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14/06/2018 | FRANCE | N°18LY00012

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 14 juin 2018, 18LY00012


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... X... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la décision du 7 juillet 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté, après avis de la commission des recours des militaires, son recours à l'encontre de son bulletin de notation établi pour la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2016, et d'autre part, d'enjoindre à la ministre de procéder à une nouvelle notation dans un délai d'un mois suivant la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.r>
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... X... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la décision du 7 juillet 2017 par laquelle la ministre des armées a rejeté, après avis de la commission des recours des militaires, son recours à l'encontre de son bulletin de notation établi pour la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2016, et d'autre part, d'enjoindre à la ministre de procéder à une nouvelle notation dans un délai d'un mois suivant la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Par une ordonnance n° 1706798 du 7 novembre 2017, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande comme irrecevable.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 2 janvier 2018, Mme X..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 7 novembre 2017 du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler la décision de la ministre des armées du 7 juillet 2017 ;

3°) d'enjoindre à la ministre des armées de faire procéder à une nouvelle notation dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à leur charge la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- aucun délai de forclusion ne peut commencer à courir contre une décision implicite de rejet dès lors que la décision ne pouvait être prise que sur avis d'un organisme collégial, ainsi que le prévoit l'article R. 421-3 du code de justice administrative ;
- le délai de recours n'était pas opposable en l'absence de mention des voies et délais de recours dans la décision implicite de rejet ;
- l'intervention d'une décision expresse au-delà du délai de recours contentieux ouvert contre une décision implicite de rejet ouvre un nouveau délai de recours contentieux ;
- aucun délai de forclusion ne peut être opposé en application du principe de sécurité juridique qui implique que l'administration n'induise pas en erreur ses agents quant aux voies et délais de recours ;
- la décision du 7 juillet 2017 est entachée d'un vice d'incompétence et a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mars 2018, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :
- c'est à bon droit que le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de Mme X... comme étant irrecevable ;
- la décision contestée n'est entachée d'aucune des illégalités externes ou internes invoquées par l'appelante.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code de la défense ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lesieux ;
- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;
- les observations de Me B...représentant Mme X... ;

1. Considérant que Mme X..., commissaire des armées de 1ère classe, était affectée à la plate-forme achats-finances Centre-Est (PFAF CE) de Lyon du 27 juillet 2015 au 8 août 2016 en qualité de cheffe de la section contrôle de gestion- contrôle interne au sein du bureau pilotage de la performance ; que son bulletin de notation des officiers (BNO) au titre de l'année 2016 lui a été notifié le 11 août 2016 ; que par une décision du 7 juillet 2017, pris après avis de la commission des recours des militaires, la ministre des armées a rejeté la demande de Mme X... tendant à l'annulation de sa notation annuelle pour 2016 ; que l'intéressée a saisi le tribunal administratif de Lyon d'une demande tendant à l'annulation de cette décision et que par, une ordonnance du 7 novembre 2017, le président de la 7ème chambre de ce tribunal a rejeté sa demande comme irrecevable ; que Mme X... relève appel de cette ordonnance ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense, " I.-Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. / La saisine de la commission est seule de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10. (...) " ; que selon l'article R. 4125-10 de ce code : " Dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, la commission notifie à l'intéressé la décision du ministre compétent, ou le cas échéant, des ministres conjointement compétents. La décision prise sur son recours, qui est motivée en cas de rejet, se substitue à la décision initiale. Cette notification, effectuée par lettre recommandée avec avis de réception, fait mention de la faculté d'exercer, dans le délai de recours contentieux, un recours contre cette décision devant la juridiction compétente à l'égard de l'acte initialement contesté devant la commission. / L'absence de décision notifiée à l'expiration du délai de quatre mois vaut décision de rejet du recours formé devant la commission. " ; que d'autre part, en en application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " ; que l'article R. 421-2 de ce code prévoit que : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours. / La date du dépôt de la demande à l'administration, constatée par tous moyens, doit être établie à l'appui de la requête. " ; qu'enfin l'article R. 421-3 du code de justice administrative dispose que " Toutefois, l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : / 1° Dans le contentieux de l'excès de pouvoir, si la mesure sollicitée ne peut être prise que par décision ou sur avis des assemblées locales ou de tous autres organismes collégiaux ; (...) " ;

3. Considérant d'une part, que la commission des recours des militaires doit être qualifiée, compte tenu de sa composition et de son fonctionnement, d'organisme collégial pour l'application des dispositions du 2° de l'article R. 421-3 du code de justice administrative ; que d'autre part, les dispositions de l'article R. 4125-10 du code de la défense citées ci-dessus, qui se bornent à fixer à quatre mois le délai à l'expiration duquel naît une décision implicite de rejet par le ministre du recours administratif préalable obligatoire prévu par l'article R. 4125-1 de ce code, ne font pas par elles mêmes obstacle à l'application des dispositions générales de l'article R. 421-3 du code de justice administrative ; que par suite, seule la notification d'une décision expresse de rejet de ce recours, intervenant après son examen par la commission précitée, est susceptible de faire courir le délai de recours contentieux de deux mois prévu à l'article R. 421-2 du code de justice administrative ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X... a saisi le 8 octobre 2016 la commission des recours des militaires contre son bulletin de notation des officiers au titre de l'année 2016, notifié le 11 août 2016 ; que sa demande a été enregistrée au secrétariat de la commission, le 11 octobre suivant ; qu'en application des dispositions de l'article R. 4125-10 du code de la défense, l'absence de décision notifiée par cette commission à l'expiration d'un délai de quatre mois, a fait naître une décision implicite de rejet le 11 février 2017 ; que toutefois, seule la notification de la décision expresse de rejet du recours administratif préalable obligatoire de Mme X... du 7 juillet 2017 a pu faire courir le délai de recours contentieux à l'encontre de cette décision qui s'est substituée à la décision initiale contestée ; qu'il en résulte que la requête de Mme X... ne pouvait être déclarée tardive qu'au terme d'un délai de deux mois courant à compter de la notification de cette décision par courrier du 24 juillet 2017 ; que dès lors, la demande de l'intéressée, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Lyon le 15 septembre 2017, était recevable ; que Mme X... est par suite fondée à soutenir que c'est à tort, que par l'ordonnance attaquée, le président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 juillet 2017 de la ministre des armées ;
5. Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Lyon pour qu'il statue à nouveau sur la demande de Mme X... ;

6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions présentées par Mme X... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1706798 du 7 novembre 2017 du président de la 7ème chambre du tribunal administratif de Lyon est annulée.

Article 2 : Mme X... est renvoyée devant le tribunal administratif de Lyon pour qu'il soit statué sur sa demande.
Article 3 : Les conclusions présentées par Mme X... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... X... et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2018, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme Lesieux, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 juin 2018.
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N° 18LY00012


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18LY00012
Date de la décision : 14/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-07-02 Procédure. Introduction de l'instance. Délais. Point de départ des délais.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : AVOCATS LYONNAIS

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-06-14;18ly00012 ?
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