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18/11/2015 | FRANCE | N°14-28223

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 18 novembre 2015, 14-28223


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 16 et 1222-1 du code de procédure civile ;
Attendu que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue contradictoirement ; que cette exigence implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce présentée au juge ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a placé M. X... sous curatelle renforcée pour une durée de soixante mois, l'UDAF de la Charente-Maritime étant dé

signée en qualité de curateur ; qu'en appel, ce jugement a été partiellement i...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 16 et 1222-1 du code de procédure civile ;
Attendu que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue contradictoirement ; que cette exigence implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce présentée au juge ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a placé M. X... sous curatelle renforcée pour une durée de soixante mois, l'UDAF de la Charente-Maritime étant désignée en qualité de curateur ; qu'en appel, ce jugement a été partiellement infirmé et l'intéressé placé sous curatelle simple ;
Attendu qu'il ne résulte ni des énonciations de l'arrêt, ni des pièces de la procédure, que M. X..., qui n'était pas assisté lors de l'audience, ait été avisé de la faculté qui lui était ouverte de consulter le dossier au greffe, de sorte qu'il n'est pas établi qu'il ait été mis en mesure de prendre connaissance, avant l'audience, des pièces présentées à la juridiction et, par suite, de les discuter utilement ; qu'ainsi, il n'a pas été satisfait aux exigences des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 octobre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR placé M. X... sous curatelle simple ;
AUX ENONCIATIONS QUE par jugement du 7 mars 2014 le juge des tutelles de Saintes, agissant dans le cadre de la procédure ouverte au bénéfice de M. X..., né le 15 juillet 1936 à Migré (Charente-Maritime) a placé le majeur sous le régime de la curatelle renforcée pour une durée de 60 mois et a désigné l'UDAF de la Charente Maritime en qualité de curateur pour l'assister et le contrôler dans la gestion de ses biens ; M. X... a interjeté appel de ce jugement par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 mars 2014. Les parties ont été convoquées à l'audience du 3 septembre 2014. M. X..., présent, demande la mainlevée de la mesure et produit un certificat médical du docteur Y... du 22 mai 2014. Les membres de sa famille, convoqués, sont absents mais ont écrit. L'UDAF de la Charente Maritime expose que la mesure actuellement n'est pas justifiée et que M. X... qui n'a pas de dettes tient ses papiers administratifs à jour Le ministère public, à qui la procédure a été communiquée, a pris par écrit ses réquisitions le 28 juillet 2014 ;
ET AUX MOTIFS QU'il ressort des éléments du dossier que M. serge X..., célibataire, propriétaire d'une maison et vivant des revenus de ses placements, s'est vu diagnostiquer en 2013 une maladie de parkinson débutante aggravée d'un syndrome dépressif ancien ; que, bien qu'ayant des frères et soeurs, il n'avait désigné personne pour s'occuper de ses affaires et était très isolé ; qu'il a fait l'objet d'un placement sous curatelle renforcée dans ce contexte ; qu'à l'audience, il a expliqué aller mieux et a produit une deuxième expertise réalisée à sa demande de laquelle il ressort que la maladie dont il souffre est bien équilibrée par un traitement mais que sa pathologie dépressive, qui évoque une bipolarité, est évolutive ; que l'expert propose d'évaluer l'état de M. X... dans cinq ans tout en prenant à son bénéfice aujourd'hui une mesure d'assistance limitée ; que M. X... vit chez lui et a mis en place des systèmes d'aide à domicile, comme des portages de repas ; qu'il perçoit 8.000 ¿ par an de retraite et une rente viagère d'assurance vie qui porte ses revenus à 760 ¿ par mois ; qu'il dépense peu et ses papiers sont à jours ; que tant l'état de santé de M. X... que la composition de son patrimoine conduisent la cour à réformer le jugement entrepris et à placer l'appelant sous le régime de la curatelle simple ;
1) ALORS QUE toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue contradictoirement ; que cette exigence implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce présentée au juge ; qu'en s'abstenant d'aviser M. X..., qui n'était pas assisté à l'audience, de son droit de consulter le dossier au greffe de la juridiction, la cour d'appel l'a privé de la faculté de connaître et de discuter les conclusions du médecin expert, en violation des articles 16 et 1222-1 alinéa 1er du code de procédure civile ;
2) ALORS QUE dans toute instance relative à l'ouverture, la modification ou la mainlevée d'une mesure de protection, le majeur à protéger ou protégé doit être informé, dans l'acte de convocation, qu'il peut faire le choix d'un avocat ou demander à la juridiction saisie qu'il lui en soit désigné un d'office ;qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que M. X... a comparu en personne à l'audience du 3 septembre 2014 sans l'assistance d'un avocat, ni de son curateur l'UDAF de la Charente Maritime ni d'aucun membre de sa famille ; qu'en plaçant M. X... sous curatelle simple quand il ne résulte ni de l'acte de convocation à l'audience, ni des énonciations de l'arrêt qu'il ait été informé de son droit à l'assistance d'un avocat, la cour d'appel a violé l'article 1214 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE dans toute instance relative à l'ouverture, la modification ou la mainlevée d'une mesure de protection, le majeur à protéger ou protégé doit être convoqué à l'audience prévue pour les débats en temps utile pour lui permettre de préparer utilement sa défense ; qu'en se bornant à mentionner que M. X..., qui n'était pas assisté à l'audience, avait été convoqué pour l'audience du 3 septembre 2014 sans autrement vérifier s'il avait été averti suffisamment tôt de la date d'audience pour pouvoir se défendre utilement, a violé l'article 1244 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR placé M. X... sous curatelle simple ;
AUX MOTIFS QU'il ressort des éléments du dossier que M. Serge X..., célibataire, propriétaire d'une maison et vivant des revenus de ses placements, s'est vu diagnostiquer en 2013 une maladie de parkinson débutante aggravée d'un syndrome dépressif ancien ; que, bien qu'ayant des frères et soeurs, il n'avait désigné personne pour s'occuper de ses affaires et était très isolé ; qu'il a fait l'objet d'un placement sous curatelle renforcée dans ce contexte ; qu'à l'audience, il a expliqué aller mieux et a produit une deuxième expertise réalisée à sa demande de laquelle il ressort que la maladie dont il souffre est bien équilibrée par un traitement mais que sa pathologie dépressive, qui évoque une bipolarité, est évolutive ; que l'expert propose d'évaluer l'état de M. X... dans cinq ans tout en prenant à son bénéfice aujourd'hui une mesure d'assistance limitée ; que M. X... vit chez lui et a mis en place des systèmes d'aide à domicile, comme des portages de repas ; qu'il perçoit 8.000 ¿ par an de retraite et une rente viagère d'assurance vie qui porte ses revenus à 760 ¿ par mois ; qu'il dépense peu et ses papiers sont à jours ; que tant l'état de santé de M. X... que la composition de son patrimoine conduisent la cour à réformer le jugement entrepris et à placer l'appelant sous le régime de la curatelle simple ;
1) ALORS QUE le prononcé d'une mesure de curatelle est subordonné à la constatation d'une altération des facultés mentales de l'intéressé et de la nécessité pour cette personne d'être conseillée ou contrôlée de manière continue par un tiers dans les actes importants de la vie civile ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la maladie de Parkinson dont souffre M. X... depuis 2013 est stabilisé, que tous ses papiers sont à jour, qu'il a organisé des systèmes d'aide à domicile et qu'il dépense peu ; qu'en se bornant à affirmer que le placement sous curatelle est justifié au regard de son état de santé et de la composition de son patrimoine, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé en quoi M. X... se trouverait dans l'impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts, a privé sa décision de base légale au regard des articles 425 et 440 alinéa 1 du code civil ;
2) ALORS, en toute hypothèse, QUE la curatelle n'est prononcée que s'il est établi que la sauvegarde de justice ne peut assurer une protection suffisante ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la maladie de Parkinson dont souffre M. X... depuis 2013 est stabilisé, que tous ses papiers sont à jour, qu'il a organisé des systèmes d'aide à domicile et qu'il dépense peu ; qu'en plaçant M. X... sous le régime de la curatelle sans expliquer en quoi une mesure de sauvegarde de justice serait insuffisante pour garantir la protection de ses intérêts, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 440 alinéa 2 du code civil, ensemble l'article 428 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-28223
Date de la décision : 18/11/2015
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

