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19/10/2022 | FRANCE | N°19NC02672

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 19 octobre 2022, 19NC02672


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 23 août 2019, et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 27 mai 2020 et 2 avril 2021, la société Cora, représentée par Me Le Fouler, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler l'arrêté du 28 juin 2019 par lequel le maire de Sainte-Marie-aux-Chênes a délivré à la SCI Gleta un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de la réalisation d'un " drive " à l'enseigne " E. Leclerc " sur un terrain situé 38 rue de Briey sur le territoir

e de cette commune.

2°) de mettre à la charge de la SCI Gleta et de la SAS Confla...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 23 août 2019, et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 27 mai 2020 et 2 avril 2021, la société Cora, représentée par Me Le Fouler, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler l'arrêté du 28 juin 2019 par lequel le maire de Sainte-Marie-aux-Chênes a délivré à la SCI Gleta un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de la réalisation d'un " drive " à l'enseigne " E. Leclerc " sur un terrain situé 38 rue de Briey sur le territoire de cette commune.

2°) de mettre à la charge de la SCI Gleta et de la SAS Conflans Distribution la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la cour est compétente pour statuer en premier et dernier ressort sur le présent litige ;

- sa requête est recevable dès lors que, d'une part, elle a été introduite dans les deux mois suivant l'édiction de l'arrêté contesté du 28 juin 2019 et, d'autre part, la réalisation du projet litigieux affectant nécessairement l'activité du service " drive " qu'elle exploite dans la même zone de chalandise, elle justifie d'un intérêt à solliciter l'annulation de cet arrêté ;

- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article A. 424-2 du code de l'urbanisme, dès lors que les mentions relatives à l'identité du demandeur et au lieu des travaux sont erronées ;

- la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale est irrecevable dès lors que l'une des deux sociétés ayant présenté le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale n'a pas la qualité de pétitionnaire du permis de construire ;

- l'avis favorable de la commission nationale d'aménagement commercial du 21 mars 2019 est entaché d'erreurs de droit dès lors que, d'une part, le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale présente des incohérences majeures avec le dossier de demande de permis de construire, d'autre part, la surface du projet, pour laquelle l'autorisation d'exploitation commerciale a été donnée, a été réduite à la suite de l'avis défavorable de la commission départementale d'aménagement commercial du 20 décembre 2018 ;

- l'avis favorable du 21 mars 2019 est entaché d'une erreur d'appréciation en raison de l'incompatibilité du projet litigieux avec le schéma de cohérence territoriale de l'agglomération messine ;

- en émettant un avis favorable au projet litigieux, la commission nationale d'aménagement commercial a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation au regard des critères de l'article L. 752-6 du code de commerce relatifs à l'aménagement du territoire, au développement durable et à la protection des consommateurs.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2019, et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 17 novembre 2020 et 28 avril 2021, la SAS Conflans Distribution et la SCI Gleta, représentées par Me Courrech, concluent au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Cora, dans le dernier état de leurs écritures, d'une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 novembre 2019, la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes doit être regardée comme concluant au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Fouler pour la société Cora et de Me Courrech pour la SCI Gleta et la SAS Conflans Distribution.

Considérant ce qui suit :

1. Le 27 juillet 2018, la SCI Gleta a sollicité la délivrance d'un permis de construire en vue de réaliser, sur un terrain situé 40 rue de Briey à Sainte-Marie-aux-Chênes (Moselle), un " drive " à l'enseigne " E. Leclerc " doté de cinq pistes de ravitaillement, en procédant à l'aménagement et à l'extension d'un ancien garage. Afin de permettre l'exploitation commerciale de ce nouvel établissement, le projet a été soumis, dans le cadre de l'instruction de la demande, à la commission départementale d'aménagement commercial de la Moselle, qui a émis un avis défavorable le 20 décembre 2018 au motif que le projet risquait de fragiliser les activités commerciales de la zone de chalandise, que les accès au site étaient susceptibles de créer des problèmes de sécurité et que les actions prévues en matière de développement durable s'avéraient peu ambitieuses. Le 21 décembre 2018, le maire de Sainte-Marie-Aux-Chênes a refusé de faire droit à la demande de la SCI Gleta. Toutefois, à la suite de l'avis favorable de la commission nationale d'aménagement commercial du 21 mars 2019, le permis de construire sollicité a été délivré à la pétitionnaire par un nouvel arrêté municipal du 28 juin 2019. Exploitant également un " drive ", doté de deux pistes de ravitaillement, dans la zone de chalandise du projet, la société Cora demande à la cour d'annuler ce dernier arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 28 juin 2019 :

