LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la communauté d'agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines (CASQY) a fait réaliser courant 2011, sur le territoire de la commune de Montigny-le-Bretonneux, des travaux de réfection de la voirie ; que lui reprochant d'avoir, à cette occasion, endommagé et/ ou rendu inaccessibles des infrastructures de génie civil lui appartenant, la société Orange, anciennement dénommée France Télécom, l'a assignée, sur le fondement de la voie de fait, en cessation des travaux et réparation de son préjudice ; que la CASQY, revendiquant la propriété des infrastructures en cause et contestant l'existence d'une voie de fait, a soulevé l'incompétence de la juridiction judiciaire au profit de la juridiction administrative ;
Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches :
Attendu que la CASQY fait grief à l'arrêt de constater que la société Orange est propriétaire des infrastructures litigieuses, de retenir l'existence d'une voie de fait et, en conséquence, de rejeter son exception d'incompétence, alors, selon le moyen :
1°/ que l'article 22 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 et l'article 1er de la loi n° 96-660 du 26 juillet 1996 n'ont pu transférer respectivement à l'établissement public France Télécom d'abord, à la société France Télécom, aux droits de laquelle se trouve la société Orange ensuite, que les seuls biens mobiliers et immobiliers qui, dans le cadre du monopole sur les télécommunications, ont été réalisés sous la maîtrise d'ouvrage de l'Etat jusqu'à la loi du 2 juillet 1990 et ensuite de l'établissement public France Télécom jusqu'à la loi du 26 juillet 1996 et dont ils avaient, en conséquence, la propriété ; qu'il résulte des article L. 33 du code des postes et télécommunications en vigueur jusqu'au 30 décembre 1990, puis des articles L. 33-1 et L. 34-1 du même code en vigueur jusqu'au 27 juillet 1996 que ce monopole ne s'étendait, pour la réalisation et par suite, la propriété des infrastructures de télécommunications, qu'à l'établissement de certains réseaux de télécommunications, définis par l'article L. 32 de ce même code comme « toute installation ou tout ensemble d'installations assurant soit la transmission, soit la transmission et l'acheminement de signaux de télécommunications ainsi que l'échange des informations de commande et de gestion qui y est associé, entre les points de terminaison de ce réseau », à l'exclusion des infrastructures de génie civil destinées à accueillir ces réseaux, telles que les fourreaux, les chambres de tirage, qui pouvaient avoir été réalisées et détenues en pleine propriété notamment par les établissements publics d'agglomération nouvelle de la loi n° 70-610 du 10 juillet 1970 pour l'application de laquelle a été créé, par décret n° 70-974 du 21 octobre 1970, l'établissement public chargé de l'aménagement de la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines, de sorte qu'en jugeant que la société Orange détenait la propriété des infrastructures de génie civil recevant les réseaux de télécommunication sur le territoire de la CASQY en raison de leur inclusion dans le monopole des télécommunications détenu successivement par l'Etat et l'établissement public France Télécom et de leur transfert à la société France Télécom, aux droits de laquelle se trouve la société Orange, la cour d'appel a violé par fausse interprétation les articles L. 33 en vigueur jusqu'au 30 décembre 1990, les articles L. 32, L. 33-1 et L. 34-1 en vigueur jusqu'au 27 juillet 1996 du code des postes et télécommunications, et, en conséquence, par fausse application les lois des 2 juillet 1990 et 26 juillet 1996 ;
2°/ qu'il appartient à celui qui invoque une voie de fait de justifier qu'il a été porté atteinte à son droit de propriété et notamment d'apporter la preuve de sa propriété sur le bien en cause de sorte que pour s'être fondée sur la circonstance que la CASQY ne rapportait pas la preuve de sa qualité de propriétaire des infrastructures et n'établissait notamment pas en avoir été le maître d'ouvrage ou le financeur, pour conclure à leur propriété par la société Orange, demandeur à la voie de fait, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation des articles 1315 du code civil, de la loi des 16-24 août 1790 et du décret du 13 fructidor an III ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que la CASQY soutenait que l'essentiel des infrastructures de génie civil couvrant le territoire de l'agglomération nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines avaient été réalisées et/ ou financées, soit par les établissements publics qui étaient en charge, dans les années 1980-1990, d'aménager l'agglomération nouvelle, soit par la CASQY elle-même, depuis décembre 2003, la cour d'appel a estimé que cette dernière ne rapportait pas la preuve de ce financement ni ne versait aux débats aucun plan des infrastructures litigieuses justifiant qu'elle en avait été le maître d'ouvrage ; qu'elle en a souverainement déduit, sans inverser la charge de la preuve, que la CASQY ne démontrait pas être propriétaire desdites infrastructures, construites avant le 1er janvier 1997 ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa première branche qui critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Attendu qu'il n'y a voie de fait de la part de l'administration, justifiant, par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire pour en ordonner la cessation et la réparation, que dans la mesure où l'administration a soit procédé à l'exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d'une décision, même régulière, portant atteinte à la liberté individuelle ou aboutissant à l'extinction d'un droit de propriété, soit pris une décision qui a les mêmes effets d'atteinte à la liberté individuelle ou d'extinction d'un droit de propriété et qui est manifestement insusceptible d'être rattachée à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative ;
Attendu que, pour retenir l'existence d'une voie de fait et rejeter l'exception d'incompétence soulevée par la CASQY, l'arrêt énonce qu'il résulte des procès-verbaux de constat d'huissier de justice produits, d'abord, qu'un certain nombre de chambres de transport et de distribution de services de communications électroniques ont été verrouillées et sont devenues inaccessibles, du fait de la mise en place de serrures à clefs ou de la création d'emplacements de parking, ensuite, que des atteintes ont été portées à des infrastructures portant le logo France Télécom et, enfin, que des chambres ont été cassées et des trappes d'accès à ces chambres remplacées ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'extinction du droit de propriété de la société Orange et dont il ressortait que les travaux de réfection entrepris par la CASQY n'étaient pas manifestement insusceptibles d'être rattachés à un pouvoir appartenant à cette dernière, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il constate que la société Orange est propriétaire des infrastructures de génie civil sur l'avenue du Manet (côté impair), sur l'avenue de la Source et sur l'avenue des IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny-le-Bretonneux, l'arrêt rendu le 5 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare les juridictions de l'ordre judiciaire incompétentes pour connaître du litige ;
Renvoie les parties à mieux se pourvoir ;
Condamne la société Orange aux dépens exposés devant les juges du fond et la Cour de cassation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la communauté d'agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines.
