Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...M...veuveJ..., M. F...N...J..., Mme H...I...néeJ..., M. E...J..., Mlle L...-P...J..., Mme D...C...néeJ..., M. B...J...ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand à les indemniser, avec capitalisation des intérêts échus à compter de la réclamation préalable en application de l'article 1154 du code civil, des préjudices résultant des fautes commises par cet établissement dans la prise en charge le 30 mai 2009 de M. F... O...J...dont le décès est survenu le 6 juillet 2009 et de mettre à la charge de cet hôpital les dépens.
Par un jugement n° 1200591 du 19 novembre 2013, le tribunal a, d'une part, rejeté cette demande ainsi que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy de Dôme dirigées contre le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand, et d'autre part, mis à la charge de cet hôpital les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 4 871,26 euros.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 janvier 2014, présentée pour Mme A...M...veuveJ..., Mme H...I...néeJ..., M. E...J..., Mlle L...-P...J..., Mme D...C...néeJ..., M. B...J..., il est demandé à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 19 novembre 2013 en ce qu'il a rejeté leur demande indemnitaire ;
2°) de prononcer la condamnation demandée avec la capitalisation des intérêts à la date de la réclamation préalable ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de laisser à la charge de cet établissement les dépens comprenant les frais d'expertise.
Ils soutiennent que :
- comme l'a jugé le tribunal, le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand a commis une faute dans le traitement de l'appel téléphonique par le médecin régulateur du SAMU qui aurait dû immédiatement faire partir l'équipe SMUR, disponible, au premier appel à 21h03 au lieu du médecin de garde ; cette faute a entraîné un retard de prise en charge ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, cette faute est à l'origine d'une perte de chance pour M.J... d'obtenir une amélioration et d'échapper à une issue fatale, le lien de causalité étant ainsi établi ;
- cette perte de chance doit être estimée à 90 % ;
- le préjudice subi par M.J..., compte tenu du pourcentage de perte de chance de 90 %, doit être évalué à 700 euros au titre du déficit fonctionnel total, 1 000 euros pour les souffrances endurées ainsi que pour le préjudice esthétique temporaire et pour le préjudice d'agrément ;
- compte tenu de la perte de chance, le préjudice économique de Mme veuve J...s'élève à 44 076,94 euros, son préjudice moral à 25 000 euros, son préjudice d'accompagnement à 4 500 euros et les frais de conseils à 1 080 euros ;
- les préjudices subis par chacun des enfants s'élèvent pour chacun d'eux à 4 500 euros pour le préjudice d'accompagnement et 20 000 euros pour le préjudice moral, les frais d'obsèques à 4 130,41 euros et les frais de déplacement à 825,03 euros pour M. E...J....
Par un mémoire, enregistré le 5 mars 2014, la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme demande :
- l'annulation du jugement du 19 novembre 2013 en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand, d'une part, à lui rembourser les dépenses de santé qu'elle a dû engager du fait de la prise en charge fautive de M. J...le 30 mai 2009, outre intérêts légaux et capitalisation des intérêts, et d'autre part, à lui verser l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale ;
- de prononcer la condamnation demandée, outre intérêts à compter du 3 août 2012 et la capitalisation des intérêts à compter du 3 août 2013, ainsi que le versement d'une somme de 1 028 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;
- de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- comme l'a jugé le tribunal, il existe un retard de diagnostic et de prise en charge fautifs ;
- la relation de causalité entre ce retard et le décès de M. J...est établie par le rapport d'expertise ;
- l'intégralité des conséquences dommageables et non une perte de chance devra être indemnisée dès lors que les études d'ordre médical mentionnées par l'expert permettent d'affirmer qu'avec une prise en charge méthodique l'aggravation ou même l'évolution fatale ne se produit plus ;
- elle justifie d'une somme de 101 136,07 euros au titre des frais d'hospitalisation au centre hospitalier de Montluçon.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 août 2014, le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand conclut au rejet de la requête des consorts J...et des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme.
