Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 20 octobre 2016, 30 octobre 2017 et 8 février 2018, la SCI MG Patrimoine, la SARL Bellou Optique et la SARL aux Fleurs d'Argentan, représentées par MeE..., demandent à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 23 août 2016 refusant à la Sci MG Patrimoine le permis de construire modificatif n° 61 117 14 A0016 M03 ;
2°) d'enjoindre au président de la communauté urbaine d'Alençon de statuer à nouveau sur cette demande de permis de construire modificatif dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de la communauté urbaine d'Alençon le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la décision contestée est relative à un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale relevant de la compétence de la cour en premier et dernier ressort ;
- le champ d'application du recours administratif préalable obligatoire est circonscrit aux seuls projets soumis à autorisation d'exploitation commerciale, or la demande de permis de construire modificatif ne nécessitait aucune autorisation commerciale ;
- la société Bellou Optique et la Sarl aux Fleurs d'Antan, qui en leur qualité de preneurs de deux cellules commerciales du projet attendent pour occuper les locaux et y développer leurs commerces ont intérêt à agir ;
- la décision contestée a été signée par une autorité incompétente dans la mesure où dans les communes dotées d'un plan d'occupation des sols ou d'un plan local d'urbanisme la délivrance des permis de construire incombe au maire et que ni les dispositions du code général des collectivités territoriales, ni les statuts de la Communauté urbaine d'Alençon, ne confèrent au président de la communauté urbaine le pouvoir de signer une telle décision ;
- si une commune peut déléguer l'instruction et la délivrance des autorisations d'urbanisme à un établissement public de coopération intercommunale, cette délégation devient caduque si elle n'a pas été confirmée dans le délai de six mois suivant le renouvellement du conseil municipal ainsi que le prévoient les articles L. 422-3 et R. 422-4 du code de commerce ;
- il n'est pas établi que M. B...était titulaire d'une délégation de signature exécutoire ;
- l'avis émis le 29 février 2016 par le conseil départemental ne leur a pas été communiqué et a privé la société pétitionnaire de la possibilité de faire évoluer son projet ;
- l'évolution du projet, qui ne constituait pas une modification substantielle au sens de la jurisprudence et des nouvelles dispositions de l'article L. 752-15 du code de commerce, et qui n'impliquait aucune modification du secteur d'activité concerné, ne justifiait pas une nouvelle consultation de la commission départementale d'aménagement commercial ;
- l'absence d'accord de la commission départementale d'aménagement commercial ne peut fonder un refus de permis de construire lorsque sa consultation n'est pas obligatoire ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit dès lors que l'autorité administrative ne peut opposer que des règles d'urbanisme présentant un lien avec les modifications envisagées et que le permis de construire modificatif n'apporte aucune modification quant aux accès à la voie publique et à la fréquentation automobile ;
- les accès prévus pour la réalisation de ce projet, qui avaient été jugés suffisants dans le cadre du permis de construire initial et qui avaient été conçus pour répondre aux exigences du département gestionnaire de la voirie, ne sont pas de nature à générer un danger pour la sécurité publique ; l'autorité administrative ne peut refuser un permis de construire lorsque des prescriptions spéciales peuvent prévenir ce risque.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 7 mars 2017 et 12 janvier 2018, la communauté urbaine d'Alençon, représentée par Me A...conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SCI MG Patrimoine, de la SARL Bellou Optique et de la SARL aux Fleurs d'Argentan au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable dès lors que les sociétés requérantes n'apportent pas la preuve de la saisine de la commission nationale d'aménagement commercial ;
- les moyens soulevés par la Sci MG Patrimoine et autres ne sont pas fondés.
Un moyen d'ordre public tiré de l'incompétence de la cour pour statuer en 1er et dernier ressort sur un refus de permis de construire ne valant pas autorisation d'exploitation commerciale a été adressé aux parties le 6 février 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gélard,
- les conclusions de M. Derlange, rapporteur public,
- et les observations de MeC..., substituant MeE..., représentant la SCI MG Patrimoine et autres, et de MeD..., substituant MeA..., représentant la communauté urbaine d'Alençon.
Une note en délibéré présentée pour la SCI MG Patrimoine, la SARL Bellou Optique et la SARL aux Fleurs d'Argentan a été enregistrée le 15 février 2018.
