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15/05/2018 | FRANCE | N°16PA03576

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 15 mai 2018, 16PA03576


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande tendant à la réparation du préjudice financier et moral qu'il estime avoir subi du fait de l'illégalité de la décision du 28 août 2014, la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 4 256,24 euros en réparation de ce préjudice et l'annulation de la décision du 19 décembre 2014 par laquelle le ministre de la défense l'a placé en congé sans rémunération pour convenances personn

elles du 9 septembre 2014 au 30 septembre 2014.

Par un jugement n°1501213 et n°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de la décision implicite de rejet de sa demande tendant à la réparation du préjudice financier et moral qu'il estime avoir subi du fait de l'illégalité de la décision du 28 août 2014, la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 4 256,24 euros en réparation de ce préjudice et l'annulation de la décision du 19 décembre 2014 par laquelle le ministre de la défense l'a placé en congé sans rémunération pour convenances personnelles du 9 septembre 2014 au 30 septembre 2014.

Par un jugement n°1501213 et n°1504721/5-1 du 6 octobre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2016, M. C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 6 octobre 2016 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet, née du silence conservé par le ministre de la défense sur sa demande indemnitaire en date du 23 octobre 2014 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 256,24 euros, assortie des intérêts légaux à compter de sa demande préalable, en réparation du préjudice financier et moral résultant pour lui de l'illégalité de la décision du 28 août 2014 lui octroyant seulement deux jours de congés annuels au titre de l'année 2013 et 16 jours au titre de l'année 2014 ;

4°) d'annuler la décision du 19 décembre 2014 par laquelle le ministre de la défense l'a placé en congé sans rémunération pour convenances personnelles du 9 septembre 2014 au 30 septembre 2014 ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier dans la mesure où les premiers juges ont commis une erreur de fait sur le nombre de jours de congés dont il disposait à sa reprise le 1er août 2014 et sur l'imputation de cinq jours de congés sur son absence du 4 au 11 août 2014 ; ils ont omis de statuer sur le moyen tiré du report automatique du congé annuel restant dû au titre de l'année écoulée ; ils n'ont pas signé le jugement ;

- les décisions du 28 août et du 19 décembre 2014 méconnaissent les dispositions de l'article 10-I du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 et de l'article 7 de la directive 2003/88/CE du 4 novembre 2003 tel qu'interprété par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne ;

- il avait droit, en application de ces dispositions, à 25 jours de congés annuels avec traitement, soit 16 jours au titre de l'année 2014, lors de sa reprise le 1er août 2014 ; aucune journée de congé ne pouvait être imputée sur son absence du 4 au 11 août 2014, cette absence s'expliquant par le fait que l'administration ne lui a notifié son arrêté de réintégration que le 8 août ; l'administration a en outre omis de tenir compte du report de ses droits à congés annuels de l'année 2013 sur l'année 2014 ;

- la décision illégale du 28 août 2014 l'a contraint à demander un congé sans rémunération du 9 au 30 septembre 2014 ; la décision du 19 décembre 2014, qui se fonde ainsi sur une demande de congés qui lui a été imposée, est donc elle-même entachée d'illégalité ;

- la décision du 28 août 2014 lui a ainsi causé un préjudice financier qu'il évalue à 2 256,24 euros, correspondant aux 16 jours de congés sans solde qu'il a été contraint de prendre, et un préjudice moral qu'il évalue à 2 000 euros.

La requête a été communiquée au ministre des armées.

Une mise en demeure a été adressée le 24 juillet 2017, sur le fondement de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, au ministre des armées, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une ordonnance du 24 juillet 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 août 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 84-972 du 26 octobre 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Niollet,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour M.C....

1. Considérant que M.C..., agent contractuel, a été recruté par le ministère de la défense, pour une durée de trois ans, à compter du 9 février 2012, en qualité d'" acheteur " auprès du secrétariat général des armées ; que, par un arrêté du 27 mai 2014, le ministre de la défense a placé M. C...en congé de maladie à demi traitement du 20 octobre 2013 au 12 novembre 2013 et en congé de maladie sans traitement pour inaptitude temporaire du 13 novembre 2013 au 12 août 2014 ; que, par un arrêté du 1er août 2014, M. C...a été réintégré par anticipation à compter du 4 août 2014 ; que M. C...s'est présenté sur son lieu de travail le 11 août 2014 ; que, par une note du 28 août 2014, l'administration a établi ses droits à congés annuels à deux jours au titre de l'année 2013 et à neuf jours au titre de l'année 2014 ; que M. C...a sollicité son placement en congé annuel du 1er au 8 septembre 2014 et, le 29 août 2014, son placement en congé sans rémunération pour convenances personnelles du 9 au 30 septembre 2014 ; que par une décision du 19 décembre 2014, l'administration a fait droit à sa demande ; que, par deux requêtes distinctes, M. C... a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler la décision implicite de rejet née du silence conservé par le ministre de la défense sur sa demande tendant à la réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité de la note du 28 août 2014, et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 4 256,24 euros en réparation du préjudice financier et moral résultant pour lui de l'illégalité de cette note, d'autre part, d'annuler la décision du 19 décembre 2014 par laquelle le ministre de la défense l'a placé en congé sans rémunération pour convenances personnelles du 9 septembre 2014 au 30 septembre 2014 ; que par un jugement du 6 octobre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ; que M. C...fait appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été signé conformément aux prescriptions de cet article ; que la circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifié à l'appelant ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement ;

3. Considérant, en second lieu, qu'il résulte du jugement attaqué que le tribunal a procédé à l'analyse de l'ensemble des moyens présentés par M. C...et y a répondu ; que le bien-fondé des réponses qu'il y a apportées est sans incidence sur la régularité de son jugement ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 19 décembre 2014 :

