Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La communauté urbaine de Bordeaux a demandé devant le tribunal administratif de Bordeaux, avant dire droit, de désigner un expert avec la mission complémentaire de décrire les désordres affectant l'étanchéité du pont de Pierre à Bordeaux, à la suite des travaux d'étanchéité effectués sur le pont de Pierre dans le cadre de la mise en place du tramway, et de condamner solidairement l'Etat, le Groupement d'études du tramway (GET), composé des sociétés Systra /Sofretu /Sofrerail, Sogelerc ingénierie et SEAMP, et la société Colas Sud Ouest à lui verser une somme de 1 128 220 euros TTC à parfaire, assortie des intérêts au taux légal, en réparation des désordres affectant le pont de Pierre.
Par un jugement n° 1100497 du 2 juillet 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête de la Communauté urbaine de Bordeaux et a mis les frais d'expertise à sa charge.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 septembre 2014, la Communauté urbaine de Bordeaux, représentée par la SCP Coulombie-Gras-Cretin-G... -Rosier-Soland, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 2 juillet 2014 du tribunal administratif de Bordeaux en ce qu'il a rejeté pour irrecevabilité sa demande et en ce qu'il a mis à sa charge les frais d'expertise ;
2°) avant dire droit, de désigner un expert avec la mission complémentaire de décrire les désordres affectant l'étanchéité du pont de Pierre à Bordeaux dans le cadre de la mise en place du tramway, de préciser si ces désordres compromettent la solidité de l'ouvrage ou le rendent impropre à sa destination, et d'indiquer la nature et le coût des travaux propres à y remédier et de surseoir à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise ;
3°) de condamner solidairement l'Etat, le Groupement d'études du tramway (GET), composé des sociétés Systra/Sofretu /Sofrerail, la société Sogelerc ingénierie, la société SEAMP, et le groupement Colas / Fayat / Sattanino à lui verser une somme de 1 128 220 euros TTC à parfaire, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de la présente requête, en réparation des désordres affectant le pont de Pierre, à titre principal sur le fondement de la garantie décennale, et, à titre subsidiaire de condamner sur le fondement de la responsabilité contractuelle, l'Etat, le groupement GET, la société Sogelerc ingénierie et la société SEAMP à lui verser la même somme de 1 128 220 euros TTC à parfaire, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de la présente requête ;
4°) de mettre à la charge des défendeurs les dépens, constitués notamment par les frais d'expertise ;
5°) de mettre à la charge des défendeurs la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- dans le cadre de la mise en place du tramway, des travaux ont été entrepris sur le pont de Pierre, pour assurer sa solidité ;
- elle a passé en 1997, différents marchés, un marché, le 31 juillet 1997, de maitre d'oeuvre générale avec le groupement GET, un marché de maitrise d'oeuvre avec l'Etat, et un marché de travaux confié au groupement Colas/Fayat/Sattanino le 19 avril 2002. Après réception de ces travaux intervenue le 6 août 2003, des désordres consistant en des infiltrations et à une mauvaise évacuation des eaux pluviales sont apparus ;
- c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande pour irrecevabilité. En effet, la jurisprudence du Conseil d'Etat (Société Intrabuilding Europe, n° 346778 et cour administrative d'appel de Lyon, 15 avril 2014, n° 13LY02388) admet la possibilité de régulariser à tout moment, y compris en appel, l'absence de document justifiant de l'intérêt pour agir. Si la jurisprudence du Conseil d'Etat, semble réserver un sort différent à la question de la régularisation de la qualité pour agir, ce n'est qu'à la condition qu'une demande de régularisation ait été adressée (CE, 4 juillet 1997, association " Lei Ravilhe Pastre ", n°155969) ou qu'une fin de non-recevoir ait été opposée (CE, 5 mai 2010, comité pour la sauvegarde du domaine de la Coudoulière-M.D..., n°304059). En l'espèce, la fin de non-recevoir tirée de l'absence de justification de la qualité pour agir, n'a pas été véritablement opposée en défense. La délibération du conseil de la CUB du 22 octobre 2010 déléguant à son président le pouvoir d'ester en justice a été produite, le 3 juin 2014 ;
