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23/09/2021 | FRANCE | N°19MA02459

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 23 septembre 2021, 19MA02459


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sopropêche a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 135 990 euros en réparation des préjudices résultant, d'une part, de la décision du 15 janvier 2014 par laquelle la brigade nationale d'enquêtes vétérinaires et phytosanitaires (BNEVP) a consigné 816 900 kilogrammes de tourteaux de neem stockés dans son établissement de Montfavet et, d'autre part, de faits de dénigrement à son encontre.

Par un jugement n° 1700118 du 2 avril 201

9, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Sopropêche a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 135 990 euros en réparation des préjudices résultant, d'une part, de la décision du 15 janvier 2014 par laquelle la brigade nationale d'enquêtes vétérinaires et phytosanitaires (BNEVP) a consigné 816 900 kilogrammes de tourteaux de neem stockés dans son établissement de Montfavet et, d'autre part, de faits de dénigrement à son encontre.

Par un jugement n° 1700118 du 2 avril 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 mai 2019 et un mémoire enregistré le 22 juin 2021, la société Sopropêche, représentée par Me Lepage demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 2 avril 2019 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 135 990 euros, à parfaire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 20 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne l'illégalité fautive de la décision du 15 janvier 2014 :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- ses observations n'ont été recueillies que postérieurement à la décision de consignation, en méconnaissance de l'article L. 253-13 du code rural et de la pêche maritime ;

- alors même qu'ils contiendraient de l'azadirachtine, ses tourteaux de neem doivent être considérés comme un simple engrais et non comme un produit phytosanitaire au sens tant du règlement (CE) n°1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques que du droit national, et ne nécessitent donc pas d'autorisation de mise sur le marché avant d'être commercialisés ;

- au demeurant, leur teneur en azadirachtine est inférieure à 0,1% ;

- le message réglementaire de la direction générale de l'alimentation du mois de mars 2011, qui a une valeur normative, prescrit que seuls les tourteaux de neem qui ne sont pas conformes à la norme NF U 42-001/A10 doivent être retirés du marché ;

En ce qui concerne les faits de dénigrement :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'administration a porté atteinte à son image auprès de ses clients en diffusant des informations erronées issues d'une enquête pénale en cours, en méconnaissance de la présomption d'innocence, du secret de l'instruction et du secret professionnel auxquels sont astreints les agents de l'Etat ;

En ce qui concerne ses préjudices :

- elle a subi un important préjudice financier particulièrement lourd à cause de la consignation litigieuse, intervenue au moment de la campagne annuelle d'ensemencement, qu'il y a lieu d'évaluer à 840 379 euros ;

- elle est fondée à demander le remboursement des frais de stockage et d'immobilisation de la marchandise consignée, à hauteur de 212 393 euros et 83 158 euros ;

- il y a lieu de l'indemniser des frais de financement du stock consigné, soit 14 950 euros ;

- les frais liés à la destruction de la marchandise peuvent être évalués à la somme de 535 891 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mars 2021, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- compte-tenu de l'autorité de la chose jugée qui s'attache au jugement du tribunal administratif de Nîmes du 29 décembre 2015, confirmé par la cour puis par le Conseil d'Etat, l'ensemble des moyens dirigés contre la décision de consignation contestée devra être écartés ;

- à titre subsidiaire, ces moyens ne sont pas fondés ;

- les autres manquements invoqués ne sont pas établis ;

- le montant des préjudices invoqués n'est établi par aucune pièce comptable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 ;

- la directive d'exécution 2011/44/UE de la commission du 13 avril 2011 ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sanson,

- les conclusions, de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Saintaman, représentant la société Sopropeche.

Considérant ce qui suit :

1. Par décision du 15 janvier 2014, la BNEVP a procédé à la consignation de 816 900 kilogrammes de tourteaux de neem, commercialisés par la société Sopropêche sous l'appellation " Nematorg ", alors stockés dans ses locaux situés à Montfavet. Par un arrêt n° 16MA00780 du 9 mai 2017, devenu définitif après le rejet le 1er février 2018 du pourvoi formé par la société Sopropêche, la cour a confirmé le jugement n° 1400605 du 29 décembre 2015 du tribunal administratif de Nîmes rejetant la demande de cette société tendant à l'annulation de la décision du 15 janvier 2014. Par la requête susvisée, la société Sopropêche demande à la cour d'annuler le jugement du 2 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande indemnitaire tendant à la réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis à raison de l'illégalité de cette décision et des faits de dénigrements commis à son encontre par l'administration.

2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de l'absence de motivation de la décision contestée, de la méconnaissance de la procédure contradictoire prévue au III de l'article L. 253-13 du code rural et de la pêche maritime et de l'erreur d'appréciation que la société Sopropêche reprend en appel sans les assortir d'élément nouveau, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, la société requérante ne peut utilement invoquer le " message réglementaire " de la direction générale de l'alimentation, dépourvu de portée normative et au demeurant contraire aux dispositions des articles L. 253-1 du code rural et de la pêche maritime alors en vigueur et à celles des articles 2 et 28 du règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 en ce qu'il mentionne que sont dispensés d'autorisation de mise sur le marché les produits phytopharmaceutiques conformes à la norme AFNOR 42001/A10.

4. En dernier lieu, par le courriel du 2 décembre 2015 auquel se réfère la requérante, la BNEVP s'est bornée à informer un de ses clients des raisons pour lesquelles le stock de " Nematorg " qu'il avait acheté avait été consigné, l'a informé de l'existence d'une enquête pénale à l'encontre de la société Sopropêche, sans livrer d'élément protégé par le secret de l'instruction judiciaire, et a invité ce client à demander la reprise des produits consignés. La société Sopropêche ne saurait, dès lors, soutenir que la responsabilité de l'administration est engagée à son égard à raison d'une méconnaissance du secret professionnel, du secret de l'instruction, d'une violation de la présomption d'innocence et de prétendus fait de dénigrement.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception de chose jugée opposée par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, que la société Sopropêche n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, tout ou partie de la somme que demande la société Sopropêche au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

7. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros. ". La requête d'appel de la société Sopropêche, qui se borne pour l'essentiel à réitérer la même argumentation que celle qui a été déjà écartée tant par le tribunal administratif de Nîmes que par la cour à l'occasion du recours qu'elle avait formé contre la décision du 15 janvier 2014, présente un caractère abusif. Il y a lieu, dès lors, de lui infliger, en application de ces dispositions, une amende de 3 000 euros.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Sopropêche est rejetée.

Article 2 : La société Sopropêche est condamnée à payer une amende pour recours abusif de 3 000 euros.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sopropêche et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Copie en sera adressée pour information à la direction départementale des finances du Pas de Calais.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2021, où siégeaient :

- M. Alfonsi, président,

- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,

- M. Sanson, conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe, le 23 septembre 2021.

4

N° 19MA02459


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02459
Date de la décision : 23/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

61-01-01 Santé publique. - Protection générale de la santé publique. - Police et réglementation sanitaire.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: M. Pierre SANSON
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : HUGLO LEPAGE SAS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-09-23;19ma02459 ?
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