Le moyen reproche à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué d'avoir constaté que la SA FRANCE TELECOM était propriétaire des infrastructures de génie civil sur l'avenue du Manet (côté impair), sur l'avenue de la Source et sur l'avenue des IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny le Bretonneux, d'avoir constaté que la Communauté d'agglomération de Saint Quentin en Yvelines avait commis une voie de fait à l'encontre de ces infrastructures de génie civil, d'avoir rejeté en conséquence l'incompétence soulevée par la CASQY, d'avoir ordonné une expertise, d'avoir enjoint à la Communauté d'agglomération de Saint Quentin en Yvelines et d'avoir réformé le jugement en portant la condamnation prononcée au profit de la SA FRANCE TELECOM à la somme de 20. 000 euros à titre de dommages-intérêts,
AUX MOTIFS PROPRES QUE
« Pour être caractérisée, la voie de fait suppose :
- d'une part, lorsqu'il s'agit d'une atteinte à la propriété immobilière, une emprise sur cette propriété par une dépossession ou une occupation d'un bien appartenant à une personne privée,
- d'autre part, une irrégularité grossière, consistant en une lourde méconnaissance par l'autorité administrative de ses pouvoirs, ce qui est le cas notamment lorsqu'une décision est manifestement insusceptible de se rattacher à l'existence d'un pouvoir appartenant à l'administration.
La voie de fait donne compétence au juge judiciaire pour assurer la réparation des préjudices par 1'allocation de dommages-intérêts, et si aucune procédure de régularisation appropriée n'a été engagée, par l'injonction de mettre fin aux agissements constitutifs de la voie de fait.
L'appelante soulève l'incompétence du juge judiciaire en l'absence de voie de fait dont, selon elle, les deux conditions essentielles ne sont pas réunies : l'extinction d'un droit de propriété et d'autre part un agissement qui est manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir de l'autorité administrative,
En premier lieu, sur la question de la propriété des infrastructures de génie civil situées avenues du Manet, de la Source et IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny-le-Bretonneux, la communauté d'agglomération de Saint Quentin en Yvelines (CASQY) fait grief au tribunal d'avoir dit que la société France télécom devenue Orange est propriétaire des infrastructures litigieuses.
Mais par la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications, le service public des télécommunications, jusque-là géré par l'Etat, a été confié à une personne morale de droit public, France télécom.
L'article 22 de cette loi prévoyait que l'ensemble des biens immobiliers et mobiliers du domaine public ou privé de l'Etat attachés aux services relevant de la direction générale des télécommunications était transféré gratuitement et en pleine propriété à France télécom.
En vertu de la loi n° 96-660 du 26 juillet 1996 relative à l'entreprise nationale France télécom, la personne morale de droit public France télécom a été transformée en une entreprise nationale soumise aux dispositions applicables aux sociétés anonymes, et il a été mis fin au monopole et à la compétence exclusive de France Télécom pour établir, exploiter et entretenir les réseaux de télécommunications.
Conformément à l'article 1 de ladite loi, les biens, droits et obligations de la personne morale de droit public France télécom ont été transférés de plein droit au 31 décembre 1996 à l'entreprise nationale France télécom, et les biens de la personne morale de droit public France télécom relevant du domaine public ont été déclassés à la même date.
Il en résulte que les infrastructures, affectées à des services de télécommunications destinés au public, établies antérieurement au 1er janvier 1997 sont demeurées la propriété de France télécom.
La société Orange anciennement dénommée France télécom soutient qu'en ce qui concerne les infrastructures de génie civil des trois avenues en litige, elles ont été effectuées avant 1996.
A cet égard, elle verse aux débats, en pièce 19, un plan masse du réseau téléphonique du quartier du Manet à Montigny le Bretonneux, document émanant de l'établissement public d'aménagement de la ville nouvelle, en date du 09septembre 1992, portant le cachet de la direction opérationnelle de Saint Quentin en Yvelines et sur lequel figure la mention de cinq installations de chambres de tirage d'un côté de l'avenue du Manet (L3T LST) et de six installations des deux côtés de l'avenue de la Source (A2).
Il convient de préciser que dans différents constats, les huissiers de justice ont identifié les chambres de tirage par des lettres de l'alphabet en correspondance avec l'emplacement des chambres de tirage figurant sur ce plan masse.
Le document du 09 septembre 1992 est étayé par les trois plans émanant de France télécom établis en mai et juin 1993 pour les avenues du Manet, des IV Pavés du Roi et de la Source, dans le cadre du projet 3301ZA, plans versés aux débats et qui font apparaître les chambres de tirage sur les dites avenues,
En outre, dans son constat établi le 13 juillet 2011, avenue des Sources, avenue du Manet et avenue des IV Pavés du Roy à Montigny-le-Bretonneux, Me Senusson, huissier de justice) a constaté notamment :
avenue des Sources
-que les deux tampons d'une chambre de transport située en milieu de voirie portent le logo de France télécom ;
- la présence d'une chambre de distribution dont les tampons au nombre de trois sont marqués du logo de France télécom ;
- la présence d'une chambre de distribution dont le tampon en fonte visible est marqué du logo de France télécom caractérisé par un cadran téléphonique et un combiné et se trouve estampillé " Norinco " ;
angle avenue de la Source et avenue des IV Pavés du Roy
-la présence d'une chambre de distribution L3T à l'intérieur de laquelle se trouve un ensemble de câblages d'alimentation ;
- la présence d'un câble se trouvant dans une chambre de distribution, marqué de l'année 1990 ;
avenue Manet
-les tampons d'une chambre L5T sont marqués du logo France télécom caractérisé par un cadran téléphonique et un combiné
-que face à la crêperie du Manet une chambre de transport et de distribution est visible, que les tampons de cette chambre portaient les logos PTT ; que dans cette chambre, se trouve gravé sur un câble « Année 1985 PTT 88-28-6 » ;
- que sur le trottoir opposé au trottoir longeant l'immeuble portant le numéro 18, à l'intérieur d'une chambre se trouve un câble portant une étiquette marquée du logo France télécom et sur lequel se trouve gravé « Année 1985 ».
