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06/12/2016 | FRANCE | N°14LY02024

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2016, 14LY02024


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

1°) d'annuler la décision du 2 octobre 2013 par laquelle le président du conseil général du Puy-de-Dôme a retiré son agrément d'assistante maternelle ;

2°) d'annuler la décision du 17 décembre 2013 par laquelle le président du conseil général du Puy-de-Dôme a rejeté son recours gracieux ;

3°) de condamner le département du Puy-de-Dôme à lui verser une indemnité de 9 000 euros.

Par un jugement n° 13

02011 du 13 mai 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé les décisions du 2 octobre 2013 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

1°) d'annuler la décision du 2 octobre 2013 par laquelle le président du conseil général du Puy-de-Dôme a retiré son agrément d'assistante maternelle ;

2°) d'annuler la décision du 17 décembre 2013 par laquelle le président du conseil général du Puy-de-Dôme a rejeté son recours gracieux ;

3°) de condamner le département du Puy-de-Dôme à lui verser une indemnité de 9 000 euros.

Par un jugement n° 1302011 du 13 mai 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé les décisions du 2 octobre 2013 et du 17 décembre 2013 et rejeté le surplus des conclusions de la demande de MmeA....

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 30 juin 2014, et un mémoire complémentaire, enregistré le 19 décembre 2014, le département du Puy-de-Dôme, représenté par la SELARL Cabinet GB2A, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 13 mai 2014 en tant qu'il annule les décisions du 2 octobre 2013 et du 17 décembre 2013 ;

2°) de mettre à la charge de Mme A...le versement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il ressort des pièces du dossier que Mme A...n'a pas informé les parents de la chute de leur enfant le jour de la survenance des faits ;

- Mme A...n'aurait pas dû laisser l'enfant seule quand bien même elle se trouvait dans un transat et n'a pas su évaluer la gravité de la situation à laquelle elle se trouvait confrontée ;

- Mme A...n'a produit aucun élément de nature à remettre en cause le lien entre le céphalhématome dont a souffert l'enfant et la chute qu'elle a subie à son domicile ; l'enfant n'ayant subi aucun autre choc entre le jour de cette chute et l'examen médical qu'elle a subi, ce lien est nécessairement établi ; les circonstances de l'accident pourraient différer du récit qu'en donne MmeA... ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que l'accident n'était pas grave, au sens des dispositions de l'article R. 421-40 du code de l'action sociale et des familles, dès lors que la gravité d'un accident doit être évaluée au regard des conséquences qu'il aurait pu avoir ;

- la procédure de retrait d'agrément n'a pas à être mise en corrélation avec la procédure de licenciement engagée par les parents de l'enfant Valentine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 septembre 2014, MmeA..., représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du département du Puy-de-Dôme une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les parents lui ont reproché d'être à l'origine du traumatisme dont a été victime leur fille dans le seul but de la licencier pour faute grave afin de ne pas avoir à régler l'indemnité de licenciement et l'indemnité de préavis ;

- sa responsabilité dans la survenance du céphalhématome n'est pas établie ; l'incident qui s'est produit à son domicile ne saurait expliquer la présence, médicalement constatée, d'un hématome sur la partie arrière du crâne de l'enfant ; le retrait d'agrément est fondé sur des suppositions et non sur des faits avérés ; c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le président du conseil général du Puy-de-Dôme avait commis une erreur d'appréciation en lui retirant son agrément.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Peuvrel,

- les conclusions de M. Clément, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour le département du Puy-de-Dôme.

1. Considérant que le département du Puy-de-Dôme relève appel du jugement du 13 mai 2014 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'il a annulé la décision du président du conseil général du Puy-de-Dôme du 2 octobre 2013 retirant l'agrément de Mme A... en qualité d'assistante maternelle et sa décision du 17 décembre 2013 rejetant le recours gracieux de Mme A...contre cette décision ;

Sur la légalité des décisions du 2 octobre 2013 et du 17 décembre 2013 :

2. Considérant, en premier lieu qu'aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction applicable à la date des décisions en litige : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil général du département où le demandeur réside. (...) L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 421-6 du même code : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. (...) " ; que l'article R. 421-40 du même code dispose : " L'assistant maternel employé par un particulier est tenu de déclarer sans délai au président du conseil général tout décès ou tout accident grave survenu à un mineur qui lui est confié. (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il incombe au président du conseil général de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies ; qu'à cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est victime des comportements en cause ou risque de l'être ;

