Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon :
- d'annuler le contrat de partenariat conclu le 18 avril 2018, dans le cadre du " projet Lyon campus : opération de réhabilitation des bâtiments abritant l'Ecole normale supérieure de Lyon (ENS) sur le site Monod ", entre l'Université de Lyon et la société Neolys ;
- de mettre à la charge de l'université de Lyon la somme de 3 000 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1604868 du 13 juin 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 6 août 2019, et un mémoire enregistré le 6 octobre 2020, M. D..., représenté par la SELARL BCV Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1604868 du 13 juin 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler le contrat de partenariat conclu le 18 avril 2018 entre l'Université de Lyon et la société Neolys ou de prononcer toute autre sanction utile au regard des vices entachant la validité du contrat ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'universités et établissements " Université de Lyon " la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'appel incident de l'Université de Lyon est irrecevable dès lors que le dispositif du jugement ne lui fait pas grief ;
- en sa qualité de membre du conseil d'administration de l'ENS de Lyon, et donc d'une assemblée délibérante d'un établissement public de l'Etat, il est un tiers " privilégié " et est donc recevable à contester la validité du contrat de partenariat et à invoquer tout moyen à son encontre ;
- en tout état de cause, l'exécution de ce contrat est susceptible de léser de façon directe et certaine ses intérêts en tant que membre du conseil d'administration de l'ENS et enseignant-chercheur exerçant ses fonctions sur le site Monod ;
- l'ensemble des moyens qu'il a soulevés sont opérants puisqu'ils sont en relation directe avec l'intérêt lésé dont il se prévaut, en tant que membre du conseil d'administration de l'ENS et enseignant-chercheur exerçant ses fonctions dans les locaux objet de la réhabilitation, ou sont d'une gravité telle que le juge doit les relever d'office ;
- le comité technique de l'ENS de Lyon n'a pas été consulté préalablement à la conclusion du contrat de partenariat litigieux ;
- en ce qui concerne la légalité du contrat, il renvoie à ses écritures de première instance jointes à la présente requête ;
- le moyen tiré de l'absence de consultation du conseil d'administration de l'ENS est opérant ;
- le moyen tiré de l'absence de consultation du comité technique de l'ENS est fondé ;
- le moyen tiré de l'incompétence du conseil d'administration de l'Université de Lyon (UdL) pour conclure le contrat de partenariat, qui est un moyen d'ordre public, est opérant et fondé ;
- sur le moyen tiré de l'illégalité de la convention pour la souscription et la mise en oeuvre d'un contrat de partenariat public-privé relatif au projet de réhabilitation, restructuration et mise aux normes du site Monod de l'ENS de Lyon, il s'en rapporte à ses écritures de première instance qui établissent son bien-fondé ;
- l'avenant n° 6 au bail emphytéotique est illégal dès lors qu'il a été signé par une personne incompétente puisque le mandat du maire s'était achevé fin mars et que le nouveau maire n'a été élu que le 4 avril, ce qui entraîne de fait l'illégalité du contrat contesté ;
- sur le moyen tiré de l'illégalité de la délibération du conseil d'administration du pôle de recherche et d'enseignement supérieur (PRES), il s'en rapporte à ses écritures de première instance qui établissent son bien-fondé ;
- le moyen tiré de l'absence d'étude démontrant la complexité du projet et justifiant le recours à un contrat de partenariat, qui est d'ordre public, est opérant et fondé.
