LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Médiapromotion du désistement de son pourvoi ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par les sociétés le Quotidien et Edition et presse de la Réunion que sur le pourvoi incident relevé par la société Médianergie ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Médianergie a conclu avec les sociétés Le Quotidien, Médiapromotion et Edition et presse de la Réunion plusieurs contrats de représentation commerciale ; que ces dernières ayant rompu les contrats dans des conditions qu'elle a estimées brutales, la société Médianerge les a assignées, par acte du 2 juin 2010, en paiement de dommages-intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6 I, 5° du code de commerce devant le tribunal mixte de commerce de Saint Denis de la Réunion ; que ses demandes ayant été rejetées, la société Médianergie a déposé une déclaration d'appel auprès du greffe de la cour d'appel de Saint Denis ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, qui est recevable :
Vu l'article 125 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce ;
Attendu que l'arrêt condamne les sociétés Le Quotidien et Edition et presse de la Réunion à payer une certaine somme à la société Médianergie, en application de l'article L. 442-6 5° du code de commerce ; Attendu qu'en statuant ainsi, sans relever la fin de non-recevoir tirée de l'inobservation de la règle d'ordre public investissant la cour d'appel de Paris du pouvoir juridictionnel exclusif de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avertissement donné aux parties ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi incident ;
Et sur le pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne les sociétés Edition et presse de la Réunion et le Quotidien, à payer, respectivement, à la société Médianergie une somme de 15 509 euros de dommages-intérêts au titre du contrat conclu le 1er janvier 1999, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, pour la première, et les sommes de14 353 euros et 2 175 euros de dommages-intérêts au titre des contrats conclus les 15 mai et 16 novembre 2000, pour la seconde, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, ainsi qu'une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 24 juin 2013 , entre les parties, par la cour d'appel de Saint Denis de la Réunion ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare irrecevable l'appel interjeté par la société Médianergie contre le jugement du 3 août 2011 en ce qu'il a été formé devant la cour d'appel de Saint Denis de la Réunion ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens exposés tant devant la Cour de cassation que devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées tant devant la Cour de cassation que devant les juges du fond ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mars deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour les sociétés Le Quotidien et Edition et presse de la Réunion.
Les sociétés Le Quotidien et Edition et presse de la Réunion font grief à l'arrêt attaqué de les avoir respectivement condamnées à payer à la société Medianergie la somme de 15.509 euros de dommages et intérêts au titre du contrat conclu le 1er janvier 1999, avec intérêts au taux légal, et la somme de 14.353 euros et de 2.175 euros de dommages et intérêts au titre des contrats conclus les 15 mai et 16 novembre 2000, avec intérêts au taux légal ;
AUX MOTIFS QUE les modalités de la rupture négociée entre les parties et notamment la durée du préavis pour mettre fin au contrat de distribution exclusive ne sont pas laissées à l'entière liberté contractuelle et doivent être conformes aux dispositions de l'article 442-6-I-5° du code de commerce ; qu'il convient que la juridiction saisie vérifie si le délai de préavis stipulé au contrat est bien suffisant ou raisonnable pour permettre au concessionnaire de disposer du temps nécessaire pour réorienter son activité à la suite de la cessation de relations commerciales stables et continues ; qu'il s'ensuit qu'à lui seul le respect du préavis contractuel n'est pas suffisant pour exonérer le concédant du manquement de brusque rupture et qu'il convient, nonobstant les stipulations du contrat relatives à la durée du préavis, de rechercher quel était le délai de préavis adapté quant à sa durée, aux besoins du concessionnaire découlant de la cessation à lui imposée de la relation commerciale établie ; qu'en l'occurrence, les relations contractuelles de la SAS Medianergie ont débuté le 1er janvier 1999 avec Edition et presse de la Réunion (VISU), le 15 mai 2000 et le 16 novembre 2000 avec le Quotidien, le 24 mai 2006 puis le 24 mai 2007 avec Mediapromotion (Cinepromotion pour le premier et NRJ Réunion, pour le second Chérie FM) ; qu'il s'agissait de contrat de représentation commerciale sur le marché extralocal ; que les contrats initiaux étaient conclus pour une durée d'un an, renouvelable par tacite reconduction par période de douze mois, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties six mois à l'avance, cf. contrats, 1er janvier 1999 avec Edition et Presse de la Réunion (VISU), le 15 mai 2000 et le 16 novembre 2000 avec Le Quotidien, alors que les deux derniers contrats conclus dans les mêmes conditions ne prévoyaient plus qu'un préavis de trois mois ; que suivant courrier du 5 décembre 2008, Mediafi, agissant au nom de « notre groupe » a décidé d'aligner l'ensemble des conditions des cinq contrats ; qu'il en est résulté un avenant le jour même de chaque contrat au terme duquel il était reconduit pour un an à compter du 30 juin 2009 et reconductible