Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 2 mai 2016 par laquelle le maire d'Hautmont a maintenu le versement d'un demi-traitement à compter du 3 mai 2016.
Par un jugement n° 1605483 du 20 juillet 2018, le tribunal administratif de Lille a annulé cette décision.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 20 septembre 2018, le 17 décembre 2018 et le 7 février 2020, la commune d'Hautmont, représentée par Me F... D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 20 juillet 2018 du tribunal administratif de Lille ;
2°) de rejeter la demande de M. E... ;
3°) de mettre à la charge de M. E... la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me C... B..., représentant la commune d'Hautmont, ainsi que de M. E....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... E..., qui est né le 7 mars 1963, a été recruté en 1985 par la commune d'Hautmont comme adjoint technique territorial de 2ème classe. Il a notamment été responsable des installations techniques de la piscine municipale, puis a exercé des fonctions d'électricien au sein des services techniques municipaux. Placé en congé de longue maladie du 3 mai 2011 au 2 mai 2012, il a ensuite été placé en congé de longue durée du 3 mai 2012 au 3 mai 2016 puis placé en disponibilité d'office, par différents arrêtés, du 3 mai 2016 au 8 avril 2018. La commune d'Hautmont relève appel du jugement du 20 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 2 mai 2016 par laquelle le maire de la commune d'Hautmont a maintenu le versement d'un demi-traitement à M. E... à compter du 3 mai 2016 sur le fondement des dispositions de l'article 37 du décret n°87-602 du 30 juillet 1987.
2. Aux termes de ce texte, dans la rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée, reprendre son service est soit reclassé dans un autre emploi, en application du décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 susvisé, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme prévue par le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. Pendant toute la durée de la procédure requérant soit l'avis du comité médical, soit l'avis de la commission de réforme, soit l'avis de ces deux instances, le paiement du demi-traitement est maintenu jusqu'à la date de la décision de reprise de service ou de réintégration, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite ". Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. (...) / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. (...) / Les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas du 2° du présent article sont applicables aux congés de longue maladie ; 4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. (...) / Si la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les périodes fixées ci-dessus sont respectivement portées à cinq ans et trois ans. / Sauf dans le cas où le fonctionnaire ne peut être placé en congé de longue maladie à plein traitement, le congé de longue durée ne peut être attribué qu'à l'issue de la période rémunérée à plein traitement d'un congé de longue maladie. Cette période est réputée être une période du congé de longue durée accordé pour la même affection. Tout congé attribué par la suite pour cette affection est un congé de longue durée. (...) ".
3. Il résulte des dispositions de l'article 57 précité, dans sa rédaction alors applicable, que le fonctionnaire en activité a droit à un congé de longue durée en cas de maladie mentale, lui ouvrant droit à un plein traitement durant trois ans et à un demi-traitement durant deux ans. En vertu de ces mêmes dispositions, dans le cas où la maladie ouvrant droit à congé de longue durée a été contractée dans l'exercice des fonctions, les deux périodes précitées sont respectivement portées à cinq ans et trois ans.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. E... souffre depuis plusieurs années d'un syndrome anxio-dépressif sévère, dont la réalité a été reconnue par l'avis favorable à l'imputabilité du 6 juillet 2012 de la commission de réforme, par la contre-visite effectuée le 27 mars 2015 à la demande de la commune d'Hautmont, contre-visite qui a effectivement conclu à un arrêt médicalement justifié. Le fait que M. E... entretienne un conflit avec sa hiérarchie, sous forme de mises en cause dans la presse locale, d'attaques sur les réseaux sociaux ou de propos dénigrants à l'égard de certains fonctionnaires municipaux, n'est pas de nature à établir l'absence d'existence de ce syndrome anxio-dépressif ou ne saurait être regardé comme excluant le caractère d'imputabilité ainsi que le soutient la commune d'Hautmont, cette attitude hostile pouvant, au contraire, constituer une manifestation de la maladie de M. E.... Les attaques et les faits de dénigrement de M. E... dénoncés par la commune d'Hautmont ont en outre été commis postérieurement à la décision du 13 avril 2015 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie et ne sont, dès lors, pas de nature à remettre en cause le lien direct existant entre la pathologie dont il souffre et le service. En l'absence de tout antécédent psychiatrique de ce dernier, l'affection dont souffre M. E... doit être reconnue comme imputable au service.
5. Par son arrêt de ce jour n° 18DA01938, la cour administrative d'appel de Douai a donc rejeté les conclusions de la commune d'Hautmont à fin d'annulation du jugement n° 1504987 du 20 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Lille avait annulé la décision du 13 avril 2015 du maire d'Hautmont refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de M. E.... Il est constant que celui-ci a été placé en congé de longue maladie du 3 mai 2011 au 2 mai 2012 puis en congé de longue durée du 3 mai 2012 au 3 mai 2016. L'affection dont il souffre doit être regardée comme ayant été contractée dans l'exercice des fonctions. Dès lors, les périodes de congé maladie sont portées à cinq ans à plein traitement et à trois ans à demi-traitement en application des dispositions précitées. Par suite, en fondant la mise à demi-traitement de M. E... à compter du 3 mai 2016 sur les dispositions de l'article 37 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 au motif de sa mise en disponibilité alors que celui-ci avait droit à un congé de longue durée d'une durée totale de huit années, la commune d'Hautmont a entaché sa décision d'une erreur de droit.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la commune d'Hautmont n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 20 juillet 2018, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 2 mai 2016 par laquelle son maire a maintenu le versement d'un demi-traitement à M. E... à compter du 3 mai 2016. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune d'Hautmont le versement à M. E... d'une somme de 1 000 euros sur le fondement de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Hautmont est rejetée.
Article 2 : La commune d'Hautmont versera une somme de 1 000 euros à M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Hautmont et à M. A... E....
Copie sera adressée pour information au préfet du Nord.
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N°18DA01939
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N°"Numéro"