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26/05/2015 | FRANCE | N°14PA01375

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 26 mai 2015, 14PA01375


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 novembre 2012 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a retiré sa décision implicite de rejet née le 19 octobre 2012 à la suite du recours hiérarchique de la société Procédés Roland Pigeon contre la décision du 7 mai 2012 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser son licenciement et a annulé cette dernière décision.

Par un jugement

n° 1221333 du 28 janvier 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 5 novembre 2012 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a retiré sa décision implicite de rejet née le 19 octobre 2012 à la suite du recours hiérarchique de la société Procédés Roland Pigeon contre la décision du 7 mai 2012 par laquelle l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser son licenciement et a annulé cette dernière décision.

Par un jugement n° 1221333 du 28 janvier 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 28 mars 2014 et le 11 août 2014, M. C..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1221333 du 28 janvier 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en date du 5 novembre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de la violation du caractère contradictoire de la procédure menée devant le ministre, imposée par les dispositions des articles 18 et 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- la décision ministérielle a été prise en violation de la procédure contradictoire imposée par les dispositions des articles 18 et 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- le ministre n'a pas pris en compte la protection attachée au mandat de conseiller du salarié alors que l'employeur était informé de l'existence de ce mandat et sa décision a été prise en violation de l'article L. 2413-1 du code du travail ;

- les élections du 19 avril 2011 ayant été annulées par un jugement du 16 juin 2011 du Tribunal d'instance de Vannes, son mandat n'a pris fin qu'à l'issue du premier tour de la nouvelle élection intervenu le 16 septembre 2011 et il bénéficiait d'une protection d'un an jusqu'au 16 septembre 2012, la décision ministérielle a ainsi été prise en violation des articles L. 2143-11, L. 2143-3 et L. 2411-3 du code du travail ;

- à supposer même qu'il ait perdu la qualité de délégué syndical le 2 mai 2011, la protection supplémentaire d'un an attachée à ce mandat devait s'apprécier non pas à la date de la décision de l'inspecteur du travail mais à celle de la convocation à l'entretien préalable au licenciement.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 juin 2014 et le 1er octobre 2014, la société Procédés Roland Pigeon, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marino,

- les conclusions de M. Sorin, rapporteur public,

- et les observations de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. Le 2 avril 2012, la société Procédés Roland Pigeon (PRP) a sollicité de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier pour motif disciplinaire M.C..., qui avait détenu les mandats de délégué syndical et de représentant syndical au comité d'entreprise. Par une décision du 7 mai 2012, l'inspecteur du travail a refusé de délivrer cette autorisation. La société PRP a formé un recours hiérarchique contre cette décision, qui a été annulée par une décision du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en date du 5 novembre 2012 au motif que l'inspecteur du travail aurait dû se déclarer incompétent dès lors qu'à la date à laquelle il s'est prononcé, la protection dont M. C...avait bénéficié durant les douze mois suivant la fin des mandats qu'il avait exercés avait cessé et que si celui-ci avait été inscrit sur la liste des conseillers des salariés de la Manche le 4 mai 2012, cette inscription ne lui ouvrait pas droit à protection au titre de la procédure en cours. M. C...fait appel du jugement du 28 janvier 2014 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 5 novembre 2012.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Pour rejeter la demande de M.C..., le tribunal a considéré qu'à la date de l'intervention de la décision de l'inspecteur du travail, l'intéressé ne bénéficiait plus du statut de salarié protégé, que l'inspecteur du travail n'était donc pas compétent pour se prononcer sur la demande d'autorisation de licenciement et que le ministre du travail était par suite tenu d'annuler sa décision et de décliner, à son tour, sa compétence. Les premiers juges ont écarté, par voie de conséquence, comme étant sans incidence sur la légalité de la décision ministérielle contestée, les moyens de légalité externe et interne soulevés par M.C.... Ce dernier n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier, faute pour le tribunal d'avoir répondu au moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure menée devant le ministre, tel qu'il résulte des dispositions des articles 18 et 24 de la loi du 12 avril 2000.

Sur la légalité de la décision du ministre du 5 novembre 2012 :

3. L'article L. 2143-3 du code du travail dispose : " Chaque organisation syndicale représentative dans l'entreprise ou l'établissement d'au moins cinquante salariés, qui constitue une section syndicale, désigne parmi les candidats aux élections professionnelles qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants, dans les limites fixées à l'article L. 2143-12, un ou plusieurs délégués syndicaux pour la représenter auprès de l'employeur (...) " et l'article L. 2143-11 du même code dispose, dans son alinéa 1er : " Le mandat de délégué syndical prend fin lorsque l'ensemble des conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 2143-3 et à l'article L. 2143-6 cessent d'être réunies ".