Il soutient que :
- aucune faute n'a été commise par le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand concernant la prise en charge de M. J...;
- le lien de causalité entre le prétendu retard de l'arrivée du véhicule et le décès n'est pas établi et cette prétendue faute n'a pas fait perdre à M. J...une chance de survie ;
- à titre subsidiaire, la perte de chance ne saurait excéder 10 % ;
- à titre très subsidiaire, concernant les préjudices, l'indemnisation ne peut s'appliquer qu'à l'aggravation résultant de la faute, le préjudice d'agrément de M. J...n'est pas établi, Mme veuve J...n'a subi aucune perte de revenus, le préjudice d'affection évalué par les requérants est d'un montant excessif, le décompte de la caisse ne justifie pas des dépenses engagées en raison de la prétendue faute et ne tient pas compte du fait que la victime aurait du être de toute façon hospitalisé et qu'il est possible que cette hospitalisation aurait été même plus longue et aurait entraîner des frais plus importants.
Par une ordonnance en date du 22 août 2014, la clôture d'instruction a été fixée au 19 septembre 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- l'arrêté du 19 décembre 2014 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.
1. Considérant que le 30 mai 2009 à 20 heures 45, M. F...J..., né le 16 février 1943, qui souffrait de diabète et d'asthme, a été victime d'un malaise avec détresse respiratoire prédominante ; qu'à 21 heures 05, devant l'aggravation de son état de santé, sa fille a appelé le service d'aide médicale urgente (SAMU) rattaché au centre hospitalier universitaire (CHU) de Clermont-Ferrand ; que le médecin régulateur a décidé de classer cet appel en " niveau R2 " (" urgence vraie sans détresse vitale ") et a dépêché sur place le médecin de garde ; qu'à 21 heures 07, les proches de M. J...ont appelé le médecin habituel de la famille, qui demeure à proximité, lequel a pris l'intéressé en charge à 21 heures 15 ; qu'à 21 heures 23, au vu de l'état très dégradé de M.J..., ce médecin a alerté le SAMU, dont le médecin régulateur a alors déclenché une intervention du service mobile d'urgence et de réanimation (SMUR) ; qu'à 21 heures 25, en présence du médecin de garde, qui était entre temps arrivé sur les lieux, M. J...a été frappé d'un arrêt cardio respiratoire (ACR) qui a été pris en charge par les deux médecins présents, lesquels ont pratiqué un massage cardiaque externe ; qu'à l'arrivée du véhicule du SMUR à 21 heures 39, il a été alors procédé, ainsi que le relate l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif, à une réanimation classique comprenant notamment une défibrillation conduisant à " une récupération spontanée en 11 minutes " ; qu'à 21 heures 50, le rythme cardiaque normal de M. J...a été rétabli, son état a été stabilisé, le patient étant toutefois plongé dans un coma profond ; que M. J...a été ensuite transporté par le véhicule du SMUR au centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand vers 22 h 45-23 h 00, puis en hélistation de cet hôpital vers l'hôpital de Montluçon où il a été pris en charge à 23 heures 40, alors qu'il était toujours en état de coma profond et que, comme l'expose l'expert, ses réactions traduisaient la gravité de l'atteinte cérébrale dont il avait été victime à la suite de son arrêt cardio respiratoire prolongé ; qu'il a ensuite été transféré, le 16 juin 2009, au service neuro-réanimation du CHU de Clermont-Ferrand dans un état qualifié par l'expert de ''coma chronique végétatif sans amélioration'' ; que le décès est survenu le 6 juillet 2009, attribué aux suites du coma anoxique post arrêt cardio respiratoire consécutif à la survenue d'une crise d'asthme ayant évoluée en asthme aigu grave dans la soirée du 30 mai ; que les consorts J...relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 novembre 2013 rejetant leur demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand à les indemniser des préjudices résultant de fautes commises par cet établissement dans la prise en charge de M. J... ; que la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme conclut à l'annulation de ce jugement en ce que le tribunal a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand à lui rembourser les dépenses de santé qu'elle a dû engager en raison de la dégradation de l'état de santé de M. F... J...à compter du 30 mai 2009 ;