Dans son constat du 3 novembre 2011, l'huissier de justice a relevé dans le prolongement de la chambre " » F " et au niveau de la chambre « H », la présence de chambres sur laquelle était indiqué " Norinco ".
Au surplus, la société France télécom produit trois arrêtés du maire de la commune de Montigny le Bretonneux du 31 août 1993, du 11juillet 1994 et du 6 décembre 1994 suivant lesquels, dans le cadre de travaux de génie civil exécutés pour le compte de France télécom, maître d'ouvrage, pour l'amélioration du réseau existant, les sociétés CEGELLEC et CORETEL étaient autorisées à intervenir sur la voirie communale notamment avenue des IV Pavés du Roy, rue du Manet et avenue de la Source.
Il résulte du dossier que la mairie de Montigny-le-Bretonneux a, en septembre 2004 demandé à France télécom d'intervenir avenue de la Source afin que le bruit causé par l'une de ses chambres objet du présent litige soit résorbé.
La CASQY n'apporte pas de preuve contraire de la qualité de propriétaire des infrastructures objet du litige, qualité dont elle se prévaut.
Si elle produit également un plan masse, il ne concerne en rien le réseau téléphonique.
La CASQY soutient encore que l'essentiel des infrastructures de génie civil (fourreaux, chambre de tirage) qui couvrent le territoire de l'agglomération nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines ont été réalisées et/ ou financées, soit par les établissements publics qui étaient en charge, dans les années 80-90 (EPASQY puis SANSQY), d'aménager l'agglomération nouvelle, soit par la CASQY depuis décembre 2003. Mais non seulement elle ne produit pas de preuve de ce financement mais encore elle ne verse aux débats aucun plan des infrastructures litigieuses qui justifierait qu'avant le 1er janvier 1997 elle a effectivement été le maître d'ouvrage de ces infrastructures.
Il convient de relever qu'avant cette date les collectivités territoriales n'avaient aucune compétence dans le domaine des télécommunications.
En effet, les collectivités territoriales ne se sont vues accorder une compétence pour établir et exploiter un service public local de télécommunications et un réseau de télécommunications s'y rapportant que postérieurement au 1er janvier 1997.
C'est par une loi 99-533 du 25 juin 1999 que les collectivités territoriales ont bénéficié d'un transfert de compétence et ont été autorisées à créer des infrastructures de télécommunications destinées à supporter des réseaux de télécommunication.
Ainsi que l'a retenu le tribunal, le fait de soutenir qu'en sa qualité de maitre d'ouvrage, l'EPASQY créé par décret du 21 octobre 1970 est propriétaire des infrastructures qu'il a financées et réalisées est insuffisant dans la mesure où à cette époque France télécom avait le monopole des installations de génie civil et des réseaux de télécommunication.
En effet, jusqu'au 31 décembre 1996, la personne publique France télécom pouvait occuper gratuitement et sans autorisation le domaine public et était propriétaire des installations en dépendant.
Au vu de l'ensemble des éléments versés aux débats, il est suffisamment établi que les infrastructures litigieuses sont antérieures au 1er janvier 1997 et qu'en conséquence celles-ci appartiennent à la société ORANGE, précédemment dénommée France télécom, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal de grande instance de Versailles.
Selon l'appelante, il faudrait opérer une distinction entre les infrastructures de télécommunications d'une part, et les réseaux de télécommunications d'autre part, les câbles étant la propriété de la société Orange mais les infrastructures (fourreaux et chambres de tirage) étant la propriété de la communauté d'agglomération.
Il convient de relever que les décisions rendues par les juridictions administratives dont se prévaut l'appelante, selon lesquelles le monopole établi par le code des postes et télécommunications (articles L. 33 et L. 33- l) au profit de l'Etat, puis de l'établissement public France télécom, en matière de télécommunications, portait uniquement sur le réseau, c'est-à -dire principalement les lignes (ou câbles) de télécommunications, et non sur les infrastructures de génie civil (fourreaux et chambres de tirage notamment), concernent des installations réalisées dans le cadre de zones d'aménagement concerté qui obéissent au régime défini aux articles R. 311-1 et suivants du code de l'urbanisme et qu'il n'est démontré ni qu'il s'agisse du cas en l'espèce, ni que la CASQY ait assuré la maîtrise d'ouvrage des ouvrages de génie civil dont s'agit, ni que cette jurisprudence soit de nature à modifier le fait qu'avant 1997, en vertu de son monopole sur l'exploitation et l'établissement des installations de télécommunications, France télécom était propriétaire de ces installations.
En effet, ainsi que le conclut la société Orange, une telle distinction entre réseaux et infrastructures n'était pas opérée lors de la période de monopole, avant le 31 décembre 1996.
Les opérateurs de télécommunications qui souhaitent déployer des réseaux de communications électroniques doivent installer des câbles reliant leurs clients à leurs propres installations et équipements et ils ont le choix entre deux techniques de déploiement soit par la voie aérienne soit par la voie souterraine en utilisant des infrastructures dites de génie civil.
