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04/11/2014 | FRANCE | N°13VE01647

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 04 novembre 2014, 13VE01647


Vu le recours, enregistré le 31 mai 2013, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, qui demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0808028 en date du 19 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a déchargé la société Melissa des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 18 octobre 2003 au 31 décembre 2005, et des pénalités y afférentes ;
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Il soutien...

Vu le recours, enregistré le 31 mai 2013, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES, qui demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0808028 en date du 19 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a déchargé la société Melissa des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 18 octobre 2003 au 31 décembre 2005, et des pénalités y afférentes ;

2° de remettre lesdites impositions à la charge de la société Melissa ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que l'emport, sans autorisation du contribuable, des relevés de vente établis par le gérant de la société à la demande du vérificateur, entachait la procédure d'irrégularité dès lors que ces documents ne constituent pas des pièces comptables ou des pièces justificatives de comptabilité, dont l'emport devrait respecter les conditions posées par la jurisprudence ; que ces relevés, qui portaient sur une période postérieure à celle vérifiée et qui n'existaient pas avant l'engagement de la procédure de vérification de comptabilité, n'ont servi qu'à la reconstitution extracomptable du chiffre d'affaire ; qu'au demeurant, le contribuable a bénéficié d'un débat oral et contradictoire, le vérificateur s'étant rendu sur place à de nombreuses reprises ;

- il y a lieu de se référer aux arguments opposés par l'administration fiscale en première instance pour ce qui est des moyens développés par la société Melissa devant le tribunal administratif sous réserve des précisions qui suivent ;

- l'administration fiscale n'est pas tenue de respecter un délai minimum entre la notification au contribuable des bases d'imposition qu'elle se propose de retenir après avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et la mise en recouvrement des impositions ;

- la société Melissa supporte la charge de la preuve de l'exagération de ses bases d'imposition dès lors que sa comptabilité comportait de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

- la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires de la société Melissa ne peut être regardée comme radicalement viciée ou excessivement sommaire en raison du caractère prétendument non représentatif de l'échantillon sur lequel a été effectuée la pesée des solides dès lors que la société avait initialement affirmé, avant de se contredire, que les conditions d'exploitation du restaurant qu'elle exploite étaient demeurées inchangées depuis la période contrôlée ; de même, le taux de pertes retenu par l'administration avait été admis par la contribuable, qui ne peut prétendre désormais qu'il serait sous-évalué en se prévalant de pesées qui ont été faites de manière non contradictoire ; il en va de même s'agissant de la détermination du taux de marge réalisé sur les solides ; enfin, la société n'établit pas que la consommation du personnel et les offerts auraient été sous-évalués ;

- il y a lieu d'appliquer le taux de l'intérêt de retard et non celui de l'intérêt légal ;

- l'intention d'éluder l'impôt de la société Melissa est établie par la nature, l'importance et le caractère répétitif des infractions commises ;

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 octobre 2014 :

- le rapport de M. Locatelli, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Coudert, rapporteur public ;

1. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la société Melissa, qui exploite un établissement de ventes de spécialités culinaires greco-turques, à consommer sur place ou à emporter, l'administration fiscale a écarté sa comptabilité comme irrégulière et dénuée de valeur probante, reconstitué son chiffre d'affaires et rehaussé ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée à hauteur de la différence entre le chiffre d'affaires déclaré et le chiffre d'affaires reconstitué ; que le MINISTRE DE l'ECONOMIE ET DES FINANCES fait appel du jugement du 19 février 2013 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a déchargé la société Melissa des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été en conséquence assujettie respectivement au titre des années 2004 et 2005 et de la période allant du 18 octobre 2003 au 31 décembre 2005 ;

2. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions du livre des procédures fiscales relatives aux opérations de vérification que celles-ci se déroulent chez le contribuable ou au siège de l'entreprise vérifiée ; que toutefois, sur la demande écrite du contribuable, le vérificateur peut emporter certains documents dans les bureaux de l'administration, qui en devient ainsi dépositaire ; qu'en ce cas, il doit remettre à l'intéressé un reçu détaillé des pièces qui lui sont confiées ; qu'en outre, cette pratique ne peut avoir pour effet de priver le contribuable des garanties qu'il tient des articles L. 47 et L. 52 du livre des procédures fiscales et qui ont notamment pour objet de lui assurer des possibilités de débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté qu'à l'occasion de la vérification de la comptabilité dont procèdent les impositions en litige, le vérificateur a emporté, sans demande écrite du contribuable et sans lui délivrer de reçu, l'original du relevé des ventes réalisées par l'entreprise au cours de la période du 11 novembre au 7 décembre 2006, que le gérant de la société Melissa avait accepté d'effectuer à la demande du vérificateur à partir de tableaux préparés par ce dernier ; que, s'il résulte de la proposition de rectification du 21 décembre 2006, qu'après avoir écarté la comptabilité pour irrégularité et pour défaut de valeur probante, le vérificateur s'est servi de ce relevé pour procéder à la reconstitution des recettes de la contribuable, il n'en demeure pas moins que les données portées sur celui-ci n'ont pas été établies à partir d'éléments figurant dans la comptabilité de la société Melissa au titre des exercices vérifiés, ni même à partir de pièces justificatives de celle-ci, mais d'un travail d'observation et de recensement des ventes effectué par le gérant, que le vérificateur aurait d'ailleurs pu effectuer lui-même, et qu'elles étaient destinées, aux fins de la reconstitution du chiffre d'affaires, à révéler les conditions d'exploitation de l'entreprise l'année de la vérification, la contribuable ayant alors admis que ses conditions d'exploitation étaient demeurées inchangées par rapport à celles des années vérifiées ; que, par suite, ce relevé des ventes ne peut être regardé comme une pièce justificative de la comptabilité ; qu'il en résulte que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a prononcé la décharge des impositions en litige au motif que l'emport de ce document par le vérificateur hors des locaux du contribuable, sans l'accord de celui-ci et sans délivrance de reçu, avait vicié la procédure d'imposition ;

4. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par la société Mélissa tant en première instance qu'en appel ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " et qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année et de la base d'imposition et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification adressée à la société Melissa le 21 décembre 2006, mentionne la catégorie de revenus faisant l'objet des rehaussements envisagés, les motifs de ces rehaussements ainsi que la période d'imposition à laquelle ils se rattachent ; qu'elle indique en particulier les raisons pour lesquelles le vérificateur a estimé que sa comptabilité était irrégulière et non probante et expose la méthode suivie pour reconstituer les recettes et les résultats des exercices vérifiés ; que cette proposition de rectification comporte ainsi les précisions de nature à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations, ce qu'il a d'ailleurs fait par lettre du 22 janvier 2007 ; que, par suite, la société Melissa n'est pas fondée à soutenir que la proposition de rectification qui lui a été adressée était insuffisamment motivée en méconnaissance des exigences posées par les dispositions précitées du livre des procédures fiscales ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, il appartient au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que c'est à la demande expresse de la redevable que la vérification de sa comptabilité a eu lieu, outre dans son établissement de Bonnières, dans les locaux du comptable auprès duquel étaient déposés ses documents comptables et que le vérificateur s'est rendu à de nombreuses reprises, entre le 3 novembre et le 20 décembre 2006, dans les locaux de l'entreprise vérifiée ; que, si la société Mélissa allègue qu'à cette occasion, celui-ci n'a pas créé les conditions favorables à l'instauration d'un débat oral et contradictoire et qu'en particulier, elle n'aurait pas été en mesure de discuter contradictoirement les informations portées sur le relevé des ventes réalisées par l'entreprise au cours de la période du 11 novembre au 7 décembre 2006, faute pour l'administration de lui en avoir remis une copie, elle ne démontre pas que le vérificateur se serait refusé à tout échange de vue avec elle s'agissant notamment des conditions d'exploitation et de réalisation du chiffre d'affaires journalier du restaurant, dont le gérant avait au demeurant porté lui-même le détail sur le relevé des ventes en litige, en se bornant à faire état de ce qu'elle a demandé en vain copie de ce relevé à des dates postérieures à la fin du contrôle et alors qu'il est constant que la réunion de synthèse s'est tenue le 20 décembre 2006, soit postérieurement à la remise de ce relevé ; qu'il s'ensuit que la requérante doit être regardée comme n'apportant pas d'éléments de nature à justifier, ainsi qu'elle en a la charge, de l'impossibilité dans laquelle elle se serait trouvée d'avoir, avec le vérificateur, le débat oral et contradictoire que doivent normalement permettre les opérations de vérification sur place ;

