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12/10/2015 | FRANCE | N°15PA01296

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 12 octobre 2015, 15PA01296


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 3 février 2014 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de regroupement familial en faveur de son épouse, Mme C...D..., épouseA..., et de son fils mineur, F...A..., ainsi que la décision du 24 avril 2014 rejetant son recours gracieux, d'autre part, d'enjoindre au préfet de police d'autoriser le regroupement familial au profit de son épouse et de son fils.

Par un jugement n° 1410085/3-3 du 20 janv

ier 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure dev...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 3 février 2014 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de regroupement familial en faveur de son épouse, Mme C...D..., épouseA..., et de son fils mineur, F...A..., ainsi que la décision du 24 avril 2014 rejetant son recours gracieux, d'autre part, d'enjoindre au préfet de police d'autoriser le regroupement familial au profit de son épouse et de son fils.

Par un jugement n° 1410085/3-3 du 20 janvier 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 20 mars 2015 et 19 juin 2015, M.A..., représenté par MeE..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 20 janvier 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 février 2014 par laquelle le préfet de police a refusé le regroupement familial en faveur de son épouse et de son fils mineur et la décision du 20 avril 2014 rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au préfet de police d'autoriser le regroupement familial en faveur de son épouse et de son fils ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement d l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation, méconnaît les stipulations des articles 8 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales avec lesquelles l'article 4 de l'accord franco-algérien n'est pas compatible ainsi que l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de l'article 2 de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 qui exonère les titulaires de l'AAH de la condition tenant aux ressources, ceux dont le taux est inférieur à 80% pouvant s'en prévaloir aux termes de la circulaire ministérielle du 7 janvier 2009

- il a ainsi fait l'objet d'une discrimination en raison de son handicap ;

- le préfet n'a pas tenu compte de ce qu'il est handicapé que sa demande n'a pas fait l'objet d'un examen de sa situation ;

- sa mère vit en France, que compte tenu des liens qui l'attachent à sa femme et son fils cette décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2015, le préfet de police conclut au rejet de cette requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. A...par décision du 27 mars 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle,

- et les observations de Me E...pour M.A....

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien né le 2 août 1970 à El Biar, a sollicité le bénéfice du regroupement familial en faveur de sa femme, Mme C...D..., qu'il a épousée le 31 août 2008 à Mekla, et de leur fils mineur, F...A..., né le 2 juillet 2009 ; que M. A...relève appel du jugement du 20 janvier 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 3 février 2014 par lequel le préfet de police a refusé de lui accorder le bénéfice du regroupement familial pour son épouse et leur fils mineur, d'autre part, de la décision du 24 avril 2014 rejetant son recours gracieux ;

2. Considérant, qu'aux termes de l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968: " (...) Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente./ le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1 - le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont pris en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales. L'insuffisance des ressources ne peut motiver un refus si celles-ci sont égales ou supérieures au salaire minimum interprofessionnel de croissance ; 2 - le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant en France (...) " ;

6. Considérant que le préfet de police a refusé à l'épouse et à l'enfant de M. A...le bénéfice du regroupement familial au motif qu'il ne remplissait pas la condition de ressources prévue par l'article 4 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que M.A..., bénéficiaire de l'allocation adulte handicapé, soutient que les décisions contestées, prises sur le fondement des stipulations précitées de l'article 4 de l'accord franco-algérien, seraient contraires à l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en raison d'une discrimination liée à sa nationalité et à son handicap résultant de ce que, à la différence des dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 4 de l'accord franco-algérien imposent aux demandeurs d'un regroupement familial titulaire de l'allocation aux adultes handicapés de satisfaire à une condition de ressources au moins égale au salaire minimum interprofessionnel de croissance ;

7. Considérant, d'une part, que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité, et les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'établir en France ; qu'ainsi, M. A... ne saurait utilement invoquer les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatif à l'interdiction des discriminations ;

8. Considérant, d'autre part, que le juge administratif n'ayant pas à connaître de la validité des traités internationaux régulièrement introduits dans le droit français, le moyen tiré de ce que la convention franco- algérienne serait contraire aux stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui "; qu'aux termes de l'article 14 de cette même convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ;

10. Considérant qu' il ressort des pièces du dossier que M.A..., qui vit en France depuis 1970, l'année de sa naissance, n'a épousé Mme D...en Algérie que le 31 août 2008 et s'il a eu un fils avec elle le 2 juillet 2009 il ne justifie pas des liens qu'il conserverait avec son épouse et son fils, justifiant seulement, au mieux, d'un déplacement ou deux par an en Algérie mais n'établissant ni avoir une vie commune ou même des contacts avec son épouse et son fils lors de ses déplacements dans ce pays, ni subvenir à leurs besoins ; que dans ces conditions les décisions refusant à son épouse et à son fils le bénéfice du regroupement familial ne peuvent être regardées comme ayant porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'elles n'ont donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant, enfin , qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

12. Considérant qu'il est constant que M. A...n'a jamais vécu avec son fils né en 2009 et qui réside depuis sa naissance en Algérie avec sa mère ; qu'il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité et l'intensité des liens que cet enfant aurait pu nouer avec lui et ne justifie pas davantage contribuer à son entretien ou à son éducation ; qu'il n'est par suite pas fondé à soutenir que les décisions attaquées qui au demeurant concernent outre le fils de M. A... son épouse, méconnaitraient les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu de rejeter par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction formulées par le requérant ainsi que celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet police.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2015 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de la chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 octobre 2015.

Le rapporteur,

M-I. LABETOULLELe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

A-L. CHICHKOVSKY PASSUELLO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA01296


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01296
Date de la décision : 12/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Brice AUVRAY
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : DURIF JONSSON

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-10-12;15pa01296 ?
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