Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société civile immobilière (SCI) Lalie a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la délibération du 9 mars 2015 par laquelle le conseil municipal de la commune de Caudebronde a autorisé le maire à exercer au nom de la commune le droit de préemption sur la parcelle cadastrée section AB n° 9.
Par un jugement n° 1502143 du 2 juin 2017, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cette délibération.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 10 juillet 2017, la commune de Caudebronde, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 juin 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) de rejeter la demande présentée par la SCI Lalie devant le tribunal administratif de Montpellier ;
3°) de mettre à la charge de la SCI Lalie la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le défaut de motivation en droit de la délibération n'a pas exercé d'influence sur le sens de la décision ni privé la société requérante d'une garantie ;
- la délibération est suffisamment motivée en droit par référence ;
- la délibération est suffisamment motivée en fait ;
- la réalité du projet et son caractère d'intérêt général sont démontrés ;
- aucun autre moyen soulevé par la société requérante n'est fondé.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2017, la SCI Lalie représentée par Me B...demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Caudebronde la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la délibération n'est pas motivée en droit et en fait ;
- la jurisprudence Danthony n'est pas applicable en l'espèce ;
- la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;
- les observations de MeA..., représentant la commune de Caudebronde et celles de MeB..., représentant la SCI Lalie.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI Lalie a souhaité acquérir la parcelle cadastrée section AB n° 9 d'une superficie de 00 ha 15 à 70 ca pour un montant de 1 200 euros sur le territoire de la commune de Caudebronde. Une déclaration d'intention d'aliéner a été adressée au département de l'Aude, titulaire d'un droit de préemption au titre des espaces naturels sensibles, qui a renoncé à exercer ce droit le 3 mars 2015. Le conseil municipal de la commune de Caudebronde a alors, par une délibération du 9 mars 2015, autorisé le maire à exercer le droit de préemption au nom de la commune sur la parcelle au titre des espaces naturels sensibles. Par courrier du 23 mars 2015, le maire en a informé la SCI Lalie.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'urbanisme applicable à la date de la délibération contestée : " Afin de préserver la qualité des sites, des paysages, des milieux naturels et des champs naturels d'expansion des crues et d'assurer la sauvegarde des habitats naturels selon les principes posés à l'article L. 110, le département est compétent pour élaborer et mettre en oeuvre une politique de protection, de gestion et d'ouverture au public des espaces naturels sensibles, boisés ou non ". Selon l'article L. 142-3 : " Pour la mise en oeuvre de la politique prévue à l'article L. 142-1, le conseil général peut créer des zones de préemption dans les conditions ci-après définies. Dans les communes dotées d'un plan d'occupation des sols rendu public ou d'un plan local d'urbanisme approuvé, les zones de préemption sont créées avec l'accord du conseil municipal. En l'absence d'un tel document, et à défaut d'accord des communes concernées, ces zones ne peuvent être créées par le conseil général qu'avec l'accord du représentant de l'Etat dans le département. A l'intérieur de ces zones, le département dispose d'un droit de préemption sur tout terrain ou ensemble de droits sociaux donnant vocation à l'attribution en propriété ou en jouissance de terrains qui font l'objet d'une aliénation, à titre onéreux, sous quelque forme que ce soit ". Selon l'article L. 142-4 : " Toute aliénation mentionnée à l'article L. 142-3 est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable adressée par le propriétaire au président du conseil général du département dans lequel sont situés les biens ; ce dernier en transmet copie au directeur départemental des finances publiques. Cette déclaration comporte obligatoirement l'indication du prix et des conditions de l'aliénation projetée ou, en cas d'adjudication, l'estimation du bien ou sa mise à prix ". Enfin, aux termes de l'article R. 142-11 : " La commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent peut exercer le droit de préemption à défaut du département et à défaut du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres ".
3. Les décisions de préemption sont des décisions individuelles imposant des sujétions qui doivent être motivées au regard de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, désormais codifié à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. La délibération litigieuse, laquelle doit être considérée comme la décision de préemption elle-même, ne contient aucune considération de droit, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif. La lettre de notification à la SCI de cette délibération, qui mentionne les articles R. 213-12 et L. 213-14 du code de l'urbanisme, dispositions qui ont trait aux conditions dans lesquelles doit être signé l'acte de vente et payé le prix du bien préempté, ne pallie pas cette carence. Si à cette lettre était également jointe la déclaration d'intention d'aliéner qui se réfère quant à elle à l'article L. 142-1 du code de l'urbanisme, la motivation en droit demeure insuffisante. Enfin, si la commune de Caudebronde soutient que le défaut de motivation en droit n'a exercé aucune influence sur le sens de la décision ni privé la SCI Lalie d'une garantie, ces circonstances sont sans incidence sur les conséquences qui s'attachent à une illégalité tenant en un tel vice.
4. Il résulte de ce qui précède que la commune de Caudebronde n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la délibération du conseil municipal du 9 mars 2015.
Sur les frais liés au litige :
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la SCI Lalie, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme à la commune de Caudebronde, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Caudebronde la somme demandée par la SCI Lalie sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Caudebronde est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la SCI Lalie présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Lalie et à la commune de Caudebronde.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2019, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- Mme Duran-Gottschalk, première conseillère.
Lu en audience publique, le 1er avril 2019.
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N° 17MA02945