4. Considérant que M. C...ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander au juge de l'excès de pouvoir d'annuler la décision du 19 décembre 2014 par laquelle il a été fait droit à sa demande de congé sans rémunération ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 10 du décret du 17 janvier 1986 : " I.-L'agent non titulaire en activité a droit, compte tenu de la durée de service effectué, à un congé annuel dont la durée et les conditions d'attribution sont identiques à celles du congé annuel des fonctionnaires titulaires prévu par le décret n° 84-972 du 26 octobre 1984 susvisé. (...) " ; qu'aux termes de l'article 12 du même décret : " L'agent non titulaire en activité bénéficie, sur présentation d'un certificat médical, pendant une période de douze mois consécutifs si son utilisation est continue ou au cours d'une période comprenant trois cents jours de services effectifs si son utilisation est discontinue, de congés de maladie dans les limites suivantes : (...)- deux mois à plein traitement - deux mois à demi-traitement (...) " ; qu'aux termes de l'article 17 de ce décret : " 2° L'agent non titulaire temporairement inapte pour raison de santé à reprendre son service à l'issue d'un congé de maladie (...) est placé en congé sans traitement pour une durée maximum d'une année (...) " ; qu'aux termes de l'article 28 de ce même décret : " I. - Les congés prévus aux articles 10, 11, 12, 13, 14, 15, 19 ter, 20 bis, 21 et 26 sont pris en compte pour la détermination de la durée de services requise pour l'ouverture des droits à congés prévus aux titres III, IV et V et au travail à temps partiel. / Les congés non énumérés à l'alinéa ci-dessus ne font pas perdre l'ancienneté acquise avant leur octroi(...)" ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit : 1° A un congé annuel avec traitement (...) " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 26 octobre 1984 : " Tout fonctionnaire de l'Etat en activité a droit, dans les conditions et sous les réserves précisées aux articles ci-après, pour une année de service accompli du 1er janvier au 31 décembre, à un congé annuel d'une durée égale à cinq fois ses obligations hebdomadaires de service. Cette durée est appréciée en nombre de jours effectivement ouvrés. (...) Les congés prévus à l'article 34 et à l'article 53, 3è alinéa, de la loi du 11 janvier 1984 susvisée sont considérés, pour l'application de ces dispositions, comme service accompli " ; que, par suite, un agent ayant une obligation hebdomadaire de cinq jours a droit à un congé annuel de vingt-cinq jours ;

7. Considérant que, dans sa note du 28 août 2014, la direction des ressources humaines du ministère de la défense a indiqué que M. C...bénéficiait d'un droit à congé annuel au titre de l'année 2013 de deux jours et, au titre de l'année 2014, de neuf jours, et que son absence pendant la période du 4 au 8 août devait être régularisée en décomptant cinq jours de ses congés annuels ;

8. Considérant, en premier lieu, que les dispositions citées ci-dessus de l'article 28 du décret du 17 janvier 1986 énumèrent limitativement les congés pris en compte pour la détermination de la durée de services requise pour l'ouverture des droits à congés annuels prévus au titre III de ce décret ; que le congé sans traitement pour inaptitude temporaire prévu à l'article 17 du même décret n'est pas au nombre de ces congés ; que, compte tenu du congé sans traitement pour inaptitude temporaire qui lui a été accordé du 13 novembre 2013 au 1er août 2014, M. C...ne peut prétendre au bénéfice de vingt-cinq jours de congés annuels au titre de l'année 2014 ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de la note du 28 août 2014 et de la " fiche navette " produite par le ministre devant le tribunal administratif que M. C...a, contrairement à ce qu'il soutient, bénéficié du report du reliquat de son congé annuel de l'année 2013, soit deux jours, sur l'année 2014 ;

10. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte du récépissé de remise en main propre, produit en appel, que l'arrêté du 1er août 2014 décidant la réintégration anticipée de M.C..., ne lui a été notifié que le 8 août suivant ; qu'ainsi, M. C...qui s'est présenté sur son lieu de travail le lundi 11 août, est fondé à soutenir que les services du ministère de la défense ne pouvaient légalement retrancher cinq jours de ses congés annuels pour régulariser son absence du 4 au 8 août, et que l'erreur ainsi commise sur ses congés annuels dans la note du 28 août 2014 l'a contraint, pour s'absenter du 1er au 30 septembre 2014, à solliciter, le 29 août 2014, son placement en congé sans rémunération pour convenances personnelles, non pendant onze jours, mais pendant seize jours ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...est fondé à demander à être indemnisé du préjudice correspondant aux cinq jours de congé sans rémunération supplémentaires qu'il a été contraint de solliciter, évalués par référence à ses bulletins de salaires, à 141 euros par jour, soit à hauteur de 705 euros au total ;

12. Considérant en revanche que M. C...n'établit avoir ainsi qu'il le soutient, subi un quelconque préjudice moral du fait de l'erreur commise dans la détermination de ses congés ; que ses conclusions tendant à l'indemnisation de ce préjudice doivent donc être rejetées ;

13. Considérant enfin que M. C...a droit aux intérêts au taux légal correspondant à l'indemnité de 705 euros à compter de la date de réception de sa demande préalable en date du 23 octobre 2014 ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la totalité de sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1501213, 1504721/5-1 du 6 octobre 2016 du Tribunal administratif de Paris est annulé en ce qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires à hauteur de 705 euros.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. C... la somme de 705 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande préalable en date du 23 octobre 2014.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mai 2018.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLET

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAULe greffier,

P. TISSERANDLa République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA03576


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03576
Date de la décision : 15/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-02 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Exécution du contrat.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : GetB GARRIGUES BEAULAC ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-05-15;16pa03576 ?
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