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25/04/2016 | FRANCE | N°15MA00339

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 25 avril 2016, 15MA00339


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...et Mme F...D...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à leur verser la somme de 25 000 euros chacun en réparation du préjudice moral qu'ils estiment avoir subi du chef du suicide de leur fils et frère, M. A... D..., survenu le 23 juillet 2012 au centre pénitentiaire des Baumettes.

Par un jugement n° 1300750 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregist

rée le 27 janvier 2015, M. et MmeD..., représentés par Me E... demandent à la Cour :

1°) d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...et Mme F...D...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à leur verser la somme de 25 000 euros chacun en réparation du préjudice moral qu'ils estiment avoir subi du chef du suicide de leur fils et frère, M. A... D..., survenu le 23 juillet 2012 au centre pénitentiaire des Baumettes.

Par un jugement n° 1300750 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 janvier 2015, M. et MmeD..., représentés par Me E... demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 décembre 2014 ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 25 000 euros chacun en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subi ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- leur demande est recevable dès lors qu'ils ont adressé une réclamation préalable indemnitaire au centre pénitentiaire des Baumettes ;

- la responsabilité du centre pénitentiaire doit être engagée dans la mesure où l'administration ne pouvait ignorer le risque de passage à l'acte, la victime ayant eu un comportement auto-agressif le matin même du suicide et présentant un état dépressif évident ainsi que des troubles psychiatriques sévères ;

- l'administration, tenue de mettre en place un dispositif de prévention spécifique qui en l'espèce a fait défaut, a commis une faute de négligence ;

- l'intervention tardive des secours montre que les services de l'administration pénitentiaire ont été défaillants ;

- eu égard au préjudice moral qu'ils ont subi, il conviendra de leur accorder à chacun la somme de 25 000 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Le président de la Cour a désigné M. B...Pocheron en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marchessaux,

- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.

1. Considérant que M. et Mme D...relèvent appel du jugement en date du 16 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 25 000 euros chacun en réparation du préjudice moral qu'ils estiment avoir subi du chef du suicide de leur fils et frère, M. A... D..., survenu le 23 juillet 2012 au centre pénitentiaire des Baumettes ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

2. Considérant que la responsabilité de l'Etat du fait des services pénitentiaires en cas de dommage résultant du suicide d'un détenu peut être recherchée seulement en cas de faute ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des documents médicaux produits par les consorts D...devant les premiers juges, que M. A...D...a fait l'objet d'un suivi et de traitements médicaux pour des troubles psychiatriques au cours des années 2003, 2005, et de 2006 à 2010 ; que, toutefois, ces pièces ne démontrent nullement que l'intéressé présentait un risque suicidaire, lequel n'est pas davantage établi pour la période allant du 31 mars 2011, date de sa dernière incarcération au centre pénitentiaire des Baumettes, jusqu'au 23 juillet 2012, date de son décès ; qu'en effet, dans sa note rédigée ce même jour, le directeur du centre précité le décrit comme un détenu calme qui n'a pas été repéré comme suicidaire ; qu'il relève également que M. A...D...était suivi médicalement et psychologiquement de longue date au sein de l'établissement, un rendez-vous auprès du médecin psychiatre étant prévu le lendemain ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que si le matin du 23 juillet 2012 vers 8h30, l'intéressé s'est volontairement blessé au cou et au ventre à l'aide d'un morceau de miroir brisé après avoir exprimé son inquiétude de ne pas avoir de nouvelles de sa mère depuis plusieurs jours, sa déception d'avoir vu ses demandes d'aménagement de peine rejetées et sa volonté de travailler, il a été immédiatement pris en charge par le service médical et le médecin psychiatre ; qu'ensuite, M. A...D...a été reçu, durant une heure, par l'officier chargé de la détention et placé sous surveillance spécifique alors même que les services médicaux n'avaient émis aucune consigne de vigilance le concernant ; que le détenu, qui semblait relativement apaisé, a été revu à deux reprises, à 13h et 13h50, par le surveillant d'étage, qui l'a finalement trouvé inanimé dans sa cellule à 16h35 ; que, son comportement ne pouvant laisser présager un passage à l'acte imminent, il ne peut être reproché au personnel pénitentiaire d'avoir momentanément laissé seul M. A... D..., alors qu'un nouveau co-détenu devait arriver dans l'après-midi, et de ne pas lui avoir confisqué le ceinturon à l'aide duquel il s'est pendu ; que, dans ces conditions, les consorts D...ne sont pas fondés à soutenir que l'administration pénitentiaire a commis une faute en négligeant de mettre en place un dispositif de prévention spécifique ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que suite à la découverte de M. A... D... inconscient dans sa cellule, à 16h35, le surveillant a tout de suite alerté son supérieur hiérarchique ; que ce dernier, une infirmière et un médecin sont arrivés rapidement sur les lieux et ont pratiqué un massage cardiaque pour tenter de le réanimer ; que les pompiers sont arrivés à 16h55 et 16h58 pour finalement constater le décès à 17h ; qu'il s'en suit, que compte tenu du déroulé de ces évènements qui ont duré près de 25 minutes, aucune faute dans l'organisation des secours ne saurait être reprochée à l'administration pénitentiaire ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'administration pénitentiaire n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ; que, dès lors, les consorts D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse aux consorts D...quelque somme que ce soit au titre des frais que ceux-ci ont exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...D..., à M. C...D...et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2016, où siégeaient :

- M. Pocheron, président-assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Hameline, premier conseiller,

- Mme Marchessaux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 avril 2016.

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N° 15MA00339


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00339
Date de la décision : 25/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-091 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Services pénitentiaires.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : ABIKHZER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-04-25;15ma00339 ?
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