Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée Eoliennes des Lilas a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés nos 2014248-0013, 2014248-00014, 2014248-0017, 2014248-0018 et 2014248-0019 du 5 septembre 2014 par lesquels le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer cinq permis de construire en vue de l'implantation des éoliennes E4, E5, E6, E7 et du poste de livraison PL2 dans le parc éolien " Colchique " sur le territoire des communes de Mancenans et de Bournois.
La société par actions simplifiée Eoliennes des Colchiques a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés nos 2014248-0012, 2014248-0015, 2014248-0016, 2014248-0020 et 2014248-0021 du 5 septembre 2014 par lesquels le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer cinq permis de construire en vue de l'implantation des éoliennes E8, E9, E10, E11 et du poste de livraison PL3 dans le parc éolien " Colchique " sur le territoire des communes d'Accolans, de Bournois et de Soye.
La société par actions simplifiée Eoliennes d'Eglantine a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés nos 2014248-0009, 2014248-0010 et 2014248-0011 du 5 septembre 2014 par lesquels le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer des permis de construire en vue de l'implantation des éoliennes E1, E2, E3 et du poste de livraison PL1 dans le parc éolien " Colchique " sur le territoire de la commune d'Accolans.
Par des jugements nos 1401689 (société Eoliennes des Lilas), 1401690 (société Eoliennes des Colchiques) et 1401691 (société Eoliennes d'Eglantine) du 29 novembre 2016, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'ensemble des arrêtés attaqués.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 27 janvier et 24 mars 2017 sous le n° 17NC00176, le ministre du logement et de l'habitat durable demande à la cour d'annuler le jugement no 1401689 du 29 novembre 2016 du tribunal administratif de Besançon et de rejeter la demande de la société Eoliennes des Lilas.
Le ministre soutient que :
- le tribunal a insuffisamment motivé son jugement ;
- il a commis une erreur de droit en estimant que le relevé de température de 2001 ne pouvait pas être pris en compte pour déterminer l'altitude minimale de sécurité radar ;
- il a commis une erreur d'appréciation en considérant que les ouvrages litigieux ne sont pas de nature à porter atteinte à la sécurité publique au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 août 2017, la société Eoliennes des Lilas, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Doubs de délivrer les permis de construire sollicités ou, à défaut, de prendre une nouvelle décision dans un délai de 60 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Eoliennes des Lilas soutient qu'aucun des moyens soulevés par le ministre n'est fondé.
II. Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 27 janvier et 24 mars 2017 sous le n° 17NC00177, le ministre du logement et de l'habitat durable demande à la cour d'annuler le jugement no 1401690 du 29 novembre 2016 du tribunal administratif de Besançon et de rejeter la demande de la société Eoliennes des Colchiques.
Le ministre soutient que :
- le tribunal a insuffisamment motivé son jugement ;
- il a commis une erreur de droit en estimant que le relevé de température de 2001 ne pouvait pas être pris en compte pour déterminer l'altitude minimale de sécurité radar ;
- il a commis une erreur d'appréciation en considérant que les ouvrages litigieux ne sont pas de nature à porter atteinte à la sécurité publique au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 août 2017, la société Eoliennes des Colchiques, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Doubs de délivrer les permis de construire sollicités ou, à défaut, de prendre une nouvelle décision dans un délai de 60 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Eoliennes des Colchiques soutient qu'aucun des moyens soulevés par le ministre n'est fondé.
II. Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 27 janvier et 24 mars 2017 sous le n° 17NC00178, le ministre du logement et de l'habitat durable demande à la cour d'annuler le jugement no 1401691 du 29 novembre 2016 du tribunal administratif de Besançon et de rejeter la demande de la société Eoliennes d'Eglantine.
Le ministre soutient que :
- le tribunal a insuffisamment motivé son jugement ;
- il a commis une erreur de droit en estimant que le relevé de température de 2001 ne pouvait pas être pris en compte pour déterminer l'altitude minimale de sécurité radar ;
- il a commis une erreur d'appréciation en considérant que les ouvrages litigieux ne sont pas de nature à porter atteinte à la sécurité publique au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 août 2017, la société Eoliennes d'Eglantine, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Doubs de délivrer les permis de construire sollicités ou, à défaut, de prendre une nouvelle décision dans un délai de 60 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Eoliennes d'Eglantine soutient qu'aucun des moyens soulevés par le ministre n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'aviation civile ;
- l'instruction n° 1350/DIRCAM du directeur de la circulation aérienne militaire du 17 novembre 2009, relative à l'établissement des procédures de départ, d'arrivée, d'attente, d'approche aux instruments, des minimums opérationnels associés et à la présentation des cartes associées ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rees, premier conseiller,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour les sociétés Eoliennes des Lilas, Eoliennes d'Eglantine et Eoliennes des Colchiques.
