Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 janvier 2019 et 5 novembre 2020, la SAS Bivaumon et la SAS Distrimon, représentées par la SELARL Aleo, demandent à la Cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2018 par lequel le maire de la commune d'Arles a délivré à la SCI Entrepôt Nîmes un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création d'un magasin de vente d'articles de D... ;
2°) de mettre à la charge solidaire de la Commission nationale d'aménagement commercial et de la commune d'Arles une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la décision est entachée d'incompétence ;
- il ne ressort pas des pièces du dossier que les dispositions des articles R. 752-35 et R. 752-36 du code de commerce auraient été respectées ;
- le dossier de demande ne respecte pas les dispositions de l'article L. 752-21 du code de commerce ;
- le projet méconnaît les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce en matière d'aménagement du territoire (consommation d'espace, impact sur l'animation urbaine, conséquences sur les flux routiers), de développement durable (imperméabilisation, impact visuel) et de protection des consommateurs (risque d'inondation).
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mars 2019, la SCI Entrepôt Nîmes, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 6 000 euros soit mise à la charge de la SAS Bivaumon et de la SAS Distrimon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2020, la commune d'Arles, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge solidaire de la SAS Bivaumon et de la SAS Distrimon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.
La requête a été communiquée à la Commission nationale d'aménagement commercial qui n'a pas produit de mémoire.
Les parties ont été informées, par une lettre du 6 octobre 2020, qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire au cours du premier trimestre 2021 et que l'instruction pourrait être close à partir du 6 novembre 2020 sans information préalable.
Par ordonnance du 4 décembre 2020, la clôture immédiate de l'instruction a été prononcée.
Un mémoire, présenté pour la SCI Entrepôt Nîmes, a été enregistré le 26 janvier 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,
- et les observations de Me E..., représentant la SAS Bivaumon et la SAS Distrimon, de Me A..., représentant la commune d'Arles, et de Me B..., représentant la SCI Entrepôt Nîmes.
Une note en délibéré, présentée par la SCI Entrepôt Nîmes, a été enregistrée le 4 février 2021.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS Bivaumon exploite, au sein de la zone commerciale du Fourchon située au sud d'Arles, un magasin sous l'enseigne " M. D... ". La SAS Distrimon exploite pour sa part, à la même adresse, un magasin sous l'enseigne " La Jardinerie M. D... ". Elles demandent à la Cour d'annuler l'arrêté pris par le maire de la commune d'Arles le 21 novembre 2018, délivrant à la SCI Entrepôt Nîmes un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création, au nord de la commune, au sein de la zone de la Plaine de Montmajour, d'un magasin de vente d'articles de D... à l'enseigne " l'Entrepôt du D... ".
2. Aux termes de l'article L. 752-21 du code de commerce : " Un pétitionnaire dont le projet a été rejeté pour un motif de fond par la Commission nationale d'aménagement commercial ne peut déposer une nouvelle demande d'autorisation sur un même terrain, à moins d'avoir pris en compte les motivations de la décision ou de l'avis de la commission nationale. ".
3. Par un avis du 28 septembre 2017, la Commission nationale d'aménagement commercial s'est prononcée défavorablement sur le projet présenté par la pétitionnaire de création d'un magasin de D..., à l'enseigne " l'Entrepôt du D... ", de 5 806 m² de surface de vente et d'un " drive " de 352 m2 d'emprise au sol avec deux pistes de ravitaillement. Cet avis était motivé par les circonstances que le projet participait " à l'étalement urbain et à la consommation d'espace naturel en s'implantant sur une parcelle dont une grande partie est non imperméabilisée " et que le site était " situé en zone inondable ".
4. Le projet ayant fait l'objet de la décision litigieuse, situé sur le même terrain, autorise l'extension d'un ensemble commercial par la création du même magasin, d'une surface de vente ramenée à 5 652 m2, la surface de vente intérieure demeurant inchangée, et du même " drive " dont l'emprise au sol est de 350 m2. Si la Commission nationale d'aménagement commercial a relevé, dans son avis favorable au projet du 13 septembre 2018, que le magasin comblerait un espace resté vacant au sein de la zone commerciale, par suite de la réalisation en cours du " retail park " mitoyen, ce dernier espace commercial avait déjà fait l'objet d'une autorisation à l'occasion de la première présentation du dossier de la SCI Entrepôt Nîmes de telle sorte que sa présence ne constitue pas une circonstance nouvelle modifiant la situation d'implantation du projet litigieux. L'augmentation, par rapport aux prévisions initiales, du nombre de places de stationnement revêtues d'un revêtement perméable, majoré de 41 unités représentant 568 m2, ne saurait davantage être regardée comme modifiant réellement l'étalement urbain et la consommation d'espace naturel résultant du projet, qui s'implante, de la même façon que précédemment, sur une parcelle de 20 000 m2 dont une grande partie est non imperméabilisée. Il est enfin constant que l'emprise du projet est toujours située en zone inondable, sans qu'ait à cet égard une incidence la circonstance que le risque en cause ait été pris en compte par la pétitionnaire, comme cela était au demeurant déjà le cas lors de la première présentation du dossier. Dès lors, la nouvelle demande ne peut être analysée comme ayant pris en compte les motivations ayant conduit la Commission nationale d'aménagement commercial, quelques mois plus tôt seulement, à refuser le premier projet. Cette demande a donc méconnu les dispositions de l'article L.752-21 du code de commerce et la Commission nationale d'aménagement commercial ne pouvait valablement délivrer un avis favorable.
5. Il résulte de ce qui vient d'être exposé que l'avis émis par la Commission nationale d'aménagement commercial le 13 septembre 2018, favorable au projet, est entaché d'illégalité. Il s'ensuit que l'arrêté litigieux du maire d'Arles, en date du 21 novembre 2018, délivrant le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, est également entaché d'illégalité et doit être annulé.
6. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens invoqués par les requérantes ne sont pas susceptibles de fonder cette annulation.
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des SAS Bivaumon et Distrimon, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la SCI Entrepôt Nîmes et par la commune d'Arles. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une quelconque somme à la charge de la commune d'Arles sur ce fondement. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions en mettant à la charge de l'Etat une somme globale de 2 000 euros à verser aux SAS Bivaumon et Distrimon.
D É C I D E :
Article 1er : L'arrêté pris par le maire de la commune d'Arles le 21 novembre 2018 est annulé.
Article 2 : L'Etat versera la somme globale de 2 000 euros aux SAS Bivaumon et Distrimon au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Bivaumon, à la SAS Distrimon, à la commune d'Arles, à la SCI Entrepôt Nîmes et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial.
Délibéré après l'audience du 3 février 2021, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- Mme C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2021.
N°19MA00079 2