Aux termes de sa décision n° 2008-0835 du 24 juillet 2008, l'autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) indique que les infrastructures de génie civil s'entendent d'abord de fourreaux ou gaines qui sont enfouis sous les trottoirs ou la chaussée et dans lesquels passent les réseaux de télécommunications jusqu'à desservir chaque immeuble et chaque habitation, ainsi que de chambres qui sont reliées par ces fourreaux ; les chambres sont des espaces souterrains permettant d'effectuer toute opération sur les câbles et elles sont accessibles depuis la surface.
Il résulte également d'une décision de l'autorité de la concurrence du 12 février 2008 que la société Free a saisi le conseil de la concurrence de pratiques mises en oeuvre par la société France télécom concernant l'accès à ses infrastructures de génie civil dans le cadre du déploiement de boucles locales en matière de fibres optiques et demandé au conseil de prononcer des mesures conservatoires pour enjoindre à France télécom de lui faire une offre d'accès à ses infrastructures de génie civil lui permettant de déployer dans des conditions non discriminatoires des boucles locales optiques, ces infrastructures de génie civil comportant fourreaux, chambres, adduction aux immeubles, A cette occasion, le conseil de la concurrence a constaté que les infrastructures de génie civil de France télécom totalisent environ 300. 000 kilomètres de fourreaux, répartis de façon homogène sur l'ensemble du territoire national, que ces infrastructures de génie civil ont été construites avant l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications et, pour l'essentiel, au début des années 1970 lors du plan d'équipement au téléphone de l'ensemble des usagers, et que " l'avantage déterminant dont bénéficie aujourd'hui FRANCE télécom est donc le fruit de sa situation d'opérateur historique auquel ont été transférés l'ensemble des droits et obligations dont bénéficiait l'ancien monopole ".
La CASQY se réfère aussi à une convention du 6 février 2004 ayant pour objet la réalisation en 2004 d'infrastructures de génie civil afin d'y enfouir un réseau de télécommunications.
Mais l'intimée fait valoir à juste titre que les chambres dont il s'agit dans le présent litige ont été enfouies avant 1996 de sorte que la convention produite par la CASQY ne peut pas les concerner et est sans effet sur la propriété de la société Orange quant aux infrastructures objet du présent litige.
En effet, sur ce dernier point, cette convention a été signée à une date où la société Orange ne pouvait plus implanter ses installations sur le domaine public qu'à la condition d'obtenir une permission de voirie ou de signer une convention, et contre versement d'une redevance. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que la SA FRANCE TELECOM est propriétaire des infrastructures de génie civil sur l'avenue du Manet (côté impair), sur l'avenue de la Source et sur l'avenue IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny le Bretonneux.
Selon l'appelante les travaux réalisés n'auraient pas eu pour effet de faire disparaître la chose sur laquelle aurait porté le droit de propriété (les chambres de tirage) ni pour effet de soustraire un propriétaire par un autre et les travaux n'auraient donc pas eu pour effet d'éteindre le droit de propriété.
Mais s'agissant des dommages causés par les travaux entrepris par la CASQY sur les infrastructures appartenant à la société Orange, il résulte du constat du 13juillet 2011 :
avenue des Sources :
- que l'enrobé de la chaussée est neuf et les trottoirs viennent d'être intégralement refaits ;
- qu'au niveau d'une réservation pour un futur emplacement de stationnement de véhicules, le coffrage en béton d'une chambre de distribution d'ORANGE est cassé sur le côté donnant sur la voirie ;
- que les deux parois latérales de cette chambre sont cassées sur toute leur hauteur ;
avenue du Manet :
- qu'une chambre LST se situe en surélévation par rapport aux autres places de stationnement en cours de création ;
- qu'une autre chambre n'appartenant pas à France télécom est visible sur le trottoir dans l'axe de la chambre L5T et que deux câbles visibles dans cette autre chambre pénètrent dans la chambre L5T ;
- que face à la crêperie du Manet une chambre de transport et de distribution est ouverte ;
- qu'une reprise du coffrage de cette chambre a été effectuée récemment cette reprise étant solidifiée par des planchettes ;
- que dans cette chambre, il constate la présence d'un câble sur lequel se trouve gravé « Année 1985 PTT 88-28-6 » ;
- qu'à 16 heures 10, des ouvriers portant des vêtements sur lesquels sont inscrits Eurovia referment cette chambre ;
- sur le trottoir opposé au trottoir longeant l'immeuble portant le numéro 12, la présence d'une chambre dépourvue de tampons, protégée uniquement par une planche de contreplaqué maintenue en place par deux pierres ;
- qu'à l'intérieur de cette chambre se trouve un câble portant une étiquette marquée du logo France télécom et sur lequel se trouve gravé « Année 1985 ».
II résulte également du procès-verbal établi par Me Senusson établi le 21 juillet 2011 les constatations suivantes :
avenue des Sources :
- sur le trottoir numéros impairs, les tampons de la chambre de distribution FRANCE Télécom type A2 ont été remplacés par deux tampons portant les mentions « Fes Debrousseval - EN 124 - D 400 » ;
- chaque tampon est désormais sécurisé et condamné par une serrure à clef ; le cache du pêne de la serrure est protégé par un bouchon plastique sur lequel se trouve écrit " F 31 ", le représentant de France Télécom déclarant ne pas être en possession de la clef permettant l'ouverture des tampons ;
- à l'intersection de l'avenue des Sources et l'avenue des IV Pavés du Roy, des fouilles sont en cours de réalisation sur le trottoir bordant les immeubles portant des numéros pairs ;
- ces fouilles d'une profondeur d'environ 80 cm sont destinées à l'enfouissement de réseaux mixtes électriques et téléphoniques ;
- une partie de ces réseaux est déjà enfouie ; une chambre de distribution à ce niveau est en cours de pose.