2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article A. 424-1 du code de l'urbanisme : " La décision expresse prise sur une demande de permis de construire, d'aménager ou de démolir ou sur une déclaration préalable prend la forme d'un arrêté. ". Aux termes du premier alinéa de l'article A. 424-2 du même code : " L'arrêté prévu au premier alinéa de l'article A. 424-1 : (...) b) Vise la demande de permis ou la déclaration et en rappelle les principales caractéristiques : nom et adresse du demandeur, objet de la demande, numéro d'enregistrement, lieu des travaux ; (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire, déposée le 27 juillet 2018 par la SCI Gleta, a été signée au nom de cette société par son gérant et qu'elle indique que le terrain d'assiette du projet, situé 40 rue de Briey, regroupe les parcelles cadastrées section 35 n° 128/68 et 324. Si la société Cora fait valoir que l'arrêté en litige du 28 juin 2019 désigne à tort, comme demandeur, le gérant de la SCI Gleta et, comme lieux des travaux, la parcelle cadastrée section 35 n° 128 située 38 rue de Briey, les imprécisions et les incomplétudes des visas sont sans incidence sur la légalité de cet arrêté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article A. 424-2 du code de l'urbanisme doit être écarté comme inopérant.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire ; c) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique. ". Aux termes de l'article R. 752-4 du code de commerce : " La demande d'autorisation d'exploitation commerciale est présentée : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains ou immeubles, par toute personne justifiant d'un titre du ou des propriétaires l'habilitant à exécuter les travaux ou par le mandataire d'une de ces personnes ; b) Soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation pour cause d'utilité publique. / Dans le cas où un permis de construire n'est pas nécessaire, la demande d'autorisation d'exploitation commerciale peut également être présentée par toute personne justifiant d'un titre du ou des propriétaires l'habilitant à exploiter commercialement les immeubles ou par le mandataire de cette personne. ".

5. Il ressort des pièces du dossier que la SCI Gleta, qui, propriétaire de la parcelle cadastrée section 35 n° 324 sur laquelle doivent être réalisés les travaux d'aménagement et d'extension du bâtiment existant, a seule la qualité de pétitionnaire du permis de construire délivré le 28 juin 2019, a présenté, devant la commission départementale d'aménagement commercial de la Moselle, puis la commission nationale d'aménagement commercial, le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale. S'il est vrai que ce dossier a également été signé, de façon superfétatoire, par la SAS Conflans Distribution, laquelle, au demeurant, est propriétaire de la parcelle cadastrée section 35 n° 128/68 et future exploitante du " drive ", une telle circonstance n'est pas de nature à entacher d'irrégularité l'arrêté en litige. Par suite, la société Cora n'est pas fondée à soutenir que la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale aurait dû être rejetée pour irrecevabilité par le maire de Sainte-Marie aux-Chênes.

6. En troisième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial. (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 423-13-2 du même code : " Lorsque la demande de permis de construire porte sur un projet relevant de l'article L. 752-1 du code de commerce, le maire transmet au secrétariat de la commission départementale d'aménagement commercial deux exemplaires du dossier, dont un sur support dématérialisé, dans le délai de sept jours francs suivant le dépôt. ". Aux termes de l'article R. 431-33-1 du même code : " Lorsque le projet relève de l'article L. 425-4, la demande est accompagnée d'un dossier comprenant les éléments mentionnés à l'article R. 752-6 du code de commerce. ".

7. Contrairement aux allégations de la société Cora, il ne ressort pas des pièces du dossier que le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale présenterait des incohérences majeures avec le dossier de demande de permis de construire. Il n'est pas contesté que l'extension du bâtiment existant, pour la réalisation de laquelle un permis de construire a été sollicité, se trouve exclusivement sur la parcelle cadastrée section 35 n° 324. Dans ces conditions, les indications concernant l'aménagement sur la parcelle contiguë d'un abri pour vélos et l'affectation de la maison d'habitation, présente sur cette même parcelle, à l'usage du personnel du " drive " n'avaient pas à figurer dans le dossier de demande de ce permis. De même, remédiant aux lacunes du plan de masse, du plan de coupe, du plan de façade et des toitures et du document graphique sur ces deux points, la notice explicative du projet architectural mentionne la présence de panneaux photovoltaïques sur le toit de l'extension pour une surface de cent mètres carrés et la plantation par séquence d'arbres de haute tige. Par suite et alors qu'il n'est pas contesté que la commission nationale d'aménagement commercial disposait également, conformément au premier alinéa de l'article R. 423-13-2 du code de l'urbanisme, du dossier de demande de permis de construire et était ainsi à même de se prononcer en pleine connaissance de cause, la société Cora n'est pas fondée à soutenir que l'avis favorable du 21 mars 2019 serait entaché d'une erreur de droit en raison des incohérences existant entre le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale et le dossier de demande de permis de construire.