MAJEUR PROTEGE - Procédure - Dossier - Consultation - Consultation par la personne protégée - Possibilité - Notification - Défaut - Portée

PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Principe de la contradiction - Violation - Cas - Défaut de notification à la personne protégée de la possibilité de consulter le dossier au greffe

Viole les articles 16 et 1222-1 du code de procédure civile la cour d'appel qui prononce une mesure de curatelle sans qu'il ressorte, ni des énonciations de l'arrêt, ni des pièces de la procédure, que le majeur protégé, qui n'était pas assisté lors de l'audience, ait été avisé de la faculté qui lui était ouverte de consulter le dossier au greffe, dès lors qu'en l'absence de tels éléments, il n'est pas établi que l'intéressé ait été mis en mesure de prendre connaissance, avant l'audience, des pièces présentées à la juridiction, partant de les discuter utilement


Références :

articles 16 et 1222-1 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 08 octobre 2014

Sur la nécessaire notification au majeur protégé de la possibilité de consulter le dossier au greffe, dans le même sens que : 1re Civ., 12 février 2014, pourvoi n° 13-13581, Bull. 2014, I, n° 24 (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 18 nov. 2015, pourvoi n°14-28223, Bull. civ. 2016, n° 840, 1re Civ., n° 528
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2016, n° 840, 1re Civ., n° 528

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : M. Bernard de La Gatinais (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Le Cotty
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.28223
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