9. Considérant, en troisième lieu, que l'administration a, préalablement à la mise en recouvrement des impositions, pour seule obligation de notifier l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires lorsque celle-ci a été utilement saisie ; qu'en revanche, elle n'est tenue à l'observation d'aucun délai entre la notification de cet avis et la mise en recouvrement des impositions ; qu'ainsi, alors que l'avis de la commission départementale des Yvelines, favorable au maintien des rectifications, a été notifié à la société Melissa le 31 octobre 2007 et réceptionné par celle-ci le 2 novembre suivant, les impositions supplémentaires, établies conformément aux bases retenues par la commission départementale, ont pu être régulièrement mises en recouvrement dès le 22 novembre 2007 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le service des impôts aurait dû respecter un délai minimum de trente jours à compter de la notification de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires avant de mettre en recouvrement les impositions litigieuses doit être écarté ;

10. Considérant, enfin, que les vices qui entachent la procédure d'instruction par l'administration de la réclamation d'un contribuable et la décision prise à l'issue de cette procédure sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité :

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lors des opérations de contrôle sur place, le vérificateur a relevé que les recettes de la société Melissa étaient comptabilisées de manière globale en fin de journée ; que, si la société fait valoir qu'un tel mode de comptabilisation est autorisé par les dispositions du 3° du I de l'article 286 du code général des impôts, pour des recettes d'un montant unitaire inférieur à 76 euros, cette faculté n'a cependant ni pour objet, ni pour effet de dispenser le contribuable de justifier du détail de ses recettes journalières par la conservation des justifications nécessaires ; qu'en l'espèce, pour justifier de ses recettes au comptant, la société Mélissa ne produit ni bande de caisse retraçant dans l'ordre chronologique les opérations quotidiennement réalisées, ni aucune autre pièce de nature à établir la sincérité des chiffres figurant dans sa comptabilité ; qu'il est constant, en outre, qu'elle n'a pas présenté l'inventaire des stocks dont la tenue est obligatoire ; qu'enfin, le vérificateur a également constaté que les factures d'achat n'avaient pas toutes été comptabilisées ; que, dès lors, c'est à bon droit qu'il a écarté la comptabilité vérifiée comme irrégulière et dépourvue de valeur probante et a procédé à la reconstitution des recettes de la société Mélissa ;

En ce qui concerne la méthode de reconstitution des recettes :

12. Considérant que les bases des impositions contestées étant conformes à celles que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a retenues dans son avis du 4 octobre 2007, il appartient à la société Melissa, en application de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de leur exagération ;

13. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et, notamment, de la proposition de rectification du 21 décembre 2006 que, pour reconstituer le chiffre d'affaires de la société Melissa, l'administration a appliqué au montant des achats revendus des solides un coefficient de marge brute de 4.72 et que ce coefficient a été établi à partir de l'observation des éléments constatés sur place ou avancés par l'entreprise au cours des opérations de contrôle, et résultant notamment de la pesée effectuée par l'administration le 17 novembre 2006 en présence du gérant et d'un salarié et du relevé de ventes effectué par l'entreprise au cours du contrôle à la demande du vérificateur ; que, par ailleurs, ces éléments ont été pondérés en tenant compte des pertes, offerts et prélèvements du personnel ainsi qu'en fonction de la répartition entre consommations sur place et à emporter ; que, si la société Melissa soutient que les recettes ne pouvaient être reconstituées à partir d'un relevé des ventes, effectué à une date postérieure aux années vérifiées et non représentatif dès lors que ses conditions d'exploitation auraient été sensiblement modifiées entre les deux périodes et que ses marges auraient diminué en raison d'un accroissement relatif du coût des approvisionnements plus rapide que celui du prix des ventes, il résulte toutefois de l'instruction que le gérant a, au cours de la vérification, admis que les conditions d'exploitation de l'entreprise n'avait pas été substantiellement modifiées, consentant en conséquence à établir un relevé des ventes à la demande du service ; qu'en outre, la société ne saurait utilement contester le coefficient de marge brute retenu par l'administration en se prévalant, sans préciser ni la méthode d'échantillonnage, ni la qualité et la quantité des produits testés, des résultats de pesées auxquelles elle s'est livrée postérieurement au contrôle et qui ne sauraient prévaloir sur les données issues des pesées effectuées contradictoirement le 17 novembre 2006 ; que, de plus, en se bornant à alléguer une baisse relative de la marge brute, sans plus de précision, de même qu'en soutenant que les chiffres d'affaires reconstitués au titre des exercices 2004 et 2005 sont de 30 % à 50 % supérieurs à ceux déclarés alors que sa comptabilité a précisément été écartée pour défaut de valeur probante, la société Mélissa n'établit pas que la méthode de reconstitution retenue par le service présenterait un caractère excessivement sommaire ou serait viciée dans son principe ;