avenue du Manet :
- côté centre commercial, les tampons d'une chambre de distribution de France télécom L5T ont été remplacés par deux tampons portant les Mentions « Fes Debrousseval ¿ EN124 ¿ D 400 » ;
- chaque tampon est sécurisé et condamné par une serrure à clef ; le cache du pêne de la serrure est protégé par un bouchon plastique sur lequel se trouve écrit F 31 ;
- face à la crêperie du Manet, les tampons d'une chambre de transport et de distribution France télécom n'ont pas été remplacés depuis le précédent constat du 13 juillet 2011, mais leurs bords sont partiellement recouverts par l'enrobé du trottoir ; cette chambre a été relevée de 20 cm environ pour la mettre au niveau du trottoir ;
- sur le trottoir bordant les immeubles portant les numéros impairs face à l'immeuble portant le numéro 18, la présence d'une chambre dépourvue de tampons, protégée uniquement par une planche de contreplaqué maintenue en place par trois planches ; la partie supérieure de cette chambre a été cassée en partie haute côté voirie ; le côté latéral droit de la chambre a été entièrement ré-enduit de ciment ; les câbles visibles à l ¿ intérieur de la chambre sont désormais recouverts d'une laitance de ciment et de dépôt de ciment.
Dans un constat du 8 août 2011, Maître Catherine X..., huissier de justice, relève :
- qu'un grand panneau avertit que la communauté d'agglomération de Saint Quentin en Yvelines procède au réaménagement de l'avenue de la Source et avenue du Manet ;
- que plusieurs chambres de distribution France télécom sont désormais placées sur des places de stationnement pour véhicules, dont certaines sont en cours de création ;
- que plusieurs de ces chambres sont à proximité immédiate de cavités prévues en vue d'y implanter des arbres ;
- que l'une de ces chambres est partiellement inondée.
Le constat établi le 3 novembre 2011 par Maître Y..., huissier de justice, avenue des Sources, avenue du Manet et avenue des IV Pavés du Roy, à Montigny-le-Bretonneux relève :
* concernant la chambre dénommée « D » :
si l'huissier de justice avait constaté le 8 août 2011 que le battant pouvait être soulevé d'environ 15 centimètres de haut, le 3 novembre 2011, l'huissier de justice constate qu'elle est verrouillée et ne peut plus être ouverte ;
*en ce qui concerne la chambre « H » :
s'il avait été constaté le 8 août 2011 la présence de cette chambre située sur les places de parking situées en limite du trottoir, l'huissier de justice constate le 3 novembre 2011 que cette même chambre est placée sous une voiture et qu'elle est équipée d'un espace destiné à recevoir un verrou ;
*concernant la chambre « J » :
si l'huissier de justice avait constaté, le 8 août 2011, qu'elle avait pu être ouverte à l'aide de marteaux à plaques, le 3 novembre 2011, il constate que seule la partie droite peut être ouverte et que pour le reste la chambre est verrouillée ;
* sur le côté de la chambre « J » : est constatée la présence de huit tubes PVC tels des fourreaux se dirigeant en direction d'une autre chambre située sous une voiture stationnée sur les places de parking ;
* en ce qui concerne la chambre « K », qui porte un logo représentant un ancien téléphone à cadran, elle est placée sous une voiture ;
* sur le même trottoir, où se trouve une chambre portant ledit logo, l'huissier de justice constate, devant le n° 18, que des encoches permettant de soulever le tampon de la chambre sont colmatées par du bitume.
Il résulte suffisamment de l'ensemble des constatations des différents huissiers de justice
-que, dans le cadre des travaux de voirie réalisés par la CASQY, un certain nombre de chambres de transport et de distribution de services de communications électroniques appartenant à France télécom ont été verrouillées et lui sont devenues inaccessibles, tant par la mise en place de serrures à clefs que par la création d'emplacements de parkings, sans aucun préavis auprès de la société Orange (anciennement France télécom), et de nouvelles chambres ont été créées à proximité immédiate ;
- que des atteintes ont été portées à des infrastructures portant le logo France Télécom particulièrement à plusieurs chambres de transport et de distribution de services de communication électroniques et à des câbles de réseau datant des années 80-90 ;
- que des chambres ont été cassées, que des câbles à l'intérieur des chambres et des parois de ces chambres ont été enduits de ciment et que des trappes d'accès Franco télécom aux chambres de la société Orange ont été remplacées.
La CASQY a effectué des travaux sans droit ni titre ni mise en oeuvre d'une procédure régulière sur des infrastructures de génie civil appartenant à la société Orange sans que cette emprise irrégulière ne s'inscrive dans l'exercice légitime de ses pouvoirs et ne soit manifestement susceptible de se rattacher à un pouvoir lui appartenant.
Le jugement sera dès lors confirmé en ce qu'il a :
- dit que la communauté d'agglomération de Saint Quentin en Yvelines a commis une voie de fait à l'encontre des infrastructures de génie civil de la SA France télécom situées sur l'avenue du Manet (côté impair), sur l'avenue de la Source et sur l'avenue IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny le Bretonneux ;
- rejeté en conséquence l'incompétence soulevée par la Communauté d'Agglomération de Saint Quentin en Yvelines ;
- ordonné une expertise,
- enjoint à la communauté d'agglomération de Saint Quentin en Yvelines de procéder aux remises en état des infrastructures de génie civil dont la SA France télécom est propriétaire sur les avenues du Manet, de la Source et IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny le Bretoimeux suivant la liste établie par l'expert dans un délai de deux mois après son établissement, sous astreinte de 1. 000 euros par jour de retard à compter de cette date.
La société Orange forme appel incident quant au montant des dommages-intérêts qui lui ont été alloués.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13juillet 2011, la société Orange a en vain demandé à la CASQY de suspendre ses travaux de réfection de la voirie, cette dernière affirmant par courriel du même jour que « la communauté d'agglomération a reçu par les communes la compétence communications électronique des réseaux téléphoniques et est propriétaire des infrastructures se trouvant sur son territoire » (sic), et ce sans prendre aucune précaution en vue de s'assurer de l'origine de propriété des infrastructures concernées.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 21 juillet2011, la société Orange a vainement mis en demeure la CASQY de remettre en place tes trappes existant initialement et de lui redonner accès à son réseau.
