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12/06/2018 | FRANCE | N°16LY01021

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 12 juin 2018, 16LY01021


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler les décisions du 29 juillet 2013 par lesquelles la préfète de la Loire a refusé de faire droit à son opposition à l'inclusion, dans le territoire des associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse, de terrains dont il est propriétaire ou sur lesquels il détient des droits de chasse ;

2°) d'annuler les arrêtés n° 2013/207 et n° 2013/208 du 29 juillet 2013 par lesquels la préfète de la Loire

a fixé la liste des terrains devant être soumis à l'action de l'association communale de chas...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler les décisions du 29 juillet 2013 par lesquelles la préfète de la Loire a refusé de faire droit à son opposition à l'inclusion, dans le territoire des associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse, de terrains dont il est propriétaire ou sur lesquels il détient des droits de chasse ;

2°) d'annuler les arrêtés n° 2013/207 et n° 2013/208 du 29 juillet 2013 par lesquels la préfète de la Loire a fixé la liste des terrains devant être soumis à l'action de l'association communale de chasse agréée de Coutouvre et à l'action de l'association communale de chasse agréée de Jarnosse en tant qu'ils incluent les terrains pour lesquels il a formé opposition.

Par un jugement n°s 1306947-1306949 du 19 janvier 2016, le tribunal administratif de Lyon a annulé les arrêtés du 29 juillet 2013 en tant qu'ils incluent les parcelles pour lesquelles M. C... a formé opposition et les décisions du même jour rejetant son opposition.

Procédure devant la cour

Par un recours, enregistré le 22 mars 2016, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 19 janvier 2016 ;

2°) de rejeter la demande de M. C....

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas retenu la fin de non-recevoir opposée par la préfète de la Loire, tirée de ce que les arrêtés du 29 juillet 2013 constituent des mesures préparatoires insusceptibles de recours ;

- le courrier d'information daté du même jour accompagnant ces arrêtés ne constitue pas davantage une décision susceptible de recours.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 février 2017, M. B... C..., représenté par Me A..., de la société Ad Justitiam, avocats, conclut au rejet du recours et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les décisions et arrêtés du 29 juillet 2013 en litige constituent non des mesures préparatoires mais des décisions faisant grief ;

- il n'est pas justifié d'une délégation valablement consentie au profit de la signataire des arrêtés ;

- les décisions et arrêtés en litige sont entachés d'un vice de procédure, dès lors que les éléments qu'il a transmis au commissaire enquêteur, relatifs à son droit de chasse sur ses propriétés et son exploitation, n'ont pas été pris en compte ;

- les dispositions du code de l'environnement ont été détournées pour régler des conflits entre chasseurs et sociétés de chasse ;

- il justifie de la propriété et de la détention de droits de chasse sur des terrains d'un seul tenant et d'une superficie supérieure à 20 hectares.

Par un mémoire, enregistré le 15 mars 2017, les associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse, représentées par Me Lagier, avocat, concluent à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Lyon du 19 janvier 2016, au rejet de la demande de M. B... C... et à ce qu'une somme de 2 000 euros, à verser à chacune d'entre elles, soit mise à la charge de M. C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les actes et arrêtés du 29 juillet 2013 constituaient des décisions susceptibles de recours ;

- c'est à tort qu'ils ont annulé ces actes et arrêtés, dès lors que la demande d'opposition formulée par M. C... n'est pas recevable, au sens des dispositions du I de l'article L. 422-13 du code de l'environnement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me François, avocat, substituant Me Lagier pour les associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse ;

1. Considérant que, par les arrêtés en litige n° 2013/207 et n° 2013/208 du 29 juillet 2013, la préfète de la Loire a fixé la liste des terrains devant être soumis, respectivement, à l'action de l'action de l'association communale de chasse agréée de Coutouvre et à l'action de l'association communale de chasse agréée de Jarnosse ; que, par arrêtés n° 2013/338 et n° 2013/923 du 15 novembre 2013, la préfète de la Loire a établi la liste des terrains soumis à l'action de chacune de ces associations ; que la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer relève appel du jugement du 19 janvier 2016 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé, d'une part, les courriers de la préfète de la Loire du 29 juillet 2013 informant M. C... du rejet de ses oppositions à l'apport des territoires sur lesquels il détient un droit de chasse aux associations communales de chasse agréées dont la création était envisagée et, d'autre part, les arrêtés du même jour fixant la liste des terrains devant être soumis à l'action des associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse ;