Sur la responsabilité :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 6311-2 du code de la santé publique : " (...) les services d'aide médicale urgente : /1° Assurent une écoute médicale permanente ; /2° Déterminent et déclenchent, dans le délai le plus rapide, la réponse la mieux adaptée à la nature des appels (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les SAMU, qui comportent un centre de réception et de régulation des appels (centre 15), sont chargés d'assurer une écoute médicale permanente, de déterminer et déclencher la réponse la mieux adaptée à la nature des appels, de s'assurer de la disponibilité des moyens d'hospitalisation, publics ou privés, adaptés à l'état du patient, d'organiser, le cas échéant, le transport dans un établissement public ou privé en faisant appel à un service public ou à une entreprise privée de transports sanitaires, de veiller enfin à l'admission du patient ; qu'en outre, le médecin régulateur placé auprès de chaque SAMU est chargé d'évaluer la gravité de la situation et de mobiliser l'ensemble des ressources disponibles (médecins généralistes, SMUR, ambulances), en vue d'apporter la réponse la plus appropriée à l'état du patient et de veiller à ce que les soins nécessaires lui soient effectivement délivrés ; qu'il doit, pour ce faire, se fonder sur une estimation du degré de gravité avérée ou potentielle de l'atteinte à la personne concernée, ainsi que de l'état et des délais d'intervention des ressources disponibles ; que ces appréciations reposent sur un dialogue entre le médecin régulateur et la personne concernée, ou, le cas échéant, son entourage ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, lequel expert a eu accès à la transcription des entretiens téléphoniques du médecin régulateur, que " le critère de gravité essentiel de cyanose " avait été énoncé spontanément au médecin régulateur par la fille de M. J...lors de son appel reçu à 21 heures 05 ; que l'expert a relevé que cet élément, qui témoignait d'une détresse respiratoire aigue chez un asthmatique connu et traité, n'avait pas été " reconnu, ni approfondi " par le médecin régulateur lors de cet entretien qualifié par l'expert de limité et incomplet ; qu'en l'absence de prise en compte de ce symptôme et faute d'un interrogatoire plus complet, le médecin régulateur a été conduit à évaluer l'état du patient comme correspondant à une simple crise d'asthme, au lieu d'un asthme aigu grave, et à commettre ensuite " une erreur d'orientation " en envoyant sur les lieux, à la suite de ce premier appel, le médecin de garde et non un véhicule du SMUR ; que cette erreur de prise en charge a ainsi retardé, d'environ 16 minutes selon les conclusions de l'expertise, l'arrivée d'un véhicule médicalisé qui était la réponse adéquate à l'état du patient ;
5. Considérant, par ailleurs, que comme l'expose le CHU de Clermont-Ferrand, les médecins présents au moment de l'arrêt cardio respiratoire ont pris M. J...en charge en pratiquant notamment un massage cardiaque externe, dont il n'est pas contesté qu'il s'agissait d'un soin correspondant à l'état du patient ; que l'expert indique qu'il n'est pas possible de formuler une hypothèse sur l'évolution qui aurait été celle de M. J...en cas de prise en charge plus précoce et plus complète par un véhicule du SMUR, cet expert précisant que " tout était possible entre une survie sans séquelles et une évolution identique à celle qui a été observée " ;