Il s'agit d'agissements graves tant pour le droit de propriété de la société ORANGE que pour les usagers des réseaux de communications électroniques.
En effet, ainsi que le fait valoir la société Orange, l'indisponibilité de son réseau et l'inaccessibilité partielle ou totale de certains équipements sont susceptibles de lui interdire de procéder à toute intervention en cas de problème affectant ses services ou ceux des opérateurs tiers empruntant son réseau, étant rappelé que France télécom devenue Orange disposant d'un réseau d'infrastructures de génie civil provenant de son ancien statut de monopole public, la société Orange est tenue à des obligations légales de permanence, de qualité et de disponibilité du réseau et du service, ainsi que de sécurité de fonctionnement du réseau.
Au vu des éléments d'appréciation contradictoirement soumis à l'appréciation de la cour, il y a lieu de porter l'allocation des dommages-intérêts à la somme de 20. 000 euros »,
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE
« Le litige concerne les travaux réalisés par la CASQY à partir de mai 2011 et portant sur les infrastructures de génie civil des avenues du Manet, de la Source et des IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny le Bretonneux.
Les infrastructures de génie civil sont déterminées par l'Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes qui indique dans sa décision du 24 juillet 2008 qu'ils comprennent « les fourreaux accueillant les câbles de communication électronique, les galeries souterraines et les chambres de tirage c'est à dire toute installation souterraine permettant d'accéder aux fourreaux afin d'y déployer des câbles de communication électronique dans la boucle locale ».
La CASQY soulève l'incompétence du juge judiciaire tandis que la SA FRANCE TELECOM fonde la compétence du juge judiciaire sur l'atteinte faite à son droit de propriété constitutive d'une voie de fait.
Les deux parties revendiquent la propriété des infrastructures de génie civil sur lesquels des travaux ont été effectués dans les avenues susvisées de la commune de Montigny le Bretonneux.
La SA FRANCE TELECOM fait valoir à juste titre que l'établissement public FRANCE TELECOM avait en vertu de la loi N° 90-958 du 2 juillet 1990 en son article 22 le monopole des installations téléphoniques, de leur exploitation et des infrastructures de génie civil en France jusqu'en 1996. A cette date, en vertu de la loi du n° 96-660 du 26 juillet 1996 « la personne morale de droit public France Télécom mentionnée à l'article 1er est transformée à compter du 31 décembre 1996 en une entreprise nationale dénommée France Télécom, dont l'Etat détient directement plus de la moitié du capital social. Cette entreprise est soumise aux dispositions de la présente loi en tant que celle-ci concerne l'exploitant public France Télécom et, dans la mesure où elles ne sont pas contraires à la présente loi, aux dispositions législatives applicables aux sociétés anonyme. Les biens, droits et obligations de la personne morale de droit public France Télécom sont transférés de plein droit, au 31 décembre 1996, à l'entreprise nationale France Télécom à l'exception de ceux mentionnés à l'alinéa suivant. Les biens de la personne morale de droit public FRANCE Télécom relevant du domaine public sont déclassés à la même date ». Il s'ensuit que les infrastructures de génie civil construites avant le 1er juillet 1996 appartiennent désormais à la SA FRANCE TELECOM.
Cependant la CASQY soutient que les infrastructures de génie civil n'ont pas été réalisées par le service des postes et télécommunications de l'État mais ont été réalisées et financées soit par les établissements publics qui étaient en charge dans les années 1980-1990 d'aménager l'agglomération nouvelle soit par elle-même. Pour autant elle ne verse aux débats aucune pièce et n'apporte aucun élément propre à contredire la propriété de la SA FRANCE TELECOM.
Le seul fait de soutenir qu'en sa qualité de maître d'ouvrage, I'EPASQY (Etablissement Public d'Aménagement de la ville nouvelle de Saint Quentin en Yvelines) créé par décret du 21 octobre 1970 est propriétaire des infrastructures qu'il a financées et réalisées est insuffisant dans la mesure où à cette époque FRANCE TELECOM avait le monopole des installations de génie civil et des réseaux de télécommunication. La seule production des statuts de la CASQY en date du 16 décembre 2003, qui indique que l'ensemble des biens, droits et obligations du Syndicat d'Agglomération nouvelle de Saint Quentin en Yvelines lui est transféré et qui mentionne qu'elle exerce les compétences obligatoires pour la création, l'aménagement et l'entretien de la voirie d'intérêt communautaire n'apporte pas à cet égard d'élément probant. La délibération NC13 du 4/ 11/ 04 de la Communauté d'agglomération de Saint Quentin en Yvelines n'est pas plus significative en ce qu'elle reprend seulement ses compétences obligatoires, facultatives ou optionnelles sans viser les infrastructures de génie civil en cause.
La SA FRANCE TELECOM soutient qu'en ce qui concerne les infrastructures de génie civil des trois avenues en litige, elles ont été effectuées avant 1996. A cet égard, " le plan masse PAS réseau téléphonique " de l'Etablissement public d'aménagement de la ville nouvelle (l'EPA) du 9 septembre 1992 placé sous X... 9 de la demanderesse, qui porte le cachet de la direction opérationnelle de Buc et qui a trait au quartier du Manet de la commune de Montigny le Bretonneux montre cinq installations de chambres de tirage d'un côté de l'avenue du Manet et six installations des deux côtés de l'avenue de la Source. Cela est d'ailleurs conforté par les projets émanant de FRANCE TELECOM de mai 1993 produits par la SA FRANCE TELECOM sous côte 11 où apparaissent également des chambres de tirage sur les avenues en cause et par le projet génie civil de mars 1990 de FRANCE TELECOM (côte 10) où sont visibles également des chambres de tirage. Au vu des explications ci-dessus données, la date d'établissement du plan de 1992 confère la propriété de ces chambres de tirage à FRANCE TELECOM sans que la contestation de la CASQY, qui ne produit qu'un plan de masse n'ayant pas le même objet sous côte 10, puisse être retenue.