Sur l'intervention des associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse :

2. Considérant que les associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse ont intérêt à l'annulation du jugement attaqué ; qu'ainsi, leur intervention à l'appui du recours de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer est recevable ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance de M. B... C... :

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 422-32 du code de l'environnement : " Le préfet arrête la liste des terrains devant être soumis à l'action de l'association communale. / Il avise, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, les propriétaires et détenteurs du droit de chasse dont l'opposition n'est pas acceptée. / Il arrête également la liste des enclaves mentionnée à l'article R. 422-27 et la transmet au président de la fédération départementale des chasseurs. " ; que, selon l'article R. 422-34 du même code, l'assemblée générale de l'association communale de chasse agréée établit la liste des terrains soumis à l'action de l'association ; qu'aux termes de l'article R. 422-35 de ce code : " L'affichage, dans les huit jours suivant celui de l'assemblée générale, de la liste mentionnée au deuxième alinéa de l'article R. 422-34 vaut notification aux propriétaires et détenteurs du droit de chasse intéressés. / L'accomplissement de cette mesure de publicité d'une durée minimum de dix jours est certifié par le maire. / La liste est communiquée au préfet par l'association par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Celui-ci l'arrête et la publie au Recueil des actes administratifs en même temps que l'arrêté d'agrément prévu à l'article R. 422-39. " ;

4. Considérant que l'arrêté déterminant la liste des terrains devant être inclus dans le territoire d'une association communale de chasse agréée dont la création est envisagée constitue, par lui-même, une décision faisant grief aux propriétaires et détenteurs de droits de chasse qui ont déclaré leur opposition à cette inclusion, dès lors qu'il a pour effet de soumettre les terrains ayant fait l'objet de cette opposition à l'action de l'association ; que les associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse ne sauraient utilement soutenir que la procédure instituée par les articles R. 422-32 et R. 422-35 précités du code de l'environnement constituerait une opération complexe, dès lors que cette théorie permet d'invoquer, par la voie de l'exception, après l'expiration du délai de recours contentieux, l'illégalité d'un acte situé en amont de la procédure dans le cadre d'un recours formé contre un acte ultérieur ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les arrêtés du 29 juillet 2013 par lesquels la préfète de la Loire a, en application de l'article R. 422-32 précité du code de l'environnement, fixé la liste des terrains devant être soumis à l'action de l'association communale de chasse agréée de Coutouvre et de l'association communale de chasse agréée de Jarnosse constitueraient des mesures préparatoires non susceptibles de recours doit être écarté ;

5. Considérant que doit également être écarté le moyen tiré de ce que les courriers accompagnant ces arrêtés du 29 juillet 2013 constitueraient des actes préparatoires, dès lors que ces courriers ne se bornaient pas à notifier lesdits arrêtés mais comportaient, en ce qu'ils rejetaient expressément l'opposition formée par M. C... à l'apport des territoires qu'il revendique aux associations communales de chasse agréées dont la création était envisagée, une décision faisant grief ;

Sur la légalité des décisions et arrêtés du 29 juillet 2013 en tant qu'ils incluent les terrains pour lesquels M. C... a formé opposition :

6. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 422-10 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable à la date des actes en litige : " L'association communale est constituée sur les terrains autres que ceux : 1° Situés dans un rayon de 150 mètres autour de toute habitation ; (...) 3° Ayant fait l'objet de l'opposition des propriétaires ou détenteurs de droits de chasse sur des superficies d'un seul tenant supérieures aux superficies minimales mentionnées à l'article L. 422-13 (...). " ; qu'aux termes de l'article R. 422-24 du même code : " A l'appui de leur opposition, les personnes mentionnées aux 3° et 5° de l'article L. 422-10 doivent joindre toute justification pour la détermination tant de la surface du territoire intéressé que des droits de propriété dont il est l'objet. (...) " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, compte tenu du point de jonction entre les parcelles cadastrées section B n° 129 et n° 210, dont M. C... est propriétaire sur le territoire des communes de Coutouvre et de Boyer, il dispose de parcelles d'une superficie totale de 29,925 hectares d'un seul tenant, après retrait des parcelles isolées B 254, B 269, B 393 et B 423 ; qu'il ressort également du dossier soumis aux juges de première instance, et notamment du plan cadastral produit par la préfète de la Loire ainsi que des relevés de propriété produits par M. C..., que des habitations sont construites sur les parcelles A 143 et A 651 ; que, toutefois, la soustraction des terrains sis dans un rayon de 150 mètres autour de ces habitations n'a pas pour effet de réduire la superficie totale qui en résulte à moins de 20 hectares d'un seul tenant ; qu'ainsi, c'est à tort que la préfète de la Loire a rejeté la demande d'opposition formée par M. C... à l'incorporation dans les associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse de terrains dont il est propriétaire au motif qu'ils ne représenteraient pas une superficie minimum de 20 hectares d'un seul tenant, après déduction de la superficie comprise dans un périmètre de 150 mètres autour des habitations ;

8. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 422-22 du code de l'environnement : " I. - Le droit de chasse sur les terrains mentionnés à l'article R. 422-21 doit appartenir : 1° Soit à un propriétaire, à un nu-propriétaire, à un usufruitier à titre légal ou conventionnel, à des propriétaires indivis ou à un locataire titulaire d'un contrat de location ayant date certaine ; 2° Soit à un groupement de propriétaires ou détenteurs de droits de chasse, constitué sous forme d'association déclarée ou sous toute autre forme prévue par une convention ayant date certaine et justifiant de l'étendue, de la durée et de la date d'entrée en jouissance de ses droits. " ; qu'aux termes de l'article R. 422-24 du même code : " (...) Le détenteur du droit de chasse peut faire opposition au titre du 3° de l'article L. 422-10 pour l'ensemble des droits de chasse sur le territoire intéressé, jusqu'à l'expiration de son contrat, et sans avoir à faire la preuve de l'accord du propriétaire, même si ce contrat réserve à celui-ci une partie du droit de chasse sur le territoire intéressé. Dans ce cas, le détenteur du droit de chasse devra justifier de l'existence et de l'étendue de ses droits. (...) " ;

9. Considérant que les associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse soutiennent que les contrats conclus les 1er et 8 février 2013 entre M. C... et les propriétaires qui lui ont loué leurs droits de chasse sur une superficie largement supérieure à vingt hectares d'un seul tenant n'ont pas été signés par tous les indivisaires ; que, toutefois, il ressort des pièces produites par l'intimé, et notamment des attestations établies par les indivisaires intéressés, que confirment les extraits de la matrice cadastrale versés aux débats, soit que ces baux ont été signés avec leur accord, soit que des parcelles présentées par les intervenantes comme des biens indivis ne l'étaient plus à la date à laquelle l'opposition a été formulée, ayant été reprises par les signataires du bail concernés en leur nom propre ; que, dans ces conditions, le moyen soulevé par les associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse, tiré de ce que M. C... ne justifierait pas, conformément aux dispositions de l'article R. 422-24 du code de l'environnement, de l'étendue de ses droits, doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé les arrêtés n° 2013/207 et n° 2013/208 du 29 juillet 2013 en tant qu'ils incluent les parcelles pour lesquelles M. C... a formé opposition ainsi que les décisions du même jour rejetant ces oppositions ;

Sur les frais liés au litige :

11. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande M. C... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. C..., qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent les associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention des associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse est admise.

Article 2 : Le recours de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, à M. B... C... et aux associations communales de chasse agréées de Coutouvre et de Jarnosse.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2018, à laquelle siégeaient :

M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

M. Hervé Drouet, président assesseur,

Mme Nathalie Peuvrel, première conseillère.

Lu en audience publique, le 12 juin 2018

6

N° 16LY01021

mg


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01021
Date de la décision : 12/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Nature et environnement.

Procédure - Introduction de l'instance - Décisions pouvant ou non faire l'objet d'un recours.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL AD JUSTITIAM

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2018-06-12;16ly01021 ?
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