4. Aux termes de l'article L. 2411-3 du code du travail : " Le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. / Cette autorisation est également requise pour le licenciement de l'ancien délégué syndical, durant les douze mois suivant la date de cessation de ses fonctions, s'il a exercé ces dernières pendant au moins un an. / Elle est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la désignation du délégué syndical a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa désignation comme délégué syndical, avant que le salarié ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement ". Aux termes de l'article L. 2411-8 du même code : " Le licenciement d'un membre élu du comité d'entreprise, titulaire ou suppléant, ou d'un représentant syndical au comité d'entreprise, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. / L'ancien membre élu du comité d'entreprise ainsi que l'ancien représentant syndical qui, désigné depuis deux ans, n'est pas reconduit dans ses fonctions lors du renouvellement du comité, bénéficient également de cette protection pendant les six premiers mois suivant l'expiration de leur mandat ou la disparition de l'institution ".

5. Enfin, aux termes de l'article L. 2411-21 du code du travail : " Le licenciement du conseiller du salarié chargé d'assister un salarié dans les conditions prévues à l'article L. 1232-4 ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ".

6. En premier lieu, M.C..., qui exerçait le mandat de délégué syndical depuis 1996, ainsi que celui de représentant syndical au sein du comité d'entreprise, n'a pas recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des élections au comité d'entreprise qui se sont déroulées le 19 avril 2011. Il a, dès lors, perdu les qualités de délégué syndical et de représentant syndical au comité d'entreprise à compter de cette date. S'il a continué à bénéficier des protections attachées à ces mandats durant respectivement un an et six mois conformément aux dispositions précitées des articles L. 2411-3 et L. 2411-8, celles-ci étaient expirées à la date à laquelle l'inspecteur du travail s'est prononcé sur la demande d'autorisation de licenciement.

7. En deuxième lieu, lorsque le juge judiciaire, saisi dans les conditions de l'article

L. 2143-8 du code du travail, prononce l'annulation des élections professionnelles, cette annulation n'a pas d'effet rétroactif et les mandats des représentants du personnel irrégulièrement élus ou des représentants syndicaux cessent de plein droit au jour de la notification de son jugement. Par suite, M. C...n'est pas fondé à soutenir que, suite à l'annulation par un jugement du Tribunal d'instance de Vannes du 16 juin 2011, du premier tour des élections de la délégation unique du personnel des membres du collège " agents de maîtrise et cadres " de la société PRP qui se sont déroulées le 19 avril 2011, il aurait retrouvé les mandats qu'il exerçait avant cette élection jusqu'à l'organisation des nouvelles élections, le 16 septembre 2011, et qu'il bénéficiait ainsi d'une protection jusqu'au 16 septembre 2012.

8. Par ailleurs, si postérieurement à l'annulation des élections du 19 avril 2011 et antérieurement à celles du 16 septembre suivant, le syndicat FO a de nouveau désigné M. C...en qualité de délégué syndical à compter du 18 août 2011, il est constant que le requérant, qui s'était déclaré candidat aux nouvelles élections du 16 septembre 2011 par un courrier reçu le 23 août 2011, n'a pas recueilli 10 % des suffrages exprimés au premier tour de ces élections. Par suite, il a perdu sa qualité de délégué syndical à compter du 16 septembre 2011 et, dès lors qu'il n'a pas exercé ce nouveau mandat pendant au moins un an, il n'a pas bénéficié de la protection mentionnée au second alinéa de l'article L. 2411-3 du code du travail. Quant à la protection dont il a bénéficié en qualité de candidat aux élections en application de l'article L. 2411-7 du même code, elle a cessé le 23 février 2012.

9. En dernier lieu, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, si M. C...a été désigné en qualité de conseiller du salarié par un arrêté du préfet de la Manche en date du 4 mai 2012, il ne saurait se prévaloir de la protection attachée à ce mandat dès lors que, s'agissant d'un mandat extérieur à l'entreprise, il n'a pas informé son employeur de l'exercice de ce mandat antérieurement à sa convocation à l'entretien préalable au licenciement.

10. Il résulte ainsi de ce qui précède qu'à la date à laquelle il s'est prononcé, l'inspecteur du travail n'était plus compétent pour statuer sur la demande d'autorisation de licenciement et le ministre était tenu d'annuler sa décision et de décliner à son tour sa compétence. En conséquence, les autres moyens de la requête sont sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société Procédés Roland Pigeon.

Délibéré après l'audience du 20 avril 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Marino, président assesseur,

- Mme Bernard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 mai 2015.

Le rapporteur,

Y. MARINOLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

A. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14PA01375


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 14PA01375
Date de la décision : 26/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Yves MARINO
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : GENOT-DELBECQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-05-26;14pa01375 ?
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