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24/04/2015 | FRANCE | N°14MA00987

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 24 avril 2015, 14MA00987


Vu la requête, enregistrée le 17 février 2014 au greffe de la Cour, sous le n°14MA00987, présentée pour la société " Combronde Logistique " dont le siège est zone industrielle de Felet à Thiers (63300), par la Selarl Veber associés ;

La société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200120 du 19 décembre 2013 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Bollène à lui verser la somme de 2 124 153 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du chef de l'absence de respect par l

adite commune de sa promesse de raccordement ferroviaire du site à proximité duquel...

Vu la requête, enregistrée le 17 février 2014 au greffe de la Cour, sous le n°14MA00987, présentée pour la société " Combronde Logistique " dont le siège est zone industrielle de Felet à Thiers (63300), par la Selarl Veber associés ;

La société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200120 du 19 décembre 2013 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Bollène à lui verser la somme de 2 124 153 euros en réparation du préjudice qu'elle a subi du chef de l'absence de respect par ladite commune de sa promesse de raccordement ferroviaire du site à proximité duquel elle s'est implantée, et à la mise à la charge de la commune de Bollène de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de condamner la commune de Bollène à lui verser la somme de 2 124 153 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bollène une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2015 :

- le rapport de M. Pocheron, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Revert, rapporteur public ;

- les observations de MeA..., pour la société " Combronde Logistique " et celles de MeB..., pour la commune de Bollène ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré présentée pour la société " Combronde Logistique ", enregistrée le 8 avril 2015 ;

1. Considérant que par courriers des 26 et 27 octobre 2011 respectivement adressés au président de la communauté de communes Rhône-Lez-Provence (CCRLP) et au maire de Bollène (Vaucluse), la société " Combronde Logistique " a réclamé le versement conjoint et solidaire de la somme de 2 124 153 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi du chef de l'absence de raccordement ferroviaire de la zone d'aménagement concerté (ZAC) Pan Euro Parc que le maire de Bollène avait, par courrier du 15 novembre 2006, promis " dans un délai raisonnable de trois années " ; que cette demande a été rejetée expressément par le maire de Bollène le 16 novembre 2011, et, implicitement, par la CCRLP ; que, par la présente requête, la société " Combronde Logistique " relève appel du jugement en date du 19 décembre 2013 du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Bollène à lui verser la somme de 2 124 153 euros, la société s'étant désistée de ses conclusions dirigées contre la CCRLP en cours d'instance devant le tribunal ;

Sur la responsabilité de la commune de Bollène :

2. Considérant que si une collectivité publique ne respecte pas un engagement formel et précis vis-à-vis d'un tiers, sa responsabilité est engagée pour faute à son égard ;

3. Considérant que, par courrier du 15 novembre 2006 adressé à la société " Combronde Logistique ", qui avait manifesté son intention de s'installer dans la zone industrielle de Tardier, située à proximité de la ZAC Pan Euro Parc, le maire de Bollène a confirmé que dans la perspective de cette implantation, et conformément à de " précédentes rencontres ", " le raccordement ferré de la plate-forme logistique Pan Euro Parc sera réalisé dans un délai raisonnable de trois années ", et précisé que les modalités de réalisation étaient alors à l'étude ; que la société requérante s'est ainsi installée à Bollène le 1er juin 2007 ; que par ce courrier, qui faisait suite à plusieurs réunions entre la commune et l'entreprise, alors que le maire de Bollène était également président de la CCRLP, qui, lors de la séance du 28 août 2007 de son conseil communautaire, délibérait sur ce projet de raccordement de la voie ferrée, la commune de Bollène doit être regardée comme ayant pris un engagement formel et précis de réaliser le raccordement ferré de la plate-forme logistique Pan Euro Parc ; que les difficultés avec la CCRLP invoquées par la commune, concernant la détermination de la collectivité compétente pour assurer la maîtrise d'ouvrage du projet en litige, qui ne sont en tout état de cause apparues qu'à partir de septembre 2008 après un changement de municipalité, pourraient expliquer l'existence d'un retard dans l'exécution des travaux, mais ne sauraient justifier l'absence totale de réalisation de l'engagement pris ; qu'il ressort tant du courrier du 15 novembre 2006 du maire de Bollène précité, que de la délibération sus-évoquée de la CCRLP du 28 août 2007 ou d'un courrier du 22 janvier 2008 adressé par l'entreprise au maire de Bollène que, jusqu'aux difficultés évoquées pour la première fois en septembre 2008, le projet était bien engagé ; qu'il ne saurait ainsi être reproché à la société " Combronde Logistique " d'avoir été imprudente en décidant son implantation à Bollène le 1er juin 2007 ; que, dès lors, en l'absence de réalisation du raccordement ferré de la plate-forme logistique Pan Euro Parc en novembre 2009, dans le délai " raisonnable " prévu, la commune de Bollène n'a pas respecté l'engagement qu'elle avait pris et a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, à compter de cette date, à l'égard de la société " Combronde Logistique " ;

