La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/07/2015 | FRANCE | N°14NT03162

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 09 juillet 2015, 14NT03162


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Eskape a demandé au tribunal administratif d'Orléans de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1302667 du 21 octobre 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 décembre 2014 et 3 avril 2015, la SARL Eskape, représentée par MeA..., demande à la co

ur :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 21 octobre 2014 ;

2°) de lui...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Eskape a demandé au tribunal administratif d'Orléans de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010.

Par un jugement n° 1302667 du 21 octobre 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 décembre 2014 et 3 avril 2015, la SARL Eskape, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 21 octobre 2014 ;

2°) de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification, qui se borne à mentionner l'absence de dépassement d'un verrou technologique ce qui ne lui permet pas de connaître le motif de l'avis négatif émis par la délégation régionale à la recherche et à la technologie (DRRT), n'est pas suffisamment motivée ; cet avis, qui ne comporte que les conclusions de l'expert, ne précise pas les raisons pour lesquelles les deux projets n'étaient pas éligibles au crédit d'impôt recherche et ne lui a pas été communiqué avant la notification de la proposition de rectification ; le vérificateur qui fonde les redressements sur l'avis de l'expert doit en reproduire les termes précis ainsi que les passages essentiels de son rapport ; les premiers juges ont estimé à tort qu'elle était en mesure de formuler utilement des observations ; la proposition de rectification reprend mot pour mot l'avis de la DRRT ;

- en indiquant que les observations ne comportaient pas d'éléments nouveaux, le service n'a pas suffisamment motivé sa réponse ; elle a tardivement obtenu communication du rapport de l'expert à l'issue de l'entretien hiérarchique et a été ainsi privée de la possibilité de présenter des observations pertinentes en temps utile ;

- étant irrégulière, la proposition de rectification n'a pas interrompu le cours de la prescription ;

- en estimant que les articles L. 45 B et R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales n'imposent pas à l'expert de l'administration de se rendre sur place et d'engager un débat contradictoire avec la société, les premiers juges ont commis une erreur de droit ; l'article R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales a été modifié en ce sens par le décret n° 2013-116 du 5 février 2013 en ce qui concerne le débat oral et contradictoire ;

- l'administration ne pouvait pas se fonder sur le caractère facultatif de l'expertise pour ne pas transmettre à l'expert son mémoire complémentaire du 24 juillet 2012 ;

- les interrogations de l'expert rendaient nécessaire une visite sur place ;

- depuis l'amélioration du logiciel Connektikup, une entreprise peut développer son propre portail métier sans avoir de connaissances en matière de programmation informatique ; le logiciel Naviway permet à ses utilisateurs d'accéder au système d'information de leurs entreprises depuis leur téléphone portable de manière personnalisée, en temps réel et en toute sécurité ; étant fondé sur la création d'un nouvel algorithme et d'un dictionnaire statique adapté au type de flux recherché il a été déposé ; ces deux logiciels entrent ainsi dans le champ d'application des dispositions du code général des impôts relatives au crédit d'impôt recherche ;

- en rejetant sa demande sans ordonner une nouvelle expertise alors qu'ils ne disposaient pas d'un rapport complet et contradictoire sur les travaux de recherche entrepris, les premiers juges n'ont pas motivé leur décision.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 février et 16 avril 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 27 mars 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 24 avril 2015.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Aubert,

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.

Une note en délibéré, présentée pour la SARL Eskape, a été enregistrée le 18 juin 2015.

1. Considérant que la SARL Eskape, qui exerce une activité de conseil en systèmes et logiciels informatiques, relève appel du jugement du 21 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009 et 2010 en raison de la remise en cause par le service du crédit d'impôt recherche déclaré au titre des améliorations apportées à deux logiciels ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 45 B du livre des procédures fiscales : " La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt défini à l'article 244 quater B du code général des impôts peut, sans préjudice des pouvoirs de contrôle de l'administration des impôts qui demeure seule compétente pour l'application des procédures de rectification, être vérifiée par les agents du ministère chargé de la recherche et de la technologie. / Un décret fixe les conditions d'application du présent article. " ; qu'aux termes de l'article R. 45 B-1 du même livre dans sa rédaction alors applicable : " La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt mentionné à l'article L. 45 B peut être vérifiée soit par des agents dûment mandatés par le directeur de la technologie, soit par les délégués régionaux à la recherche et à la technologie ou par des agents dûment mandatés par ces derniers. / A cet effet, ils peuvent se rendre dans les entreprises après envoi d'un avis de visite pour, notamment : / a. Prendre connaissance de la déclaration spéciale si elle ne leur a pas été communiquée précédemment ; / b. Consulter les documents comptables prévus par les articles L. 123-12 à L. 123-28 du code du commerce, ainsi que tous les documents annexes ou justificatifs, en vue de s'assurer de la réalité des dépenses affectées à la recherche ; / c. Consulter tous les documents techniques, effectuer toutes constatations matérielles, procéder à des vérifications techniques, en vue de s'assurer de la réalité de l'activité de recherche à laquelle les dépenses ont été affectées. / Les résultats de ce contrôle sont notifiés à l'entreprise et sont communiqués à l'administration des impôts. " ;