6. Considérant toutefois que dans le cas où la faute commise lors de la prise en charge ou le traitement d'un patient dans un établissement public hospitalier a compromis ses chances d'obtenir une amélioration de son état de santé ou d'échapper à son aggravation, le préjudice résultant directement de la faute commise par l'établissement, et qui doit être intégralement réparé, n'est pas le dommage corporel constaté, mais la perte de chance d'éviter que ce dommage soit advenu ; que la réparation qui incombe à l'hôpital doit alors être évaluée à une fraction du dommage corporel déterminée en fonction de l'ampleur de la chance perdue ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'une prise en charge adéquate de M. J... aurait amené l'équipe médicale du SMUR au chevet de celui-ci dans la tranche des cinq minutes autour de la survenue de l'arrêt cardio respiratoire ; que cette présence plus précoce constituait pour l'expert " la garantie du maximum de chances pour éventuellement prévenir la survenue de l'arrêt cardio respiratoire ou en éviter ou atténuer les conséquences " ; que la faute ainsi commise par le médecin régulateur est à l'origine d'une perte de chance de survie du patient, imputable au CHU de Clermont-Ferrand dont la responsabilité se trouve dès lors engagée ;
8. Considérant que, compte tenu de l'ampleur de la chance perdue, la fraction des préjudices indemnisables qui sont la conséquence du décès de M. J...doit être fixée à 50 % ;
Sur les préjudices de M.J... :
9. Considérant, en premier lieu, que les consorts J...n'ont réclamé le remboursement d'aucune dépense de santé, contrairement à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme ; qu'il ne résulte pas en en outre de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, qu'en l'absence de faute commise par le médecin régulateur l'état de santé de M. J...aurait malgré tout nécessairement entraîné son hospitalisation ; que l'état des débours que présente la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme, qui est suffisamment détaillé, met en évidence la prise en charge des frais d'hospitalisation de M. J... pour un montant total de 101 136,07 euros au titre de la période du 30 mai 2009 au 6 juillet 2009 ; que ces frais peuvent être regardés comme étant en rapport avec la faute commise par le médecin régulateur ; que le CHU de Clermont-Ferrand n'étant tenu à réparation qu'à hauteur de 50%, le montant total des indemnités dues à la caisse dont le versement lui incombe s'élève à 50 568,03 euros ;
10. Considérant, en deuxième lieu, que, durant la période du 30 mai au 6 juillet 2009, M. J..., âgé de 66 ans, a été atteint d'un déficit temporaire total ; qu'il sera fait une juste appréciation des troubles subis à raison de ce déficit fonctionnel temporaire en le fixant à un montant de 700 euros ; que, compte tenu du taux de perte de chance de 50 %, le montant dû à ce titre par le CHU de Clermont-Ferrand aux héritiers de M. J... s'élève à 350 euros ;
11. Considérant, en troisième lieu, que les préjudices correspondant aux souffrances endurées, qualifiées par l'expert de très minimes à modérées, au préjudice esthétique temporaire ainsi qu'au préjudice d'agrément subis par M. J...au cours de cette période doivent être évalués à la somme totale de 3 000 euros ; qu'après application du taux de perte de chance de 50 %, l'indemnité due à ce titre par le CHU de Clermont-Ferrand aux héritiers de M. J...s'élève à la somme de 1 500 euros ;
12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CHU de Clermont-Ferrand doit être condamné à verser à Mme A...M...veuveJ..., en sa qualité d'ayant droit de son époux, à Mme H...I...néeJ..., à M. E...J..., à Mlle L...-P...J..., à Mme D...C...néeJ..., et à M. B...J..., en leur qualité d'ayants droit de leur père, une indemnité correspondant, pour chacun d'entre eux, à une fraction de la somme de 1 850 euros visée ci-dessus, fixée au prorata des droits que chacun détient dans la succession ; que, par ailleurs, la CPAM du Puy-de-Dôme est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande aux fins de condamnation de cet établissement hospitalier à lui verser une somme de 50 568,03 euros au titre des prestations de santé ;
Sur les préjudices personnels des ayants droit :
En ce qui concerne MmeJ... :