- le tribunal en mettant les frais d'expertise d'un montant de 14 945,69 euros TTC à la charge de la communauté urbaine de Bordeaux (CUB) a commis une erreur de droit et de fait, dès lors que le délai de garantie décennale n'était pas expiré à la date du jugement du tribunal administratif, et que compte tenu de que ce jugement ne s'est prononcé que sur la recevabilité et non sur le fond, il n'était pas définitif, et le tribunal ne pouvait dès lors statuer sur les frais d'expertise ;
- en ce qui concerne le bien-fondé des conclusions présentées au titre de la garantie décennale, si la réception de ces travaux est intervenue le 6 août 2003 et les réserves ont été levées le 14 septembre 2004, dès la mise en place du tramway, des interrogations sont apparues quant à la solidité de l'ouvrage ;
- les désordres n'étaient pas apparents lors des opérations de réception, et en tout état de cause, la mise en évidence lors des opérations d'expertise de l'existence de 85 zones infiltrables sur la seule zone visitable du pont, démontre que les désordres n'auraient pas pu être prévus dans toute leur ampleur ;
- les désordres en cause relèvent indiscutablement de la garantie décennale dès lors que comme l'indique l'expert, l'étanchéité du pont de Pierre n'est pas assurée et qu'il existe des " circulations d'eau sous toute la surface de l'étanchéité " ;
- ces infiltrations endommagent les ouvrages en béton du pont de Pierre, ainsi que ses encorbellements et ses voûtes en brique ;
- en ce qui concerne l'imputabilité des désordres, ces désordres peuvent être classés en deux catégories, la catégorie des défauts de conception et d'exécution et la catégorie des défauts de direction des travaux et d'exécution ;
- la direction départementale de l'équipement (Etat) a commis des erreurs de conception du fait de l'absence de prise en compte des caractéristiques du pont, de l'absence d'étanchéité au droit des rives gauche et droite et de la mise en oeuvre d'un procédé technique " TESTUDO ", inadéquat ;
- le groupement GET qui était chargé de la coordination générale des maitres d'oeuvre, n'a pas comme l'indique l'expert, fait des remarques sur l'insuffisance du marché placé sous la maitrise d'oeuvre de la direction départementale de l'équipement (DDE), et a commis des fautes en laissant rouler des véhicules sur l'étanchéité de la voie ;
- GET a également été négligent dans sa mission de conseil au maitre d'ouvrage ;
- le groupement Colas / Fayat / Sattanino titulaire du marché de travaux ne pouvait ignorer les règles de protection et de finition de l'ouvrage, règles qu'il n'a pas respectées ;
- en ce qui concerne son sous-traitant BTPS, il est responsable de la non-conformité de la mise en place du TESTUDO et du raccordement des deux types d'étanchéité ;
- les désordres indiqués doivent donc entrainer la responsabilité conjointe et solidaire de l'Etat, du groupement GET et du groupement Colas / Fayat / Sattanino ;
- aucune faute de la CUB n'est susceptible d'exonérer les constructeurs de leur responsabilité ;
- l'expert a chiffré le coût des réparations à la somme de 1 128 220 euros TTC ; toutefois, comme l'indique l'expert lui-même ces réparations ne sont pas suffisantes pour résoudre la question de la cause des désordres et c'est pourquoi à titre principal un complément d'expertise s'avère nécessaire.
