Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La Sarl Elise a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos les 31 décembre 2009, 31 décembre 2010 et 31 décembre 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1520918/1-3 du 7 juin 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 juillet 2017 et 22 février 2018, la Sarl Elise, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1520918/1-3 du 7 juin 2017 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos les 31 décembre 2009, 31 décembre 2010 et 31 décembre 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011, des pénalités correspondantes ainsi que de la pénalité prévue par l'article 1759 du code général des impôts ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité, faute pour les premiers juges d'avoir répondu de manière complète à l'ensemble des moyens dont elle s'est prévalue pour contester la régularité de la procédure de contrôle et le bien-fondé de la méthode utilisée par le service pour procéder à la reconstitution de son chiffre d'affaires ;
- les premiers juges ont méconnu les dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ;
- ils ont méconnu les droits de la défense, l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 41 de la charte des droits fondamentaux ;
- l'administration fiscale a méconnu les dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ; elle n'établit pas les graves irrégularités de sa comptabilité dont elle se prévaut pour justifier de la durée des opérations de contrôle ; le service n'établit pas l'avoir informée de cette prorogation des opérations de contrôle ;
- l'administration fiscale a méconnu les dispositions de l'instruction 13 L 10-08 reprise au BOI-CF-PGR-20-30 n° 140 du 4 février 2015 faute de l'avoir informée de la prorogation de la durée des opérations de contrôle ;
- l'administration fiscale ne l'a pas informée de son intention de dresser un procès-verbal pour présentation de comptabilité irrégulière ni des motifs de la mesure qu'elle envisageait de prendre, en méconnaissance du principe du contradictoire, de loyauté et des droits de la défense ;
- l'administration fiscale a procédé à une double vérification de comptabilité, en méconnaissance de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales ;
- l'administration fiscale a méconnu les dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; les propositions de rectifications ainsi que les réponses aux observations du contribuable sont insuffisamment motivées ; le service n'a répondu à ses observations qu'après l'expiration du délai de soixante jours ;
- la composition de la commission départementale des impôts qui a examiné sa situation est irrégulière ;
- la procédure devant la commission départementale des impôts n'a pas respecté le principe du contradictoire ; la délibération n'a pas été effective ;
- c'est à tort que le Tribunal administratif n'a pas fait droit à sa demande tendant à la désignation d'un expert ;
- la transmission des copies des pièces dont la communication avait été sollicitée est intervenue le 21 juillet 2014 soit postérieurement à l'émission des avis de mise en recouvrement, entachant ainsi d'illégalité la procédure suivie par l'administration fiscale ; c'est à tort que le service n'a pas repris la procédure au stade de la proposition de rectifications afin de lui permettre de renouveler sa demande de communication de pièces ; en outre les dégrèvements prononcés par le service sont intervenus le 3 mars 2015 alors que les nouvelles impositions ont été mises en recouvrement le 15 avril 2015 ;
- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que la commission départementale des impôts s'est prononcée au vu d'éléments produits postérieurement à la séance au cours de laquelle sa situation a été examinée ;
- les opérations de contrôle des recettes doivent s'analyser comme une vérification de la comptabilité qui est intervenue en méconnaissance de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales, faute pour le service de lui avoir remis un avis de vérification de comptabilité le 30 août 2011 lors du contrôle des recettes qui a été effectué ;
- l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts n'est pas fondée ; elle a valablement répondu à la demande qui lui a été faite par le service ; ce dernier ne pouvait mettre en oeuvre la procédure de désignation dès lors qu'il avait connaissance des bénéficiaires des sommes réputés distribuées ;
- les dispositions relatives au dialogue contradictoire ont été méconnues par le service ;
- les sanctions qui lui ont été infligées méconnaissent le principe de proportionnalité ainsi que la liberté d'entreprendre protégée par l'article 16 de la charte des droits fondamentaux et de l'article 1er du protocole n°1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elles méconnaissent la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 janvier et 28 mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office et tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin de décharge dirigées contre l'amende infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts au motif qu'elles constituent des conclusions nouvelles en appel.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son protocole additionnel n°1 ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stoltz-Valette,
- les conclusions de Mme Mielnik-Meddah, rapporteur public,
- et les observations de Me Mosser, avocat de la Sarl Elise.