Par des mémoires enregistrés les 14 septembre 2020 et 26 octobre 2020, l'Université de Lyon, représentée par Me B... de la Brosse, conclut, à titre principal, à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a considéré que M. D... était recevable à sa prévaloir de sa qualité de membre du conseil d'administration de l'ENS de Lyon et celle d'enseignant-chercheur exerçant ses fonctions sur le site Monod de l'ENS de Lyon, pour exercer un recours en contestation de la validité du contrat de partenariat conclu sur le site Monod de l'ENS de Lyon et au rejet de la requête comme irrecevable, à titre subsidiaire, au rejet de la requête comme inopérante, à titre très subsidiaire, au rejet de la requête comme infondée, et, en tout état de cause, à ce qu'il soit mis à la charge de M. D... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- M. D... ne dispose pas de la qualité de " requérant privilégié " au sens de la jurisprudence " Tarn-et-Garonne " ;
- c'est à tort, que le tribunal a reconnu à M. D..., un intérêt à agir en qualité de membre du conseil d'administration de l'ENS et d'enseignant-chercheur exerçant ses fonctions sur le site de Monod de l'ENS de Lyon, sans caractériser l'intérêt représenté par l'intéressé à ces deux titres et la lésion causée à cet intérêt, ;
- le contrat conclu, qui permet à l'ENS de réaliser des économies substantielles, ne lèse pas les intérêts de l'ENS - et donc a fortiori, ceux d'un simple membre de son conseil d'administration ;
- le contrat conclu, qui ne porte pas sur le service public de l'enseignement supérieur assuré par les membres du corps enseignants dans les locaux, ne lèse pas les intérêts de M. D... en qualité d'enseignant-chercheur ;
- la requête est tardive en tant qu'elle excipe de l'illégalité de l'avenant n° 6 au bail emphytéotique dès lors que le contrat de partenariat contesté ne constitue pas une mesure d'application de cet avenant et celui-ci ne constitue pas la base légale du contrat de partenariat ;
- à titre subsidiaire, les moyens soulevés sont inopérants dès lors qu'ils ne sont pas en rapport direct avec l'intérêt de membre du conseil d'administration de l'ENS qu'il invoque ;
- à titre infiniment subsidiaire, les moyens soulevés par le requérant à l'encontre du contrat de partenariat ne sont pas fondés ;
- en tout état de cause, aucun des vices allégués n'est d'une gravité telle qu'il doive entraîner l'annulation du contrat de partenariat, chacun des prétendus vices allégués par M. D... pouvant être régularisé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le décret n° 2007-386 du 21 mars 2007 ;
- le décret n° 2015-127 du 5 février 2015 ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... ;
- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;
- et les observations de Me E... pour M. D... et celles de Me F... pour l'Université de Lyon.
Trois notes en délibéré, enregistrées les 16 et 19 avril 2021, ont été produites pour M. D....
Considérant ce qui suit :
1. Dans le cadre de ses missions, l'Université de Lyon (UdL), alors pôle de recherche et d'enseignement supérieur (PRES) constitué sous la forme d'un établissement public de coopération scientifique, comptant, en vertu du décret du 21 mars 2007 créant cet établissement parmi ses membres fondateurs l'Ecole normale supérieure (ENS) de Lyon, a répondu à l'appel à candidatures " Opération Campus " lancé par l'Etat le 6 février 2008, visant à requalifier et dynamiser des campus universitaires existants. Elle a dans ce cadre élaboré et présenté le projet " Lyon Cité Campus ", comprenant plusieurs opérations de construction, de rénovation, d'aménagement et de restructuration sur le territoire de la métropole de Lyon, regroupés en deux ensembles cohérents, le campus " LyonTech " et le campus " Charles Mérieux ". Ce dernier comprend le site Monod de l'ENS de Lyon, pour lequel il est prévu des travaux de réhabilitation d'envergure des locaux. Le projet " Lyon Cité Campus " porté par l'UdL a été déclaré lauréat de l'appel à candidatures lancé par le ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, et a reçu à ce titre le 16 janvier 2009 une dotation de 575 millions d'euros. Par un avis d'appel public à la concurrence publié le 21 décembre 2013 au journal officiel de l'Union européenne et au bulletin officiel des annonces des marchés publics, l'UdL a lancé une procédure pour la conclusion d'un contrat de partenariat dans le cadre " Lyon Cité Campus ", pour la réhabilitation des bâtiments du site Monod de l'ENS de Lyon. Par une délibération n° II-2 du 14 décembre 2015, le conseil d'administration de l'ENS de Lyon a approuvé la convention à conclure entre l'Etat, l'Université de Lyon et l'ENS de Lyon pour la souscription et la mise en oeuvre d'un contrat de partenariat public-privé relatif au site Monod. Le contrat de partenariat a été conclu le 