Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 17 juillet 2015 par lequel la présidente du conseil départemental du Finistère a rejeté sa demande tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie déclarée le 11 janvier 2015.
Par un jugement n° 1503974 du 22 juin 2017, le tribunal administratif de Rennes a fait droit à sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 aout 2017 et le 28 mars 2018, le département du Finistère demande à la cour :
1°) à titre principal, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 22 juin 2017 ;
2°) à titre subsidiaire, de désigner un expert aux fins de prendre connaissance du dossier, se faire communiquer le dossier médical de Mme A... et tous documents utiles, examiner Mme A... et déterminer si les troubles dont souffre la requérante sont imputables au service ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- la preuve de l'imputabilité au service de l'affection dont souffre Mme A... n'est pas apportée, et au-delà des expertises médicales produites par l'intéressée, il est nécessaire de prendre en considération les faits dans leur globalité ;
- la perte du bénéfice du concours d'attaché territorial est systématiquement écartée des analyses médicales figurant au dossier, alors qu'il s'agit à l'évidence d'une préoccupation majeure de l'intéressée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2017, Mme A..., représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du département du Finistère la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête est irrecevable, dès lors que la présidente du conseil départemental du Finistère ne justifie pas avoir été régulièrement autorisée par le conseil départemental à exercer un recours et que les moyens soulevés par le département du Finistère sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pons ;
- les conclusions de M. Lemoine, rapporteur public ;
- et les observations de MeD..., substituant MeB..., pour le département du Finistère et de Me Buors, avocat de MmeA....
Une note en délibéré, présentée pour le département du Finistère, a été enregistrée le 16 novembre 2018.
1. MmeA..., recrutée à compter du 1er octobre 2003 par le conseil départemental du Finistère en qualité d'adjointe administrative stagiaire, a été titularisée dans ce grade le 1er octobre 2004. Suite à sa réussite au concours du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux au mois de décembre 2009, elle a été titularisée dans ce grade le 1er janvier 2013 et affectée à la direction des finances et de la commande publique - service pilotage de la préparation budgétaire - du conseil départemental. Parallèlement, Mme A...a réussi les épreuves du concours d'accès au cadre d'emplois des attachés territoriaux en 2011, mais elle a perdu le bénéfice de son concours le 30 avril 2014, ses demandes d'emploi au sein de sa collectivité n'ayant pas été retenues. Mme A... a ensuite été placée en congé de longue maladie du 28 avril 2014 au 17 octobre 2015, par un arrêté de la présidente du conseil départemental du Finistère du 17 juin 2015. Par un courrier du 11 janvier 2015, l'intéressée a demandé à ce que son congé de longue maladie du 28 avril 2014 au 17 octobre 2015 soit pris en charge au titre d'une maladie professionnelle contractée en service. Par un arrêté du 17 juillet 2015, la présidente du conseil départemental du Finistère a rejeté sa demande. Par sa présente requête, le département du Finistère relève appel du jugement du 22 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 17 juillet 2015 de la présidente du conseil départemental du Finistère.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ". Au nombre des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite figurent notamment les maladies contractées ou aggravées en service.
3. Il ressort des pièces du dossier que pour rejeter la demande de MmeA..., placée depuis le 28 avril 2014 en congé de longue maladie pour " anxiété réactionnelle et souffrance morale ", tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie constatée le 28 avril 2014, la présidente du conseil départemental du Finistère a estimé que les faits invoqués à l'appui de cette demande n'étaient pas matériellement établis. Toutefois, comme l'a relevé à juste titre le tribunal, il ressort des conclusions de l'expertise réalisée le 20 mars 2015 par le docteur Altuzarra, psychiatre, à la demande de la commission de réforme du Finistère, que Mme A...présentait, à la date de l'expertise, un état anxieux important, des difficultés de sommeil, que l'expert a estimés imputables au service. Ce même médecin a relevé que Mme A...ne présentait aucun antécédent de pathologie somatique ou psychiatrique. Cet avis est confirmé par celui rendu le 4 mai 2015 par le docteur Ernandez, médecin de prévention du département du Finistère, qui a relevé que la souffrance mentale de Mme A...n'était pas médicalement contestable, a précisé que la dégradation de l'état de santé et des conditions de travail de l'intéressée pouvait être attestée par des avis d'aptitude établis dès les mois de septembre et d'octobre 2013, a mentionné l'existence de tensions entre la requérante et sa hiérarchie, dont le commencement peut être fixé au mois de février 2013, a exclu tout antécédent psychiatrique chez MmeA..., et a estimé qu'un lien direct pouvait ainsi être établi entre la pathologie de la requérante et ses conditions de travail. Enfin, la commission de réforme, réunie le 28 mai 2015, a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie de Mme A.... Si le département du Finistère conteste ces différents avis, en indiquant que l'intéressée ne démontre pas le harcèlement moral qu'elle allègue, a même proféré des accusations mensongères à l'encontre de sa hiérarchie, et que la perte par Mme A...du bénéfice du concours d'attaché territorial en 2014 a joué un rôle majeur dans la dégradation de son état de santé, ces éléments, qui ne reposent sur aucun fondement médical précis, ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions concordantes et circonstanciées des praticiens cités, tendant à la reconnaissance d'un lien de causalité directe entre la pathologie contractée par Mme A...et le service. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la pathologie l'intéressée résulterait d'une cause étrangère au service, cette pathologie doit donc, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme imputable au service.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête ou de procéder à une expertise médicale, que le département du Finistère n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 17 juillet 2015 par lequel la présidente du conseil départemental du Finistère a rejeté la demande de Mme A...tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie déclarée le 11 janvier 2015.
Sur les frais de procédure :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le département du Finistère à verser à Mme A...la somme de 1 500 euros au titre des frais de procédure.
DECIDE :
Article 1er : La requête du département du Finistère est rejetée.
Article 2 : Le département du Finistère versera à Mme A...la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département du Finistère et à Mme C...A....
Délibéré après l'audience du 16 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lenoir, président de chambre,
- M. Francfort, président-assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 décembre 2018.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
H. LENOIR
Le greffier,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT02566