Considérant ce qui suit :
1. La Sarl Elise, qui exerce une activité de restauration rapide, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2009 à 2011. Après avoir écarté la comptabilité comme irrégulière et non probante, le service a procédé à la reconstitution de son chiffre d'affaires laquelle a donné lieu, selon la procédure de rectification contradictoire, à des cotisations d'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités. La Sarl Elise relève appel du jugement du 7 juin 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices 2009 à 2011, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, des intérêts de retard et des pénalités pour manquement délibéré correspondants.
Sur la recevabilité des conclusions tendant à la décharge de l'amende infligée sur le fondement des dispositions de l'article 1759 du code général des impôts :
2. Il résulte de l'instruction que la Sarl Elise a seulement demandé au Tribunal administratif de Paris la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2009, 2010 et 2011 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de ces mêmes années ainsi que des intérêts de retard et pénalités pour manquement délibéré correspondants. Dans sa requête d'appel, la Sarl Elise conteste en outre l'amende qui lui a été infligée sur le fondement des dispositions de l'article 1759 du code général des impôts. Cependant une telle demande a le caractère de conclusions nouvelles en appel, qui sont par suite irrecevables, ainsi qu'il y a lieu de le relever d'office, les parties en ayant été informées par une lettre du 20 novembre 2018.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. La Sarl Elise ne conteste pas utilement le jugement attaqué en se bornant à soutenir sans autre précision que les premiers juges n'ont pas répondu de manière complète à l'ensemble des moyens dont elle s'est prévalue pour contester la régularité de la procédure de contrôle. En revanche, contrairement à ce qu'elle soutient, il ressort des termes du jugement attaqué, et notamment du point 16, que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par les parties, ont répondu de façon suffisamment précise à sa contestation portant sur le bien-fondé de la méthode utilisée par le service pour procéder à la reconstitution de son chiffre d'affaires. Par ailleurs, au point 12 du jugement attaqué, ils ont également répondu de manière circonstanciée au moyen tiré de la méconnaissance du principe du contradictoire applicable lors des échanges devant la commission départementale des impôts.
4. Si la Sarl Elise soutient que les premiers juges ont méconnu les dispositions de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les droits de la défense, ces moyens ne sont cependant pas assortis des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
5. Contrairement à ce que soutient la Sarl Elise, le tribunal a, en estimant qu'il n'avait pas besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, fait usage d'un pouvoir qui lui est propre et n'a entaché d'aucune irrégularité son jugement à ce titre.
Sur les conclusions tendant à la décharge des impositions litigieuses :
6. Si la Sarl Elise soutient que le vérificateur ne l'a pas informée, avant l'expiration du délai de trois mois prévu par les dispositions du I de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, de la prolongation de la vérification de comptabilité au-delà de ce délai, elle ne peut se prévaloir sur ce point des énonciations du paragraphe 5 de l'instruction 13 L-10-08 du 18 décembre 2008, désormais reprises par la doctrine publiée sous la référence BOI CF-PGR-20-30 n°140, dès lors qu'une telle instruction, relative à la procédure d'imposition, n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
7. Aucune disposition du code général des impôts ne fait obstacle à ce que l'administration, après avoir reconnu l'irrégularité de la procédure de rectification suivie, à la suite notamment d'une réclamation contentieuse du contribuable, reprenne cette procédure dans le délai de reprise imparti par les articles L. 169 du livre des procédures fiscales en matière d'impôt sur les sociétés, L. 176 et L. 177 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, afin de parvenir à la fixation des impositions dans des conditions régulières. Cette faculté ne lui est cependant ouverte qu'autant qu'elle a expressément constaté l'irrégularité de la première procédure en notifiant le dégrèvement des impositions précédentes et informé le contribuable de la persistance de son intention de l'imposer préalablement à la reprise de la procédure d'imposition.
