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19/01/2021 | FRANCE | N°19MA04090

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 19 janvier 2021, 19MA04090


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Bupa Insurance Limited a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1604093 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge de ces cotisations supplémentaires.

Procédure devant la C

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Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 août 2019 et le 2 décembre 2019, le mi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Bupa Insurance Limited a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1604093 du 27 juin 2019, le tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge de ces cotisations supplémentaires.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 août 2019 et le 2 décembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles la société Bupa Insurance Limited a été assujettie au titre des exercices clos en 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes ;

2°) de rejeter la demande de la société Bupa Insurance Limited présentée devant le tribunal administratif de Nice ;

3°) de rétablir la société Bupa Insurance Limited aux rôles de l'impôt sur les sociétés et de la contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2009 et 2010.

Il soutient que :

- le changement d'activité de la succursale française de la société Bupa Insurance Limited a entraîné le transfert à celle-ci de l'actif incorporel constitué par le portefeuille de clients de la succursale et, ayant été réalisé gratuitement et sans contrepartie, ce transfert devait être imposé en application de l'article 57 du code général des impôts ;

- la prise en compte de la réclamation présentée par la société Bupa Insurance Limited le 19 octobre 2012 ne peut être regardée comme une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal dont le contribuable pourrait se prévaloir sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 novembre 2019 et le 20 décembre 2019, la société Bupa Insurance Limited, représentée par Me Filippi, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 20 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'action et des comptes publics ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 30 décembre 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 30 avril 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,

- et les observations de Me Filippi, représentant la société Bupa Insurance Limited.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'une vérification de comptabilité, la société de droit britannique Bupa Insurance Limited a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2009 et 2010 selon la procédure de rectification contradictoire, le principal chef de redressement consistant en un rehaussement de la base de ces impôts au titre de l'exercice clos en 2009 d'un montant de 6 095 000 euros correspondant à la valeur de l'actif incorporel constitué par la clientèle de la succursale française que celle-ci aurait cédé gratuitement et sans contrepartie à la société britannique et qui devrait être soumis à ces impôts en application de l'article 57 du code général des impôts. Le ministre de l'action et des comptes publics fait appel du jugement du 27 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Nice a prononcé la décharge de ces cotisations supplémentaires.

2. En premier lieux, aux termes de l'article 57 du code général des impôts : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France. (...) A défaut d'éléments précis pour opérer les rectifications prévues aux premier, deuxième et troisième alinéas, les produits imposables sont déterminés par comparaison avec ceux des entreprises similaires exploitées normalement ". Ces dispositions instituent, dès lors que l'administration établit l'existence d'un lien de dépendance et d'une pratique entrant dans leurs prévisions, une présomption de transfert indirect de bénéfices par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France au profit de ces dernières, qui ne peut être utilement combattue par les entreprises imposables en France qu'à charge, pour elles, d'apporter la preuve que les avantages qu'elles ont consentis ont été justifiés par l'obtention de contreparties favorables à leur propre exploitation. Ces dispositions sont applicables à toute entreprise imposable en France, y compris une succursale française d'une société dont le siège est à l'étranger, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que la succursale n'a pas la personnalité morale.

3. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance soutient que la succursale française de la société de droit danois International Health Insurance (IHI) acquise par la société Bupa Insurance Limited en 2005 et absorbée par celle-ci le 1er janvier 2009 exerçait, avant cette date, une activité complète d'assureur et est devenue, après cette date, un simple bureau de gestion administrative de l'activité d'assurance. Il en déduit qu'elle avait créé une clientèle et qu'elle a cédé le 1er janvier 2009 cet actif incorporel à la société britannique gratuitement et sans contrepartie, ce qui constitue une pratique entrant dans les prévisions de l'article 57 du code général des impôts. Afin d'établir l'existence d'une telle pratique, contestée par la société Bupa Insurance Limited, le ministre de l'économie, des finances et de la relance fonde principalement sur la décision de la société de modifier les règles comptables et financières régissant ses relations avec sa succursale française le 1er janvier 2009. Il note ainsi qu'alors que la succursale bénéficiait du reversement de l'ensemble des primes des clients rattachés à la France et comptabilisait des provisions pour litiges et primes impayées, elle est rémunérée après cette date selon la méthode du prix de revient majoré d'un taux de marge évalué par la société à 5 %. Le ministre note également que la succursale signait et donc gérait des contrats avec les courtiers d'assurance exerçant sur le territoire français avant le 1er janvier 2009 et que les contrats conclus en France étaient enregistrés dans la comptabilité de la société Bupa Insurance Limited avec une cotation spécifique.

4. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'avant la date du 1er janvier 2009, une partie des contrats avec les courtiers d'assurance exerçant sur le territoire français était conclue directement par la société au Danemark, que l'ensemble des services proposés aux assurés, notamment le service d'assistance, était assuré au Danemark et que les contrats d'assurance, régis par le droit danois, ne bénéficiaient d'aucune adaptation particulière à la situation française. En outre, aucun élément du dossier n'établit que les salariés de la succursale française, au nombre de sept à la date du 1er janvier 2009, auraient eu une activité tendant au développement d'une clientèle propre à cette succursale. Notamment, la circonstance que le contrat de travail de la directrice de la succursale française comporte une clause de non-concurrence ne révèle pas la nature de l'activité de la succursale. Enfin, l'enregistrement avec une cotation spécifique, s'il permet de faire une analyse comptable propre aux clients ayant conclu des contrats avec des courtiers exerçant sur le territoire français, ne suffit pas à établir que l'activité de la succursale française aurait consisté à développer une clientèle.

5. Par suite, et bien que le changement des règles comptables et financières mentionné au point 4 soit matériellement exact et montre que la succursale française supportait le risque d'exploitation de l'activité d'assurance en France, le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'établit pas que cette succursale disposait d'une réelle autonomie commerciale avant le 1er janvier 2009. Par suite, il n'établit pas l'existence d'une cession gratuite de clientèle laissant présumer un transfert indirect de bénéfices à la société de droit britannique Bupa Insurance Limited.

6. En second lieu, le jugement du tribunal administratif de Nice n'est pas fondé sur l'existence d'une prise de position formelle de l'administration sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal dont la société Bupa Insurance Limited pourrait se prévaloir sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales. Par suite, le moyen selon lequel l'administration n'aurait pris aucune position formelle à la suite de la réclamation de la société en date du 19 octobre 2012 est sans incidence sur le bien-fondé du jugement du tribunal administratif de Nice. Il ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a déchargé la société Bupa Insurance Limited des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à la société Bupa Insurance Limited au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'économie, des finances et de la relance est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à la société Bupa Insurance Limited au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la relance et à la société Bupa Insurance Limited.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 6 janvier 2021, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 janvier 2021.

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N° 19MA04090

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04090
Date de la décision : 19/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04-083 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Détermination du bénéfice net. - Relations entre sociétés d'un même groupe.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : ERNST et YOUNG

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-01-19;19ma04090 ?
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