14. Considérant, en deuxième lieu, qu'en se prévalant des résultats de pesées effectuées postérieurement au contrôle, et sans, ainsi qu'il a été dit au point 13, préciser ni la méthode d'échantillonnage, ni la qualité et la quantité des produits testés, la société Mélissa ne justifie pas qu'un taux de perte de 25 % devrait être substitué au taux de perte totale sur stocks, préparation, cuisson et invendus de 10 % retenu par l'administration alors que le gérant a déclaré, lors du contrôle, estimer les pertes sur préparations à 10 % et ignorer leur pourcentage au niveau des invendus ; qu'en outre, le taux de pertes appliqué a été établi d'après des données propres à l'entreprise et non à partir d'un pourcentage de pertes calculé pour un autre contribuable qui, en tout état de cause, ne saurait être tenu pour plus précis ; que, dès lors, le taux de perte de 55 %, déterminé pour une tierce entreprise, ne peut être utilement revendiqué par la société Melissa ;

15. Considérant, enfin, que si la société requérante soutient que les consommations du personnel ont été minorées pour moitié et que les produits offerts aux clients représentent, compte tenu de sa politique de fidélisation, une dépense annuelle de 2 400 euros par an, elle n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de cette affirmation ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le vérificateur aurait minoré la valeur des consommations prélevées par les salariés et offertes aux clients ne peut être accueilli ;

16. Considérant, par suite, que la société Melissa ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'exagération des impositions mises à sa charge ;

Sur les intérêts de retard :

17. Considérant que l'intérêt de retard institué par l'article 1727 du code général des impôts vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'Etat à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et de payer l'impôt aux dates légales ; que, si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; qu'il suit de là que la société Melissa ne peut utilement soutenir que le taux annuel de l'intérêt de retard devait être modulé et limité au taux de l'intérêt légal, ni que la fraction de cet intérêt qui dépasse celui de l'intérêt légal revêtirait le caractère d'une sanction aux sens des stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la majoration pour manquement délibéré :

18. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) " ;

19. Considérant qu'après avoir relevé l'absence de caractère probant de la comptabilité de la société Melissa, l'importance et le caractère répété des minorations de recettes déclarées et la circonstance que ces minorations trouvent pour l'essentiel leur origine dans des pratiques comptables irrégulières et insincères, l'administration a pu considérer à juste titre que la contribuable avait eu l'intention délibérée de se soustraire à l'impôt ; qu'ainsi, c'est à bon droit qu'elle a fait application de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a accordé à la société Melissa la décharge des impositions supplémentaires qui lui avaient été assignées ;

Sur les conclusions présentées par la société Melissa sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

21. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Melissa demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0808028 du Tribunal administratif de Versailles en date du 19 février 2013 est annulé.

Article 2 : Les suppléments d'impôt sur les sociétés au titre des années 2004 et 2005 et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée de la période du 18 octobre 2003 au 31 décembre 2005, auxquels la société Melissa a été assujettie, ainsi que les pénalités correspondantes, sont remis à sa charge.

Article 3 : Les conclusions de la société Melissa tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 13VE01647 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE01647
Date de la décision : 04/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-01-02-03 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Contrôle fiscal. Vérification de comptabilité. Garanties accordées au contribuable.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Franck LOCATELLI
Rapporteur public ?: M. COUDERT
Avocat(s) : JESSLEN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2014-11-04;13ve01647 ?
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