8. Il est constant que la Sarl Elise a demandé, par un courrier en date du 18 mars 2014, la communication des documents obtenus de tiers par le service dans le cadre de son droit de communication et ayant fondé les rehaussements litigieux. En dépit de sa demande, les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices 2009 à 2011, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, et les pénalités correspondantes ont été mises en recouvrement le 28 mars 2014. Il résulte des avis de dégrèvement du 3 mars 2015 que le service a informé la société, à cette date, que le dégrèvement lui était accordé en raison d'une erreur dans la procédure d'imposition et qu'elle entendait poursuivre le recouvrement des impositions ainsi dégrevées. Il a ainsi procédé à une nouvelle mise en recouvrement de ces impositions le 15 avril 2015. Il est constant que l'irrégularité tirée de la méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, qui a justifié le dégrèvement opéré, a été purgée le 21 juillet 2014 par l'envoi à la société requérante des documents concernés avant la nouvelle mise en recouvrement des impositions dégrevées. Si la communication de ces documents est intervenue antérieurement aux dégrèvements prononcés et à la reprise d'une nouvelle procédure d'imposition, une telle circonstance n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, de nature à vicier l'ensemble de la procédure d'imposition. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration fiscale n'était pas tenue de reprendre entièrement la procédure et de lui adresser une nouvelle proposition de rectification. Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, la Sarl Elise n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition est irrégulière au motif que l'administration aurait méconnu les prescriptions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales.
9. Aux termes de l'article L. 13 A du livre des procédures fiscales : " Le défaut de présentation de la comptabilité est constaté par procès-verbal que le contribuable est invité à signer ". L'établissement d'un procès-verbal en application de ces dispositions ne constitue pour le vérificateur qu'une simple faculté, destinée à lui faciliter l'administration de la preuve. Par suite d'éventuelles irrégularités entachant ce procès-verbal au regard des exigences prévues par les dispositions précitées, si elles privent celui-ci de sa valeur probante, sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition. Dans ces conditions, la Sarl Elise ne peut utilement soutenir que l'administration fiscale aurait méconnu les principes du contradictoire, de loyauté et les droits de la défense en ne l'informant ni de son intention de dresser un procès-verbal pour présentation de comptabilité irrégulière ni des motifs de la mesure qu'elle envisageait de prendre.
10. D'une part, aux termes de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales : " Lorsque la vérification de la comptabilité, pour une période déterminée, au regard d'un impôt ou taxe ou d'un groupe d'impôts ou de taxes est achevée, l'administration ne peut procéder à une nouvelle vérification de ces écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période / (...) ".
11. D'autre part, aux termes de l'article L. 80 F du livre des procédures fiscales : " Pour rechercher les manquements aux règles de facturation auxquelles sont soumis les assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée en application du code général des impôts (...), les agents des impôts ayant au moins le grade de contrôleur peuvent se faire présenter les factures, la comptabilité matière ainsi que les livres, les registres et les documents professionnels pouvant se rapporter à des opérations ayant donné ou devant donner lieu à facturation et procéder à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation / (...) / L'enquête définie au présent article ne relève pas des procédures de contrôle de l'impôt prévues aux articles L. 10 à L. 47 A / (...) ". Aux termes de l'article L. 80 H de ce livre, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " A l'issue de l'enquête prévue à l'article L. 80 F, les agents de l'administration établissent un procès-verbal consignant les manquements constatés ou l'absence de tels manquements (...) / (...) / Les constatations du procès-verbal ne peuvent être opposées à cet assujetti ainsi qu'aux tiers concernés par la facturation que dans le cadre des procédures de contrôle mentionnées à l'article L. 47 au regard des impositions de toute nature et de la procédure d'enquête prévue à l'article L. 80 F (...) ".
12. La Sarl Elise a fait l'objet, sur le fondement des dispositions des articles L. 80 F et L. 80 H du livre des procédures fiscales, d'une enquête concernant d'éventuels manquements aux règles de facturation, qui s'est déroulée du 7 juillet au 30 août 2011. Il ne résulte pas de l'instruction qu'au cours de cette enquête l'administration aurait effectué une vérification de comptabilité de la Sarl Elise, opération qui consiste à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par un contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont le service prend alors connaissance et dont il peut remettre en cause l'exactitude. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la vérification de comptabilité qui s'est déroulée du 6 septembre 2012 au 26 février 2013 serait irrégulière au regard des dispositions précitées de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales. En outre, contrairement à ce qu'elle soutient, aucune disposition n'impose au service d'adresser au contribuable un avis de vérification avant de mettre en oeuvre la procédure prévue aux articles L. 80 F et L. 80 H du livre des procédures fiscales.