4. Considérant que MmeA..., bénéficiaire d'un agrément pour exercer la profession d'assistante maternelle à compter du 1er octobre 2009, accueillait depuis le mois de septembre 2010 l'enfant Simon, âgé de trois ans à la date des faits, et, depuis janvier 2013, sa soeur Valentine, alors âgée de cinq mois ; que selon le compte rendu de l'entretien entre Mme A... et le médecin du service de protection maternelle et infantile (PMI) du département du Puy-de-Dôme, rédigé le 7 mars 2013, l'intéressée a relaté que, le mardi 26 février 2013, après qu'elle s'est absentée quelques instants pour accompagner aux toilettes le frère de l'enfant Valentine, laquelle se trouvait attachée par la sangle ventrale dans son transat, posé sur le sol de la cuisine, Mme A...l'a, à son retour, retrouvée "penchée en avant et légèrement sur le côté, la tête sur le sol" ; qu'elle a constaté que l'enfant ne pleurait pas, ne présentait aucune marque sur la tête et mangeait normalement ; que les enfants ont passé la journée du 27 février 2013 chez elle ; qu'au soir, la mère a constaté une légère déformation du crâne de l'enfant ; que cette déformation s'étant accentuée le lendemain, jeudi 28 février 2013, jour où les enfants étaient gardés par leur mère, l'enfant Valentine a été admise le soir aux urgences pédiatriques du centre hospitalier universitaire Estaing de Clermont-Ferrand ; qu'un céphalhématome pariétal gauche a alors été détecté ; que le président du conseil général du Puy-de-Dôme, a suspendu l'agrément de Mme A...et, après consultation de la commission consultative paritaire départementale le 13 septembre 2013, a procédé au retrait de cet agrément par décision du 2 octobre 2013, aux motifs que Mme A...avait été défaillante dans la surveillance de l'enfant Valentine, qu'elle n'avait pas su évaluer la gravité de la situation, qu'elle n'avait pas informé les parents de l'accident survenu à son domicile le 26 février 2013 et qu'elle ne l'avait pas déclaré au président du conseil général du Puy-de-Dôme, conformément aux dispositions de l'article R. 421-40 du code de l'action sociale et des familles ; que le recours gracieux formé par Mme A...contre cette décision a été rejeté par décision du 17 décembre 2013 ;

5. Considérant qu'il ressort des termes du courrier électronique adressé le 21 mars 2013 par la mère de l'enfant au service de PMI que la déformation qu'elle a constatée se trouvait à l'arrière de la tête de son enfant ; que ces propos sont confirmés par le certificat établi le 2 avril 2013 par le médecin pédiatre de l'enfant, lequel indique avoir constaté un céphalhématome pariétal gauche "dû à un traumatisme crânien (suite à une chute en arrière d'une hauteur certaine avec choc postérieur gauche)" ; qu'il ressort des pièces du dossier que, selon les médecins, l'incident qui a eu lieu au domicile de Mme A...ne peut expliquer ni l'ampleur ni l'emplacement de l'hématome ; qu'eu égard aux caractéristiques de la lésion, au délai qui s'est écoulé entre son apparition et la chute de l'enfant de son transat et alors que les circonstances de l'incident telles qu'elles ont été rapportées par Mme A...ne font l'objet d'aucune contestation sérieuse par le département, le lien de causalité entre le traumatisme et cet incident, lequel ne peut, dans les circonstances où il s'est produit, être regardé comme un accident grave au sens des dispositions de l'article R. 421-40 précité du code de l'action sociale et des familles, n'est pas établi ; que, par ailleurs, s'il est indiqué, dans le compte rendu de l'entretien de Mme A...avec le médecin du service de la PMI mentionné ci-dessus, que Mme A...a informé la mère de Valentine de l'incident lorsqu'elle est venue récupérer les enfants le 26 février 2013, l'intéressée a elle-même déclaré dans sa demande devant le tribunal administratif qu'ayant jugé l'incident anodin, elle n'avait pas pensé à en parler immédiatement aux parents ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, cette omission, comme le défaut de surveillance de l'enfant Valentine pendant quelques instants, ne permet pas d'établir que Mme A...ne remplissait plus les conditions de l'agrément ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le président du conseil général du Puy-de-Dôme avait commis une erreur d'appréciation en procédant au retrait de l'agrément de MmeA... ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le département du Puy-de-Dôme n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé les décisions des 2 octobre et 17 décembre 2013 ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de MmeA..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement au département du Puy-de-Dôme de la somme demandée au titre des frais non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département du Puy-de-Dôme le versement de la somme demandée en application des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du département du Puy-de-Dôme est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au département du Puy-de-Dôme et à Mme C... A....

Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme Peuvrel, premier conseiller,

- M. Deliancourt, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 décembre 2016.

4

N° 14LY02024


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02024
Date de la décision : 06/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

04-02-02-02-01 Aide sociale. Différentes formes d'aide sociale. Aide sociale à l'enfance. Placement des mineurs. Placement familial.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : SELARL GB2A

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-12-06;14ly02024 ?
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