Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. F... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 12 août 2013 par lequel le maire de la commune de Saint-Donat a délivré au nom de l'Etat un permis de construire à M. D....
Par un jugement n° 1301493 du 22 avril 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, après avoir sursis à statuer sur la demande de M. F... par jugement du 20 janvier 2015, a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
I) Par une requête enregistrée le 20 mars 2015 sous le n° 15LY00966, et un mémoire enregistré le 6 octobre 2016, M. F..., représenté par Me C...et MeG..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement avant dire droit du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 20 janvier 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Saint-Donat du 12 août 2013 ;
3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge respectivement de l'Etat, de la commune de Saint-Donat et de M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement méconnaît l'article R. 741-2 du code de justice administrative en ce qu'il ne mentionne pas l'audience qui s'était tenue le 17 novembre 2014 ;
- le jugement a été notifié avec les voies et délais de recours alors que le tribunal n'était pas dessaisi puisque le jugement prononce un sursis à statuer ;
- le jugement n'est pas suffisamment motivé ;
- le dossier de demande de permis n'indique pas les points et angles de prises de vue des photographies sur le plan de situation, comporte des incohérences concernant la localisation du garage sur les documents graphiques par rapport aux plans et n'indique pas les modalités de l'alimentation en eau du projet ;
- le permis de construire contesté méconnaît les articles L. 111-4 et R. 111-8 du code de l'urbanisme ;
- le projet méconnaît l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme ;
- c'est à tort que le tribunal a considéré que le défaut de projet architectural établi par un architecte, qui constitue une fraude, était un vice régularisable en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;
- le permis méconnaît l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme dès lors que la demande de permis ne mentionne pas l'intégralité de la surface de plancher des constructions ;
- le projet nécessitait l'intervention d'un architecte ;
- l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales est méconnu.
Par des mémoires enregistrés le 5 juin 2015 et le 5 septembre 2016, M. E... D..., représenté par la SCP Teillot et associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en intervention enregistré le 19 juillet 2016, la commune de Saint-Donat, représentée par la SCP Teillot et associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de M. F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 5 octobre 2016, la ministre du logement et de l'habitat durable conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.
II) Par une requête enregistrée le 22 juin 2015 sous le n° 15LY02115 et un mémoire enregistré le 6 octobre 2016, M. F... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand 22 avril 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Saint-Donat du 12 août 2013 ;
3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge respectivement de l'Etat, de la commune de Saint-Donat et de M. D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement n'est pas suffisamment motivé en ce qu'il ne répond pas au moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme ;
- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs dès lors qu'il a motivé l'absence de fraude par la possibilité ou non pour le service instructeur de relever une omission du pétitionnaire ;
- c'est à tort que le tribunal a considéré que le défaut de projet architectural établi par un architecte, qui constitue une fraude, était un vice régularisable en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;
- le permis en litige méconnaît les articles R. 431-10 et R. 431-5 du code de l'urbanisme, ainsi que l'obligation de recourir à un architecte, les articles L. 111-4 et R. 111-8 du code de l'urbanisme, et les articles R. 431-9, R. 111-5, L. 145-3 et L. 111-1-2 du code de l'urbanisme ainsi que l'article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales.
Par un mémoire en intervention enregistré le 19 juillet 2016, la commune de Saint-Donat, représentée par la SCP Teillot et associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de M. F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 5 septembre 2016, M. E... D..., représenté par la SCP Teillot et associés, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.
Par un mémoire enregistré le 5 octobre 2016, la ministre du logement et de l'habitat durable conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller,
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour M. D...et pour la commune de Saint-Donat ;
Une note en délibéré présentée pour la commune de Saint-Donat et M. D... a été enregistrée dans les deux instances le 8 décembre 2016.