Considérant ce qui suit :
1. Pour la réalisation de son projet de parc éolien " Colchique " comportant la création de onze éoliennes et de trois postes de livraison sur le territoire des communes d'Accolans, de Bournois, de Mancenans et de Soye, la société H2Air a créé les sociétés Eoliennes des Lilas, Eoliennes des Colchiques et Eoliennes d'Eglantine.
2. Le 22 mars 2011, la société Eoliennes d'Eglantine a présenté au préfet du Doubs trois demandes de permis de construire portant sur l'installation des éoliennes E1, E2 et E3 ainsi que du poste de livraison PL1 sur le territoire de la commune d'Accolans, la société Eoliennes des Lilas lui a présenté cinq demandes de permis de construire portant sur l'installation des éoliennes E4, E5, E6 et E7 ainsi que du poste de livraison PL2 sur le territoire des communes de Mancenans et de Bournois et la société Eoliennes des Colchiques, cinq demandes de permis de construire portant sur l'installation des éoliennes E8, E9, E10 et E11 ainsi que du poste de livraison PL3 sur le territoire des communes d'Accolans, de Bournois et de Soye.
3. Par des arrêtés du 7 janvier 2013, le préfet du Doubs a rejeté toutes ces demandes. Ces arrêtés ont été annulés par des jugements nos 1300848 (société Eoliennes des Lilas), 1300849 (société Eoliennes d'Eglantine) et 1300850 (société Eoliennes des Colchiques) du tribunal administratif de Besançon du 23 juillet 2014. Après avoir réexaminé les demandes à la suite de ces annulations, le préfet du Doubs a, par des arrêtés du 5 septembre 2014, réitéré ses refus de délivrer les permis de construire sollicités.
4. Par les requêtes susvisées, nos 17NC00176, 17NC00177 et 17NC00178, le ministre du logement et de l'habitat durable relève appel des jugements nos 1401689, 1401690 et 1401691 du 29 novembre 2016 par lesquels le tribunal administratif de Besançon a annulé l'ensemble des arrêtés du 5 septembre 2014.
5. Les requêtes susvisées, nos 17NC00176, 17NC00177 et 17NC00178, concernent le même projet, présentent à juger des mêmes questions, relatives au motif identique fondant l'ensemble des décisions, et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la régularité des jugements :
6. Les premiers juges ont expliqué, de manière précise et circonstanciée, aux points 4 et 5 de chacun des jugements, pour quelles raisons le préfet s'est fondé sur un calcul irrégulier de l'altitude minimale de sécurité radar pour considérer que les installations projetées étaient de nature à porter atteinte à la sécurité publique. Ils ont également indiqué que le préfet ne démontrait pas, par un calcul cette fois régulier de cette altitude, que lesdites installations la méconnaissaient.
7. Contrairement à ce que soutient le ministre, le tribunal a ainsi énoncé de manière suffisante, dans chacun des jugements attaqués, les raisons de droit et de fait pour lesquelles il a retenu le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
8. Dès lors, le ministre n'est pas fondé à soutenir que les jugements sont entachés d'une insuffisance de motivation.
Sur le bien-fondé des jugements :
9. Pour refuser la délivrance des permis de construire sollicités, le préfet du Doubs, se fondant sur l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, a estimé que les installations projetées sont de nature à porter atteinte à la sécurité publique dès lors que, compte tenu de la marge de franchissement d'obstacles réglementaire, leur hauteur dépasse l'altitude minimale de sécurité radar fixée pour la base aérienne militaire de Luxeuil-Saint-Sauveur, située à une trentaine de kilomètres du parc éolien.
10. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".