Par des mémoires en défense enregistrés le 9 juin 2015 et le 21 avril 2016, la société TDC, venant aux droits de la société Sogelerg, représentée par Me A...E..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête de la CUB, à titre subsidiaire, à la condamnation solidaire de l'Etat, du groupement Colas /Fayat /Sattanino et de ses sous-traitants, les sociétés Astram, SEAMP et BTPS, à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, et, en tout état de cause, à ce que soit mise à la charge de tout succombant une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle fait valoir que :
- l'expert ayant donné tous les éléments dans son rapport, le complément d'expertise sollicité par la CUB n'est pas nécessaire ;
- l'expert retient en partie la responsabilité de la CUB dans l'apparition des désordres dès lors que la CUB n'a pas prévu la construction d'ouvrages d'arrêt de l'étanchéité entre le pont et la voirie, ce qui a conduit au rabotage de l'étanchéité ;
- la nature décennale des désordres allégués n'est pas établie ;
- aucune faute ne peut être mise à sa charge dès lors qu'elle n'a pas assuré la maitrise d'oeuvre des travaux d'étanchéité du pont dont la DDE avait la charge ;
- la responsabilité de chaque membre du GET est individuelle et non solidaire et la CUB devrait donc établir la responsabilité individuelle de chaque membre, ce qu'elle ne fait pas ;
- subsidiairement le GET demande à être garanti des condamnations prononcées à son encontre ;
Par des mémoires en défense des 15 juin 2015 et 4 mai 2016, la société Ingerop conseil et ingénierie, représentée par la SCP Delormeau et associés, conclut, à titre principal, au rejet de la requête à titre subsidiaire, à ce que soit prononcée la nullité du rapport d'expertise, à la condamnation solidaire de l'Etat, de la CUB du groupement Colas /Fayat /Sattanino et de la société TDC, à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, et à la condamnation de la CUB à lui verser une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- si elle vient aux droit de la société SEAMP, le jugement est définitif à son égard, dès lors que l'appel de la CUB, présenté le dernier jour du délai est dirigé contre la société SEAMP, qui n'existait plus dès lors qu'elle a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 2 septembre 2002 ;
- la CUB ne peut plus dès lors présenter de conclusions d'appel à l'encontre de la société Ingerop ;
- à titre subsidiaire, le rapport de l'expert est entaché de nullité, faute de respect du principe du contradictoire ;
- Ingerop appartient à un groupement momentané, le GET et la responsabilité de chaque membre du GET est individuelle et non solidaire et la CUB devrait donc établir la responsabilité individuelle de chaque membre ;
- Ingerop n'a accompli strictement aucune prestation de maitrise d'oeuvre sur l'ouvrage litigieux qu'est le pont de Pierre ;
- les désordres en cause ne présentent pas un caractère décennal et en tout état de cause, les désordres ne sont pas imputables au groupement GET mais trouvent leur cause dans la conception et la réalisation des travaux d'étanchéité dont la maitrise d'oeuvre a été confiée à la DDE ;
- la CUB ne peut reprocher à la société Ingerop un manquement à son devoir de conseil.
Par des mémoires en défense enregistrés le 6 juillet 2015 et le 23 novembre 2016, la société Colas Sud Ouest, représentée par la SCP Avocagir, conclut au rejet de la requête de la CUB et, dans l'hypothèse où la cour prononcerait une condamnation à son encontre, à la condamnation de l'Etat, de la société Fayat, de la société Eiffage, de la société Thalès, de la société Systra, de la société Sogelerc ingénierie, et de la société SEAMP, à la garantir de cette condamnation et à ce qu'une somme de 4000 euros soit mise à la charge de la CUB au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle fait valoir que :
- comme l'a jugé le tribunal, la demande de la CUB était irrecevable dès lors que la CUB, en vertu de la jurisprudence du Conseil d'Etat, ne pouvait pas régulariser, après la clôture de l'instruction, l'absence de production de la délibération habilitant le président à engager la requête devant le tribunal. Cette irrecevabilité conformément à la jurisprudence, ne peut faire l'objet d'une régularisation en appel ;
- en ce qui concerne les frais d'expertise, en vertu de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, ils doivent être mis à la charge de la CUB dès lors qu'elle était partie perdante en première instance et que sa requête n'était pas régularisable en appel ;
