de contrôle de l'administration des impôts qui demeure seule compétente pour l'application des procédures de rectification, être vérifiée par les agents du ministère chargé de la recherche et de la technologie (...) ". Enfin, l'article R. 45 B-1 du même livre dispose que : " I. La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt mentionné à l'article L. 45 B peut être vérifiée soit par des agents dûment mandatés par le directeur de la technologie, soit par les délégués régionaux à la recherche et à la technologie ou par des agents dûment mandatés par ces derniers (...) ". D'une part, il ne résulte pas de l'instruction, que tant l'administration que le tribunal administratif se sont estimés liés par l'avis rendu par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche au titre des crédits d'impôt-recherche des années précédentes. D'autre part, la circonstance que la cour soit amenée à se prononcer sur le crédit d'impôt litigieux, relatif à l'année 2014 avant que le tribunal administratif n'ait pu statuer sur le droit au crédit d'impôt-recherche de la même société au titre des années 2011, 2012 et 2013 , n'a pour effet ni de priver d'effet utile la demande relative au crédit d'impôt-recherche de 2011 à 2013 devant le tribunal administratif, ni de méconnaitre une future et éventuelle autorité de la chose jugée par le tribunal administratif sur le crédit d'impôt-recherche au titre des années 2011 à 2013, ni, par suite, et en tout état de cause, de méconnaitre le droit au procès équitable reconnu par les stipulations de l'article 6 précité de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

5. En second lieu, aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : / a) Les dotations aux amortissements des immobilisations, créées ou acquises à l'état neuf et affectées directement à la réalisation d'opérations de recherche scientifique et technique (...) b) Les dépenses de personnel afférentes aux chercheurs et techniciens de recherche directement et exclusivement affectés à ces opérations (...) c) les autres dépenses de fonctionnement exposées dans les mêmes opérations ; ces dépenses sont fixées forfaitairement à 75 % des dépenses de personnel mentionnées à la première phrase du b (...) VI. Un décret fixe les conditions d'application du présent article (...) ". Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au même code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : (...) c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté. ".

6. Il résulte de ces dispositions que ne peuvent être prises en compte pour le bénéfice du crédit d'impôt en faveur de la recherche, que les dépenses exposées pour le développement de logiciels dont la conception ne pouvait être envisagée, eu égard à l'état des connaissances techniques à l'époque considérée, par un professionnel averti, par simple développement ou adaptation desdites techniques. Des opérations consistant à perfectionner des matériels ou procédés existants, ou à en développer des fonctionnalités particulières, et qui se traduisent par des améliorations non substantielles de techniques déjà existantes ne caractérisent pas des opérations de développement expérimental présentant un caractère de nouveauté. Il appartient au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction dont le litige qui lui est soumis a fait l'objet, qu'une entreprise remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 244 quater B du code général des impôts.

7. La société UBIQUE a produit, le 18 février 2016, en réponse à la demande de l'administration fiscale, un dossier technique relatif à ses activités de recherche au titre de l'année 2014, pour lesquels elle demandait la restitution d'un crédit impôt recherche au titre de cette année. Le projet de recherche, mentionné dans ce dossier et intitulé " NEOFOOD ", y est décrit comme consistant à " mettre en place un référentiel de plusieurs bases de données assurant la traçabilité de la chaîne de consommation alimentaire jusqu'au niveau client, sur la base d'une normalisation, à créer, pour le nommage et la définition des aliments ". Si la société requérante soutient que ses travaux de recherche au cours de l'année 2014 ont porté sur un projet dénommé " FOODPASSPORT ", qui a constitué la continuité du projet " NEOFOOD " lequel a fait l'objet d'un constat d'échec à l'été 2014, elle ne fait état d'aucun élément de nature à étayer ces allégations, le dossier technique qu'elle produit ne mentionnant aucune donnée relative au projet " FOODPASSPORT ", ni même le terme " FOODPASSPORT ", non plus qu'un quelconque échec du projet " NEOFOOD ".

8. Il résulte par ailleurs de l'instruction, et notamment de la comparaison des dossiers techniques produits par l'entreprise pour justifier de l'éligibilité des projets menés au cours des années antérieures, que la description des projets est strictement identique s'agissant des parties " A. Préambule ", " B. Contexte ", " C. Objectifs " et " D. État de l'art ". Cette comparaison révèle en outre que la partie " E. Travaux effectués " n'a été enrichie que par l'ajout d'un paragraphe. Si la société soutient que cette comparaison est fondée sur des éléments matériellement inexacts, elle n'apporte aucun élément de nature à étayer ces allégations. L'avis technique du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut à l'inéligibilité des dépenses engagées pour le projet " NEOFOOD " au titre des années 2011 à 2013, la société ne justifiant pas que les travaux réalisés ont nécessité une démarche de recherche. L'examen du dossier technique produit par la société au titre de l'année 2014, à l'instar des dossiers présentés au titre des années 2011 à 2013, se borne à définir des obstacles et des objectifs, sans établir, en particulier dans la partie intitulée " Travaux effectués ", ni le caractère substantiel ni même la réalité des travaux de recherche effectués. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que le projet présenté par la société UBIQUE ne remplissait pas les critères posés par les dispositions précitées du code général des impôts, et que les dépenses engagées pour la réalisation de ce projet ne constituaient pas des dépenses de recherche au sens du II de l'article 244 quater B de ce code.

9. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de

non-recevoir opposée par le ministre, ni de faire droit à la demande de nomination d'un expert, formulée par la société requérante, que la société UBIQUE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante à la présente instance. Les conclusions présentés à ce titre par la société UBIQUE doivent, par suite, être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société UBIQUE est rejetée.

N° 19VE03251 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19VE03251
Date de la décision : 18/12/2020
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08-01-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Patrice BEAUJARD
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : DS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2020-12-18;19ve03251 ?
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