1. Considérant que, par un arrêté du 12 août 2013, le maire de la commune de Saint-Donat a, au nom de l'Etat, délivré un permis de construire à M. D... ; que M. F... a saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une demande tendant à l'annulation de ce permis de construire ; que, par un jugement avant dire droit du 20 janvier 2015 pris sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, le tribunal, après avoir jugé que la méconnaissance des dispositions de l'article L. 431-1 du code de l'urbanisme était seule de nature à entraîner l'annulation de la décision contestée, a sursis à statuer sur la demande de M. F... jusqu'à l'expiration d'un délai de deux mois imparti à M. D... pour obtenir un permis de construire modificatif susceptible de régulariser ce vice ; que, par un jugement du 22 avril 2015 mettant fin à l'instance, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, prenant acte de l'intervention d'un permis de construire modificatif le 5 février 2015 et jugeant que ce dernier avait purgé le vice dont était initialement entaché le permis de construire du 12 août 2013, a rejeté la demande de M. F... ; que M. F... relève appel de ces jugements des 20 janvier et 22 avril 2015 ;
2. Considérant que les requêtes de M. F...sont relatives à des jugements rendus dans la même instance ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur l'intervention de la commune de Saint-Donat :
3. Considérant que la commune de Saint-Donat a intérêt au maintien des jugements attaqués ; qu'ainsi son intervention en défense est recevable ;
Sur la légalité du permis de construire du 12 août 2013 :
4. Considérant que selon les dispositions du premier alinéa du III de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme alors en vigueur, applicables en zone de montagne, " l'urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants " ; que le III de ce même article L. 145-3 énonce les cas dans lesquels les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas et dispose notamment que : " Dans les communes ou parties de commune qui ne sont pas couvertes par un plan local d'urbanisme ou une carte communale, des constructions qui ne sont pas situées en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants peuvent être autorisées, dans les conditions définies au 4° de l'article L. 111-1-2, si la commune ne subit pas de pression foncière due au développement démographique ou à la construction de résidences secondaires et si la dérogation envisagée est compatible avec les objectifs de protection des terres agricoles, pastorales et forestières et avec la préservation des paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel prévus aux I et II.. (...) " ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-1-2 du même code dans sa rédaction alors en vigueur : " En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seuls sont autorisés, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : / (...) 4° Les constructions ou installations, sur délibération motivée du conseil municipal, si celui-ci considère que l'intérêt de la commune, en particulier pour éviter une diminution de la population communale, le justifie, dès lors qu'elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages, à la salubrité et à la sécurité publique, qu'elles n'entraînent pas un surcroît important de dépenses publiques et que le projet n'est pas contraire aux objectifs visés à l'article L. 110 et aux dispositions des chapitres V et VI du titre IV du livre Ier ou aux directives territoriales d'aménagement précisant leurs modalités d'application. " ;
6. Considérant qu'il est constant que le projet de construction d'une habitation individuelle et d'un garage professionnel de M. D... sur le territoire de la commune de Saint-Donat qui est classée en zone de montagne et n'est pas couverte par un plan local d'urbanisme ou une carte communale, n'est pas implanté dans une zone actuellement urbanisée de la commune ; que par une délibération du 26 juillet 2013 le conseil municipal de Saint-Donat a émis un avis favorable à ce projet, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 111-1-2 citées au point 4 ; que M. F... soutient que cette délibération est illégale ;
7. Considérant que cette délibération est motivée par le fait que le projet de construction de M. D... permettra " l'installation d'une entreprise sur la commune, voire la création d'emploi ", " le maintien d'un jeune couple sur la commune, permettant ainsi à l'avenir de conforter les effectifs de l'école " alors que la population de la commune de Saint-Donat " diminue depuis plusieurs années ", que cette construction " amènera des recettes fiscales " et n'entraînera pas de nouvelle dépense pour la collectivité, la parcelle étant viabilisée ;
8. Considérant, toutefois, qu'en indiquant seulement qu'il comporte un garage à usage professionnel sans autre précision permettant d'apprécier la consistance et la pérennité de l'activité envisagée, le projet ne permet pas d'évaluer son incidence sur l'emploi dans la commune ; que M. D... et sa compagne résident déjà à Saint-Donat, de sorte que le projet n'aura pas d'incidence significative sur la population communale, alors même que celle-ci serait, comme le fait valoir la commune, en diminution depuis plusieurs années ; qu'il n'est pas soutenu que M. D... aurait des enfants, ni que l'école du regroupement intercommunal connaîtrait des difficultés particulières en termes d'effectifs ; que l'absence de dépenses pour la commune afin de viabiliser le terrain d'assiette du projet et les recettes fiscales générées par cette nouvelle habitation ne sauraient suffire à caractériser un intérêt communal de nature à justifier une dérogation à l'obligation de réaliser les constructions en continuité en zone de montagne ; que, dans ces conditions, le permis de construire contesté méconnaît les dispositions combinées des articles L. 111-1-2 et L. 145-3 du code de l'urbanisme ;
9. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît, en l'état de l'instruction, également susceptible de fonder l'annulation du permis contesté ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité des jugements attaqués, M. F... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ces jugements, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a sursis à statuer jusqu'à la régularisation du permis de construire contesté et a ensuite rejeté sa demande ;
Sur les frais d'instance :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. D... demande sur leur fondement au titre des frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de M. F..., qui n'est pas partie perdante dans la présente instance ; que ces dispositions font également obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de M. F... dirigées au même titre contre la commune de Saint-Donat ainsi qu'aux conclusions présentées à l'encontre de M. F...par la commune, laquelle n'a pas la qualité de partie à l'instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... la somme que M. F...demande au titre de ses frais ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au titre des frais exposés par M. F... ;
DECIDE :
Article 1er : L'intervention de la commune de Saint-Donat est admise.
Article 2 : Les jugements du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 20 janvier 2015 et du 22 avril 2015 sont annulés.
Article 3 : L'arrêté du maire de Saint-Donat du 12 août 2013 est annulé.
Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F..., à M. E... D..., à la ministre du logement et de l'habitat durable et à la commune de Saint-Donat.
Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016, à laquelle siégeaient :
M. Boucher, président de chambre,
M. Gille, président-assesseur,
Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 janvier 2017.
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N°s 15LY00966, 15LY02115
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