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08/02/2016 | FRANCE | N°14MA03391

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 08 février 2016, 14MA03391


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite de la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault en date du 11 mars 2013 en ce qu'elle a rejeté sa demande indemnitaire et de condamner la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault à lui verser la somme de 18 488 euros en réparation du préjudice que lui aurait causé un défaut d'information sur l'étendue de ses droits qui lui serait imputable.

Par un jugement n° 1

301882 du 3 juin 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite de la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault en date du 11 mars 2013 en ce qu'elle a rejeté sa demande indemnitaire et de condamner la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault à lui verser la somme de 18 488 euros en réparation du préjudice que lui aurait causé un défaut d'information sur l'étendue de ses droits qui lui serait imputable.

Par un jugement n° 1301882 du 3 juin 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée au greffe de la Cour le 29 juillet 2014, sous le n° 14MA03391, M.C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 3 juin 2014, ensemble la décision implicite de la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault en date du 11 mars 2013 en ce qu'elle a rejeté sa demande indemnitaire ;

2°) de condamner la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault à lui verser la somme de 18 488 euros, à titre de réparation du préjudice qu'il estime avoir subi ;

3°) de mettre à la charge de la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault la somme de 1 500 euros TTC, à verser à son conseil, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle, ainsi que les entiers dépens.

Il soutient que :

- sur la recevabilité de son recours au regard de la compétence de la juridiction administrative, il n'a pas été en mesure de répondre au moyen soulevé d'office par le tribunal administratif de Montpellier et tiré de l'incompétence de la juridiction administrative ;

- en tout état de cause, ce moyen est infondé dès lors que l'appréciation dudit tribunal est erronée en ce qu'il a estimé que sa demande devait être regardée comme tendant seulement à obtenir le paiement des sommes dues au titre du complément de 2ème catégorie à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé dès lors qu'il ne faisait valoir aucun autre préjudice que le non versement de ces sommes ; le préjudice qu'il a subi est inhérent à ce non versement car, outre les dépenses qu'il a engagées, il n'a pu effectuer les autres dépenses nécessaires au quotidien et à l'amélioration du bien-être de son enfant ; ce préjudice est nécessairement équivalent au montant des sommes qui auraient dû être perçues et qu'il ne pourra recouvrer compte tenu de la prescription biennale s'appliquant en la matière ;

- c'est à tort, et à la suite d'une appréciation là encore erronée, que le tribunal administratif de Montpellier s'est déclaré incompétent ; en effet, comme l'a rappelé le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Hérault, dans son jugement en date du 30 octobre 2012, la maison départementale des personnes handicapées étant sous la tutelle du département, la juridiction administrative est compétente ; il avait d'ailleurs saisi le tribunal du contentieux de l'incapacité de Montpellier qui, le 15 novembre 2011, s'était déclaré incompétent ;

- sur le fond, en violation des dispositions des articles 27 de la loi du 13 juillet 1983 et 2 de la loi du 12 avril 2000, la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault a commis une faute en ne l'informant pas de son droit à pouvoir bénéficier d'un complément d'allocation dès le 1er décembre 2004 ; cette faute lui a causé un préjudice important dès lors qu'il a depuis dû faire face à des frais élevés, notamment pour aménager son domicile afin de l'adapter au lourd handicap de son enfant ; il est donc fondé à solliciter l'indemnisation de ce préjudice à hauteur de 18 488 euros, somme correspondant au montant du complément d'allocation qu'il aurait dû percevoir entre le 1er décembre 2004 et le 1er septembre 2010.

La requête a été communiquée à la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault qui n'a pas produit de mémoire.

Un courrier du 27 mai 2015 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 30 septembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience par un avis d'audience adressé le 2 décembre 2015 portant clôture d'instruction en application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marchessaux,

- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.

1. Considérant que M. C...relève appel du jugement du 3 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault en date du 11 mars 2013 rejetant sa demande indemnitaire et à ce que cette dernière soit condamnée à lui verser la somme de 18 488 euros en réparation du préjudice que lui aurait causé un défaut d'information sur l'étendue de ses droits qui lui serait imputable ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Considérant que la responsabilité qui peut incomber à l'Etat ou aux autres personnes morales de droit public en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs est soumise à un régime de droit public et relève en conséquence de la juridiction administrative ; qu'il n'en va autrement que si la loi, par une disposition expresse, a dérogé à ce principe ;

