Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ainsi que des prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012 et des pénalités correspondantes et, à défaut, d'ordonner le dégrèvement de la quotité des rappels de contributions sociales correspondant à la majoration de 25 %.
Par un jugement n° 1504364 du 15 juin 2017, le tribunal administratif de Grenoble a jugé qu'il y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme C..., à concurrence des dégrèvements en droits et pénalités des prélèvements sociaux prononcés par le directeur départemental des finances publiques de l'Isère au titre des années 2010, 2011 et 2012 correspondant à la majoration de 25 % de l'assiette des contributions sociales et a rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 18 août 2017, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2017 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restées à sa charge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'administration fiscale n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la validité de la reconstitution du chiffre d'affaires et du bien-fondé des rectifications correspondantes en retenant une contenance de 12 cl pour les verres de vin ;
- les pénalités ne sont pas fondées, dès lors que l'administration fiscale a motivé leur application exclusivement sur le montant des rectifications supposées, or, eu égard au caractère invalide de la reconstitution du chiffre d'affaires fondée sur une contenance de 12 cl des verres à vin, le calcul approximatif de l'administration fiscale ne lui permet pas de démontrer la mauvaise foi du contribuable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 février 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Le ministre soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 2 mai 2018, M. C..., conclut aux mêmes fins que sa demande initiale par les mêmes moyens.
Il soutient, en outre, que l'administration fiscale ne peut imposer à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers l'associé unique de l'EURL Le Saint'é qui est une société unipersonnelle et n'a pas opté pour l'impôt sur les sociétés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2018, le ministre de l'action et des comptes publics persiste dans ses écritures.
Le ministre soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B..., première conseillère,
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Suite à la vérification de comptabilité au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012 de la SARL Le Saint'é, bar-restaurant-PMU, dont il est le gérant et principal associé, l'administration fiscale, après avoir notifié à la société des suppléments d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée assortis de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré, a adressé à M. C... une proposition de rectification lui notifiant, selon la procédure de redressement contradictoire, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales résultant de la réintégration de sommes que l'administration a regardées comme des rémunérations et avantages occultes imposables sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts au titre de ces mêmes années. M. C... relève appel du jugement du 15 juin 2017 en tant qu'il a, après avoir constaté un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements prononcés par l'administration fiscale correspondant à la majoration de 25 % des contributions sociales, rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des impositions et des pénalités restant en litige.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 47 de l'annexe II du code général des impôts : " Toute rectification du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés au titre d'une période sera prise en compte au titre de la même période pour le calcul des sommes distribuées. ".
3. M. C... n'a pas accepté les rehaussements d'impôt sur le revenu notifiés par l'administration fiscale résultant de la réintégration au revenu global de son foyer fiscal de sommes regardées comme des rémunérations et avantages occultes imposables sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts. La charge de la preuve de l'existence et du montant ainsi que de l'appréhension de ces sommes incombe, par suite, à l'administration fiscale.
4. Le contribuable soutient que la SARL Le Saint'é dont il a concentré toutes les parts entre ses mains, ne peut être imposée à l'impôt sur les sociétés au titre de la période vérifiée en raison de sa transformation en société unipersonnelle n'ayant pas expressément opté pour son assujettissement à l'impôt sur les sociétés, et qu'en sa qualité de gérant, il ne peut être imposé à des suppléments d'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'après la transformation alléguée, la société a spontanément et de façon constante déposé auprès de l'administration fiscale des déclarations d'impôt sur les sociétés, manifestant ainsi clairement son intention d'opter à cet impôt et que M. C..., gérant et seul associé, n'a, pour sa part, déposé aucune déclaration à l'impôt sur le revenu au titre d'une activité individuelle. Les sommes distribuées par cette société en tant que rémunérations et avantages occultes pouvaient dès lors être imposées à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
5. M. C... conteste le montant des distributions imposées entre ses mains en faisant valoir que la reconstitution du chiffre d'affaires de la société opérée par l'administration selon la méthode des liquides est sommaire et radicalement viciée en ce qu'elle a pris pour hypothèse une contenance des verres à vin utilisés pour servir les boissons de 12 cl et non de 14 cl. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'hypothèse initialement retenue par le service pour procéder à la reconstitution du chiffre d'affaires selon la méthode des liquides était de 7 cl et correspondait aux déclarations du gérant qui a ensuite soutenu que cette contenance était erronée. S'il résulte de l'instruction que le gérant a ensuite plaidé pour une contenance de 14 cl, il ressort des constatations opérées par l'administration fiscale lors de la vérification de comptabilité de la société, reprises dans un procès-verbal de constatations, que seuls les sodas sont servis dans des verres de 14 cl. Dans ces conditions, l'administration fiscale était fondée à retenir une contenance de 12 cl pour les consommations de vin au verre et autres boissons servies alcoolisées ou non autres que les sodas. Par suite, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve du montant des distributions imposées.
6. Il résulte des dispositions précitées du c) de l'article 111 du code général des impôts que l'administration fiscale est réputée apporter la preuve que des distributions occultes ont été appréhendées par la personne qui est, dans la société dont les revenus ont été regardés comme distribués, le maître de l'affaire.
7. Au cas d'espèce, l'administration fiscale fait valoir que M. C..., en sa qualité de gérant, qui revendique être l'unique associé de la société vérifiée sans d'ailleurs l'établir, qui procède aux déclarations fiscales de la société et ne conteste pas disposer de la signature et des comptes bancaires de la société, est le maître de l'affaire. Par suite, l'administration fiscale apporte la preuve de son appréhension des revenus occultes distribués par cette société au titre de la période vérifiée. C'est donc à bon droit qu'elle les a imposés entre ses mains sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts.
Sur les pénalités :
8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ". Aux termes de l'article 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration. ". Le caractère délibéré du manquement résulte d'éléments de fait permettant d'établir que le contribuable a eu connaissance et conscience des erreurs, des inexactitudes ou des omissions qu'il a commises et qu'il s'est livré à des agissements sous-tendus par une volonté délibérée de se soustraire à l'impôt.
9. L'administration fiscale apporte la preuve des manquements délibérés justifiant l'application de la pénalité prévue à l'article 1729 du code général des impôts, dès lors que le contribuable, en sa qualité de maître de l'affaire, ne pouvait ignorer les irrégularités comptables graves et répétés constatées à l'origine des minorations répétées des recettes déclarées par la société dont il est le gérant et unique associé.
10. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée au directeur du contrôle fiscal de Rhône-Alpes-Bourgogne.
Délibéré après l'audience du 9 octobre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Menasseyre, présidente assesseure,
Mme B..., première conseillère.
Lu en audience publique le 6 novembre 2018.
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N° 17LY03174