Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes de désigner un expert afin de déterminer les préjudices ayant résulté pour elle de l'implantation, le 21 mai 2005, puis des suites opératoires et enfin du remplacement le 25 avril 2012 d'une prothèse mammaire dont la société Poly Implant Prothèse était le fournisseur.
Par une ordonnance n° 1600136 du 4 avril 2016, le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 15 avril, 17 mai, 24 mai et 8 juin 2016, Mme D...B..., représentée par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du président du tribunal administratif de Nantes du 4 avril 2016 ;
2°) d'ordonner l'expertise demandée.
Elle soutient que :
- l'agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), venant au droit de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), a commis dans l'exercice de sa mission de police sanitaire des manquements fautifs susceptibles d'engager la responsabilité de l'Etat en application de l'art. L.5322-2 du code de la santé publique ;
- à la date à laquelle elle s'est fait poser l'implant en cause, soit le 21 mai 2005, l'ANSM disposait de suffisamment d'éléments mettant en évidence un risque sérieux pour la santé publique ; dès 2001, cette agence était suffisamment alertée des dangers liés aux prothèses PIP et il lui incombait alors de contrôler les prothèses en question au titre des missions que la loi lui a confiées ; en s'abstenant de le faire, l'ANSM a clairement manqué à son obligation de surveillance du marché ;
- les préjudices qu'elle a subis doivent être déterminés par une expertise contradictoire.
Par un mémoire enregistré le 8 juin 2016, l'agence nationale de sécurité du médicament, représentée par Me Schmelck, conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que les moyens présentés par Mme B...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coiffet,
- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., substituant Me Schmelck, avocat de l'agence nationale de sécurité du médicament.
Une note en délibéré a été produite le 17 juin 2016 pour MmeB....
1. Considérant que Mme B... a, le 21 mai 2005, subi à la clinique Bizet à Paris une intervention de chirurgie reconstructrice à la suite d'un cancer du sein avec mastectomie ; qu'une prothèse mammaire de la marque Poly Implant Prothèse (PIP) lui a alors été implantée ; qu'à la suite des procédures judiciaires engagées contre les responsables de la société fournissant ces prothèses en raison du défaut de résistance de leurs enveloppes, Mme B...a subi une intervention à visée thérapeutique d'explantation de sa prothèse le 25 avril 2012 ; qu'estimant la responsabilité de l'Etat susceptible d'être engagée sur le fondement de l'article L. 5322-2 du code de la santé publique, à raison de la carence fautive de l'agence nationale de sécurité du médicament, venant au droit de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, dans sa mission de surveillance de la qualité des prothèses utilisées, elle a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nantes de désigner un expert à l'effet de déterminer les préjudices ayant résulté pour elle de l'implantation le 21 mai 2005 puis des suites opératoires et enfin du remplacement le 25 avril 2012 de la prothèse mammaire dont la société Poly Implant Prothèse était le fournisseur ; qu'elle relève appel de l'ordonnance du 4 avril 2016 par laquelle le président de cette juridiction a rejeté sa demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 532-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise (...) " ; que l'octroi d'une telle mesure est subordonné à son utilité pour le règlement d'un litige principal, appréciée en tenant compte, notamment, de l'intérêt de la mesure pour le contentieux né ou à venir ;
3. Considérant que l'explantation en 2012, par mesure de précaution, de la prothèse mammaire qui avait été implantée en 2005 dans les circonstances rappelées au point 1 a contraint Mme B...à subir une nouvelle intervention chirurgicale et entraîné pour elle plusieurs arrêts de travail ; que cette intervention, ainsi que les soins et congés de maladie qui y sont liés, ont été pris en charge par les organismes sociaux ; qu'à la suite de la procédure pénale engagée contre les deux responsables de la société Poly Implant Prothèse, ces derniers ont été déclarés coupables et condamnés solidairement à verser à Mme B...la somme de 6 000 euros en réparation de son préjudice moral et d'anxiété par un jugement du tribunal correctionnel de Marseille du 10 décembre 2013; que ce jugement a été confirmé en ce qui concerne la requérante par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 2 mai 2016 ;
4. Considérant que si Mme B...soutient devant la cour avoir subi d'autres préjudices, qu'elle impute à une carence fautive de l'agence nationale de sécurité du médicament dans sa mission de surveillance du fabricant de prothèse et dont elle est en droit de demander l'évaluation en vue de leur réparation par l'Etat, aucun élément du dossier ne permet, en l'état, d'établir de manière suffisante la réalité du lien de causalité qu'elle invoque entre les préjudices dont elle sollicite l'évaluation et une carence fautive de cet organisme durant la période au cours de laquelle la prothèse litigieuse a été implantée ; que par suite, et dès lors que la mesure d'expertise sollicitée ne porte que sur l'évaluation des préjudices allégués, une telle mesure ne présente pas, en l'état, en l'absence de tout élément suffisamment précis pour permettre l'engagement de la responsabilité de l'Etat sur le fondement de l'article L. 5322-2 du code de la santé publique à raison de la carence alléguée de l'agence nationale de sécurité du médicament, le caractère d'utilité exigé par les dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, ainsi que l'a estimé à juste titre le juge des référés de première instance ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme D...B..., au ministre des affaires sociales et de la santé, à l'agence nationale de sécurité du médicament et à la MGEN de Loire Atlantique.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Lemoine, premier conseiller.
Lu en audience publique le 30 juin 2016.
Le rapporteur,
O. CoiffetLe président,
I. Perrot
Le greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT01255