3. Considérant que, dans le jugement en litige, les premiers juges ont regardé la demande de première instance présentée par M. C...comme tendant " seulement à obtenir le paiement des sommes dues au titre du complément de 2ème catégorie à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé qu'il estime être dû eu égard aux sommes engagées depuis le 1er décembre 2004 pour l'aménagement de son logement dès lors qu'il ne fait valoir aucun préjudice autre que le non versement desdites sommes " ; qu'ainsi, ils ont rejeté cette demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître, motif pris de ce qu'en application des dispositions combinées des articles L. 142-1, L. 142-2, L. 511-1 et R. 142-1 du code de la sécurité sociale, les contestations relatives à l'attribution d'un tel complément ressortissent à la compétence des juridictions du contentieux technique de la sécurité sociale ;

4. Considérant, toutefois, que, comme le fait valoir M. C...devant la Cour, la demande qu'il a présentée devant le tribunal administratif de Montpellier tendait à obtenir la réparation du préjudice subi du fait de la faute qui aurait été commise par la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault, en raison de l'absence d'information sur son droit à pouvoir bénéficier d'un complément à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, dès le 1er septembre 2004 ; que, dès lors que la maison départementale constitue, en vertu des dispositions de l'article R. 146-16 du code de l'action sociale et des familles, un groupement d'intérêt public, un tel litige ayant trait à une éventuelle faute commise par une personne morale de droit public, ressortit nécessairement à la compétence du juge administratif ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont rejeté cette demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ; qu'il suit de là que, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen soulevé par M. C...et tiré de son irrégularité, le jugement attaqué doit être annulé ;

5. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Montpellier et la Cour de céans ;

Sur la faute de la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 27 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : " Les fonctionnaires ont le devoir de satisfaire aux demandes d'information du public dans le respect des règles mentionnées à l'article 26 de la présente loi. " ; qu'aux termes de l'article 2 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : " Le droit de toute personne à l'information est précisé et garanti par le présent chapitre en ce qui concerne la liberté d'accès aux règles de droit applicables aux citoyens. / Les autorités administratives sont tenues d'organiser un accès simple aux règles de droit qu'elles édictent. La mise à disposition et la diffusion des textes juridiques constituent une mission de service public au bon accomplissement de laquelle il appartient aux autorités administratives de veiller. (...) " ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 541-3 du code de la sécurité sociale : " La demande d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, de son complément et de la majoration mentionnés aux articles L. 541-1 et L. 541-4, est adressée à la maison départementale des personnes handicapées compétente dans les conditions prévues à l'article L. 146-3 du code de l'action sociale et des familles. (...) " ;

8. Considérant que M. C...se fonde sur les dispositions de ces deux articles pour soutenir que l'administration serait soumise à une obligation générale d'information à l'égard des usagers et qu'en l'espèce, la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault a commis une faute en ne l'informant pas de son droit à pouvoir bénéficier d'un complément de 2ème catégorie à l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé entre le 1er décembre 2004 et le 1er septembre 2010 ; que, toutefois, ni ces dispositions, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire, n'imposent à l'administration une obligation générale d'information individuelle des administrés sur l'étendue de leurs droits, en l'absence de toute demande en ce sens ; qu'en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier, et il n'est pas allégué, que M. C...ait, antérieurement au 1er décembre 2004, demandé, comme l'y invite les dispositions de l'article R. 541-3 du code de la sécurité sociale, le bénéfice dudit complément, ni même qu'il ait saisi la maison départementale des personnes handicapées intimée d'une demande d'information à son sujet ; que, dans ces conditions, l'appelant n'établit pas l'existence d'une faute qui aurait été commise par la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault ; que, par suite, ses conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault en date du 11 mars 2013 rejetant sa demande indemnitaire et à la condamnation de cette dernière à lui verser la somme de 18 488 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...) " ;

10. Considérant que la présente instance n'a donné lieu à aucuns dépens au sens de ces dispositions ; que les conclusions de M. C...tendant à ce que les entiers dépens soient mis à la charge de la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault ne peuvent donc qu'être rejetées ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée : " (...) En toute matière, l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle partielle ou totale peut demander au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à lui payer une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. / Si le juge fait droit à sa demande, l'avocat dispose d'un délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée pour recouvrer la somme qui lui a été allouée. S'il recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

12. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que le conseil de M. C...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du 3 juin 2014 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Montpellier et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et à la maison départementale des personnes handicapées de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2016, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- Mme Hameline, premier conseiller,

- Mme Marchessaux, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 février 2016.

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No 14MA03391


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA03391
Date de la décision : 08/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Aide sociale - Différentes formes d'aide sociale - Aide sociale aux personnes handicapées.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics.

Sécurité sociale - Contentieux et règles de procédure contentieuse spéciales - Règles de compétence - Compétence de la juridiction administrative.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : RAHAL

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-02-08;14ma03391 ?
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