18 avril 2016 entre l'UdL, devenue un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel constitué sous la forme d'une communauté d'universités et établissements, dont est notamment membre l'ENS de Lyon, en application du décret du 5 février 2015 approuvant ses statuts, et la société Neolys. Ce contrat, qui a un caractère administratif, confie à l'opérateur la réalisation d'une mission globale comportant la mise aux normes de sécurité incendie, la mise aux normes d'accessibilité tous handicaps, la création d'un laboratoire (LR7) dans des locaux désaffectés précédemment à usage d'habitation, la restructuration de locaux de recherche (LR1 à LR6), des travaux d'efficacité énergétique, l'aménagement d'une salle informatique nouvelle génération, la maintenance et le gros entretien renouvellement (hors second oeuvre) et le financement de tout ou partie de l'opération. M. D..., se prévalant de ses qualités de maître de conférence et membre élu du conseil d'administration de l'ENS de Lyon, a saisi le tribunal administratif de Lyon d'une requête pour contester la validité de ce contrat de partenariat. Par un jugement n° 1604868 du 13 juin 2019, dont il relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions d'annulation du jugement présentées par l'Université de Lyon :
2. Les appels formés contre les jugements des tribunaux administratifs ne peuvent tendre qu'à l'annulation ou à la réformation du dispositif du jugement attaqué et ne peuvent être dirigés que contre ses seuls motifs. Par suite, n'est pas recevable l'appel dirigé par le défendeur en premier ressort contre le jugement qui a rejeté les conclusions du demandeur. Lorsque cette partie est comme en l'espèce également défendeur en appel, il lui est toutefois possible de contester le bien-fondé du jugement en tant qu'il a admis la recevabilité de la demande.
3. Les conclusions de l'Université de Lyon tendant, par la voie d'un appel présenté comme incident, à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a admis la recevabilité de la demande de M. D..., pour exercer un recours en contestation de la validité du contrat de partenariat litigieux, alors que ce jugement a rejeté la requête de M. D..., ne peuvent être en tant que telles accueillies.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Un tiers à un contrat administratif n'est recevable à contester la validité d'un contrat que s'il est susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou par ses clauses. Cette action devant le juge du contrat est également, le cas échéant, ouverte aux membres de l'organe délibérant d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu'au représentant de l'Etat dans le département dans l'exercice du contrôle de légalité.
5. En l'espèce, en se bornant à faire état, sans davantage de précision, de sa qualité de membre du conseil d'administration de l'ENS de Lyon, par ailleurs membre de la communauté d'universités et établissements " Université de Lyon " partie au contrat, et de celle d'enseignement chercheur exerçant ses fonctions sur le site Monod de cette même école, M. D..., qui n'est pas au nombre des requérants dits " privilégiés " pouvant contester en cette qualité la validité d'un contrat et qui sont ceux mentionnés au point 4, ne justifie pas qu'il est susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par la passation du contrat de partenariat litigieux, conclu entre l'Université de Lyon et la société Neolys, ou par ses clauses, compte tenu de l'objet de ce contrat, tel que décrit au point 1, alors que l'UdL fait valoir sans être contredite que ce contrat permet à l'ENS de Lyon de réaliser des économies substantielles sur ses coûts de fonctionnement et d'investissement et n'affecte ni le service public de l'enseignement supérieur, que les membres du corps enseignant ont vocation à assurer, ni ses conditions d'exercice dans les locaux concernés. Par suite, ainsi que le soutient en défense l'université de Lyon, M. D... n'était pas recevable faute d'un intérêt à exercer une telle action, à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction pour contester la validité du contrat de partenariat en litige.
6. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Les conclusions présentées à ce titre par M. D..., partie perdante, doivent être rejetées.
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... au profit de l'Université de Lyon la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... D... est rejetée.
Article 2 : M. D... versera à l'Université de Lyon la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à l'Université de Lyon, et à la société Neolys.
Délibéré après l'audience du 15 avril 2021, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
M. C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2021.
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N° 19LY03102