- en ce qui concerne la demande de la CUB de désignation d'un nouvel expert, trois des nouvelles missions d'expertise qu'elle sollicite relevaient déjà de la mission de l'expert désigné par le tribunal administratif, alors qu'il appartenait par ailleurs à la CUB de solliciter en cours d'expertise, une extension des missions de l'expert ;
- l'estimation par l'expert du montant des travaux à réaliser est établie à partir de celle que la CUB lui avait transmise ;
- sur le fond, la CUB n'a actionné que la société Colas, alors qu'elle appartient à un groupement solidaire d'entreprises dont chacune est engagée solidairement vis-à-vis du maitre d'ouvrage ; les sociétés Fayat et Eiffage doivent donc être attraites en la cause ;
- les désordres invoqués par la CUB ne présentent pas un caractère décennal dès lors que les défauts relatifs à l'étanchéité étaient connus et apparents lors de la réception des travaux ;
- que l'expert ne s'est pas prononcé quant au fait qu'il serait porté atteinte à la solidité de l'ouvrage ou que l'ouvrage serait impropre à sa destination ;
- que la CUB comme le relève le rapport d'expertise s'est immiscé dans les travaux et a eu un comportement fautif ;
- la CUB n'a pas dans le marché, prévu tous les ouvrages nécessaires à l'étanchéité du pont ;
- la société Colas n'a commis aucune faute, dès lors que la prise en compte des mouvements du pont, relevait de la DDE ;
- le GET, groupement de maitrise d'oeuvre, n'a fait aucune remarque sur les insuffisances du marché ;
Par des mémoires en défense enregistrés le 23 mars 2016 et le 30 novembre 2016, la société SYSTRA, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête de la CUB et, dans l'hypothèse où la cour prononcerait une condamnation à son encontre, à la condamnation de l'Etat, de la société Colas et de la société TDC à la garantir de toute condamnation et à ce qu'il soit mis à la charge de toute partie succombante une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle fait valoir que :
- c'est à juste titre que le tribunal a rejeté pour irrecevabilité la requête de la CUB, dès lors qu'elle n'a pas justifié avant la clôture de l'instruction de l'habilitation pour agir donnée à son président, cette irrecevabilité n'étant pas de nature à être régularisée en appel ;
- la demande de la CUB tendant à une nouvelle expertise doit être rejetée d'autant que la CUB n'est pas à même d'établir que les désordres afférents au pont de Pierre seraient de nature à porter atteinte à sa solidité ou de le rendre impropres à sa destination ;
- la société SYSTRA n'a commis aucune faute, dès lors qu'elle était totalement étrangère au marché d'étanchéité et donc ne peut être qualifiée de constructeur responsable au titre de la garantie décennale, la présence de SYSTRA membre du GET, aux travaux réalisés par la DDE, a été limitée aux interfaces conformément à sa mission ;
- la CUB a commis des fautes exonérant les constructeurs de leur responsabilité au titre de la garantie décennale ;
- en ce qui concerne la réparation du préjudice, la CUB ne peut à la fois prétendre à la condamnation des constructeurs à lui verser la somme de somme de 1 128 220 euros TTC et demander une nouvelle expertise ;
- en tout état de cause, SYSTRA demande à être garantie des condamnations qui seraient prononcées à son encontre, par l'Etat, la société Colas et la société TDC.
Par un mémoire enregistré le 30 novembre 2016 le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer conclut, à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire au rejet des conclusions présentées contre l'Etat et à titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse où la responsabilité de l'Etat serait engagée, à la condamnation de la CUB, du groupement Colas/Sattanino/Fayat, du bureau d'études Solen et du groupement GET à garantir toutes les condamnations prononcées à l'encontre de l'Etat.
Par un mémoire enregistrés le 1er décembre 2016, la société Eiffage TP Sud-Ouest, venant aux droits de la société Sattanino et la société Fayat Entreprise TP, représentées par la SCP Salesse et Associés, concluent à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à l'incompétence de la juridiction administrative sur les conclusions de la société Colas Sud-Ouest présentées contre elles et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Bordeaux métropole au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pierre Bentolila premier conseiller ;
- les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public ;
- et les observations de meG..., représentant Bordeaux Métropole, de Me B..., représentant le groupement solidaire Colas Sud-Ouest/Fayat/Sattanino, de Me F... représentant la société Systra, de MeH..., représentant la société TDC et de Me de la Marque, représentant les sociétés Eiffage TP Sud-Ouest et Fayat Entreprise.
