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21/06/2017 | FRANCE | N°16NT02012

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 21 juin 2017, 16NT02012


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté d'agglomération de Laval a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner solidairement la société SPIE-Trindel, Mme F...G..., la société ACORE, la société Euro concept aménagement, la société Renaudat centre construction, la société Cruard couverture, la société Bâtiment mayennais, la société Générali IARD, la Mutuelle des architectes français, la société MMA IARD, la société AXA France IARD et la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics

lui verser, en premier lieu, la somme de 405 156,22 euros assortie des intérêts au taux lé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La communauté d'agglomération de Laval a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner solidairement la société SPIE-Trindel, Mme F...G..., la société ACORE, la société Euro concept aménagement, la société Renaudat centre construction, la société Cruard couverture, la société Bâtiment mayennais, la société Générali IARD, la Mutuelle des architectes français, la société MMA IARD, la société AXA France IARD et la société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics à lui verser, en premier lieu, la somme de 405 156,22 euros assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en réparation des préjudices subis du fait des désordres affectant les tribunes du stade Francis Le Basser à Laval, en deuxième lieu, la somme de 4 400 euros assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts, en troisième lieu, la somme de 17 940,96 euros au titre des frais d'expertise, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2014 et de la capitalisation des intérêts, et, en quatrième lieu, la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1400949 du 20 avril 2016, le tribunal administratif de Nantes a :

1°) condamné solidairement la société SPIE centre ouest, la société ACORE et Mme G... à verser à la communauté d'agglomération de Laval la somme de 322 106,94 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 février 2014 et de la capitalisation des intérêts à compter du 4 février 2015 et à chaque échéance annuelle ;

2°) condamné solidairement la société SPIE centre ouest, la société ACORE et Mme G... à verser à la communauté d'agglomération de Laval la somme de 17 940,96 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2014 et de la capitalisation des intérêts à compter du 14 janvier 2015 et à chaque échéance annuelle ;

3°) mis à la charge de la société SPIE centre ouest, la société ACORE et Mme G... le versement de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) mis à la charge de la communauté d'agglomération de Laval le versement à la société Renaudat centre construction, à la société Cruard couverture, à la SMABTP, à la société MMA IARD, à la société Bâtiment mayennais, à la société AXA France et à la société Générali IARD de la somme de 1 000 euros chacune au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) condamné la société ACORE à garantir la société SPIE centre ouest à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre ;

6°) condamné Mme G...à garantir la société SPIE centre ouest à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre ;

7°) rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juin 2016, la société ACORE et Mme F...G..., représentées par MeA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler les articles 5, 6 et 7 de ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 avril 2016 ;

2°) à titre principal, de faire droit à leurs appels en garantie formés à l'encontre de la société SPIE centre ouest ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner chacun des débiteurs solidaires à garantir chacun des autres codébiteurs à hauteur d'un tiers des condamnations prononcées, tant en principal, qu'en intérêts, frais et dépens au profit de la communauté d'agglomération de Laval.

Elles soutiennent que :

- l'expert a relevé que le dommage qui provient du défaut de prise en compte de la nécessaire évacuation des eaux de ruissellement dans les tribunes est exclusivement imputable à la société ECA, seules conceptrice et réalisatrice des gradins métalliques démontables ; cette société ayant disparu, elle ne peut plus assumer les conséquences du désordre ;

- la société SPIE centre ouest a manqué à son obligation contractuelle de mandataire du groupement d'entreprises solidaires puisqu'elle a méconnu les dispositions de l'article 9.8.2 du cahier des clauses administratives particulières du marché en ne s'assurant pas que cette société était assurée en cas de mise en cause de sa responsabilité décennale ; du fait de sa négligence, il ne peuvent exercer de recours auprès de l'assureur décennal de cette société ;

- à titre subsidiaire, la contribution à la dette doit se faire par parts viriles en application des dispositions de l'article 1213 du code civil ; la conception des tribunes ne relevait pas de leur responsabilité mais de celle de la société ECA en application des dispositions de l'annexe 3 de la convention de groupement du 2 mai 2001.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 août 2016, la société SPIE centre ouest, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et demande en outre qu'une somme de 5 000 euros soit mise respectivement à la charge de la société ACORE et de Mme G...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 décembre 2016, la communauté d'agglomération de Laval, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande en outre qu'une somme de 3 000 euros soit mise solidairement à la charge de la société ACORE et de Mme G...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par les requérantes ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau,

- les conclusions de M. Bréchot, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., représentant la communauté d'agglomération de Laval, et de MeB..., représentant la société SPIE centre ouest.