13. Considérant, en premier lieu, que le préjudice économique subi par Mme K... G...veuve J...du fait du décès de son époux est constitué par la perte des revenus de la victime qui étaient consacrés à son entretien, compte tenu des propres revenus de Mme J...; qu'il résulte de l'avis d'imposition concernant les revenus de la famille durant l'année 2008, qu'au titre de l'année précédant son décès, le montant des revenus perçus par M. J...s'est élevé à la somme de 12 574 euros ; que son épouse percevait des revenus pour un montant de 7 567 euros ; que les revenus dont bénéficiaient ainsi la famille s'élevaient, avant le décès, à un montant total de 20 141 euros ; que, compte tenu de la part de 25 % des revenus du foyer que M. J...devait consacrer à sa propre consommation, des revenus perçus par Mme J...avant le décès de son mari, de la pension de réversion qu'elle perçoit depuis ce décès, qui peut être estimée, eu égard aux éléments produits, à un montant annuel total de 4 620 euros au moment du décès, du prix de l'euro de la rente viagère à soixante-six ans de 14,872 correspondant au barème de capitalisation reposant sur la table de mortalité 2006/2008 pour les hommes avec un taux d'intérêt à 1,2 % prenant ainsi en compte, notamment, l'espérance de vie qui était celle du défunt à la date de son décès, la perte de revenus pour Mme J...liée au décès de son époux doit être établie à 43 407,65 euros ; que, la fraction indemnisable du préjudice ayant été fixée à 50 %, il y a lieu de fixer à 21 703,82 euros le montant de l'indemnité totale que devra verser le CHU de Clermont-Ferrand à Mme K... G...veuve J...au titre de ce chef de préjudice ;
14. Considérant, en deuxième lieu, que Mme J...demande le remboursement des honoraires qu'elle a versés au docteur Hivert qui l'a assistée ; que ces honoraires s'élèvent à une somme de 1 200 euros dont elle produit les justificatifs ; que l'utilité de cette assistance n'est pas sérieusement contestée ; que Mme veuve J...justifie également des frais de déplacement à hauteur de 88,80 euros correspondant à des frais de péage ; qu'elle ne produit aucun autre élément établissant qu'elle a acquitté personnellement d'autres frais de déplacement ; que, dès lors, et compte tenu de la fraction indemnisable du préjudice fixée à 50 %, Mme J...est seulement fondée à demander le remboursement par le CHU de Clermont-Ferrand de la somme de 644,40 euros au titre de ces frais divers ;
15. Considérant, en dernier lieu, que le préjudice moral et celui d'accompagnement subis par Mme veuve J...doivent être évalués à une somme totale de 25 000 euros ; qu'après application du taux de perte de chance de 50 %, l'indemnité due à ce titre s'élève 12 500 euros ;
16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme K... G...veuve J...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande tendant à la condamnation du CHU de Clermont-Ferrand à lui verser une indemnité totale de 38 848,22 euros au titre des préjudices qu'elle a personnellement subis ;
En ce qui concerne les préjudices personnels des autres ayants droit :
17. Considérant, en premier lieu, que M. E...J...justifie avoir pris en charge les frais d'obsèques pour un montant de 4 589,34 euros ; que, dès lors, et compte tenu de la fraction indemnisable du préjudice fixée à 50 %, M. E...J...est fondé à demander le remboursement par le CHU de Clermont-Ferrand de la somme de 2 294,67 euros au titre de ces frais d'obsèques ;
18. Considérant, en deuxième lieu que Mme L...D...C...née J...justifie avoir acquitté des frais de déplacement à hauteur de 27,90 euros correspondant à des frais de péage acquittés durant cette période ; qu'il n'est pas justifié d'autres dépenses de transport acquittées par les enfants Do Couto ; que, la fraction indemnisable du préjudice ayant été fixée à 50 %, il y a lieu de fixer à 13,95 euros le montant de l'indemnité que devra verser le CHU de Clermont-Ferrand à Mme L...D...C...née J...au titre de ce chef de préjudice ;
19. Considérant, en dernier lieu qu'il sera fait une juste appréciation de l'indemnité due au titre du préjudice moral et celui d'accompagnement subis par Mme H... I...néeJ..., M. E...J..., Mlle L...-P...J..., Mme L...D...C...née J...et M. B...J..., enfants de la victime décédée, en la fixant pour chacun d'eux à une somme 3 000 euros compte tenu de la fraction indemnisable du préjudice fixée à 50 % ;
20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les enfants Do Couto sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté leur demande tendant au versement d'une indemnité de 3 000 euros pour Mme H...I...néeJ..., 5 294,67 euros pour M. E...J..., 3 013,95 euros pour Mme L... D...C...néeJ..., 3 000 euros pour Mlle L...-P... J...et 3 000 euros pour M. B...J... ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
