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06/07/2016 | FRANCE | N°15-22868

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 06 juillet 2016, 15-22868


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée (Lyon, 22 décembre 2014), rendue par un premier président, et les pièces de la procédure, que M. X..., de nationalité béninoise, en situation irrégulière en France, a été interpellé à l'occasion d'un contrôle d'identité et placé en retenue pour vérification de son droit au séjour ; qu'un préfet a pris à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français, puis une décision de placement en rétention ;
Sur le moyen unique

, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance de...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée (Lyon, 22 décembre 2014), rendue par un premier président, et les pièces de la procédure, que M. X..., de nationalité béninoise, en situation irrégulière en France, a été interpellé à l'occasion d'un contrôle d'identité et placé en retenue pour vérification de son droit au séjour ; qu'un préfet a pris à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français, puis une décision de placement en rétention ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance de prolonger cette mesure, alors, selon le moyen, que porte nécessairement atteinte aux droits de l'étranger retenu la prise de ses empreintes digitales tandis même que cette mesure ne constituait pas l'unique moyen d'établir la situation de ce dernier ; qu'en l'espèce, le premier président a admis que la prise des empreintes de M. X... était irrégulière dans la mesure où elle ne constituait pas l'unique moyen d'établir sa situation, l'identité fournie spontanément ayant permis de retrouver sans difficulté le dossier administratif de la préfecture ; qu'en refusant cependant d'annuler la procédure au motif qu'il ne serait résulté de cette irrégularité aucune atteinte aux droits de M. X..., la prise d'empreintes n'ayant donné lieu qu'à une simple comparaison et n'ayant fait l'objet d'aucun enregistrement ni d'aucune conservation, le premier président a violé les articles L. 552-13 et L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Mais attendu que, lorsqu'il constate une irrégularité des actes de procédure préalables au placement en rétention, il incombe au juge de rechercher si celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger, au sens de l'article L. 552-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ayant relevé que les empreintes digitales irrégulièrement recueillies avaient donné lieu à une simple comparaison et n'avaient fait l'objet d'aucun enregistrement ni d'aucune conservation, le premier président a pu en déduire qu'il n'était résulté de cette irrégularité aucune atteinte à la vie privée de l'intéressé ; qu'en sa première branche, le moyen n'est pas fondé ;
Sur les autres branches du moyen, ci-après annexé :
Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six juillet deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'AVOIR confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Lyon ayant rejeté l'exception de nullité soulevée par M. X... et ordonné la prolongation du maintien de ce dernier dans des locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 20 jours à compter de l'expiration du délai initial de 5 jours ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' « aux termes de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'étranger ne fournit pas d'éléments permettant d'apprécier son droit de circulation ou de séjour, les opérations de vérification peuvent donner lieu, après information du procureur de la République, à la prise d'empreintes digitales ou de photographies lorsque celle-ci constitue l'unique moyen d'établir la situation de cette personne (…). Les prescriptions énumérées au présent article sont imposées à peine de nullité, sous réserve des dispositions de l'article L. 552-13 ». Aux termes de l'article L. 552-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger. En l'espèce, il résulte de la procédure qu'une personne disant se dénommer Kiki Gbedjignon a fait l'objet d'un contrôle d'identité en gare de Lyon Part Dieu, le dimanche 14 décembre 2014 à 7 h 20, par les services de police dans le cadre d'une réquisition du procureur de la République de Lyon prise en application des dispositions de l'article 78-2 alinéa 6 du code de procédure pénale. M. X... ne possédant ni document d'identité ou de voyage a présenté une carte vitale à son nom et a indiqué aux policiers être de nationalité béninoise. Les premières vérifications sur la base de cette identité ont fait apparaître l'existence d'un dossier administratif au nom de M. X... ainsi que l'existence d'une fiche de recherche au titre d'une obligation de quitter le territoire français en date du 18 octobre 2013, notifié à l'intéressé le 25 octobre 2013. Présenté devant l'officier de police judiciaire, M. X... a fait l'objet d'une mesure de rétention aux fins de vérification du droit de circulation ou de séjour, à 7 h 50. L'intéressé a été entendu et a confirmé son identité et fourni tous les détails et précisions utiles sur sa situation administrative. A 11 h 35, M. X... a fait l'objet d'une consultation dactyloscopique au fichier automatisé des empreintes digitales pour examen de comparaison. Cette consultation a été négative, l'identité et les empreintes de M. X... ne figurant pas dans la base de données du fichier automatisé. Il résulte de ces éléments que la prise d'empreintes digitales ne constituait pas l'unique moyen d'établir la situation de cette personne, puisque l'identité fournie a permis de retrouver sans difficulté le dossier administratif de la préfecture et de connaître la situation de M. X..., à savoir une situation irrégulière. Il serait disproportionné de considérer qu'une personne puisse usurper l'identité d'une autre personne qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire national. Cependant, il n'est résulté de cette irrégularité aucune atteinte aux droits, notamment à la vie privée de M. X..., puisque la prise d'empreintes n'a donné lieu qu'à une simple comparaison et n'a fait l'objet d'aucun enregistrement ni d'aucune conservation » ;