13. Il résulte des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales que les vices de forme ou de procédure dont serait entaché l'avis de la commission ne peuvent avoir d'autre effet que de modifier le cas échéant la dévolution de la charge de la preuve mais n'affectent pas la régularité de la procédure d'imposition et ne sont, par suite, pas de nature à entraîner la décharge de l'imposition établie à la suite des rectifications ou redressements soumis à l'examen de la commission. Par suite, le moyen tiré d'irrégularités qui auraient entaché la procédure suivie devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est sans effet sur la régularité de la procédure d'imposition. En tout état de cause, lors de sa séance du 8 janvier 2014, la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de Paris était composée de cinq membres, y compris son président, de sorte que le quorum exigé par les dispositions précitées l'article 348 de l'annexe 3 au code général des impôts était atteint.
14. Pour l'instruction du litige qui l'opposait à la société requérante, l'administration a présenté devant la commission départementale des impôts des documents comportant des erreurs, lesquelles ont été relevées par le service qui en a informé la société le 23 décembre 2013, soit antérieurement à la séance du 8 janvier 2014. Lors de cette séance, la Sarl Elise a pu présenter des observations, et notamment sur ces erreurs. Si elle soutient que l'administration fiscale n'aurait pas respecté le principe du contradictoire lors de ses échanges avec la commission départementale des impôts et que cette dernière aurait statué au vu d'éléments transmis à la commission postérieurement à sa réunion, elle n'apporte aucun élément au soutien de ses allégations. La circonstance que l'avis a par ailleurs été rendu le jour même de son audition n'est pas de nature à établir l'absence de délibération. Le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la commission départementale des impôts directs doit en tout état de cause être écarté.
15. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même code : " L'administration invite, en même temps le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition [...] ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.
16. Les propositions de rectification des 20 décembre 2012 et 4 avril 2013 adressées à la Sarl Elise comportaient la désignation des impôts concernés, les motifs du rejet de la comptabilité, la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires appliquée par le service, le montant des bases d'imposition, et mentionnaient les dispositions du code général des impôts qui fondent en droit les impositions contestées. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la motivation des propositions de rectification dont elle a été destinataire ne répondaient pas aux exigences de l'article L. 57 précité du livre des procédures fiscales.
17. Contrairement à ce que soutient la Sarl Elise, le service, dans sa réponse du 28 juin 2013 aux observations de la contribuable, a explicitement écarté, en fournissant les raisons de ce rejet, chacune des objections formulées par celle-ci à l'encontre des rehaussements litigieux qui lui avaient été notifiés. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la lettre valant réponse aux observations du contribuable doit être écarté.
18. Aux termes de l'article L. 57 A du livre des procédures fiscales : " En cas de vérification de comptabilité d'une entreprise ou d'un contribuable exerçant une activité industrielle ou commerciale dont le chiffre d'affaires est inférieur à 1 526 000 € s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, ou à 460 000 € s'il s'agit d'autres entreprises ou d'un contribuable se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes est inférieur à 460 000 €, l'administration répond dans un délai de soixante jours à compter de la réception des observations du contribuable faisant suite à la proposition de rectification mentionnée au premier alinéa de l'article L. 57. Le défaut de notification d'une réponse dans ce délai équivaut à une acceptation des observations du contribuable. / Le délai de réponse mentionné au premier alinéa ne s'applique pas en cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité ".
19. Il est constant que l'administration n'a pas répondu dans le délai de soixante jours à compter de la réception des observations que la Sarl Elise avait présentées par courrier en date du 25 février 2013. Lors des opérations de contrôle, le service a, le 3 octobre 2012, dressé un procès-verbal pour présentation de comptabilité irrégulière et non probante. Il résulte de ce qui a été dit au point 22 que le service établit l'existence de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité de la Sarl Elise. Par conséquent, l'administration n'était nullement tenue de répondre aux observations de la Sarl Elise dans un délai de soixante jours. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 A du livre des procédures fiscales, ne peut qu'être écarté.
20. Au cours de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la Sarl Elise, le vérificateur s'est d'abord rendu au sein des locaux de l'entreprise, puis, à la demande de cette dernière, dans les locaux de son mandataire. Par suite, il appartient à la société requérante d'établir que les opérations de contrôle ont été conduites sans qu'elle ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, qui se serait refusé à un tel débat. La société requérante n'apporte aucun élément de preuve ni précision permettant d'établir qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire. Le moyen ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.
21. Aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales: " I. - Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; (...) / II. - Par dérogation au I, l'expiration du délai de trois mois n'est pas opposable à l'administration : (...) / 4° En cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité. Dans ce cas, la vérification sur place ne peut s'étendre sur une durée supérieure à six mois. ".
