Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association Collectif d'accueil pour les solliciteurs d'asile à Strasbourg (CASAS) a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 17 avril 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a notifié un trop perçu sur subvention d'un montant de 943,23 euros et de condamner de l'Etat à lui verser, au titre d'un reliquat de subvention, une somme de 34 056,77 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 juin 2009.
Par un jugement n° 1406367 du 25 janvier 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 17 avril 2014 et a condamné l'Etat à verser à l'association CASAS une somme de 34 056,77 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2014.
Procédure devant la cour :
Par un recours enregistré le 27 mars 2017, le ministre de l'intérieur demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 25 janvier 2017 ;
2°) de rejeter la demande présentée par l'association CASAS devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que les premiers juges ont commis une erreur dans la qualification des faits ;
- la somme de 293 085,82 euros correspond à la somme totale des dépenses de l'association CASAS, mais le contrôleur n'a pas été à même de vérifier qu'elles correspondaient aux dépenses éligibles au régime de contribution communautaire et à l'action subventionnée ;
- la différence entre le montant total des dépenses éligibles et le montant total des ressources de l'association CASAS correspond bien à la subvention versée, moins une somme de 943,23 euros et dans ces conditions, le versement du solde de la subvention communautaire d'un montant de 35 000 euros, méconnaîtrait la règle du non profit, les ressources excédant les dépenses éligibles.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2017, l'association Collectif d'accueil pour les solliciteurs d'asile à Strasbourg, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) avant dire droit, d'ordonner la production du rapport complet du cabinet Sirius ;
2°) de rejeter le recours ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le rapport du cabinet d'audit sur lequel se fonde le ministre indique que le montant des dépenses éligibles certifiées s'élève à une somme de 204 276,20 euros et les courriers invoqués par le ministre pour contester l'éligibilité des dépenses sont antérieurs à ce rapport ;
- le rapport final de l'association et le décompte détaillé figurant en annexe permettent de lever toute incertitude quant au montant des dépenses et des ressources de l'association ;
- le cabinet d'audit a confondu le montant total des ressources et le montant des dépenses et a commis une erreur quant aux dépenses déclarées à hauteur de 156 210 euros, somme qui ne correspond à aucune pièce comptable, ni à aucun document transmis par l'association ;
- l'Etat reste bien redevable d'une somme de 34 056,77 euros.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la décision n° 573/2007/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 mai 2017 ;
- la décision n° 2008/22/CE de la Commission européenne du 19 décembre 2007 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michel, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de Me A...pour l'association Collectif d'accueil pour les solliciteurs d'asile à Strasbourg.
1. Considérant que l'Etat a signé le 12 juin 2009 avec l'association Collectif d'accueil pour les solliciteurs d'asile à Strasbourg (CASAS) une convention ayant pour objet de définir les modalités de versement d'un cofinancement par l'Etat et le Fonds européen pour les réfugiés d'une action d'accompagnement administratif et juridique des demandeurs d'asile menée par l'association ; qu'à ce titre, au vu du budget prévisionnel des dépenses et des recettes affectées à cette action, la contribution du Fonds européen pour les réfugiés devait s'élever, au titre de l'exercice 2008-2009, à 70 000 euros dont la moitié, soit 35 000 euros, a été versée à la signature de la convention ; qu'après vérification, en 2010, des éléments comptables relatifs à cette action par le cabinet d'audit Sirius, dont le rapport final a été établi le 26 août 2011, à partir d'un bilan transmis par l'association CASAS, le ministre de l'intérieur a arrêté la participation du Fonds à un montant total de 34 056,77 euros, ce qui l'a conduit à constater un trop perçu par l'association CASAS de 943,23 euros ; qu'il a notifié à l'association sa décision d'exiger le reversement de cette somme par une lettre du 17 avril 2014 ; que le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 25 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cet ordre de reversement et a condamné l'Etat à verser à l'association CASAS une somme de 34 056,77 euros, correspondant, selon l'association, au reliquat de la subvention attendue ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient commis une erreur dans la qualification des faits concerne le bien fondé du jugement attaqué et non sa régularité ;