8. En quatrième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 752-1 du code de commerce : " Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : (...) 7° La création ou l'extension d'un point permanent de retrait par la clientèle d'achats au détail commandés par voie télématique, organisé pour l'accès en automobile. (...) ". Aux termes du troisième paragraphe de l'article L. 752-3 du même code : " Au sens du présent code, constituent des points permanents de retrait par la clientèle d'achats au détail commandés par voie télématique, organisés pour l'accès en automobile, les installations, aménagements ou équipements conçus pour le retrait par la clientèle de marchandises commandées par voie télématique ainsi que les pistes de ravitaillement attenantes. ". Aux termes de l'article L. 752-16 du même code : " Pour les points permanents de retrait par la clientèle d'achats au détail mentionnés à l'article L 752-3, l'autorisation est accordée par piste de ravitaillement et par mètre carré d'emprise au sol des surfaces, bâties ou non, affectées au retrait des marchandises. ".

9. Il résulte de l'avis favorable de la commission nationale d'aménagement commercial du 21 mars 2019 que le projet de la SCI Gleta a été autorisé pour la réalisation de cinq pistes de ravitaillement présentant une emprise au sol de 172 mètres carrés. La société Cora fait valoir que la commission départementale d'aménagement commercial de la Moselle avait émis, le 20 décembre 2018, un avis défavorable au même projet pour la réalisation, en sus des cinq pistes de ravitaillement, d'un local de stockage des commandes en attente de livraison, soit une emprise au sol de 85 mètres carrés supplémentaires. Toutefois, il est constant que le " drive " projeté n'est pas intégré directement à un magasin de commerce de détail. Dans ces conditions, l'ensemble des surfaces de l'établissement concerné, qu'elles soient bâties ou non, doivent être regardées comme affectées au retrait des marchandises. Par suite, en retenant une emprise au sol de 172 mètres carrés, limitée aux seules pistes de ravitaillement, à l'exclusion des parties du bâtiment dédiées à la réception, au stockage, à la conservation et à la circulation des marchandises, ainsi que des espaces réservés aux bureaux et aux besoins du personnel, la commission nationale d'aménagement commercial a commis une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 752-16 du code de commerce.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Sont compatibles avec le document d'orientation et d'objectifs du schéma de cohérence territoriale : (...) 8° Les autorisations prévues par l'article L. 752-1 du code de commerce ; (...) ". Aux termes du premier alinéa du premier paragraphe de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable : " L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. ".

11. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes est couverte par le schéma de cohérence territoriale de l'agglomération messine et que, bien que dotée d'une zone d'aménagement commercial, elle y est classée parmi les communes ayant vocation à accueillir une " offre commerciale courante ". Le document d'orientations et d'objectifs du schéma prévoit que l'accueil des activités commerciales est guidé par trois grands principes, consistant à privilégier le redéploiement qualitatif de l'offre plutôt que le développement de nouveaux espaces dédiés au commerce, à adapter qualitativement l'armature commerciale afin d'anticiper les besoins en lien avec les évolutions sociétales et à maintenir la cohérence existante dans la localisation des équipements commerciaux. Ce document précise également que l'offre commerciale courante se localisera " préférentiellement " au sein ou en contiguïté du tissu urbain du cœur d'agglomération, ainsi que dans les espaces économiques dédiés. Enfin, il énumère notamment, parmi les objectifs généraux recherchés lors de l'implantation des activités commerciales et artisanales, l'optimisation de l'espace, le renforcement de la qualité environnementale et paysagère du bâti et des espaces extérieurs des commerces ou encore l'amélioration de la qualité architecturale du bâti commercial.

