La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/04/2019 | FRANCE | N°17PA02176

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 23 avril 2019, 17PA02176


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet du Val-de-Marne a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la délibération du 26 janvier 2016 par laquelle le conseil de territoire de l'établissement public territorial 12, devenu Grand Orly-Seine Bièvre, a fixé le montant des indemnités de fonction du président, des vice-présidents, des conseillers supplémentaires membres du bureau et des autres conseillers territoriaux.

Par un jugement n° 1605798 du 10 mai 2017, le Tribunal administratif de Melun a annulé la délibérati

on déférée.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet du Val-de-Marne a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la délibération du 26 janvier 2016 par laquelle le conseil de territoire de l'établissement public territorial 12, devenu Grand Orly-Seine Bièvre, a fixé le montant des indemnités de fonction du président, des vice-présidents, des conseillers supplémentaires membres du bureau et des autres conseillers territoriaux.

Par un jugement n° 1605798 du 10 mai 2017, le Tribunal administratif de Melun a annulé la délibération déférée.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 28 juin 2017 et le 2 mars 2018, l'établissement public territorial Grand Orly-Seine Bièvre, représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun n° 1605798 du 10 mai 2017 ;

2°) de rejeter le déféré présenté par le préfet du Val-de-Marne devant le Tribunal administratif de Melun ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier car il vise un mémoire du préfet qui n'a pas été communiqué ;

- il est insuffisamment motivé au regard de l'argumentation développée ;

- l'article L. 5211-2 du code général des collectivités territoriales ne peut fonder, comme l'a jugé à tort le tribunal administratif, l'application aux établissements publics territoriaux des dispositions applicables aux communes en matière d'indemnités des élus ;

- seules les dispositions énoncées par les articles L. 5219-2- et L. 5211-12 du code général des collectivités territoriales sont applicables aux indemnités des élus des établissements publics territoriaux ;

- les premiers juges ont interprété de manière erronée les dispositions du code général des collectivités territoriales applicables aux élus des communes, des communautés d'agglomération, communautés urbaines et métropoles, en ne distinguant pas selon le nombre d'habitants de

celles-ci ;

- les motifs du jugement se contredisent en ce qu'il juge à la fois que les règles de calcul des indemnités sont les mêmes pour les élus des établissements publics territoriaux et ceux des communes, communautés d'agglomération, communautés urbaines et métropoles, et que le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que les établissements publics territoriaux fassent l'objet d'une dérogation, à raison de leur fiscalité ;

- aucun motif objectif, notamment pas la fiscalité, ne justifie la différence de traitement entre les élus des établissements publics territoriaux et ceux des autres collectivités ;

- les articles L. 5219-2 et L. 5211-12 du code général des collectivités territoriales applicables ne portent que sur les indemnités des président et vice-présidents, et non sur celles de l'ensemble des élus des établissements publics territoriaux, qui sont exclues de l'enveloppe indemnitaire globale ;

- l'interprétation que fait le préfet du code général des collectivités territoriales est contraire au principe constitutionnel d'égalité devant la loi, dès lors que ceci a pour effet d'instaurer une distinction non justifiée entre les élus des établissements publics territoriaux et ceux des communautés d'agglomération, communautés urbaines et métropoles ;

- elle est contraire à la volonté du législateur quant à l'investissement demandé aux élus des établissements publics territoriaux ;

- une circulaire du ministre de l'intérieur du 10 janvier 2018 contredit l'interprétation faite par le préfet et le tribunal administratif.

Par un mémoire en défense enregistré le 26 février 2018, le préfet du Val-de-Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'établissement public territorial Grand Orly-Seine Bièvre ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour l'établissement public territorial Grand Orly-Seine Bièvre.

Considérant ce qui suit :

1. L'établissement public territorial Grand Orly-Seine Bièvre (l'EPT) fait appel du jugement du 10 mai 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun, saisi d'un déféré du préfet du Val-de-Marne, a annulé la délibération du 26 janvier 2016 par laquelle son conseil de territoire a fixé le montant des indemnités de fonction du président, des vice-présidents, des conseillers supplémentaires membres du bureau et des autres conseillers territoriaux.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, la circonstance que le Tribunal ait visé, sans le communiquer à l'EPT, le mémoire produit par le préfet du Val-de-Marne le 8 février 2017 n'a, en l'espèce, pas méconnu le principe du contradictoire dès lors que, par ce mémoire, le préfet se bornait à indiquer n'avoir aucune observation à ajouter à ses précédentes écritures.

3. En second lieu, il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à l'intégralité de l'argumentation présentée en défense par l'établissement public territorial, ont suffisamment explicité l'interprétation qu'il convenait de donner aux dispositions du code général des collectivités territoriales invoquées par les parties, permettant à ces dernières de la contester utilement en appel. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement contesté doit être écarté.

Sur la légalité de la décision contestée :

4. Aux termes de l'article L. 5219-2 du code général des collectivités territoriales : " Dans le périmètre de la métropole du Grand Paris, sont créés, au 1er janvier 2016, des établissements publics de coopération intercommunale dénommés " établissements publics territoriaux ". Sous réserve du présent chapitre, ces établissements publics sont soumis aux dispositions applicables aux syndicats de communes. D'un seul tenant et sans enclave, d'au moins 300 000 habitants, ces établissements regroupent l'ensemble des communes membres de la métropole du Grand Paris, à l'exception de la commune de Paris. Les communes appartenant à un même établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre à la date de promulgation de la loi n° 2015-991 du

7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République ne peuvent appartenir à des établissements publics territoriaux distincts. / Dans chaque établissement public territorial, il est créé un conseil de territoire composé des délégués des communes incluses dans le périmètre de l'établissement, désignés au conseil de la métropole du Grand Paris en application de l'article

L. 5219-9 (...) Le président du conseil de territoire est élu en son sein. Le conseil de territoire désigne également en son sein un ou plusieurs vice-présidents. Le nombre de ceux-ci ne peut excéder 20 % du nombre total des membres du conseil de territoire ".

