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23/02/2016 | FRANCE | N°15MA02753

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 23 février 2016, 15MA02753


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006.

Par un jugement n° 1001407 du 10 mai 2012, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12MA02675 du 28 janvier 2014, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.

Par une déc

ision n° 376579 du 24 juin 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, sur pourvoi de M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006.

Par un jugement n° 1001407 du 10 mai 2012, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 12MA02675 du 28 janvier 2014, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. B... contre ce jugement.

Par une décision n° 376579 du 24 juin 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, sur pourvoi de M. B..., annulé l'arrêt susmentionné du 28 janvier 2014 et renvoyé l'affaire devant la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 4 juillet 2012, le 17 décembre 2013 et le 31 juillet 2015, M. B..., représenté par la SELARL Aizac Bruno, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 10 mai 2012 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dont le montant sera précisé en cours d'instance.

Il soutient :

S'agissant de sa demande de compensation que :

- son activité de chercheur n'est pas contestée et il justifie de l'inscription du brevet Colle EG 2000 au registre de ses immobilisations, ainsi que l'a reconnu le Conseil d'Etat dans sa décision du 24 juin 2015 ;

- le brevet qu'il a acquis constitue un bien professionnel par nature, tant au regard de la loi fiscale qu'au regard de la doctrine administrative ;

- subsidiairement il était utile à son activité ;

- il était donc fondé à demander la prise en compte d'une moins-value professionnelle lors de la cession de ce brevet.

S'agissant des impositions supplémentaires mises à sa charge que :

- la proposition de rectification n'est pas suffisamment motivée ;

- l'administration n'établit pas, comme elle en a la charge, qu'il aurait appréhendé les sommes regardées comme distribuées résultant de la cession à la SAS Europlak, à un prix majoré, du brevet litigieux.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 janvier 2013 et le 20 août 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. B... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Georges Guidal, président ;

- les conclusions de Renaud Thielé, rapporteur public.

1. Considérant que M. B..., qui exerce à titre principal une activité de chirurgien et à titre accessoire une activité de chercheur, a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2005, 2006 et 2007, ayant conduit à des redressements au titre des années 2005 et 2006 ; que l'administration fiscale a, notamment, estimé que devait être réintégrée dans le revenu du contribuable, au titre de l'année 2005, sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, une somme de 249 308 euros résultant de la cession, à un prix estimé majoré, d'une partie d'un brevet dit " Colle EG 2000 " détenu en co-propriété par M. B... à la SAS Europlak, dont il était par ailleurs co-gérant et associé ; que s'il n'a pas contesté le bien-fondé de ce redressement, M. B... a, en revanche, demandé la prise en compte d'une moins-value professionnelle constituée de la différence entre le prix de cession rectifié du brevet cédé et son prix d'acquisition et souscrit, à cette fin, deux déclarations rectificatives de résultats pour son activité accessoire de chercheur au titre des années 2005 et 2006 ; que l'administration fiscale a refusé de faire droit à cette demande ; que, par un jugement du 10 mai 2012, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de M. B... tendant à la décharge, à raison de la non-prise en compte de la moins-value professionnelle qu'il estime avoir réalisée au titre de son activité de chercheur, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 à la suite de l'examen de sa situation fiscale personnelle ; que par un arrêt du 28 janvier 2014, la Cour a rejeté l'appel que M. B... a formé contre ce jugement ; qu'enfin, par une décision du 24 juin 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, sur pourvoi de M. B..., annulé l'arrêt susmentionné de la Cour et lui a renvoyé l'affaire, au motif que c'était à tort que la Cour avait jugé que le brevet litigieux ne figurait pas sur le registre des immobilisations de l'activité de chercheur exercée par M. B..., alors que les déclarations n° 2035 afférentes à cette activité faisaient apparaître une telle inscription ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande " ; qu'aux termes de l'article L. 205 du même livre : " Les compensations de droits prévues aux articles L. 203 et L. 204 sont opérées dans les mêmes conditions au profit du contribuable à l'encontre duquel l'administration effectue une rectification lorsque ce contribuable invoque une surtaxe commise à son préjudice ou lorsque la rectification fait apparaître une double imposition " ;

3. Considérant qu'un contribuable peut à tout moment de la procédure, y compris devant les juges du fond, demander à bénéficier, en application des dispositions précitées des articles L. 203 et L. 205 du livre des procédures fiscales, d'une compensation, et ce alors même que le délai de réclamation serait expiré, dans la limite, toutefois, de l'imposition qu'il a régulièrement contestée et, devant le juge d'appel, dans celle du quantum de sa demande devant le tribunal administratif ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 93 alors applicable du code général des impôts, relatif aux bénéfices des professions non commerciales : " 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. Sous réserve des dispositions de l'article 151 sexies, il tient compte des gains ou des pertes provenant (...) de la réalisation des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession (...) " ; que l'article 99 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige, prévoit que les contribuables soumis obligatoirement au régime de la déclaration contrôlée ou qui désirent être imposés d'après ce régime doivent tenir " un document appuyé des pièces justificatives correspondantes, comportant la date d'acquisition ou de création et le prix de revient des éléments d'actif affectés à l'exercice de leur profession, le montant des amortissements effectués sur ces éléments, ainsi qu'éventuellement le prix et la date de cession de ces mêmes éléments " ;

5. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'il appartient au contribuable, lorsque celui-ci souhaite inclure dans la base de ses revenus imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux les gains et les pertes afférents à la détention d'un élément d'actif non affecté par nature à l'exercice de son activité non commerciale, de justifier d'une part que cet actif est inscrit au registre des immobilisations professionnelles, dans les conditions prévues à l'article 99 précité, et d'autre part que cette détention est utile à l'exercice de cette activité ; que les dispositions de cet article n'imposent pas que le document relatif aux immobilisations soit tenu sous forme de pages cotées et paraphées, ni même qu'il soit relié ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que les déclarations n° 2035 que M. B... a souscrites au titre des années 2005 et 2006 à raison de son activité de chercheur et d'inventeur faisaient apparaître, dans le tableau relatif aux immobilisations et amortissements retraçant la liste des matériels affectés à l'exercice de cette activité, pour chaque élément de l'actif ainsi immobilisé, la date d'acquisition ou de mise en service, les prix de revient toutes taxes comprises et hors taxes, la base amortissable, le mode et le taux d'amortissement retenus, le montant cumulé des amortissements antérieurs et l'amortissement de l'année ; que dans ce tableau, outre deux lignes recensant du matériel de bureau, M. B... a fait figurer une ligne "brevet" avec une date d'acquisition fixée au 1er avril 2005 et un prix d'acquisition de 800 000 euros ; que M. B... a également produit le contrat daté du 29 mars 2005 par lequel il a acquis la co-propriété du brevet litigieux pour un montant de 800 000 euros ; que les tableaux relatifs aux immobilisations et amortissements ont été renseignés dans les déclarations n° 2035 au titre des années 2005 et 2006 ; qu'ainsi ces déclarations n° 2035 afférentes à l'activité de chercheur exercée par M. B... font clairement apparaître l'inscription du brevet en litige sur le registre des immobilisations ;

7. Considérant, en troisième lieu, que l'acquisition et la détention par M. B... du brevet litigieux portant sur une colle chirurgicale à usage interne et externe destinée à la fixation des prothèses et à la fermeture cutanée était utile à son activité de chercheur, dès lors qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par l'administration que cette activité visait notamment à rechercher un stabilisateur, permettant sa conservation à plus de six mois ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 6, M. B... a décidé d'affecter le brevet litigieux à l'exercice de sa profession en l'inscrivant à cette fin au registre de ses immobilisations dans les conditions prévues à l'article 99 du code général des impôts ; qu'il suit de là que le contribuable est fondé à se prévaloir de la réalisation d'une moins-value professionnelle à raison de la cession de ce brevet, sous réserve d'en établir le montant ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de l'instruction et n'est pas contesté devant la Cour que l'acquisition du brevet litigieux est intervenue le 29 mars 2005 et que sa cession a été effectuée aux termes de deux actes en date des 27 juin 2005 et 25 juin 2006, soit moins de deux ans plus tard; que par suite M. B... est fondé à soutenir que les moins-values constatées au titre des années 2005 et 2006 ont été réalisées à court terme et à en demander l'imputation sur les résultats des exercices correspondants ;

9. Considérant, en cinquième lieu, que l'état de l'instruction ne permet pas de savoir la manière dont le contribuable a déterminé le prix de revient des droits indivis de brevets cédés en 2005 et 2006, qu'il a fixé respectivement à 320 000 euros et 480 000 euros dans ses déclarations rectificatives, et les raisons de cette ventilation ; qu'il ne permet pas davantage de connaître la manière dont le prix de cession de ces droits, cédés à hauteur de 12 % en 2005 et de 88 % en 2006, a été fixé respectivement à 59 105 euros et 460 000 euros ; qu'il y a lieu, dès lors, d'ordonner un supplément d'instruction contradictoire aux fins de demander à M. B... d'apporter à la Cour toutes précisions et toutes justifications utiles quant à la détermination de ces montants, et par voie de conséquence, du montant des moins-values dont il se prévaut ;

D É C I D E :

Article 1er : Avant de statuer sur la requête de M. B..., il est ordonné un supplément d'instruction contradictoire à l'effet de demander à MB... :

1°) d'indiquer à la Cour les modalités selon lesquelles il a déterminé le prix d'acquisition des droits indivis de brevet cédés en 2005 et 2006, fixée respectivement à 320 000 euros et 480 000 euros dans ses déclarations rectificatives, les raisons de cette ventilation, ainsi que toutes précisions et toutes justifications utiles au soutien de ces indications.

2°) d'indiquer à la Cour les modalités selon lesquelles il a fixé à 59 105 euros et 460 000 euros le prix de cession des droits indivis du brevet litigieux respectivement au tire de 2005 et 2006, ainsi que toutes précisions et toutes justifications utiles au soutien de ces indications.

3°) de produire une copie des actes de vente des 27 juin 2005 et 25 juin 2006 des droits indivis de brevet.

Article 2 : Le résultat du supplément d'instruction sera transmis à la Cour dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 5 février 2016, où siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 23 février 2016.

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N° 15MA02753

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA02753
Date de la décision : 23/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : SELARL BRUNO AIZAC

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-02-23;15ma02753 ?
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