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15/04/2016 | FRANCE | N°15PA00896

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 15 avril 2016, 15PA00896


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Polynésie française a déféré au Tribunal administratif de la Polynésie française, comme prévenus d'une contravention de grande voirie, M. B...A...et M. D...A..., et a demandé au tribunal :

1°) de constater que les faits établis par le procès-verbal n° 2310/GEG/EX dressé le 25 février 2014 constituent la contravention prévue et réprimée par la délibération n° 2004-34 du 12 février 2004 ;

2°) de condamner solidairement M. B...A...et M. D...A...:

- à l'amende prévue à

cet effet,

- à lui verser la somme de 70 975 447 francs CFP en réparation du dommage.

Par un jugement n°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Polynésie française a déféré au Tribunal administratif de la Polynésie française, comme prévenus d'une contravention de grande voirie, M. B...A...et M. D...A..., et a demandé au tribunal :

1°) de constater que les faits établis par le procès-verbal n° 2310/GEG/EX dressé le 25 février 2014 constituent la contravention prévue et réprimée par la délibération n° 2004-34 du 12 février 2004 ;

2°) de condamner solidairement M. B...A...et M. D...A...:

- à l'amende prévue à cet effet,

- à lui verser la somme de 70 975 447 francs CFP en réparation du dommage.

Par un jugement n° 1400207 du 14 octobre 2014, le Président du Tribunal administratif de la Polynésie française a condamné solidairement M. B...A...et M. D...A... :

- à payer à la Polynésie française une amende de 150 000 francs CFP ;

- à verser à la Polynésie française la somme de 70 975 447 francs CFP correspondant au montant des frais de la remise en état du domaine public maritime.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée par télécopie le 24 février 2015, régularisée le 2 mars 2015 par la production de l'original, M. B...A...et M. D...A..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 octobre 2014 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) d'ordonner une expertise ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française le versement de la somme de

150 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les ouvrages en litige ont été réalisés dans un but d'intérêt général ;

- ils sont dans l'incapacité de payer les sommes auxquelles ils ont été condamnés et vont devoir mettre fin à leur activité et licencier leur personnel ;

- l'estimation du coût des travaux de remise en état sur laquelle le Président du tribunal administratif s'est fondée est excessive ;

- il y a lieu de procéder à une expertise sur ce point.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 mars 2016, la Polynésie française conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 1 500 euros soit mis à la charge de M. B... A...et de M. D...A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B...A...et de M. D...A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 modifiée portant statut d'autonomie de la Polynésie française, ensemble la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française ;

- la délibération n° 2004-34 APF du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française ;

- le code pénal ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Niollet,

- et les conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

Une note en délibéré, enregistrée le 6 avril 2016, a été présentée pour M. B...A...et M. D...A....

1. Considérant que la Polynésie française a déféré comme prévenus d'une contravention de grande voirie M. B...A...et M. D...A...pour avoir fait réaliser des travaux d'extraction pour la création d'un chenal et d'une darse, d'une superficie de 10 285 m² générant un volume de 13 725 m3 de déblai, au droit de la terre Pouono cadastrée E 97, E 99 et E 104, quatre souilles d'extraction d'une superficie de 449 m² générant un volume de 338 m3, au droit de l'aéroport (terre cadastrée E 143), un remblai d'une superficie de 10 090 m² et d'un volume de 12 474 m3, édifié autour de la darse et du chenal précités, un chemin de drague d'une superficie de 2 472 m² et d'un volume de 885 m3, sis au droit de l'aéroport (terre cadastrée E 143), un remblai d'une superficie de 402 m² et d'un volume de 150 m3, un enrochement sur le platier d'une superficie de 665 m² et d'un volume de 3 775 m3, au droit de l'aéroport (parcelle cadastrée E 143), et quatre tas de sable sur le remblai, d'un volume total de 2 162 m3, sur le domaine public maritime, sur le territoire de la commune d'Arutua, sur l'atoll d'Apataki, sans autorisation administrative ; que M. B...A...et M. D...A...font appel du jugement du 14 octobre 2014 par lequel le Président du Tribunal administratif de la Polynésie française les a condamnés à payer à la Polynésie française, d'une part, une amende d'un montant de 150 000 francs CFP, d'autre part, une somme de 70 975 447 francs CFP correspondant au montant des frais de remise en état du domaine public maritime ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la délibération n° 2004-34 de l'assemblée de la Polynésie française du 12 février 2004 portant composition et administration du domaine public en Polynésie française : " Le domaine public naturel comprend : le domaine public maritime qui se compose notamment des rivages de la mer, des lais et relais de mer, des étangs salés communiquant librement ou par infiltration ou par immersion avec la mer, du sol et du sous-sol des eaux intérieures dont les havres et rades non aménagés et les lagons jusqu'à la laisse de basse mer sur le récif côté large, du sol et du sous-sol des golfes, baies et détroits de peu d'étendue, et du sol et du sous-sol des eaux territoriales (...) " ; qu'aux termes de l'article 6 de la même délibération : " Nul ne peut sans autorisation préalable délivrée par l'autorité compétente, effectuer aucun remblaiement, travaux, extraction, installation et aménagement quelconque sur le domaine public, occuper une dépendance dudit domaine ou l'utiliser dans les limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous (...) " ; que l'article 27 de ladite délibération dispose que : " Les infractions à la réglementation en matière de domaine public (...) constituent des contraventions de grande voirie et donnent lieu à poursuite devant le tribunal administratif, hormis le cas des infractions à la police de la conservation du domaine public routier qui relèvent des juridictions judiciaires. Les contrevenants pourront être punis des peines d'amende ou des peines privatives ou restrictives de droit, telles que définies dans le code pénal pour les contraventions de la cinquième classe. En cas de récidive, le montant maximum de l'amende pourra être doublé. En outre, l'auteur d'une contravention de grande voirie pourra être tenu de réparer le dommage causé, au besoin sous astreinte " ; qu'enfin, selon