22. Il est constant que les opérations de contrôle ont débuté le 6 septembre 2012 et ont pris fin le 23 février 2013, soit postérieurement à l'expiration du délai de 3 mois prévu par les dispositions citées ci-dessus. Toutefois, il résulte de l'instruction que la comptabilité de la Sarl Elise présentait, pour chacun de ces exercices de graves anomalies. En particulier, l'administration fiscale a constaté que la Sarl Elise n'a présenté, au titre de l'année 2009, ni le double des tickets remis aux clients, ni les commandes, ou les tickets journaliers. Cette dernière s'est bornée à produire, pour justifier ses recettes, les tickets statistiques, retraçant seulement le nombre de couverts servis par jour et le chiffre d'affaires correspondant, sans détailler les mets et boissons servis. Le service a relevé que les recettes indiquées sur les tableaux trimestriels de recettes ne correspondent pas aux recettes mentionnées sur les tableaux mensuels de recettes, établis à partir des tickets statistiques, et qu'une somme forfaitaire de 2 000 euros étant du reste ajoutée sur les tableaux mensuels, sans justification. Au titre des années 2010 et 2011, la société requérante n'a présenté, au titre de neuf mois, que des tickets " RAZ " mensuels. Si, au titre des autres mois, elle a présenté des tickets " RAZ " journaliers, le service a constaté, d'une part, que 42 de ces tickets faisaient défaut, d'autre part, que les tickets présentés ne comportaient pas le détail des boissons consommées avec les formules. En outre, les tableaux mensuels de recettes ne comportaient pas la totalité des recettes journalières et l'intégralité des achats réalisés au cours de la période vérifiée n'avait pas été comptabilisée. Enfin, l'inventaire des marchandises en stock au 31 décembre 2009 et au 31 décembre 2011 n'avait pas été établi, l'inventaire au 31 décembre 2010 ne comportant quant à lui aucun détail. Dans ces conditions, les manquements constatés par le service sont de nature à ôter à la comptabilité son caractère probant. En outre, contrairement à ce que soutient la société, le service l'a informée par lettre du 29 novembre 2012 de son intention de proroger la durée des opérations de contrôle. Dès lors, l'administration fiscale pouvait légalement, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, étendre la durée de la vérification jusqu'à six mois. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit donc être écarté.
Sur les conclusions tendant à la décharge des pénalités pour manquement délibéré :
23. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
24. Pour appliquer la majoration de 40 % prévue par les dispositions précitées aux redressements litigieux, l'administration s'est fondée sur la circonstance que les manquements graves et répétés dans la tenue de la comptabilité ont été réitérés sur toute la période vérifiée et que la société s'est systématiquement et délibérément abstenue de comptabiliser une part significative de ses recettes. La société requérante soutient que le gérant et son père chargé des tâches administratives ont fait appel aux services d'un expert-comptable ainsi qu'à des conseils en gestion et que lors d'un contrôle effectué en juillet et août le service n'a formulé aucune observation sur la gestion de l'entreprise. Toutefois, eu égard à l'importance et au caractère systématique de la minoration par le contribuable de ses recettes ainsi qu'au caractère non probant de la comptabilité, l'administration apporte ainsi la preuve qui lui incombe de l'existence des manquements délibérés et établit, par suite, le bien fondé des pénalités litigieuses.
25. Il résulte de ce qui précède que l'administration établit que les impositions litigieuses ainsi que les pénalités qui lui ont été infligées sur le fondement des dispositions du code général des impôts ont été correctement appliquées. Par suite la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les pénalités mises à sa charge constitueraient une atteinte à son droit au respect de ses biens, tel qu'il est garanti par l'article 1er du protocole n° 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour le même motif, elle n'est pas fondée à soutenir qu'elles sont contraires à la liberté d'entreprendre garantie par l'article 16 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et au principe de proportionnalité.
26. Si la société soutient que les sanctions qui lui ont été infligées méconnaissent la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen n'est pas assorti des précisions permettant d'apprécier son bien-fondé.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la Sarl Elise demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la Sarl Elise est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl Elise et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).
Délibéré après l'audience du 28 février 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Dalle, président assesseur,
- Mme Stoltz-Valette, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 14 mars 2019.
Le rapporteur,
A. STOLTZ-VALETTELe président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17PA02684