21. Considérant que les consorts J...ont droit, comme ils le demandent, aux intérêts des sommes qui leur sont dues à compter du 7 février 2012, date de réception de leur réclamation préalable ; qu'ils ont droit à la capitalisation de ces intérêts, qui a été demandée pour la première fois le 30 mars 2012, à compter du 7 février 2013 date à laquelle les intérêts étaient dus au moins pour une année entière, et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
22. Considérant que la CPAM du Puy-de-Dôme a droit, comme elle le demande, aux intérêts des sommes qui lui sont dues à compter du 3 août 2012, date d'enregistrement de ses conclusions indemnitaires au greffe du tribunal administratif ; que l'intéressée a droit à la capitalisation de ces intérêts, qui a été demandée pour la première fois le 3 août 2012, à compter du 3 août 2013 date à laquelle les intérêts étaient dus au moins pour une année entière, et à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;
Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :
23. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme a droit à l'indemnité forfaitaire régie par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, pour le montant de 1 037 euros auquel elle est fixée, à la date du présent arrêt, par l'arrêté interministériel du 19 décembre 2014 susvisé ; qu'il y a lieu de mettre cette somme à la charge du centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
24. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU de Clermont-Ferrand une somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance par les consorts J...et non compris dans les dépens et la même somme au titre des frais exposés par la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme ;
DECIDE :
Article 1er : Le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand est condamné à verser :
- à Mme A...M...veuveJ..., Mme H...I...néeJ..., M. E...J..., Mlle L...-P...J..., Mme D...C...néeJ..., M. B...J..., en leur qualité d'ayants droit de M. F...J..., une fraction de la somme de 1 850 euros, fixée au prorata des droits que chacun détient dans la succession de M. F...J... ;
- à Mme A...M...veuve J...la somme de 38 848,22 euros ;
- à Mme H...I...née J...la somme de 3 000 euros ;
- à M. E...J...la somme de 5 294,67 euros,
- à Mlle L...-P... J...la somme de 3 000 euros,
- à Mme L...D...C...née J...la somme de 3 013,95 euros,
- à M. B...J... la somme de 3 000 euros.
Article 2 : Les sommes mentionnées à l'article 1er porteront intérêts au taux légal à compter du 7 février 2012 et les intérêts échus le 7 février 2013 et à chaque échéance annuelle ultérieure seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme la somme de 50 568,03 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 3 août 2012 et les intérêts échus le 3 août 2013 et à chaque échéance annuelle ultérieure seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêt.
Article 4 : Le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand est condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme la somme de 1 037 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Article 5 : Le jugement du 19 novembre 2013 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Le centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand versera une somme globale de 1 500 euros aux consorts J...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et la même somme à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme.
Article 7 : Le surplus des conclusions des consorts J...et de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...M...veuveJ..., à Mme H...I...néeJ..., à M. E...J..., à Mlle L...-P...J..., à Mme L...D...C...néeJ..., à M. B...J..., au centre hospitalier universitaire de Clermont-Ferrand et à la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme. Copie en sera adressée, pour information, à l'expert.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2015 à laquelle siégeaient :
M. Faessel, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
M. Segado, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 novembre 2015.
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N° 14LY00226