Considérant ce qui suit :
1. La communauté urbaine de Bordeaux (CUB) en vue de la réalisation de différents travaux visant à garantir l'étanchéité du pont de Pierre, a passé un marché le 31 juillet 1997 de maitre d'oeuvre générale avec le groupement GET, un marché de maitrise d'oeuvre avec l'Etat, et un marché de travaux avec le groupement Colas/Fayat/Sattanino le 19 avril 2002. La CUB a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de désigner un expert avec la mission complémentaire de décrire les désordres affectant l'étanchéité du pont de Pierre à Bordeaux, dans le cadre de la mise en place du tramway, et de condamner solidairement l'Etat, le Groupement d'études du tramway (GET), composé des sociétés Systra /Sofretu /Sofrerail, Sogelerc ingénierie et SEAMP, et la société Colas Sud Ouest à lui verser une somme de 1 128 220 euros TTC à parfaire, assortie des intérêts au taux légal, en réparation des désordres affectant le pont de Pierre.
2. La CUB relève appel du jugement du 2 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa requête et mis les frais d'expertise à sa charge.
Sur les conclusions de la communauté urbaine de Bordeaux :
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
3. Aux termes de l'article L. 5211-9 du code général des collectivités territoriales : " Le président est l'organe exécutif de l'établissement public de coopération intercommunale. (...) Il représente en justice l'établissement public de coopération intercommunale. (...) ". Selon l'article L. 5211-2 du même code : " A l'exception de celles des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 2122-4, les dispositions du chapitre II du titre II du livre Ier de la deuxième partie relatives au maire et aux adjoints sont applicables au président et aux membres du bureau des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre. ". Aux termes de l'article L. 2122-21 de ce code : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé, d'une manière générale, d'exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : (...) 8° De représenter la commune soit en demandant, soit en défendant (...). ". Et l'article L. 2122-22 dispose que : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal (...). "
4. Ainsi que l'ont à juste titre rappelé les premiers juges, il résulte des dispositions précitées, que le président d'un établissement public de coopération intercommunale, notamment d'une communauté urbaine, n'a qualité pour engager une action en justice au nom de la collectivité, qu'à condition de bénéficier par délibération de l'organe délibérant, soit d'une délégation générale pour ester en justice ou représenter en justice la collectivité soit aux mêmes fins, d'une habilitation pour une instance donnée.
5. Dans l'hypothèse de l'absence de production dans la demande devant le tribunal administratif de l'habilitation donnée, au maire ou au président d'un établissement public de coopération intercommunale, cette absence de production est régularisable, notamment lorsqu'une fin de non-recevoir est opposée en défense, jusqu'à la clôture de l'instruction.
6. En l'espèce, contrairement à ce que soutient la communauté urbaine de Bordeaux, une fin de non-recevoir tirée de l'absence de qualité pour agir, a été expressément opposée en défense en première instance, dès lors que la société Colas, dans la page 5 de son mémoire en défense du 15 juillet 2011, a indiqué que " (...) le tribunal administratif de Bordeaux notera qu'aucune délégation habilitant le président de la CUB ou bien aucune délibération du conseil communautaire de la CUB autorise le président de la CUB à ester en justice dans ce dossier. Dès lors, la demande présentée par la CUB est déclarée irrecevable (...) ". Par un mémoire enregistré le 2 décembre 2011, la société TDC (page 4 de ce mémoire) a également opposé de façon expresse une fin de non-recevoir à la demande de la CUB au motif de l'absence de production par la CUB, d'une délibération habilitant le président de la CUB à ester en justice ou à la représenter en justice.
7. Si la communauté urbaine de Bordeaux a produit devant le tribunal administratif de Bordeaux, par un mémoire en production de pièces du 3 juin 2014, une délibération du conseil de la communauté urbaine de Bordeaux, du 22 octobre 2010 déléguant à son président le pouvoir d'ester en justice et de représenter en justice la communauté, cette transmission est intervenue après la clôture de l'instruction, fixée au 20 janvier 2014, par ordonnance du 29 novembre 2013 prise par le magistrat-rapporteur par délégation du président de la première chambre du tribunal administratif de Bordeaux. Dans ces conditions, et alors qu'aucune circonstance ne faisait obstacle à ce que la communauté urbaine de Bordeaux régularise avant la clôture de l'instruction l'absence de production de la délibération d'habilitation à ester en justice ou de représentation en justice, la production de la délibération après la clôture de l'instruction n'a pas eu pour effet de régulariser l'irrecevabilité de cette demande. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté pour irrecevabilité la demande de la communauté urbaine de Bordeaux. Et cette irrecevabilité est insusceptible de faire l'objet d'une régularisation en appel.