1. Considérant que, dans le cadre de la requalification des équipements du stade Francis Le Basser situé à Laval, la communauté d'agglomération de Laval a conclu, par un acte d'engagement du 15 mai 2001, un marché de conception-réalisation portant sur la construction d'une tribune nord de 4 912 places, le déplacement du terrain de football et divers aménagements extérieurs avec un groupement solidaire d'entreprises, composé de la société SPIE-Trindel, devenue la société SPIE centre ouest, mandataire, de Mme F...G..., architecte, de la société ACORE Ingénierie, devenue ACORE, bureau d'études pluridisciplinaires, de la société Express Gazon, chargée de la réalisation des gazons, et de la société Euro Concept Aménagement, chargée de la réalisation des tribunes tubulaires ; que la réception des travaux est intervenue le 24 septembre 2001 et des désordres sont apparus durant l'année 2009 ; que la communauté d'agglomération de Laval, alertée de ce que des zones corrodées et des fissures sur les structures tubulaires supportant les gradins étaient susceptibles de compromettre la solidité de l'ouvrage, a fait réaliser au mois de mai 2010 des travaux de renforcement ; que, les désordres n'ayant pas cessé, la communauté d'agglomération a formé un référé-expertise devant le tribunal administratif de Nantes le 26 juillet 2011 ; que l'expert judiciaire, désigné par une ordonnance du 1er septembre 2011, a rendu son rapport le 31 juillet 2013 ; qu'au vu de ce rapport, la communauté d'agglomération de Laval a demandé au tribunal administratif de Nantes la condamnation solidaire de la société SPIE centre ouest, de MmeG..., de la société ACORE, de la société Euro concept aménagement et de leurs sous-traitants et assureurs, au titre de la garantie décennale des constructeurs, à lui verser la somme de 405 156,22 euros en réparation des préjudices subis du fait des désordres affectant la tribune nord du stade Francis Le Basser ; que, par un jugement du 20 avril 2016, le tribunal administratif de Nantes a, dans son article 1er, condamné solidairement la société SPIE centre ouest, la société ACORE et Mme G... à verser à la communauté d'agglomération de Laval la somme de 322 106,94 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 février 2014, et de la capitalisation des intérêts à compter du 4 février 2015 et à chaque échéance annuelle, dans son article 2, condamné solidairement la société SPIE centre ouest, la société ACORE et Mme G... à verser à la communauté d'agglomération de Laval la somme de 17 940,96 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 2014 et de la capitalisation des intérêts à compter du 14 janvier 2015 et à chaque échéance annuelle, dans son article 3, mis à la charge de la société SPIE centre ouest, la société ACORE et Mme G... le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dans son article 4, mis à la charge de la communauté d'agglomération de Laval le versement à la société Renaudat centre construction, à la société Cruard couverture, à la SMABTP, à la société MMA IARD, à la société Bâtiment mayennais, à la société AXA France et à la société Générali IARD de la somme de 1 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dans son article 5, condamné la société ACORE à garantir la société SPIE centre ouest à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre, dans son article 6, condamné Mme G...à garantir la société SPIE centre ouest à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre, et dans son article 7, rejeté le surplus des conclusions des parties ; que la société ACORE et Mme G...relèvent appel des articles 5, 6 et 7 de ce jugement ;

Sur les appels en garantie :

2. Considérant que, lorsque le juge administratif est saisi d'un litige né de l'exécution d'un marché de travaux publics opposant le maître d'ouvrage à des constructeurs qui ont constitué un groupement pour exécuter le marché, il est compétent pour connaître des actions en garantie engagées par les constructeurs les uns envers les autres si le marché indique la répartition des prestations entre les membres du groupement ; que si tel n'est pas le cas, le juge administratif est également compétent pour connaître des actions en garantie entre les constructeurs, quand bien même la répartition des prestations résulterait d'un contrat de droit privé conclu entre eux, hormis le cas où la validité ou l'interprétation de ce contrat soulèverait une difficulté sérieuse ;