5. L'article L. 5219-2-1 de ce même code dispose que : " Les indemnités votées par le conseil de territoire pour l'exercice effectif des fonctions de président d'un établissement public territorial sont inférieures ou égales à 110 % du terme de référence mentionné au I de l'article L. 2123-20. / Les indemnités votées par le conseil de territoire pour l'exercice effectif des fonctions de vice-président d'un établissement public territorial sont inférieures ou égales à 44 % du terme de référence mentionné au même I. /Les indemnités votées par le conseil de territoire pour l'exercice effectif des fonctions de conseiller d'un établissement public territorial sont inférieures ou égales à

6 % du terme de référence mentionné audit I. / L'article L. 5211-12, à l'exception de son premier alinéa, est applicable aux indemnités des élus des établissements publics territoriaux. / Les indemnités de fonctions pour l'exercice des fonctions de président, de vice-président et de conseiller des établissements publics territoriaux ne peuvent être cumulées avec les indemnités de fonctions perçues au titre des fonctions de président, de vice-président et de conseiller de la métropole du Grand Paris. " ;

6. Enfin, aux termes de l'article L. 5211-12 du même code : " Les indemnités maximales votées par le conseil ou comité d'un syndicat de communes dont le périmètre est supérieur à celui d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, d'une communauté de communes, d'une communauté urbaine, d'une communauté d'agglomération, d'une métropole et d'un syndicat d'agglomération nouvelle pour l'exercice effectif des fonctions de président et de vice-président sont déterminées par un décret en Conseil d'Etat par référence au montant du traitement correspondant à l'indice brut terminal de l'échelle indiciaire de la fonction publique. / Le montant total des indemnités versées ne doit pas excéder celui de l'enveloppe indemnitaire globale, déterminée en additionnant l'indemnité maximale pour l'exercice effectif des fonctions de président et les indemnités maximales pour l'exercice effectif des fonctions de vice-président, correspondant soit au nombre maximal de vice-présidents qui résulterait de l'application des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 5211-10 à l'organe délibérant qui comporterait un nombre de membres déterminé en application des III à VI de l'article L. 5211-6-1, soit au nombre existant de

vice-présidences effectivement exercées, si celui-ci est inférieur. / De manière dérogatoire, l'indemnité versée à un vice-président peut dépasser le montant de l'indemnité maximale prévue au premier alinéa du présent article, à condition qu'elle ne dépasse pas le montant de l'indemnité maximale susceptible d'être allouée au président et que le montant total des indemnités versées n'excède pas l'enveloppe indemnitaire globale définie au deuxième alinéa. (...) Toute délibération de l'organe délibérant d'un établissement public de coopération intercommunale concernant les indemnités de fonction d'un ou de plusieurs de ses membres est accompagnée d'un tableau annexe récapitulant l'ensemble des indemnités allouées aux membres de l'assemblée concernée (...) ".

7. En premier lieu, il résulte de la combinaison des dispositions précitées, sans qu'il y ait lieu de se référer à l'intention du législateur, que l'enveloppe indemnitaire globale telle qu'elle est définie par le deuxième alinéa de l'article L. 5211-12 doit être répartie entre l'ensemble des élus, président, vice-présidents, mais aussi conseillers des établissements publics territoriaux créés par l'article L. 5219-2 du code général des collectivités territoriales. Or, il est constant que le montant total des indemnités votées par la délibération du 26 janvier 2016 en litige excède le montant de cette enveloppe indemnitaire globale, fixé à la somme non contestée de 34 289,32 euros mensuels.

8. En second lieu, l'EPT, qui n'a pas saisi la Cour d'un mémoire distinct tendant à ce que la Cour transmette au Conseil d'Etat une question prioritaire de constitutionnalité, ne saurait utilement invoquer la violation par les dispositions précitées du principe d'égalité entre les élus des établissements publics territoriaux et ceux des communautés d'agglomération, communautés urbaines et métropoles.

9. Enfin, l'EPT ne peut pas plus utilement se référer aux prescriptions de la circulaire du ministre de l'intérieur du 10 janvier 2018 relative à la mise en oeuvre de la possibilité de majoration de l'indemnité de fonction des chefs de l'exécutif et présidents de l'assemblée délibérante de certaines collectivités territoriales, au nombre desquelles il ne figure pas.

10. Il résulte de tout ce qui précède que l'établissement public territorial Grand Orly-Seine Bièvre n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché de contradictions, le Tribunal administratif de Melun a annulé sa délibération du 26 janvier 2016 déférée.

Sur les conclusions présentées au titre des frais de justice :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'EPT demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'établissement public territorial Grand Orly-Seine Bièvre est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'établissement public territorial Grand Orly-Seine Bièvre et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 avril 2019.

Le rapporteur,

P. HAMONLe président,

B. EVENLe greffier,

S. GASPARLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 17PA02176


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02176
Date de la décision : 23/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-06-01 Collectivités territoriales. Dispositions particulières à certaines collectivités. Collectivités de la région Ile-de-France.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : CABINET SEBAN et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-04-23;17pa02176 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award