8. Il résulte de ce qui précède que la communauté urbaine de Bordeaux n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 2 juillet 2014, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté pour irrecevabilité ses conclusions tendant à ce que soit effectuée une nouvelle expertise et à la condamnation des constructeurs à lui verser une somme de 1 128 220 euros TTC à parfaire, assortie des intérêts au taux légal, en réparation des désordres affectant le pont de Pierre, et dès lors les mêmes conclusions présentées en appel par la communauté urbaine de Bordeaux sont irrecevables et ne peuvent être que rejetées.
Sur les conclusions présentées par la communauté urbaine de Bordeaux afférentes à la mise à sa charge par le tribunal administratif, des frais d'expertise :
9. Par l'article 2 de son jugement, le tribunal administratif de Bordeaux a mis à la charge définitive de la communauté urbaine de Bordeaux, les frais d'expertise, s'élevant à la somme de 14 945,69 euros TTC. Compte tenu de ce que le tribunal en vertu de ses pouvoirs propres a mis à la charge de la CUB les frais d'expertise, la CUB est recevable à contester le jugement sur ce point alors même que comme il a été dit précédemment, les conclusions de la CUB, tendant à la réalisation d'une nouvelle expertise et à la condamnation des constructeurs à lui verser des indemnités étaient irrecevables.
10. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. L'Etat peut être condamné aux dépens ". La communauté urbaine de Bordeaux, à l'appui de ses conclusions contestant la mise à sa charge des frais d'expertise par le tribunal administratif, soutient que les frais d'expertise ne pouvaient être mis à sa charge du seul fait du rejet de sa demande par le tribunal, dès lors que l'irrecevabilité qui lui était opposée ne lui interdisait pas de faire appel et de présenter une nouvelle demande indemnitaire compte tenu de ce que le délai de la garantie décennale n'était pas expiré. Toutefois, les circonstances invoquées ne constituent pas au sens des dispositions précitées, des circonstances particulières pouvant justifier que ne soit pas mis à la charge de la communauté urbaine de Bordeaux les frais d'expertise. Dès lors, le tribunal, a pu comme il l'a fait, mettre à sa charge les frais d'expertise, comme le prévoyaient les dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative.
Sur le surplus des conclusions :
Sur les appels en garantie :
11. Les appels en garantie présentés dans les mémoires en défense susvisé, n'étant présentés qu'à titre subsidiaire dans l'hypothèse de l'absence de rejet de l'appel principal, il n'y a pas lieu d'y statuer compte tenu du rejet de l'appel principal.
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
12. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mises à la charge de l'Etat, du Groupement d'études du tramway (GET), composé des sociétés Systra/Sofretu /Sofrerail, de la société Sogelerc ingénierie, de la société SEAMP, et de groupement Colas / Fayat / Sattanino qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, les sommes que la communauté urbaine de Bordeaux demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Bordeaux Métropole venant aux droits de la communauté urbaine de Bordeaux à verser à chacune des sociétés TDC, Ingerop Conseil, Colas et Systra la somme de 1500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Bordeaux Métropole est rejetée
Article 2 : Bordeaux Métropole versera la somme de 1500 euros à chacune des sociétés TDC, Ingerop Conseil et ingénierie, Colas et Systra en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Bordeaux Métropole, au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, au groupement Colas /Fayat /Sattanino, à la société Systra, aux sociétés TDC, Ingerop Conseil et ingénierie, au groupement d'études du tramway et à la société Fayat et à la société Eiffage Sud-Ouest.
Délibéré après l'audience du 5 décembre 2016, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Antoine Bec, président-assesseur,
M. Pierre Bentolila, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 3 janvier 2017.
Le rapporteur,
Pierre BentolilaLe président,
Pierre Larroumec
Le greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.
Le greffier,
Cindy Virin
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N° 14BX02662