3. Considérant qu'il résulte des énonciations non contestées du jugement du 20 avril 2016 que les désordres affectant la tribune nord du stade Francis Le Basser, laquelle a été conçue pour être adaptée à la configuration particulière des lieux, résident dans l'apparition de zones corrodées et de fissures sur les structures tubulaires supportant les gradins, ces dégradations étant dues à la pénétration d'eau de ruissellement dans les tubes des treillis par les gradins ; que le rapport d'expertise a mis en évidence que ces désordres évolutifs et généralisés étaient de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination et à compromettre sa solidité ; que le rapport d'expertise souligne que les désordres en litige ont pour origine un défaut de conception, entraînant l'arrivée d'eau de pluie à l'intérieur des tubes par infiltration au droit des axes supportant les montants tubulaires des gradins ; que, d'une part, le défaut de prise en compte de la nécessaire évacuation des eaux de ruissellement dans les tribunes, qui relevait de la mission de conception de la tribune, tant au stade des études architecturales générales, relevant de MmeG..., qu'en phase de conception de la tribune à proprement parler, imputable à la société ACORE, dans le cadre des missions qui leur avaient été confiées, est de nature à engager leur responsabilité décennale ; que, d'autre part, la mise en oeuvre de structures tubulaires métalliques dépourvues de système d'évacuation des eaux de ruissellement, imputable à la société Euro concept aménagement dans le cadre des missions qui lui avaient été confiées, est de nature à engager également sa responsabilité décennale ; que la société Euro Concept Aménagement n'ayant toutefois plus d'existence à la date du jugement, sa responsabilité ne pouvait plus être recherchée solidairement avec celle de la société SPIE centre ouest, de Mme G...et de la société ACORE ;

4. Considérant qu'il résulte de la convention de groupement signée le 2 mai 2001 et annexée à l'acte d'engagement, notamment de son annexe 3 qui prévoit la répartition technique des missions entre les membres du groupement, que, dans le cadre des travaux litigieux, la société SPIE-Trindel était chargée de l'éclairage et de l'alimentation électrique de la tribune, la société ACORE assumait les missions d'études générales, de coordination et de suivi du chantier, les "études architecturales" relevant quant à elles de la responsabilité de Mme G...et les études, les fournitures, l'installation et la mise en service de la tribune incombant à la société Euro concept aménagement ; que, dans ces conditions et conformément à ce qui a été rappelé au point 3, les désordres affectant la tribune sont imputables, dans le cadre de leurs missions respectives, à la société ACORE et à MmeG..., qui engagent leur responsabilité décennale à ce titre ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'à supposer que la société SPIE-Trindel, en tant que mandataire du groupement, ait méconnu les obligations résultant pour elle des stipulations du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché litigieux, en ce qui concerne l'obligation de vérifier que chaque entreprise était assurée au titre de la garantie décennale, cette circonstance est sans lien direct avec la survenance des désordres constatés ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société SPIE-Trindel a, au regard du partage de travaux établi par la convention de groupement du 2 mai 2001 et non contesté par les parties, contribué à leur apparition ; que, dans ces conditions, il n'y a pas lieu de condamner la société SPIE centre ouest à garantir la société ACORE et Mme G...de l'ensemble des condamnations mises à leurs charges ;

6. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutiennent les requérantes, l'article 1213 du code civil ne fait pas obstacle à ce que le juge répartisse sur des bases inégales, dans les rapports entre eux des coauteurs d'un même dommage, la dette dont ils sont tenus solidairement s'il apparaît que la responsabilité de chacun d'entre eux ne présente pas le même degré de gravité ; qu'en l'absence de faute de la société SPIE-Trindel et compte tenu de ce qui a été énoncé au point précédent, les condamnations à garantir prononcées par le tribunal à l'encontre de la société ACORE et de Mme G...ne peuvent dès lors être regardées comme sérieusement contestées ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société ACORE et Mme G...ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par les articles 5, 6 et 7 du jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes les a condamnées à garantir à hauteur de 50 % la société SPIE centre ouest des condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci et a rejeté leurs demandes tendant à être garanties par cette société ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux demandes présentées par la communauté d'agglomération de Laval et par la société SPIE centre ouest sur ce fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société ACORE et de Mme G...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération de Laval et par la société SPIE centre ouest au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société ACORE, à Mme F...G..., à la communauté d'agglomération de Laval et à la société SPIE centre ouest.

Délibéré après l'audience du 6 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 juin 2017.

Le rapporteur,

M-P. Allio-RousseauLe président,

L. Lainé

Le greffier,

V. Desbouillons

La République mande et ordonne au préfet de la Mayenne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT02012


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT02012
Date de la décision : 21/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : SCP DELAGE BEDON ROUXEL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-06-21;16nt02012 ?
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