Au surplus, la SA FRANCE TELECOM produit le « document extrait du guide de formation AEXSL de 1977 » en pièce 14 qui montre qu'à celle date existaient avenue du Manet des canalisations multitubulaires (côté impair) alors que de l'autre côté il y avait des câbles aériens et les arrêtés du Maire de la commune de Montigny le Bretonneux du 31 août 1993, du 11 juillet 1994 et du 6 décembre 1994 (pièce N° 31) qui indiquent que dans le cadre de travaux confiés à FRANCE TELECOM pour l'extension et l'amélioration du réseau FRANCE TELECOM, la mise en souterrain de canalisations téléphoniques et l'extension du réseau téléphonique, l'entreprise CEGELLEC et l'entreprise CORETEL étaient autorisées à intervenir notamment avenue des IV Pavés du Roy, rue du Manet et avenue de la Source, ce qui caractérise le fait que la SA FRANCE TELECOM étaient bien propriétaire de ces infrastructures.
Enfin, la CASQY produit la convention établie le 6 février 2004 entre elle et FRANCE TELECOM qui précise dans son article 1 son objet « la mise en souterrain du réseau de télécommunications avenue du Manet phase 1 et 2 (entre avenue de la source et RD36 puis entre avenue du Manet et la Ferme du Manet », qui indique sous l'article 3 que « les travaux de génie civil (tranchées, pose de conduites, implantation de chambres et des bornes de raccordement, etc...) seront réalisés par la communauté d'agglomération par l'entreprise de son choix (FRANCE TELECOM n ¿ étant pas propriétaire des ouvrages de génie civil, les dalles de chambres ne porteront pas de marquage FRANCE TELECOM) " et qui mentionne sous l'article 5 intitulé " propriété : les ouvrages de génie civil réalisés dans le cadre de la présente convention, dont le périmètre est défini à l'article 1 restent la propriété de la communauté d'agglomération. Le câblage réalisé par la communauté d'agglomération reste la propriété de FRANCE TELECOM.
Il résulte des termes de la convention que les travaux portent sur l'enfouissement du réseau de télécommunications de l'avenue du Manet, dont il a été vu par les plans produits par FRANCE TELECOM qu'un seul côté de cette rue avait un câblage aérien, l'autre étant déjà souterrain et sur la transformation de ces installations aériennes en installations souterraines qui deviennent la propriété de la CASQY. A contrario, l'existence même de cette convention montre que la propriété de toutes les installations de cette avenue étaient la propriété de FRANCE TELECOM puisqu'il y a eu nécessité de cet accord pour transférer la propriété des installations aériennes devenues souterraines à la CASQY sans d'ailleurs qu'il soit fait référence dans cet acte aux installations déjà enfouies ou à d'autres rues.
Au vu de tous ces éléments, il convient de constater que FRANCE TELECOM est propriétaire des infrastructures de génie civil sur l'avenue du Manet côté impair, sur l'avenue de la Source et sur l'avenue des IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny le Bretonneux sans qu'il appartienne au Tribunal de se prononcer sur la propriété de l'ensemble des infrastructures de la commune de Montigny le Bretonneux qui dépasse l'objet du litige.
A la requête de la SA FRANCE TELECOM, qui a répondu dans les délais à la demande de renseignements de la CASQY du 29/ 04/ 2011 et au vu de la déclaration d'intention de commencement de travaux de la société EUROVIA et qui a indiqué l'emplacement des chambres de tirage, plusieurs constats d'huissier ont été établis à la date du 13 juillet 2011, du 21juillet2011 du 8 août 2011 et du 3 novembre 2011. II résulte de ces procès-verbaux que sur les trois avenues concernées, des chambres de tirage ont été ouvertes, quelles sont restées ouvertes sans aucune barrière de sécurité, que des trappes ont été déplacées et mises à des emplacements de stationnement les rendant ainsi inaccessibles, que les tampons des chambres de tirage ne comportent plus le logo FRANCE TELECOM, que des tampons ont été sécurisés par des clés dont la clé n'est pas en possession de FRANCE TELECOM.
L'exécution des travaux perpétrés par la CASQY, qui ne sont pas contestés dans leur réalité, sur les infrastructures de génie civil de FRANCE TELECOM sans son accord porte atteinte au droit de propriété de FRANCE TELECOM sur ses infrastructures de génie civil dans les trois avenues susmentionnées et constitue une voie de fait de la part de la CASQY. En effet à partir du moment où FRANGE TELECOM arguant de sa propriété sur lesdites infrastructures lui demandait de faire cesser les travaux, ce qui n'est pas contesté, la CASQY se devait de s'assurer de l'origine de propriété de ces infrastructures et ne peut dès lors aujourd'hui arguer du fait que les travaux entrepris procèdent d'une décision qui ne serait pas manifestement insusceptible de se rattacher à un de ses pouvoirs. Dès lors le juge judiciaire est compétent pour faire cesser la voie de fait constatée dans les trois avenues de la commune de Montigny le Bretonneux en cause dans le présent litige, sans qu'il appartienne au Tribunal de se prononcer sur l'ensemble des infrastructures de génie civil de la commune de Montigny le Bretonneux et toute demande contraire sera rejetée.