Sur le préjudice :

4. Considérant que l'installation d'une voie ferrée, qui a fait l'objet d'une facture du 9 novembre 2007 d'un montant de 157 225 euros, et à supposer même qu'elle ait été effectuée sur le site de Bollène de la société " Combronde Logistique ", est antérieure au début de la période de responsabilité de la commune ; que deux des tableaux d'amortissement produits par la requérante, dépourvus de toute précision de valeur probante quant à leur objet, ne sont que des simulations remises à titre indicatif sans valeur contractuelle ; que l'appelante ne justifie pas à quels investissements sur la zone industrielle de Tardier correspondraient les tableaux d'amortissement de prêts accordés par la Banque Populaire le 28 février 2008 et par la Société Générale le 22 mars 2008, d'un montant de 240 000 euros chacun, qui se bornent à mentionner respectivement un " équipement amortissable 614 " et la " plate-forme de Bollène " ; que, dans ces conditions, le préjudice évalué à 296 704 euros invoqué au titre de son " investissement immobilier " par la requérante, n'est en tout état de cause pas établi ;

5. Considérant que, dans son courrier du 22 janvier 2008 adressé à la commune de Bollène, la société " Combronde Logistique " a indiqué qu'elle s'acquitterait de la somme de 300 000 euros au titre de la taxe locale d'équipement ; que, par avis du 9 octobre 2007, en tout état de cause avant le début d'engagement de la période de responsabilité de la commune de Bollène, il lui a été réclamé à ce titre la somme de 295 475 euros ; que la requérante, qui n'établit d'ailleurs aucunement avoir acquitté cette somme auprès du trésor public, et réclame en outre en réparation de son préjudice une somme de 360 000 euros dont le montant n'est pas justifié, ne démontre pas davantage qu'il lui aurait été promis une exonération de la taxe locale d'équipement, comme aux entreprises installées sur la ZAC Pan Euro Parc ; que, par suite, la société appelante n'est pas fondée à invoquer un préjudice au titre de la taxe locale d'équipement ;

6. Considérant que pour réclamer le remboursement des frais liés à l'acquisition d'un loco-tracteur, la société " Combronde logistique " produit une facture du 30 octobre 2008 antérieure à la période de responsabilité, et un tableau d'amortissement qui est en fait une simulation remise à titre indicatif sans valeur contractuelle ; que, dès lors, la société n'est pas fondée à demander la somme de 263 766 euros de ce chef ;

7. Considérant que l'appelante invoque des surcoûts liés à l'absence du raccordement ferré promis, du fait de l'obligation de décharger les trains en provenance de la société " Owens Illinois " en gare de Bollène, de la mise en place de navettes, de l'acquisition de matériel et de l'embauche de onze salariés pour cette seule tâche ; que, cependant, elle ne démontre pas en quoi le fait de décharger les trains en gare de Bollène et pas au terminus du raccordement ferré litigieux l'a obligée à acquérir un chariot de brouettage le 19 août 2010 pour un montant de 76 163 euros avec les frais financiers ; que les surcoûts d'exploitation, constitués par des " coups de fourche supplémentaires pour chaque palette " et le transport de ces palettes par camion, évalués à 145 800 euros par an de 2009 à 2011, ne sont quant à eux aucunement établis, ni dans leur réalité, ni dans leur montant ;

8. Considérant que la société " Combronde Logistique " invoque une perte d'exploitation de 230 040 euros par an de 2009 à 2011 constituée par la " perte de volumes " de trois sociétés clientes en raison de l'absence de l'embranchement ferroviaire promis ; qu'elle ne produit, à l'appui de ses allégations, qu'un courrier du 25 mai 2011 de la société " O-I Manufacturing " qui se borne à mettre en garde la requérante si une solution n'était pas trouvée rapidement au problème des surcoûts, pour cette société, liés à l'absence de raccordement ferré ; que la perte d'exploitation invoquée n'est ainsi pas établie ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société " Combronde Logistique " n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la société " Combronde Logistique " le versement de la somme réclamée par la commune de Bollène au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la commune de Bollène, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à la société " Combronde Logistique " la somme que celle-ci réclame au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société " Combronde Logistique " est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Bollène tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société " Combronde Logistique " et à la commune de Bollène.

Copie en sera adressée à la communauté de communes Rhône-Lez-Provence.

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N°14MA00987


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00987
Date de la décision : 24/04/2015
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Agissements administratifs susceptibles d'engager la responsabilité de la puissance publique - Promesses.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Caractère certain du préjudice - Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Michel POCHERON
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : LENTILHAC

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-04-24;14ma00987 ?
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