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30/06/2017 | FRANCE | N°16NC00897

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 30 juin 2017, 16NC00897


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Borflex-Cafac-Bajolet a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision implicite du 20 avril 2014 par laquelle le préfet de la Meuse a rejeté sa demande tendant à la délivrance des récépissés pour l'exploitation, sous le régime de la déclaration, des installations classées implantées sur le site de Verdun et de lui délivrer les récépissés de déclaration sollicités.

Par un jugement no 1401586 du 8 mars 2016, le tribunal administratif de Nancy a annulé la déc

ision attaquée et délivré le récépissé sollicité.

La société Borflex-Cafac-Bajolet a égale...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Borflex-Cafac-Bajolet a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision implicite du 20 avril 2014 par laquelle le préfet de la Meuse a rejeté sa demande tendant à la délivrance des récépissés pour l'exploitation, sous le régime de la déclaration, des installations classées implantées sur le site de Verdun et de lui délivrer les récépissés de déclaration sollicités.

Par un jugement no 1401586 du 8 mars 2016, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision attaquée et délivré le récépissé sollicité.

La société Borflex-Cafac-Bajolet a également demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté complémentaire n° 2015-544 du 20 mars 2015 par lequel le préfet de la Meuse a prononcé le reclassement sous le régime de la déclaration de l'unité de fabrication de pièces en caoutchouc qu'elle exploite sur le territoire de la commune de Verdun.

Par un jugement no 1501662 du 8 mars 2016, le tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté attaqué.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 mai 2016, le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie demande à la cour d'annuler les deux jugements susvisés.

Le ministre soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- le silence gardé par l'administration sur la demande de récépissé de déclaration n'a pas fait naître une décision implicite de rejet ;

- la société ne pouvait pas obtenir un récépissé de déclaration sur le fondement de l'article R. 512-47 du code de l'environnement dès lors que ces dispositions ne s'appliquent pas à des installations déjà en service ;

- le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en recourant, pour prendre acte du déclassement des activités exploitées par l'intéressée et abroger partiellement l'arrêté initial d'autorisation, à la procédure de l'arrêté complémentaire ;

- le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en recourant à la procédure de l'arrêté complémentaire dès lors que les modifications apportées à son activité par la société ne sont pas mineures et justifiaient l'édiction d'un tel arrêté.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2016, la société Borflex-Cafac-Bajolet, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Borflex-Cafac-Bajolet soutient que la requête est irrecevable car tardive et que, subsidiairement, aucun des moyens soulevés par le ministre n'est fondé.

L'instruction a été close le 2 novembre 2016.

Le ministre de la transition écologique et solidaire a déposé un mémoire le 2 juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rees, premier conseiller,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour la société Borflex-Cafac-Bajolet.

Considérant ce qui suit :

1. La société Borflex-Cafac-Bajolet a été autorisée, par un arrêté du préfet de la Meuse du 14 septembre 2001, à exploiter une usine de fabrication de pièces en caoutchouc sur le territoire de la commune de Verdun. Après avoir réduit le volume de bains de sel, qui constituait la seule des activités relevant effectivement du régime de l'autorisation, à 450 litres, elle a, le 19 février 2014, déposé un dossier afin de se voir délivrer des récépissés de déclaration pour l'exploitation de l'ensemble de ses installations. Le préfet de la Meuse ayant gardé le silence sur sa demande, la société Borflex-Cafac-Bajolet a saisi le tribunal administratif de Nancy d'une première demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née de ce silence et à la délivrance des récépissés sollicités.

2. Le préfet de la Meuse a ensuite, par un arrêté complémentaire du 20 mars 2015, pris acte du changement de classement des activités de la société Borflex-Cafac-Bajolet, a abrogé, en conséquence, les articles 1er, 2 et 3 de l'arrêté d'autorisation du 14 septembre 2001 et a fixé les prescriptions applicables aux activités de la société. Celle-ci a saisi le tribunal administratif de Nancy d'une seconde demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

3. Le ministre relève appel des jugements du 8 mars 2016 par lesquels le tribunal administratif de Nancy a annulé les décisions attaquées et prononcé la délivrance des récépissés sollicités.

Sur la recevabilité de l'appel :

4. Il est constant que les jugements attaqués ont été régulièrement notifiés au ministre le 14 mars 2016. Le délai d'appel de deux mois fixé par l'article R. 811-2 du code de justice administrative devait normalement expirer le 15 mai 2016, mais cette date correspond à un dimanche et le lendemain était le lundi de Pentecôte, jour férié. Le délai d'appel a donc été prorogé jusqu'à la fin du premier jour ouvrable suivant, soit le 17 mai 2016 à minuit.

5. La requête d'appel du ministre, enregistrée le 17 mai 2016 à 17 heures 43, n'est donc pas tardive.

Sur la régularité du jugement :

6. Le ministre soutient que " le jugement attaqué souffre d'une insuffisance de motivation ". Alors que la requête est dirigée contre deux jugements distincts, l'emploi du singulier par l'auteur de cette requête révèle que le ministre ne fait valoir l'insuffisance de motivation qu'à l'encontre de l'un de ces jugements. Or, le ministre ne précise pas le jugement contesté et le passage qu'il cite ne permet pas de l'identifier.