11. Les règles techniques de conception et d'établissement des procédures de vol aux instruments sur la base aérienne militaire de Luxeuil-Saint-Sauveur, dont le ministre chargé de la défense est l'unique affectataire, sont définies par l'instruction n° 1350/DIRCAM du directeur de la circulation aérienne militaire du 17 novembre 2009. Cette instruction définit les conditions et les critères d'établissement et de révision des procédures de vol aux instruments et prévoit que chaque procédure est mise en vigueur par une publication. Au nombre de ces critères, qui ne trouvent à s'appliquer que dans le cadre de la procédure d'établissement ou de révision d'une procédure de vol aux instruments, figure notamment celui défini au point II.ii.2.4.1 de l'instruction, relatif aux altitudes et hauteurs minimales de sécurité radar dans les procédures d'approche, d'attente et de départ aux instruments pour avions de combat et d'entraînement.
12. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date des arrêtés litigieux, les altitudes et hauteurs minimales de sécurité radar en vigueur pour la base aérienne militaire de Luxeuil-Saint-Sauveur avaient été publiées le 16 décembre 2010. Par conséquent, c'est à juste titre que le préfet, qui n'avait pas à leur substituer ses propres calculs, s'est fondé sur ces dernières données.
13. Il ressort des pièces du dossier que, dans le secteur où est situé le parc éolien, l'altitude minimale de sécurité radar est fixée à 3 200 pieds, soit 975 mètres. Ces 975 mètres comprennent une marge de franchissement d'obstacles de 300 mètres, augmentée d'une correction pour basses températures de 47,199 mètres. Si les 11 éoliennes en litige, dont la hauteur en sommet de pale culmine à 639 mètres pour la plus basse et 675 mètres pour la plus haute, ne dépassent pas ce plancher de 975 mètres, en revanche, elles empiètent toutes sur la marge de franchissement d'obstacle corrigée (975 - 347,199 = 627,801 mètres).
14. Toutefois, d'une part, il ne ressort d'aucune disposition légale ou réglementaire que l'altitude minimale de sécurité radar, déterminée en application de l'instruction du 17 novembre 2009, constitue, par elle-même, une règle opposable à la hauteur des constructions au sol. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les éoliennes en litige sont situées à proximité d'un secteur d'approche voisin, où l'altitude minimale de sécurité radar est fixée à 6 700 pieds, soit 2 042 mètres. Compte tenu de cette proximité et de l'écart significatif entre les altitudes minimales de sécurité radar d'un secteur à l'autre, il ne ressort pas des pièces du dossier que les avions quittant la base aérienne ou s'en approchant aient vocation à gagner ou perdre brutalement plus de mille mètres d'altitude pour survoler la zone d'implantation des éoliennes au ras de l'altitude minimale de sécurité radar fixée à 975 mètres, à plus forte raison en-deçà de cette altitude, alors que la plus haute des éoliennes se trouve encore 300 mètres plus bas. Le ministre n'établit pas ainsi l'existence d'un risque d'atteinte à la sécurité publique au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
15. Dans ces conditions, le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que le préfet, en considérant que les installations projetées sont de nature à porter atteinte à la sécurité publique, a commis une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
16. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé les arrêtés attaqués. Dès lors, les conclusions tendant à l'annulation du jugement et au rejet de la demande des sociétés Eoliennes des Lilas, Eoliennes des Colchiques et Eoliennes d'Eglantine ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'injonction présentées par les sociétés Eoliennes des Lilas, Eoliennes des Colchiques et Eoliennes d'Eglantine :
17. Le présent arrêt n'implique pas que les permis de construire en litige soient délivrés aux sociétés Eoliennes des Lilas, Eoliennes des Colchiques et Eoliennes d'Eglantine. Dès lors que le tribunal a déjà ordonné au préfet du Doubs de réexaminer les demandes de permis de construire présentées par les sociétés Eoliennes des Lilas, Eoliennes des Colchiques et Eoliennes d'Eglantine, et en l'absence d'éléments quant à l'exécution de cette injonction et à son éventuel non respect, il n'implique pas non plus que de nouvelles injonctions soient adressées au préfet.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
18. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".
19. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, au titre de ces dispositions, une somme de 1 000 euros à verser à chacune des sociétés intimées.
Par ces motifs,
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes nos 17NC00176, 17NC00177 et 17NC00178 présentées par la ministre du logement et de l'habitat durable sont rejetées.
Article 2 : L'Etat versera à chacune des intimées la somme de 1 000 (mille) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la cohésion des territoires et aux sociétés Eoliennes des Lilas, Eoliennes d'Eglantine et Eoliennes des Colchiques.
Copie en sera adressée au préfet du Doubs.
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Nos 17NC00176, 17NC00177 et 17NC00178