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04/05/2017 | FRANCE | N°17NC00208

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 04 mai 2017, 17NC00208


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 6 avril 2016 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1600955 du 20 septembre 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 janvier 2017, M. A... B...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 6 avril 2016 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 1600955 du 20 septembre 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 janvier 2017, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 20 septembre 2016 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 6 avril 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en contrepartie de son renoncement au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- les premiers juges ont omis de se prononcer sur le moyen tiré de ce que le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation avant de lui refuser un certificat de résidence ;

- le préfet a refusé de lui délivrer ce certificat sans procéder à un examen particulier de sa situation ;

- cette décision de refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité dont le refus de titre est lui-même entaché ;

- cette décision est illégale dès lors que le préfet a omis d'examiner sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations précitées de l'accord franco-algérien et de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant un délai de départ volontaire de trente jours est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale, par voie d'exception, en raison de l'illégalité dont le refus de titre et la mesure d'éloignement sont entachés.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 février 2017, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens n'est fondé.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 janvier 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guérin-Lebacq a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant algérien né le 15 mars 1986, est entré sur le territoire français le 30 mai 2014, sous couvert d'un visa de long séjour, afin de rejoindre son épouse, ressortissante française ; qu'un certificat de résidence en qualité de conjoint de français lui a été délivré pour la période du 11 décembre 2014 au 24 novembre 2015 ; que M. B...ayant sollicité le renouvellement de ce certificat, le préfet du Doubs a, par un arrêté du 6 avril 2016, rejeté sa demande au motif de la rupture de la communauté de vie entre les époux et, par ce même arrêté, a obligé l'intéressé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit en cas d'exécution forcée de la mesure d'éloignement ; que M. B...relève appel du jugement du 20 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que dans sa demande présentée devant le tribunal administratif de Besançon, M. B...soutenait notamment, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision refusant de renouveler son titre de séjour, que le préfet avait omis de procéder à un examen réel et sérieux de sa situation avant de lui refuser un certificat de résidence ; que le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que, par suite, son jugement doit être annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. B...tendant à l'annulation de la décision de refus de séjour ;

3. Considérant qu'il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur ces dernières conclusions de M. B...et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées par l'intéressé devant le tribunal administratif ;

Sur la décision portant refus de séjour :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien (...) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

5. Considérant que M. B...fait état de ses relations amicales et de sa situation professionnelle en France, de sa maîtrise de la langue française et de la circonstance qu'il dispose d'un appartement en location ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'il est entré sur le territoire français le 30 mai 2014, moins de deux ans avant l'intervention de l'arrêté contesté, après avoir vécu jusqu'à l'âge de 28 ans dans son pays d'origine ; qu'il n'est pas contesté qu'il vit séparé de son épouse, quand bien même celle-ci s'est désistée de son action en divorce engagée devant le tribunal de grande instance de Besançon ; que, dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour du requérant en France, il n'est pas établi qu'en refusant de renouveler, le 6 avril 2016, le certificat de résidence de M.B..., le préfet du Doubs aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de sa décision sur la vie privée et familiale de l'intéressé ;

6. Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des éléments de motivation mentionnés dans la décision contestée, que le préfet du Doubs aurait rejeté la demande de M. B...sans procéder à un examen particulier de sa situation ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 6 avril 2016 en tant qu'il rejette sa demande de renouvellement de son certificat de résidence ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M.B..., qui n'établit pas que la décision refusant de renouveler son certificat de résidence serait entachée d'illégalité, n'est pas fondé à en demander l'annulation ; que par suite, il n'est pas plus fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours serait privée de base légale et, pour ce motif, entachée d'illégalité ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Doubs aurait obligé M. B...à quitter le territoire français sans procéder préalablement à un examen particulier de sa situation ;

10. Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5 du présent arrêt, la mesure d'éloignement prise à l'encontre de M.B... ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales , ni celles du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ni n'est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

11. Considérant, en dernier lieu, que les seules circonstances que M. B...dispose d'un contrat de travail à durée indéterminée et souhaite reprendre la vie commune avec son épouse ne sauraient suffire à démontrer que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en l'obligeant à quitter le territoire français et à lui fixant un délai de trente jours pour satisfaire à cette obligation ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M.B..., qui n'établit pas que les décisions refusant de renouveler son certificat de résidence et l'obligeant à quitter le territoire français seraient entachées d'illégalité, n'est pas fondé à en demander l'annulation ; que par suite, il n'est pas plus fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait privée de base légale et, pour ce motif, entachée d'illégalité ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 avril 2016 en tant qu'il l'oblige à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixe le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M. B..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. B... demande le versement au bénéfice de son avocat, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Besançon n° 1600955 du 20 septembre 2016 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 avril 2016 en tant que, par cet arrêté, le préfet du Doubs a refusé de renouveler son certificat de résidence.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Besançon tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 avril 2016 en tant que, par cet arrêté, le préfet du Doubs a refusé de renouveler son certificat de résidence, est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête présentée en appel est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M.A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

2

N° 17NC00208


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC00208
Date de la décision : 04/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DHIVER
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : BOCHER-ALLANET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-05-04;17nc00208 ?
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