7. Le moyen n'est donc pas assorti de précisions permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

Sur le bien-fondé des jugements :

8. Le ministre, qui ne précise pas, pour chacun de ses moyens, s'il a entendu ne le soulever qu'à l'encontre de l'une des décisions attaquées, doit être regardé comme soulevant ces moyens contre les deux décisions.

9. Aux termes de l'article R. 512-47 du code de l'environnement : " I.-La déclaration relative à une installation doit être adressée, avant la mise en service de l'installation, au préfet du département dans lequel celle-ci doit être implantée (...) ".

10. Aux termes de l'article R. 512-33 du même code, alors applicable : " I. - Tout transfert d'une installation soumise à autorisation sur un autre emplacement nécessite une nouvelle autorisation. / II. - Toute modification apportée par l'exploitant à l'installation, à son mode d'utilisation ou à son voisinage entraînant un changement notable des éléments du dossier de demande d'autorisation doit être portée, avant sa réalisation, à la connaissance du préfet avec tous les éléments d'appréciation. / S'il estime, après avis de l'inspection des installations classées, que la modification est substantielle, le préfet invite l'exploitant à déposer une nouvelle demande d'autorisation. / Une modification est considérée comme substantielle, outre les cas où sont atteints des seuils quantitatifs et des critères fixés par arrêté du ministre chargé des installations classées, dès lors qu'elle est de nature à entraîner des dangers ou inconvénients significatifs pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. / S'il estime que la modification n'est pas substantielle, le préfet : /1° Invite l'exploitant à déposer une demande d'enregistrement pour cette modification lorsque celle-ci relève en elle-même de la section 2. La demande est alors instruite selon les dispositions de la sous-section 2 de cette section ; / 2° Fixe, s'il y a lieu, des prescriptions complémentaires dans les formes prévues à l'article R. 512-31. / III. - Les nouvelles autorisations prévues aux I et II sont soumises aux mêmes formalités que les demandes initiales ".

11. Aux termes de l'article R. 512-31 du même code : " Des arrêtés complémentaires peuvent être pris sur proposition de l'inspection des installations classées et après avis du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques. Ils peuvent fixer toutes les prescriptions additionnelles que la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 rend nécessaires ou atténuer celles des prescriptions primitives dont le maintien n'est plus justifié. L'exploitant peut se faire entendre et présenter ses observations dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article R. 512-25 et au premier alinéa de l'article R. 512-26. / Ces arrêtés prévus peuvent prescrire, en particulier, la fourniture des informations prévues aux articles R. 512-3 et R. 512-6 ou leur mise à jour ".

12. Enfin, aux termes de l'article R. 512-49 du code de l'environnement : " Le préfet donne récépissé de la déclaration et communique au déclarant une copie des prescriptions générales applicables à l'installation ".

13. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le ministre, le silence gardé par le préfet sur la demande de délivrance de récépissé de déclaration présentée le 19 février 2014 par la société Borflex-Cafac-Bajolet a fait naître une décision implicite de rejet.

14. En deuxième lieu, la circonstance que les installations de la société Borflex-Cafac-Bajolet étaient déjà en service ne faisait pas obstacle à ce qu'elle dépose un dossier de déclaration sur le fondement de l'article R. 512-47 du code de l'environnement précité, dès lors que ces installations fonctionnaient régulièrement sous le régime de l'autorisation.

15. En troisième lieu, si les dispositions des articles R. 512-31 et R. 512-33 du code de l'environnement portent sur les modifications affectant une installation autorisée, son emplacement, son mode d'utilisation ou son voisinage, la procédure qu'elles fixent concerne les modifications qui doivent ou peuvent être apportées à l'autorisation antérieurement délivrée ou la nécessité de délivrance d'une nouvelle autorisation. Ces dispositions ne sont donc pas applicables lorsque, du fait de modifications apportées à l'installation, celle-ci cesse de relever du régime de l'autorisation pour relever de celui de la déclaration.

16. Dès lors, le préfet a commis une erreur de droit en recourant, pour prendre acte du déclassement des activités exploitées par la société Borflex-Cafac-Bajolet et abroger partiellement l'arrêté initial d'autorisation, à la procédure de l'arrêté complémentaire, sans que le ministre puisse utilement faire valoir, à cet égard, les modifications, selon lui substantielles, apportées par l'intéressée à ses installations.

17. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de la transition écologique et solidaire n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision implicite de rejet du 20 avril 2014 et l'arrêté du préfet de la Meuse du 20 mars 2015 et délivré à la société Borflex-Cafac-Bajolet les récépissés de déclaration sollicités. Par conséquent, ses conclusions à fin d'annulation ne peuvent qu'être rejetées.

18. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante à la présente instance, une somme de 1 500 euros à verser à la société Borflex-Cafac-Bajolet au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par ces motifs,

D E C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de la transition écologique et solidaire est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à la société Borflex-Cafac-Bajolet une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société Borflex-Cafac-Bajolet est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et solidaire et à la société Borflex-Cafac-Bajolet.

Copie en sera adressée au préfet de la Meuse.

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N° 16NC00897


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00897
Date de la décision : 30/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-02-02-005-01 Nature et environnement. Installations classées pour la protection de l'environnement. Régime juridique. Actes affectant le régime juridique des installations. Classement.


Composition du Tribunal
Président : M. MESLAY
Rapporteur ?: M. Philippe REES
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : GREENLAW AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-06-30;16nc00897 ?
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