1. Considérant que la Sarl Prest'im et la Sci MG Patrimoine sont propriétaires des parcelles cadastrées section AH n° 181 à 192, situées 69 rue d'Alençon à Condé-sur-Sarthe, sur lesquelles est implanté un ensemble commercial représentant une surface de vente de 1 057 m² ; que le 17 juin 2015, le président de la communauté urbaine d'Alençon a délivré à la sarl Prest'im le permis de construire sollicité pour l'édification d'un bâtiment à usage commercial de 1 653 m² comprenant quatre cellules commerciales d'une surface de vente de 788,26 m² sur la parcelle voisine cadastrée section AH n°77, dont elle venait de faire l'acquisition ; que par un arrêté du 13 novembre 2015 du président de la communauté urbaine, ce permis de construire a été transféré à la Sci MG Patrimoine ; que la commission départementale d'aménagement commercial ne s'est pas opposée à ce projet ; que le 4 novembre 2015, un permis de construire modificatif a été délivré à cette société pour l'installation d'un transformateur électrique ; que suite au dépôt en mairie de la déclaration d'achèvement des travaux correspondant au permis de construire délivré le 17 juin 2015, le vice-président de la communauté urbaine d'Alençon a contesté la conformité des travaux ; que le 1er février 2016, la Sci MG Patrimoine a déposé une nouvelle demande de permis de construire modificatif ; qu'elle a également présenté un nouveau dossier devant la commission départementale d'aménagement commercial ; que le 20 mai 2016, cette commission s'est prononcée défavorablement sur le projet en raison notamment des problèmes constatés en matière de sécurité routière " qui seront accentués par le présent projet " qui " n'apporte pas de solution concrète à ces dysfonctionnements " ; que par un arrêté du 23 août 2016, le vice-président de la communauté urbaine d'Alençon a refusé le permis de construire modificatif sollicité ; que la Sci MG Patrimoine, ainsi que la Sarl Bellou Optique et la Sarl Aux Fleurs d'Argentan, deux sociétés avec lesquelles elle a conclu un bail pour l'exploitation de deux des cellules commerciales du projet, demandent à la cour d'annuler cette décision ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la communauté urbaine d'Alençon :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-10 du code de l'urbanisme : " Les cours administratives d'appel sont compétentes pour connaître en premier et dernier ressort des litiges relatifs au permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale prévue à l'article L. 425-4 " ; qu'aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial. Une modification du projet qui revêt un caractère substantiel, au sens de l'article L. 752-15 du même code, mais n'a pas d'effet sur la conformité des travaux projetés par rapport aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6 du présent code nécessite une nouvelle demande d'autorisation d'exploitation commerciale auprès de la commission départementale. / A peine d'irrecevabilité, la saisine de la commission nationale par les personnes mentionnées à l'article L. 752-17 du même code est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire. " ; qu' aux termes de l'article L. 752-15 du code de commerce : " (...) Une nouvelle demande est nécessaire lorsque le projet, en cours d'instruction ou dans sa réalisation, subit des modifications substantielles, du fait du pétitionnaire, au regard de l'un des critères énoncés à l'article L. 752-6, ou dans la nature des surfaces de vente. " ; qu' aux termes de l'article R. 752-2 de ce code : " Au sens de l'article L. 752-1, constituent des secteurs d'activité : 1° le commerce de détail à prédominance alimentaire ; 2° les autres commerces de détail et les activités de prestation de services à caractère artisanal. " ;
3. Considérant que si le 20 mai 2016, la commission départementale d'aménagement commercial s'est prononcée défavorablement sur le projet en litige, il est constant que, préalablement à la saisine de la cour, les sociétés requérantes n'ont pas saisi la commission nationale d'aménagement commercial contrairement à ce que prévoit l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme ; que par suite, et sans qu'il soit besoin de vérifier si le projet contesté présentait une modification substantielle du projet initial au sens de l'article L. 752-15 du code de commerce, la communauté urbaine d'Alençon est fondée à soutenir que leur requête est irrecevable ;
Sur les frais liés au litige :
4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté urbaine d'Alençon, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la Sci MG Patrimoine, de la Sarl Bellou Optique et de la Sarl aux fleurs d'Argentan de la somme qu'elles demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge solidaire de la Sci MG Patrimoine, de la Sarl Bellou Optique et de la Sarl aux fleurs d'Argentan le versement à la communauté urbaine d'Alençon d'une somme globale de 1 500 euros au titre des mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCI MG Patrimoine, de la SARL Bellou Optique et de la SARL aux Fleurs d'Argentan est rejetée.
Article 2 : La SCI MG Patrimoine, la SARL Bellou Optique et la SARL aux Fleurs d'Argentan verseront à la communauté urbaine d'Alençon une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI MG Patrimoine, à la société Bellou Optique, à la société aux Fleurs d'Argentan et à la communauté urbaine d'Alençon.
Délibéré après l'audience du 13 février 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Degommier, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 mars 2018.
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
A. PEREZ Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT03471