Sur la décision du 17 avril 2014 et le versement de la subvention :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la décision de la Commission européenne n° 2008/22/CE du 19 décembre 2007 fixant les modalités de mise en oeuvre de la décision n° 573/2007/CE du Parlement européen et du Conseil portant création du Fonds européen pour les réfugiés pour la période 2008-2013 dans le cadre du programme général " Solidarité et gestion des flux migratoires " en ce qui concerne les systèmes de gestion et de contrôle des Etats membres, les règles de gestion administrative et financière et l'éligibilité des dépenses pour les projets cofinancés par le Fonds relatif à la contribution communautaire finale : " Aux fins du calcul du paiement final au bénéficiaire final, la contribution communautaire totale à chaque projet correspond au moins élevé des trois montants suivants : / a) le montant maximal indiqué dans la convention de subvention ; / b) le cofinancement maximal résultant de la multiplication des coûts éligibles totaux du projet concerné par le pourcentage prévu à l'article 14, paragraphe 4, et à l'article 21, paragraphe 3, de l'acte de base (à savoir 50 %, 75 % ou 80 %) ; et / c) le montant résultant de l'application du principe de non-profit, visé au point I.3.3 de l'annexe 11 " ; qu'aux termes du I.3.1. de l'annexe 11 à cette décision : " Les projets soutenus par le Fonds européen pour les réfugiés doivent être sans but lucratif. Si, au terme du projet, les sources de revenus, y compris les recettes, dépassent les dépenses, la participation du Fonds au projet sera réduite proportionnellement (...) " ; qu'enfin aux termes du I.3.3. de cette annexe : " La contribution communautaire résultant de l'application du principe de non-profit, prévue à l'article 12, point c) (...) sera égale au " coût total éligible " moins la " contribution de tiers " et les " recettes générées par le projet " ;
En ce qui concerne les ressources affectées à l'action :
4. Considérant qu'il résulte du rapport d'audit et n'est pas contesté que le montant total des ressources affectées à l'action s'élève à une somme de 170 219,43 euros, hors contribution de l'Union européenne ;
En ce qui concerne les dépenses affectées à l'action :
5. Considérant, en premier lieu, s'agissant des dépenses diverses, qu'il résulte de l'instruction que le cabinet d'audit Sirius a retenu un montant de 49 872,87 euros ; que si l'association CASAS se prévaut pour cette catégorie de dépenses d'un montant supérieur s'élevant à 50 474,91 euros, elle n'en justifie pas par les pièces produites à l'instance ;
6. Considérant, en second lieu, s'agissant des dépenses de personnel, que l'association CASAS se prévaut d'un montant de 188 004,81 euros qui figure dans son compte financier détaillé et qu'elle en a explicité le mode de calcul en particulier en précisant la clé de répartition permettant de le déterminer à partir du total des salaires bruts et charges patronales pour la période du 1er juillet 2008 au 30 juin 2009, du pourcentage du temps de travail consacré à la réalisation de l'action par les salariés ainsi que du nombre d'heures effectuées par ces derniers ; que si le ministre se prévaut du rapport du cabinet d'audit qui ne retient qu'un montant de dépenses éligibles de 154 403,33 euros, seul le rejet d'une somme de 1 806,67 euros a, dans les extraits fournis à l'instance, été explicitement motivé par l'absence de justification de son affectation et que le ministre ne produit aucun autre élément précis permettant de remettre en cause les pièces produites par l'association CASAS, et notamment la clé de répartition utilisée pour établir l'éligibilité des dépenses engagées par cette dernière au titre de l'action ; que par suite, le montant des dépenses de personnel à retenir au titre de l'action s'établit, déduction faite de la somme de 1 806,67 euros, à 186 198,14 euros ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le montant des dépenses éligibles de l'association CASAS affectées à l'action au titre de l'exercice 2008-2009 s'élève à 236 071,01 euros ;
En ce qui concerne l'application du principe du non-profit et le montant de la contribution communautaire :
8. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 4 et 7 ci-dessus, que le montant des ressources, hors contribution de l'Union européenne, est inférieur de 65 851,68 euros au montant des dépenses et que cette différence correspond au montant de la contribution communautaire qui devait être accordée à l'association CASAS ; que compte tenu du versement d'une première fraction de 35 000 euros lors de la signature de la convention, l'association peut prétendre au versement d'une somme de 30 851,68 euros au titre du solde de la contribution communautaire ; qu'il suit de là que le ministre de l'intérieur a fait une inexacte application du principe du non-profit en émettant à l'encontre de l'association CASAS un ordre de reversement d'un montant de 943,23 euros, et en refusant de lui verser le solde de la subvention à concurrence d'un montant de 30 851,68 euros ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner avant-dire droit la communication par l'Etat du rapport d'audit du cabinet Sirius sollicitée par l'association CASAS, que le ministre de l'intérieur est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'Etat à verser à l'association CASAS une somme supérieure à 30 851,68 euros ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'Association CASAS présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : La somme que l'Etat a été condamné à verser à l'association CASAS par le jugement n° 1406367 du 25 janvier 2017 du tribunal administratif de Strasbourg est ramenée de 34 056,77 euros à 30 851,68 euros.
Article 2 : Le jugement du 25 janvier 2017 du tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire avec le présent arrêt.
Article 3 : Le surplus du recours du ministre de l'intérieur est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de l'association CASAS présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à l'association Collectif d'accueil pour les solliciteurs d'asile à Strasbourg.
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N°17NC00730