La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/04/2016 | FRANCE | N°13VE02931

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 21 avril 2016, 13VE02931


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2002, d'autre part, d'ordonner la restitution d'une partie des impositions primitives qu'elle a acquittées au titre des exercices clos en 2002 et 2003.

Par un jugement n° 1109143 du 4 juillet 2013, l

e Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2002, d'autre part, d'ordonner la restitution d'une partie des impositions primitives qu'elle a acquittées au titre des exercices clos en 2002 et 2003.

Par un jugement n° 1109143 du 4 juillet 2013, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 9 septembre 2013 et le 29 janvier 2016, la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES, représentée par Me Marsella, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer le décharge et la restitution des impositions contestées ;

3° et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES soutient que :

- le changement introduit dans le II de l'article R. 332-19 du code général des impôts par le décret du 24 décembre 2002, est sans influence sur l'actif net fiscal ;

- les primes de remboursement afférentes aux obligations détenues entre l'exercice clos en 1999 et l'exercice clos en 2011, ont été déterminées conformément à l'ancienne réglementation comptable et surimposées au regard de l'article 238 septies E du code général des impôts ;

- il ne lui appartient pas d'établir que ces primes satisfont aux obligations fixées par cet article ;

----------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des assurances ;

- le code général des impôts et le livre de procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Soyez,

- les conclusions de M. Delage, rapporteur public.

- les observations de Me Marsella, avocat, pour la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES.

1. Considérant que la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES relève appel du jugement du 4 juillet 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant, d'une part, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2002, d'autre part, à la restitution de la partie de ses impositions qu'elle aurait acquittées à tort, au titre des primes de remboursement des obligations qu'elle détenait en portefeuille au cours des exercices clos entre le 31 décembre 1999 et le 31 décembre 2001 ;

Sur la fin de non-recevoir du ministre des finances et des comptes publics :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R.*196-1 du livre des procédures fiscales : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : a) De la mise en recouvrement du rôle ou de la notification d'un avis de mise en recouvrement ; /b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; /c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation. Ne constitue pas un tel événement une décision juridictionnelle ou un avis mentionné aux troisième et cinquième alinéas de l'article L. 190. / Toutefois, dans les cas suivants, les réclamations doivent être présentées au plus tard le 31 décembre de l'année suivant celle, selon le cas : /a) De la réception par le contribuable d'un nouvel avis d'imposition réparant les erreurs d'expédition que contenait celui adressé précédemment ; /b) Au cours de laquelle les retenues à la source et les prélèvements ont été opérés s'il s'agit de contestations relatives à l'application de ces retenues ; /c) Au cours de laquelle le contribuable a eu connaissance certaine de cotisations d'impôts directs établies à tort ou faisant double emploi. " ;

3. Considérant que, par lettre du 15 novembre 2005, la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES a demandé la décharge des impositions acquittées au titre de l'exercice clos en 2003 ; que cette demande, qui doit être regardée comme présentée en application du b) de l'article R.*196-1 du livre des procédures fiscales, n'était pas tardive au regard de ces dispositions ; que, s'agissant de l'exercice clos en 2002, la lettre du 16 décembre 2010, portant réclamation des impositions supplémentaires auxquelles la requérante a été, le 9 décembre 2008, assujettie au titre de cet exercice, a été présentée avant l'expiration des délais prescrits par l'article R.*196-3 du même livre ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir opposée par le ministre des finances et des comptes publics ne peut être accueillie ;

Sur les conclusions à fin de décharge et de restitution et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens :

4. Considérant qu'aux termes du II de l'article R. 332-19 du code des assurances, dans sa rédaction issue de l'article 1er du décret n° 2002-1535 du 24 décembre 2002 : " Le I du présent article s'applique également aux obligations indexées sur le niveau général des prix, avec garantie de remboursement au pair et émises ou garanties par un Etat, un organisme ou une collectivité publics mentionnés au 1° du A de l'article R. 332-2 ou dont le débiteur est un établissement public national de l'un des Etats membres de la Communauté européenne ou parties à l'accord sur l'Espace économique européen. / Pour le calcul de la différence à amortir entre le prix d'achat d'une obligation indexée sur le niveau général des prix et son prix de remboursement, celui-ci est le prix de remboursement initial du titre multiplié par le rapport entre l'indice des prix de référence à la date d'acquisition et ce même indice à la date d'émission. / A chaque arrêté comptable, le gain ou la perte lié à l'indexation depuis le dernier arrêté comptable ou, si elle est plus récente, depuis l'achat, est enregistré en produits ou en charges. (...) " ; qu'aux termes de l'article 2 de ce même décret : " La méthode de comptabilisation définie à l'article 1er est applicable dès le premier arrêté comptable suivant l'entrée en vigueur du présent décret, y compris pour les obligations émises avant cette date. Le changement de méthode comptable donne lieu à des écritures de régularisation qui sont imputées en report à nouveau et dont le montant entre dans le calcul de la provision pour participation des assurés aux bénéfices " ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : "(...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...). " ; qu'aux termes de l'article 238 septies E du même code : " I. Constitue une prime de remboursement : /1. Pour les emprunts négociables visés à l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, les titres de créances négociables visés à l'article 124 B et tous autres titres ou contrats d'emprunt ou de capitalisation négociables ou non, émis ou conclus à compter du 1er janvier 1993, la différence entre les sommes ou valeurs à recevoir quelle que soit leur nature, à l'exception des intérêts linéaires versés chaque année à échéances régulières et restant à recevoir après l'acquisition, et celles versées lors de la souscription ou de l'acquisition ; /2. Pour les emprunts ou titres de même nature démembrés à compter du 1er janvier 1993, la différence entre les sommes ou valeurs à recevoir quelle que soit leur nature et le prix d'acquisition du droit au paiement du principal, d'intérêts ou de toute autre rémunération de l'emprunt, ou du titre représentatif de l'un de ces droits. (...) / II. (...) 2. La fraction de la prime et des intérêts à rattacher aux résultats imposables de chaque exercice jusqu'au remboursement est déterminée en appliquant au prix d'acquisition le taux d'intérêt actuariel déterminé à la date d'acquisition ; le prix d'acquisition est majoré de la fraction de la prime et des intérêts capitalisés à la date anniversaire de l'emprunt ou du titre. /Le taux actuariel est le taux annuel qui, à la date d'acquisition, égalise à ce taux et à intérêts composés les valeurs actuelles des montants à verser et des montants à recevoir. / 3. Lorsque le contrat ou le titre comporte une clause rendant aléatoire la détermination avant l'échéance de la valeur de remboursement, les dispositions du 2 s'appliquent en considérant que le taux d'intérêt actuariel à la date d'acquisition est égal à 105 % du dernier taux mensuel des emprunts d'Etat à long terme connu lors de l'acquisition, et en retenant comme date de remboursement la date la plus éloignée prévue au contrat. Toutefois, ces dispositions ne s'appliquent pas si la prime de remboursement déterminée par application de ce même taux, diminuée des intérêts linéaires versés chaque année à échéances régulières, est inférieure à 10 % de la valeur d'émission. / Par exception aux dispositions du premier alinéa, si le contrat comporte une clause d'indexation, la prime de remboursement est calculée à la clôture de chaque exercice en retenant la valeur de remboursement telle qu'elle apparaît compte tenu de la variation de l'index constatée à cette date depuis l'acquisition du titre ou la conclusion du contrat. La fraction imposable de la prime ainsi définie est égale à la différence entre : / a) La valeur acquise de cette prime calculée au taux qui, appliqué au prix d'acquisition, permet, en retenant la méthode des intérêts composés, d'obtenir la valeur de remboursement définie ci-dessus ; / b) Et les fractions imposées en application des deuxième à quatrième alinéas depuis l'acquisition au titre des exercices antérieurs... " ;