12. Il n'est pas sérieusement contesté que l'instauration d'un " drive " comportant cinq pistes de ravitaillement, qui a vocation à s'implanter au sein d'une zone de chalandise pourvue uniquement de deux autres établissements du même type, dotés respectivement d'une et de deux pistes, s'inscrit dans une volonté d'adapter qualitativement l'armature commerciale existante en répondant à des besoins en lien avec les évolutions sociétales. Impliquant la réhabilitation d'un ancien garage particulièrement inesthétique en entrée d'agglomération, la réalisation d'un tel projet, qui ne se traduit pas par la création d'un nouvel espace dédié au commerce, mais par la requalification d'une friche commerciale existante, contribue à l'optimisation de l'espace et à l'amélioration de la qualité du bâti. S'il est vrai que l'établissement envisagé ne se situe ni dans la zone d'aménagement commercial du Sauceu située à proximité, ni au sein ou en contiguïté du tissu urbain du centre-ville de la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes, les préconisations du schéma de cohérence territoriale de l'agglomération messine en matière de localisation de l'offre commerciale courante ne sont que préférentielles et ne s'opposent donc pas à cette implantation. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de la SCI Gleta serait incompatible avec le document d'orientations et d'objectifs dudit schéma. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la commission nationale d'aménagement commercial aurait commis une erreur d'appréciation en émettant un avis favorable sur la compatibilité de ce projet.

13. En sixième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable : " I.- (...) / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche (...) ; 3° En matière de protection des consommateurs : a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / II.-A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale. ". Aux termes du deuxième alinéa du premier paragraphe de l'article L. 752-17 du code de commerce : " La Commission nationale d'aménagement commercial émet un avis sur la conformité du projet aux critères énoncés à l'article L 752-6 du présent code, qui se substitue à celui de la commission départementale. En l'absence d'avis exprès de la commission nationale dans le délai de quatre mois à compter de sa saisine, l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial est réputé confirmé. ".

14. Il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'exploitation commerciale ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions départementale et nationale d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur un dossier de demande d'autorisation, d'apprécier la compatibilité du projet à ces objectifs au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant de l'objectif relatif à l'aménagement du territoire :

15. Il ressort des pièces du dossier que le projet de la SCI Gleta doit être réalisé le long de la route départementale n° 643, à moins de deux kilomètres au nord-ouest du centre-ville de la commune de Sainte-Marie-aux chênes et à quelques centaines de mètres au sud d'une zone pavillonnaire. Il est situé à proximité de la zone d'aménagement commercial du Sauceu, dont il n'est séparé que par un échangeur routier permettant d'accéder à l'autoroute A4. Destiné à être implanté sur un terrain déjà bâti et viabilisé, il répond à une consommation économe de l'espace et ne contribue pas, contrairement aux allégations de la société Cora, au mitage du paysage. Il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le projet en litige aura des effets négatifs sur l'animation de la vie urbaine, les commerces alimentaires situés en centre-ville se limitant à trois boulangeries et à un point de vente hebdomadaire de produits locaux. Enfin, alors qu'il n'est pas établi que le nombre de véhicules empruntant quotidiennement la rue de Briey, qui était de 6 257 en 2016, aurait augmenté de façon significative depuis cette date et alors que la réserve de capacité de cet axe routier s'élève à 57,9 %, le fonctionnement du " drive " envisagé, qui a vocation à accueillir quatre-vingt-dix clients par jour, dont la moitié circule déjà sur la route départementale n° 643 dans le cadre de leurs déplacements pendulaires, aura un impact très limité sur les flux de transports. Dans ces conditions, le projet en litige n'est pas de nature à compromettre l'objectif en matière d'aménagement du territoire fixé à l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant de l'objectif relatif au développement durable :

16. Il n'est pas sérieusement contesté que le projet de la SCI Gleta, composé de volumes en décroché recouverts d'un bardage métallique de ton gris et de panneaux de façade stratifiés et doté à l'avant d'un abri en toile souple de couleur orange couvrant les pistes de ravitaillement, s'il n'est pas particulièrement remarquable sur le plan architectural, contribue à améliorer l'aspect de l'ancien garage implanté en front de rue. Contrairement aux allégations de la société Cora, il ne ressort pas des pièces du dossier que la réalisation à l'arrière du bâtiment existant d'une extension de 185,60 mètres carrés et d'un rehaussement de la toiture à cet endroit de trois mètres aura un impact négatif sur les paysages environnants, constitués principalement de terres agricoles ne présentant pas un intérêt paysager particulier. S'il est vrai que cette extension, de même que l'aménagement des pistes de ravitaillement et d'un parc de stationnement destiné au personnel, auront pour effet d'accentuer l'imperméabilisation des sols, il est constant que les surfaces dédiées aux espaces verts continueront à représenter plus de la moitié de l'emprise foncière totale. Le projet prévoit, en particulier, le maintien à l'état de prairie de la partie non constructible située en fond de parcelle, l'implantation sur le site de douze arbres de haute tige, l'installation d'une borne de recharge pour les véhicules électriques et la couverture d'une partie de la toiture de cent mètres carrés de panneaux photovoltaïques. Dans ces conditions, le projet en litige n'est pas de nature à compromettre l'objectif en matière de développement durable fixé à l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant de l'objectif relatif à la protection des consommateurs :