Il convient donc d'ordonner à la CASQY de faire cesser les travaux et d'assurer la remise en état des locaux en cause. Pour autant, il s'avère des conclusions de la CASQY que les travaux sont achevés dans les trois rues susvisées sans que FRANCE TELECOM n'ait démontré à l'audience que les travaux sont encore en cours. Dès lors il convient d'ordonner une expertise aux fins de rechercher dans les avenues du Manet, de la Source et des IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny le Bretonneux l'état d'avancée des travaux, la nature et la consistance des dommages causés aux infrastructures de génie civil propriété de FRANCE TELECOM dans ces trois avenues et de déterminer les travaux de remise en l'état nécessaires et ce dans les conditions précisées au dispositif de la décision. Au vu des résultats de cette expertise qui constatera la liste des travaux à faire, il sera enjoint à la Communauté d'agglomération de Saint Quentin en Yvelines de procéder aux remises en état nécessaires dans les avenues du Manet, de la Source et des IV Pavés du Roy dans la commune de Montigny le Bretonneux dans un délai de deux mois après l'établissement de la liste des travaux par l'expert, sous astreinte de 1. 000 € par jour passé ce délai étant donné la résistance démontrée de la CASQY. Une expertise étant diligentée, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes de travaux de la SA FRANCE TELECOM tels que détaillés dans son assignation.
L'astreinte ayant été ordonnée, il n'y a pas lieu d'autoriser la SA FRANCE TELECOM à faire exécuter elle-même les travaux de remise en état nécessités.
En ce qui concerne la demande de dommages et intérêts, force est de constater que la CASQY s'est arrogée le droit de porter atteinte à la propriété de la SA FRANCE TELECOM alors même que cette dernière revendiquait sa propriété et la jouissance de ses infrastructures de génie civil, auxquelles elle n'a pas pu accéder depuis le début des travaux dans les trois avenues en cause dans la commune de Montigny le Bretonneux. Il convient donc d'allouer à ce titre la somme de 10. 000 ¿ de dommages et intérêts que la Communauté d'agglomération de Saint Quentin en Yvelines sera condamnée à lui verser »,
ALORS D'UNE PART QUE l'article 22 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 et l'article 1er de la loi n° 96-660 du 26 juillet 1996 n'ont pu transférer respectivement à l'Etablissement public France Telecom d'abord, à la société France Telecom, aux droits de laquelle se trouve la société Orange ensuite, que les seuls biens mobiliers et immobiliers qui, dans le cadre du monopole sur les télécommunications, ont été réalisés sous la maîtrise d'ouvrage de l'Etat jusqu'à la loi du 2 juillet 1990 et ensuite de l'Etablissement public France Telecom jusqu'à la loi du 26 juillet 1996 et dont ils avaient, en conséquence, la propriété ; qu'il résulte des article L 33 du code des postes et télécommunications en vigueur jusqu'au 30 décembre 1990, puis des articles L 33-1 et L 34-1 du même code en vigueur jusqu'au 27 juillet 1996 que ce monopole ne s'étendait, pour la réalisation et par suite, la propriété des infrastructures de télécommunications, qu'à l'établissement de certains réseaux de télécommunications, définis par l'article L 32 de ce même code comme « toute installation ou tout ensemble d'installations assurant soit la transmission, soit la transmission et l'acheminement de signaux de télécommunications ainsi que l'échange des informations de commande et de gestion qui y est associé, entre les points de terminaison de ce réseau », à l'exclusion des infrastructures de génie civil destinées à accueillir ces réseaux, telles que les fourreaux, les chambres de tirage, qui pouvaient avoir été réalisées et détenues en pleine propriété notamment par les établissements publics d'agglomération nouvelle de la loi n° 70-610 du 10 juillet 1970 pour l'application de laquelle a été créé, par décret n° 70-974 du 21 octobre 1970 l'établissement public chargé de l'aménagement de la Ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines, de sorte qu'en jugeant que la société Orange détenait la propriété des infrastructures de génie civil recevant les réseaux de télécommunication sur le territoire de la CASQY en raison de leur inclusion dans le monopole des télécommunications détenu successivement par l'Etat et l'Etablissement public France Telecom et de leur transfert à la société France Telecom, aux droits de laquelle se trouve la société Orange, la cour d'appel a violé par fausse interprétation les articles L 33 en vigueur jusqu'au 30 décembre 1990, les articles L 32, L 33-1 et L 34-1 en vigueur jusqu'au 27 juillet 1996 du code des postes et télécommunications, et, en conséquence, par fausse application les lois des 2 juillet 1990 et 26 juillet 1996,
ET ALORS D'AUTRE PART QU'il n'y a voie de fait de la part de l'administration, justifiant, par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire pour en ordonner la cessation ou la réparation, que dans la mesure où l'administration, soit a procédé à l'exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d'une décision, même régulière, portant atteinte à la liberté individuelle ou aboutissant à l'extinction d'un droit de propriété, soit a pris une décision qui a les mêmes effets d'atteinte à la liberté individuelle ou d'extinction d'un droit de propriété et qui est manifestement insusceptible d'être rattachée à un pouvoir appartenant à l'autorité administrative de sorte que la cour d'appel qui, par motifs propres et adoptés, s'est bornée à constater une simple atteinte portée au droit de propriété de la société Orange sans extinction de son droit de propriété, par une décision de la CASQY ne s'inscrivant pas « dans l'exercice légitime de ses pouvoirs » et n'étant pas « manifestement susceptible de se rattacher à un pouvoir lui appartenant », a violé, par fausse interprétation et fausse application, la loi des 16 et 24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III,
ET ALORS ENFIN QU'il appartient à celui qui invoque une voie de fait de justifier qu'il a été porté atteinte à son droit de propriété et notamment d'apporter la preuve de sa propriété sur le bien en cause de sorte que pour s'être fondée sur la circonstance que la CASQY ne rapportait pas la preuve de sa qualité de propriétaire des infrastructures et n'établissait notamment pas en avoir été le maître d'ouvrage ou le financeur, pour conclure à leur propriété par Orange, demandeur à la voie de fait, la cour a inversé la charge de la preuve en violation des articles 1315 du Code civil, de la loi des 16 et 24 août 1790 et du décret du 13 fructidor an III.