tacitement par période de douze mois, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties, trois mois avant son échéance ; que le 26 mars 2010, les sociétés Le Quotidien (SAS), Mediapromotion (SARL) et Edition et presse de la Réunion (SAS) les ont dénoncés par lettre recommandée avec effet au 1er juillet 2010, conformément aux termes des contrats ; que selon l'article 442-6-I-5° du code de commerce, en l'absence d'accords interprofessionnels déterminant la durée minimale du préavis de rupture, seul le critère de la durée commerciale établie est désormais à prendre en compte pour apprécier le délai du préavis nécessaire à prendre en compte pour apprécier le délai du préavis nécessaire à la reconversion de la partie qui subit la rupture ; que le délai de préavis doit permettre la réadaptation des parties, le rétablissement d'une nouvelle relation contractuelle, une reconversion salvatrice ; que le caractère brutal de la rupture se déduit du fait que rien ne la laissait présager, que les conventions avaient été régulièrement reconduites jusque là, que la relation contractuelle était ainsi pour les trois premiers contrats stable et continue et que soudainement, sans mettre en cause l'exécution des obligations à la charge de la SAS Medianergie, les sociétés Le Quotidien (SAS), Mediapromotion (SAS) et Edition et presse de la Réunion (SAS) ont décidé d'y mettre un terme, non sans avoir pris la précaution de préalablement réduire la durée d'un préavis contractuel de six mois à trois mois, après sept à huit ans d'exécution ; qu'il ressort des pièces comptables produites que la clientèle de la SAS Medianergie se situe outre mer, mais que de façon significative, l'essentiel de sa clientèle était sur la Réunion, en raison des contrats conclus avec les sociétés Le Quotidien (SAS), Mediapromotion (SARL) et Edition et presse de la Réunion (SAS) ; qu'il convient de retenir qu'un préavis de six mois aurait dû être observé pour les trois premiers contrats, compte tenu de leur ancienneté et conformément à ce que les parties avaient du reste elles-mêmes convenu ; qu'il convient en réparation d'allouer à la SAS Medianergie à titre de dommages et intérêts la somme de 15.509 euros pour le contrat du 1er janvier 1999 conclu avec Edition et Presse de la Réunion, en complément des trois mois de préavis, de 14.353 euros pour le contrat du 15 mai 2000 conclu avec le Quotidien, de 2.175 euros pour le contrat du 16 novembre 2000 conclu avec le Quotidien ;
ALORS QUE les juges doivent relever d'office la fin de non-recevoir tirée de l'inobservation de la règle d'ordre public investissant exclusivement la cour d'appel de Paris du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce ; qu'en condamnant les sociétés Le Quotidien et Edition et presse de la Réunion à verser à la société Medianergie des dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce, sans relever d'office la fin de non-recevoir tirée de l'inobservation des articles L. 442-6-III, alinéa 5 et D. 442-3 du code de commerce investissant la seule cour d'appel de Paris du pouvoir de statuer sur les appels formés contre les décisions rendues dans les litiges relatifs à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce, la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion a violé l'article 125 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Monod, Colin et Stoclet, avocat aux Conseils, pour la société Médianergie.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société MEDIANERGIE de sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint aux sociétés LE QUOTIDIEN, MEDIAPROMOTION et EDITION ET PRESSE DE LA REUNION de communiquer l'ensemble des données chiffrées nécessaires à l'évaluation du préjudice subi par la société MEDIANERGIE du fait de la violation de l'exclusivité territoriale accordée dans le cadre des contrats conclus les 1er janvier 1999, 15 mai 2000, 16 novembre 2000, 24 mai 2006 et 24 janvier 2007 ;
AUX MOTIFS QUE s'agissant du non-respect par la société MEDIAPROMOTION des clauses d'exclusivité territoriale contractuellement prévues, dont il est fait expressément état dans les contrats des 24/05/06 et 24/01/07, les prétentions de la SAS MEDIANERGIE ne reposent que sur ses affirmations ; qu'elle ne justifie pas par les pièces produites avoir dénoncé de tels manquements de la part de son cocontractant et en avoir subi un préjudice ; que les prétentions de la SAS MEDIANERGIE sur ce fondement seront écartées ;
1°) ALORS QUE la mesure d'instruction sollicitée par la société MEDIANERGIE avait pour objet la détermination du préjudice qu'elle avait subi du fait de la violation de l'exclusivité qui lui avait été accordée et dont l'estimation était impossible sans la communication des données comptables des sociétés du groupe ; qu'en considérant, pour rejeter cette demande, que la société MEDIANERGIE ne justifiait pas avoir subi un préjudice, quand cette justification ne pouvait justement être apportée que par la communication de données qui étaient en la seule possession de ces sociétés, la cour d'appel a violé les articles 1315 du code civil et 146 du code procédure civile ;
2°) ALORS QUE la société MEDIANERGIE faisait valoir que, dans le cadre des contrats conclus avec les sociétés EDITION ET PRESSE DE LA REUNION et LE QUOTIDIEN, elle bénéficiait d'une exclusivité de fait, reconnue par le groupe, qui n'avait pas été respectée (conclusions, p. 15) ; qu'en se bornant à examiner les seuls rapports contractuels entre la société MEDIANERGIE et la société MEDIAPROMOTION, sans répondre à ces conclusions, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.