17. Ainsi qu'il a déjà été dit au point 12 du présent arrêt, la zone de chalandise du projet de la SCI Gleta comprend uniquement deux " drives " d'une et de deux pistes de ravitaillement, le second étant exploité par la société Cora. Les défenderesses font valoir, sans être sérieusement contredites, que la réalisation d'un " drive " supplémentaire, doté de cinq pistes de ravitaillement, répond à un réel besoin de la population, dès lors qu'il résulte de l'étude de marché par sondages réalisée en juin 2016, dont l'absence de fiabilité n'est pas démontrée par la requérante, que 71,8 % des foyers effectuant des achats par internet déclarent fréquenter ce type d'établissements en dehors de la zone de chalandise. Dans ces conditions, alors que l'évolution démographique au sein de cette zone et sur le territoire de la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes est favorable et que les allégations de la société Cora concernant l'inexistence des partenariats conclus avec des associations et des producteurs locaux ne sont étayées par aucun élément probant, le projet en litige n'est pas de nature à compromettre l'objectif en matière de protection des consommateurs fixé à l'article L. 752-6 du code de commerce.

18. Par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la commission nationale d'aménagement commercial, en émettant un avis favorable au projet litigieux, aurait commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation au regard des objectifs et des critères énoncés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

Sur les conséquences du vice affectant l'arrêté du 28 juin 2019 :

19. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de

non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé ".

20. Il résulte de tout ce qui précède que seul est fondé le moyen tiré de ce que, en retenant une emprise au sol de 172 mètres carrés, limitée aux seules pistes de ravitaillement, à l'exclusion des parties du bâtiment dédiées à la réception, au stockage, à la conservation et à la circulation des marchandises, ainsi que des espaces réservés aux bureaux et aux besoins du personnel, la commission nationale d'aménagement commercial a commis une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 752-16 du code de commerce. Il y a lieu de ne procéder qu'à une annulation partielle et conditionnelle du permis de construire litigieux dès lors que ce vice n'affecte qu'une partie identifiable du projet et qu'il est régularisable sans que la nature même de ce projet en soit modifiée. Il y a lieu également de fixer un délai de quatre mois à la SCI Gleta pour demander la régularisation de l'arrêté du 28 juin 2019, en sollicitant un nouvel avis de la commission nationale d'aménagement commercial et un nouvel arrêté du maire de Sainte-Marie-aux-Chênes.

Sur les frais de justice :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la société Cora, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par la SCI Gleta et la SAS Conflans Distribution au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge solidaire des défenderesses le versement à la requérante de la somme totale de 2 000 euros en application de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : L'arrêté du 28 juin 2019 est annulé en tant que l'autorisation d'exploitation commerciale accordée à la SCI Gleta ne porte pas sur les parties du bâtiment dédiées à la réception, au stockage, à la conservation et à la circulation des marchandises, ainsi que sur les espaces réservés aux bureaux et aux besoins du personnel.

Article 2 : Le délai imparti à la SCI Gleta pour demander la régularisation de son projet est fixé à quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La SCI Gleta et la SAS Conflans Distribution verseront solidairement à la société Cora la somme totale de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions présentées par la SCI Gleta et par la SAS Conflans Distribution en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Cora, à la SCI Gleta, à la SAS Conflans Distribution et à la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président de la chambre,

- M. Meisse, premier conseiller,

- M. Marchal, conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 octobre 2022.

Le rapporteur,

Signé : E. A...

Le président,

Signé : C. WURTZ

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au préfet de la Moselle, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N°19NC02672 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02672
Date de la décision : 19/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : SCP COURRECH et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2022-10-19;19nc02672 ?
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