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24/03/2016 | FRANCE | N°15NC00737

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 24 mars 2016, 15NC00737


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1102055 du 10 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 22 avril 2015, 18 janvier et

11 février 2016, sous le n° 15NC00737, M. et MmeA..., représentés p

ar MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la réduction sollicitée...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...A...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.

Par un jugement n° 1102055 du 10 mars 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 22 avril 2015, 18 janvier et

11 février 2016, sous le n° 15NC00737, M. et MmeA..., représentés par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la réduction sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'application combinée des dispositions de l'article 117 quater du code général des impôts et du f du 3° du 3 de l'article 158 du même code créée une discrimination prohibée par l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen entre les contribuables dont l'ensemble des revenus sont soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu et ceux dont certains revenus sont soumis au prélèvement forfaitaire obligatoire ;

- aucun motif d'intérêt général ne justifie cette inégalité de traitement ;

- le Conseil constitutionnel a été saisi de la question de la conformité à la Constitution de ce dispositif.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 1er décembre 2015 et 3 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par des mémoires, enregistrés le 18 janvier et 10 février 2016, les époux A...demandent à la cour de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité à l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 de l'article 117 quater du code général des impôts en ce qu'il ne permet pas de révoquer l'option formulée pour la soumission au prélèvement forfaitaire libératoire dans le cas où le contribuable aurait omis fortuitement et en dehors de toute considération d'optimisation fiscale de soumettre une autre distribution au prélèvement forfaitaire libératoire en lui faisant subir en conséquence une imposition plus élevée que s'il avait soumis l'ensemble de ses dividendes au prélèvement libératoire ou au barème progressif de l'impôt sur le revenu.

Par un mémoire, enregistré le 1er février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut à ce qu'il n'y a pas lieu de transmettre la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'Etat dès lors qu'elle est dépourvue de caractère sérieux.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958, et notamment son article 61-1 et la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 23-1 à 23-12 ;

- la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution, notamment ses articles 2, 3, 4 et 5 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Etienvre ;

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public.

1. Considérant que M. et Mme A...ont déclaré, au titre des revenus de l'année 2008, une somme d'un montant de 76 euros dans la catégorie des sommes distribuées déjà soumises à un prélèvement forfaitaire libératoire de l'impôt sur le revenu effectué par les établissements payeurs ainsi que des dividendes d'un montant de 230 781 euros dans la catégorie des sommes distribuées soumises à l'impôt sur le revenu pouvant donner lieu à des abattements ; que l'administration fiscale ayant cependant relevé que les époux A...avaient perçu au titre de la même année des revenus sur lesquels le prélèvement forfaitaire libératoire de l'article 117 quater du code général des impôts avait été opéré, a refusé d'appliquer aux autres revenus perçus par les contribuables l'abattement prévu par l'article 158 du code général des impôts ; que M. et Mme A...ont sollicité la réduction de la cotisation d'impôt sur le revenu qui leur a été assignée, pour un montant de 55 483 euros, à concurrence de la différence existant entre ce montant et celui qui aurait résulté de l'application des dispositions de l'article 158, 3, 2° du code général des impôts ; qu'à la suite du rejet de leur réclamation, ils ont saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande de réduction ; que, dans le cadre de cette instance, ils ont demandé le 29 novembre 2011 au tribunal de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 117 quater du code général des impôts, issues de l'article 10 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007, relatives à l'option pour le prélèvement forfaitaire libératoire sur les dividendes et distributions assimilées perçus par les personnes physiques ; que, par ordonnance n° 1102055 du 24 janvier 2012, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Strasbourg a transmis cette question au Conseil d'Etat qui, par décision n° 356227 du 28 mars 2012, a décidé qu'il n'y avait pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le tribunal administratif de Strasbourg ; que M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 10 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : " Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé. Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article " ; qu'aux termes de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, modifiée par la loi organique susvisée du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution : " Devant les juridictions relevant du Conseil d'État (...) le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. Un tel moyen peut être soulevé pour la première fois en cause d'appel (...) " ; qu'aux termes de l'article 23-2 de la même ordonnance : " La juridiction statue sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d'État ou à la Cour de cassation. Il est procédé à cette transmission si les conditions suivantes sont remplies : 1° La disposition contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ; 2° Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances ;