3. Considérant que les agents du ministère de la recherche habilités par les dispositions précitées de l'article R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales à vérifier la réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt recherche ne sont tenus ni de procéder à une visite sur place ni d'engager un débat oral et contradictoire avec l'entreprise faisant l'objet de ce contrôle ; que la société requérante ne se prévaut pas utilement des dispositions de l'article R. 45 B-1 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction issue du décret n° 2013-116 du 5 février 2013, entrées en vigueur le 15 février 2013 et qui, au surplus et contrairement à ce qu'elle soutient, n'imposent pas l'organisation d'un débat oral et contradictoire ;

4. Considérant qu'en l'absence de dispositions imposant la communication du rapport de l'expert, la circonstance que le rapport établi par l'expert auquel l'agent mandaté par la délégation régionale à la recherche et à la technologie de la région Centre a soumis le cas de la SARL Eskape ne lui a été communiqué qu'après l'entretien organisé dans le cadre du recours hiérarchique n'est pas utilement invoquée ;

5. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le dossier technique complémentaire que la SARL Eskape a établi, après avoir pris connaissance du rapport de l'expert, comportait des éléments nouveaux de nature à démontrer l'éligibilité des logiciels Connectikup et Naviway au crédit d'impôt recherche ; que, dans ces conditions, le refus de l'administration fiscale de transmettre ce dossier à l'expert est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

6. Considérant que la proposition de rectification du 28 février 2012 adressée à la SARL Eskape précise la teneur des dispositions de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts, décrit les logiciels Connectikup et Naviway et indique, contrairement à ce que soutient la requérante, les motifs pour lesquels le vérificateur a estimé que ces deux logiciels n'étaient pas éligibles au crédit d'impôt recherche ; qu'il n'avait pas à y reproduire des extraits du rapport d'expertise sur lequel est fondé l'avis émis le 6 février 2012 par la délégation régionale à la recherche et à la technologie de la région Centre dont il a repris la teneur ; que la proposition de rectification précise en outre la nature et le montant des redressements pour chaque année d'imposition ; qu'elle comporte ainsi, conformément aux dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, les éléments de nature à permettre à la société de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ;

7. Considérant que la circonstance que l'avis émis par la délégation régionale à la recherche et à la technologie de la région Centre n'a pas été communiqué à la société requérante avant la notification de la proposition de rectification est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

8. Considérant que, contrairement à ce que soutient la SARL Eskape, qui ne précise pas en outre les éléments nouveaux que ses observations auraient contenus, le service a suffisamment motivé la réponse qu'il y a apportée, le 8 juin 2012, en indiquant qu'elle ne comportait pas de tels éléments ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

9. Considérant qu'il résulte de ce qui est dit au point 6 du présent arrêt que la prescription prévue par l'article L. 172 G du livre des procédures fiscales a été régulièrement interrompue par la notification d'une proposition de rectification suffisamment motivée ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts : " I. Les entreprises industrielles et commerciales (...) imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) " ; qu'aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au même code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : (...) c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté. " ; que ne peuvent être prises en compte pour le bénéfice du crédit d'impôt recherche que les dépenses exposées pour le développement ou l'amélioration substantielle de matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services, dont la conception ne pouvait être envisagée, eu égard à l'état des connaissances techniques à l'époque considérée, par un professionnel averti, par simple développement ou adaptation de ces techniques ;

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des conclusions de l'expert auquel l'agent mandaté par la délégation régionale à la recherche et à la technologie de la région Centre a soumis les logiciels Connekticup et Naviway, que les améliorations apportées au premier de ces deux logiciels résultent exclusivement d'un travail d'ingénierie et la création du second repose sur des techniques déjà connues ; que les dossiers techniques produits par la société requérante ne contiennent pas d'éléments de nature à infirmer cette appréciation ; que, dans ces conditions, les dépenses qu'elle a engagées dans le cadre de l'amélioration et de la création de ces deux logiciels ne sont pas éligibles au crédit d'impôt prévu dans le domaine de la recherche par les dispositions précitées de l'article 244 quater B du code général des impôts ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Eskape n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché d'insuffisance de motivation, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la SARL Eskape de la somme qu'elle demande à ce titre ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Eskape est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Eskape et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- M. Etienvre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juillet 2015.

Le rapporteur,

S. AUBERTLe président,

F. BATAILLE

Le greffier,

C. CROIGER

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

1

N° 14NT03162 2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14NT03162
Date de la décision : 09/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Sylvie AUBERT
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : TZIKAS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-07-09;14nt03162 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award