l'article 131-13 du code pénal applicable en Polynésie française, l'amende pour les contraventions de 5ème classe est de la contre valeur en francs Pacifique de 1 500 euros au plus, montant qui peut être porté à 3 000 euros en cas de récidive lorsque le règlement le prévoit ;

3. Considérant, en premier lieu, que la circonstance à la supposer établie, que les ouvrages réalisés par M. B...A...et M. D...A...sur le domaine public répondraient aux besoins de la population est sans incidence sur le bien fondé des poursuites diligentées à leur encontre ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...A...et M. D...A...ne sauraient utilement faire état de leurs de leurs difficultés financières, ni soutenir à l'appui des conclusions de leur requête qu'ils vont devoir mettre fin à l'activité de leur entreprise et licencier leur personnel ;

5. Considérant, en troisième lieu, que l'auteur d'une contravention de grande voirie doit être condamné à rembourser au gestionnaire du domaine public le montant des frais exposés ou à exposer par celui-ci pour les besoins de la remise en état de l'ouvrage endommagé ; qu'il n'est fondé à demander la réduction des frais mis à sa charge que dans le cas où le montant des dépenses engagées en vue de réparer les conséquences de la contravention présente un caractère anormal ;

6. Considérant que, pour évaluer à 70 975 447 francs CFP le montant des dépenses nécessaires à la remise en état du domaine public, la Polynésie française s'est référée à un devis de travaux établi par la société SAS PALACZ, faisant apparaitre un coût de 10 450 000 francs CFP HT pour les installations de chantier, un coût de 255 000 francs CFP HT pour la signalisation du chantier, un coût de 33 048 050 francs CFP HT pour les travaux liés aux extractions sans autorisation, un coût de 19 057 080 francs CFP HT pour les travaux de destruction de plusieurs remblais, augmentés d'une TVA totale de 8 165 317 francs CFP ; que les devis de deux autres entreprises produits par M. B...A...et M. D...A...ne permettent pas d'établir que les dépenses ainsi évaluées présenteraient un caractère anormal ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, M. B...A...et M. D...A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Président du Tribunal administratif de la Polynésie française a fait droit à la demande de la Polynésie française ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Polynésie française qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; qu'il résulte par ailleurs de ces dispositions que si une personne publique qui n'a pas eu recours au ministère d'avocat peut néanmoins demander au juge l'application de cet article, la Polynésie française ne fait état d'aucun frais spécifiques exposés par elle à l'occasion de l'instance ; que dans ces conditions, les conclusions présentées par la Polynésie française au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...A...et de M. D...A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Polynésie française présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., M. D...A...et à la Polynésie française.

Délibéré après l'audience du 30 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique le 15 avril 2016.

Le rapporteur,

J-C. NIOLLETLe président,

O. FUCHS-TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA00896

Classement CNIJ :

C


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00896
Date de la décision : 15/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

24-01-03-01 Domaine. Domaine public. Protection du domaine. Contraventions de grande voirie.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SELARL JURISPOL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-04-15;15pa00896 ?
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