3° La question n'est pas dépourvue de caractère sérieux " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 117 quater du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : "I.-1. Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B qui bénéficient de revenus éligibles à l'abattement prévu au 2° du 3 de l'article 158 peuvent opter pour leur assujettissement à un prélèvement au taux de 18 %, qui libère les revenus auxquels il s'applique de l'impôt sur le revenu. / Pour le calcul de ce prélèvement, les revenus mentionnés au premier alinéa sont retenus pour leur montant brut (...) / II. / (...) L'option pour le prélèvement est exercée par le contribuable au plus tard lors de l'encaissement des revenus ; elle est irrévocable pour cet encaissement (...)" ;

4. Considérant que les époux A...soutiennent que l'article 117 quater du code général des impôts n'est pas conforme à l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dès lors que le caractère irrévocable de l'option exercée pour la soumission au prélèvement forfaitaire libératoire institue une différence de traitement entre les contribuables qui ont soumis l'intégralité de leurs revenus de capitaux mobilier au barème progressif et ceux qui, par erreur et sans volonté d'optimisation fiscale, n'ont soumis qu'une partie de ces revenus au prélèvement forfaitaire libératoire ;

5. Considérant que les dispositions de l'article 117 quater du code général des impôts permettent aux contribuables d'opter pour l'imposition des revenus de capitaux mobiliers à un taux forfaitaire, égal à 18 % au titre de l'année 2008, libératoire de l'impôt sur le revenu ; que, si l'option pour ce prélèvement forfaitaire libératoire peut, dans certains cas, conduire le contribuable à supporter au titre des revenus concernés une imposition plus élevée que celle qui aurait résulté de l'application du barème progressif de l'impôt sur le revenu, la différence de traitement qui en découle résulte uniquement du choix opéré par le contribuable lui-même entre les deux modalités d'imposition qui s'offrent à lui ; que, si les dispositions de l'article 117 quater précisent que l'option pour le prélèvement forfaitaire libératoire est irrévocable pour l'encaissement auquel elle s'applique, cette règle, qui ne fait pas obstacle à ce que le contribuable opte pour l'imposition au barème progressif au titre de revenus de même nature perçus la même année, n'est pas, par elle-même, de nature à créer une rupture d'égalité entre contribuables ; que le caractère irrévocable du choix se justifie par la nature de prélèvement à la source du prélèvement forfaitaire libératoire, laquelle implique que le contribuable se soit déterminé à la date d'encaissement des revenus ; que, par suite, les dispositions de l'article 117 quater du code général des impôts ne méconnaissent pas le principe d'égalité devant les charges publiques ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée est dépourvue de caractère sérieux ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de transmettre cette question au Conseil d'Etat ;

Sur les conclusions aux fins de réduction :

7. Considérant que les époux A...persistent à soutenir que l'application combinée des dispositions de l'article 117 quater du code général des impôts et du f du 3° du 3 de l'article 158 du même code créée une discrimination prohibée par l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen entre les contribuables dont l'ensemble des revenus sont soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu et ceux dont certains revenus sont soumis au prélèvement forfaitaire obligatoire et qu'aucun motif d'intérêt général ne justifie cette inégalité de traitement ; que toutefois, à l'exception des attributions exercées dans le cadre particulier de la question prioritaire de constitutionnalisé, il n'appartient pas au juge administratif d'apprécier la constitutionnalité de la loi ; que d'ailleurs, comme il a été dit précédemment, le Conseil d'Etat a refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article 117 quater du code général des impôts, issues de l'article 10 de la loi n° 2007-1822 du

24 décembre 2007, relatives à l'option pour le prélèvement forfaitaire libératoire sur les dividendes et distributions assimilées perçus par les personnes physiques ; qu'au demeurant, par une décision n° 2015-473l du 26 juin 2015, le Conseil constitutionnel a jugé ces dispositions, dans leur rédaction applicable jusqu'au 31 décembre 2011, conformes à la Constitution ; que le moyen soulevé par M. et Mme A...ne peut en conséquence qu'être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie principalement perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. et

Mme A...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de transmettre au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée en appel par M. et MmeA....

Article 2 : La requête de M. et Mme A...est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...A...et au ministre des finances et des comptes publics.

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N° 15NC00737


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC00737
Date de la décision : 24/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

54-10-05-03-02 Procédure.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-03-24;15nc00737 ?
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