6. Considérant que les dispositions précitées du 3 du II de l'article 238 septies E précité prévoient deux modalités de comptabilisation de la prime de remboursement des emprunts et titres visés au 1 du même article ; que la première de ces modalités, décrite au premier alinéa de ce 3, s'applique aux emprunts et titres comportant une clause rendant aléatoire la détermination de la valeur de remboursement du titre avant l'échéance ; qu'elle consiste à déterminer la fraction de la prime et des intérêts rattachés aux résultats imposables de chaque exercice jusqu'au remboursement en appliquant au prix d'acquisition le taux d'intérêt actuariel déterminé à la date d'acquisition, à la condition toutefois que cette prime de remboursement déterminée par application de ce taux, diminuée des intérêts linéaires versés chaque année à échéances régulières, soit supérieure ou égale à 10 % de la valeur d'émission ; que la seconde de ces modalités s'applique particulièrement aux contrats ou aux titres comportant une clause d'indexation ; que, dans ce cas, la prime de remboursement est calculée à la clôture de chaque exercice en retenant la valeur de remboursement telle qu'elle apparaît compte tenu de la variation de l'index constatée à cette date depuis l'acquisition du titre ou la conclusion du contrat ; que les obligations assimilables du Trésor indexées sur l'inflation (OATi) relèvent de ce second alinéa, dont les dispositions constituent une exception par rapport à celles de l'alinéa qui le précède ; qu'il en résulte que le mécanisme d'étalement actuariel des primes de remboursement prévu à l'égard de ce type d'emprunt par le second alinéa du 3 du II de l'article 238 septies E précité n'est soumis, contrairement à ce que soutient l'administration, à aucune des conditions mentionnées à l'alinéa précédent ;

7. Considérant qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction, et il n'est pas contesté, que, d'une part, la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES a comptabilisé les primes de remboursement afférentes aux OATi qu'elle détenait dans son portefeuille entre le 31 décembre 1999 et le 31 décembre 2001 selon les règles de comptabilisation linéaire en vigueur avant le 1er janvier 2002 ; qu'ayant, de ce fait, majoré son résultat de 2.448.177 euros au titre de l'exercice clos au 31 décembre 2002 et de 2.130.695 au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2003, elle a acquitté une imposition supérieure à celle qui aurait résulté de l'application de la méthode actuarielle prévue par les dispositions sus-analysées de l'article 238 septies E du code général des impôts ; que, d'autre part, a la suite de la modification, au 1er janvier 2002, du traitement comptable prévu à l'article R. 332-19 du code des assurances pour les obligations indexées sur l'inflation détenues par les compagnies d'assurance, elle a constaté un gain d'un montant de 1.396.743 euros qu'elle a porté au crédit du compte " report à nouveau " à l'ouverture de l'exercice 2002 ; que l'administration, estimant que cette majoration de l'actif net de la société requérante, résultant de la réévaluation de son bilan, constituait un produit imposable sur le fondement du 2 de l'article 38 du code général des impôts, a assujetti la requérante à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice 2002 ; qu'après avoir recalculé depuis l'origine des dates d'acquisition, soit 1999, le produit fiscal tel qu'il aurait dû être imposé sur chaque exercice, la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES a sollicité tant la restitution d'une fraction des cotisations d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles acquittées au titre des exercices clos en 2002 et 2003 que la décharge des impositions supplémentaires auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2002 ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 6 que la requérante est fondée à se prévaloir, à l'appui des réclamations présentées à cette fin, des dispositions du second alinéa du 3 du II de l'article 238 septies E, dans le champ d'application desquelles entrent les OATi en litige, sans que le ministre des finances et des comptes publics puisse valablement lui opposer la double condition prévue au premier alinéa du 3 du II de ce même article ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; qu'en l'absence toutefois de débat entre les parties sur l'étendue exacte des droits de la société requérante, dès lors que doit lui être appliquée la méthode de comptabilisation des primes de remboursement prescrite au deuxième alinéa du 3 du II de l'article 238 septies E du code précité, il y a lieu de renvoyer cette société devant l'administration, en vue de la liquidation de la somme à laquelle elle a droit compte tenu de ce qui a été dit au point 6 du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, qui est dans la présente instance la partie perdante, une somme de 5 000 euros à verser à la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES sur le fondement de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1109143 du 4 juillet 2013 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES.

Article 2 : La société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES est déchargée de la différence entre les cotisations d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt qu'elle a acquittées ou auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2002 et en 2003 et le montant de ces cotisations résultant de l'application de la méthode de comptabilisation des primes de remboursement des titres et emprunts prévue au second alinéa du 3 du II de l'article 238 septies E du code général des impôts.

Article 3 : La société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES est renvoyée devant l'administration pour qu'il soit procédé, conformément à l'article 2 ci-dessus, à la liquidation de la somme à laquelle elle a droit.

Article 4 : L'Etat versera à la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la société MMA VIE ASSURANCES MUTUELLES est rejeté.

''

''

''

''

3

N° 13VE02931


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE02931
Date de la décision : 21/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net.


Composition du Tribunal
Président : M. DEMOUVEAUX
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. DELAGE
Avocat(s) : CMS BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2016-04-21;13ve02931 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award