ET AUX MOTIFS éventuellement ADOPTES QUE « le conseil de M. X... fait valoir que la prise d'empreintes dont il a fait l'objet serait en contradiction avec les dispositions légales puisqu'elles n'étaient pas nécessaires pour l'appréciation de la situation de cet homme qui a donné des indications exactes aux policiers, bien que dépourvu de documents d'identité à l'exception d'une carte vitale ; il y a lieu de noter qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'une prise d'empreintes aux fins d'alimenter le fichier national des empreintes digitales ou un autre fichier, mais seulement d'une comparaison des empreintes digitales de M. X... aux bases de données informatiques ; d'où il suit qu'il s'agit seulement d'une comparaison d'empreintes afin de savoir si cet homme était déjà enregistré dans la base de données ; et non d'une prise d'empreintes ; au demeurant, si les déclarations verbales de M. X... sont exactes en elles-mêmes, un doute subsistait néanmoins sur son identité, car une carte vitale, même munie d'une photo, n'est pas un instrument probant de l'identité et une usurpation d'identité était tout à fait possible ; la consultation du fichier des empreintes digitales était donc le seul moyen totalement fiable de s'assurer de l'identité de la personne présente devant les policiers » ;
1°) ALORS QUE porte nécessairement atteinte aux droits de l'étranger retenu la prise de ses empreintes digitales tandis même que cette mesure ne constituait pas l'unique moyen d'établir la situation de ce dernier ; qu'en l'espèce, le premier président a admis que la prise des empreintes de M. X... était irrégulière dans la mesure où elle ne constituait pas l'unique moyen d'établir sa situation, l'identité fournie spontanément ayant permis de retrouver sans difficulté le dossier administratif de la préfecture ; qu'en refusant cependant d'annuler la procédure au motif qu'il ne serait résulté de cette irrégularité aucune atteinte aux droits de M. X..., la prise d'empreintes n'ayant donné lieu qu'à une simple comparaison et n'ayant fait l'objet d'aucun enregistrement ni d'aucune conservation, la premier président a violé les articles L. 552-13 et L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
2°) ALORS en tout état de cause QUE, tenus de motiver leur décision, les juges du fond ne peuvent affirmer un fait sans viser le moindre élément du dossier le leur permettant ; qu'en affirmant que la prise d'empreintes n'avait fait l'objet d'aucun enregistrement ni d'aucune conservation, sans préciser l'origine de cette affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE la prise des empreintes digitales est constituée par leur seule collecte et n'implique pas nécessairement leur conservation et leur enregistrement dans un fichier ; qu'en affirmant, par motifs éventuellement adoptés, que, n'étant pas pratiquée aux fins d'alimenter le fichier national des empreintes digitales ou un autre fichier, la prise d'empreintes litigieuse n'en était pas une mais constituait seulement une comparaison d'empreintes, la cour d'appel a déduit un motif dépourvu de toute valeur et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 552-13 et L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 15-22868
Date de la décision : 06/07/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ETRANGER - Mesures d'éloignement - Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire - Placement en rétention - Collecte et traitement d'empreintes digitales - Irrégularité - Atteinte aux droits de l'étranger placé en rétention - Caractérisation - Défaut - Portée

ETRANGER - Mesures d'éloignement - Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire - Procédure - Nullité - Cas - Atteinte aux droits de l'étranger placé en rétention - Caractérisation - Défaut - Applications diverses

Il incombe au juge qui constate une irrégularité des actes de procédure préalables au placement en rétention de rechercher si celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger, au sens de l'article L. 552-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ayant relevé que les empreintes digitales irrégulièrement recueillies avaient donné lieu à une simple comparaison et n'avaient fait l'objet d'aucun enregistrement ni d'aucune conservation, le premier président a pu en déduire qu'il n'était résulté de cette irrégularité aucune atteinte à la vie privée de l'intéressé


Références :

articles L. 552-13 et L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 22 décembre 2014

Rapprochements : 1re Civ., 23 septembre 2015, pourvoi n° 14-21279, Bull. 2015, I, n° 216 (Cassation partielle sans renvoi)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 06 jui. 2016, pourvoi n°15-22868, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Rapporteur ?: Mme Gargoullaud
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.22868
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