Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 mai 2013 et 25 juin 2013, présentés pour M. A... B..., demeurant à..., par Me Dufresne-Castets, avocat ;
M. B...demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n° 1205139 du 26 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé, à la demande de la compagnie d'exploitation des services auxiliaires aériens (SERVAIR), les décisions en date du 6 décembre 2011 et du 17 avril 2012 par lesquelles l'inspectrice du travail de l'Unité territoriale de la Seine-Saint-Denis et le ministre chargé du travail ont refusé d'autoriser son licenciement ;
2° de rejeter la demande présentée par la SERVAIR devant le Tribunal Administratif de Montreuil ;
3° de mettre à la charge de la SERVAIR la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. B...soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a considéré que le contrôleur du travail et le ministre ne pouvaient se fonder sur un motif tiré de la méconnaissance de l'article L. 1232-2 du code du travail ;
- la décision ministérielle qui est incomplète mérite la critique formulée par le jugement attaqué ;
- l'autorité administrative, lorsqu'elle est à nouveau saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé à la suite d'une annulation d'une décision de refus par le juge de l'excès de pouvoir, doit statuer au regard des circonstances de fait et de droit nouvelles et ne saurait se considérer en situation de compétence liée pour accorder l'autorisation sollicitée ;
- c'est à tort que le tribunal a jugé que la demande d'autoriser son licenciement n'avait pas de lien avec les mandats dont il est investi ; il s'était vu confier de nouveaux mandats, celui de délégué syndical central CGT de Servair SA et celui de membre du comité d'établissement de Servair 2 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2014 :
- le rapport de Mme Orio, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- les observations de Me Dufresne-Castets, avocat de M. B...,
- et les observations de Me Segond, avocat de la SERVAIR ;
1. Considérant qu'entre 2007 et 2008, la SERVAIR a sollicité à quatre reprises de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier M.B..., ouvrier ajusteur, délégué syndical central et membre du comité d'établissement ; que ces demandes ont été refusées par des décisions de l'inspection du travail en date des 16 mai 2007, 16 août 2007, 13 février 2008 et 30 avril 2008, décisions confirmées par le ministre ; que, par un arrêt du 4 octobre 2011, la cour de céans a, d'une part, annulé les décisions de refus d'autorisation des 13 février et 30 avril 2008 au motif que les faits invoqués étaient d'une gravité suffisante pour justifier un licenciement et que le lien entre les demandes de licenciement et les mandats n'était pas établi et, d'autre part, enjoint à l'inspecteur du travail de réexaminer les demandes de la société ; que, par lettre du 17 octobre 2011, la SERVAIR a, à nouveau, sollicité de l'inspecteur du travail l'autorisation de licencier M. B... ; que, par une décision du 6 décembre 2011, l'inspectrice du travail a refusé cette autorisation au motif que le délai minimal de cinq jours ouvrables prévu par l'article L. 1232-2 du code du travail entre la convocation à l'entretien préalable le samedi 24 novembre 2007 et cet entretien le 30 novembre 2007 n'avait pas été respecté et qu'il existait un lien entre les différentes demandes d'autorisation et les mandats détenus ; que le 21 décembre 2011, la société a présenté un recours hiérarchique auprès du ministre chargé du travail, que celui-ci a rejeté au motif que, le délai minimal de cinq jours ouvrables prévu par l'article L. 1232-2 du code du travail entre la convocation à l'entretien préalable et cet entretien n'ayant pas été respecté, l'inspectrice était tenue de refuser l'autorisation de licenciement sollicitée ;
Sans qu'il soit besoin de statuer la fin de non-recevoir :
En ce qui concerne la régularité de la procédure suivie :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l'objet de la convocation. L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. " ;
3. Considérant qu'il ressort du constat d'huissier établi le 23 novembre 2007 et qui ne peut être sérieusement contesté par une attestation établie plusieurs années après, par un témoin des faits, que M.B..., refusant de signer la lettre qui devait lui être remise en main propre, a été convoqué oralement, le vendredi 23 novembre 2007 vers 11h50 à un entretien préalable à une procédure de licenciement qui devait se tenir le vendredi 30 novembre à 15 heures ; que, par suite, l'inspecteur du travail et le ministre chargé du travail ne pouvaient se fonder sur le motif tiré de ce que le délai de cinq jours ouvrables prévu par le texte précité n'avait pas été respecté pour refuser, par décisions du 6 décembre 2011 et du 17 avril 2012, la nouvelle autorisation de licenciement sollicitée le 17 octobre 2011 ;
En ce qui concerne le lien avec le mandat :
4. Considérant que si l'inspecteur du travail ne pouvait, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée par la Cour, dénier aux faits reprochés à M. B...le caractère de faute suffisamment grave, il était tenu d'examiner si la nouvelle procédure de licenciement était ou non en rapport avec les fonctions représentatives telles qu'exercées par l'intéressé depuis la précédente décision intervenue en 2008 ;
5. Considérant que pour estimer que le lien entre la demande de la société et les fonctions représentatives telles qu'exercées par l'intéressé depuis la précédente décision était établi, l'inspecteur du travail a retenu des faits antérieurs aux décisions de 2008, des faits qualifiés de discriminations à l'égard de la CGT, des procédures intentées par ce syndicat, et non par M. B...ayant abouti, en 2009, à des requalifications de contrats à durée déterminée et de périodes d'intérim en contrats à durée indéterminée, en 2010, à faire respecter le droit de vote des salariés du groupe SERVAIR et, en 2011, à la prise en compte dans l'effectif de 131 contrats à durée déterminée supplémentaires ; qu'il a également pris en compte une plainte fautive contre X pour faux et usage de faux déposée par la société SERVAIR, au motif que M. B...avait été placé en garde à vue dans le cadre de l'enquête ; qu'il a également considéré un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 20 novembre 2008 qui condamne uniquement la société à rembourser à M. B... de faibles retenues sur salaires et qui a, au demeurant, été en partie cassé par l'arrêt n° 09-40.251 de la Cour de cassation ; que, par ailleurs, le second arrêt de la Cour d'appel de Paris du même jour qui juge que
M. B...a été maintenu à l'écart de l'entreprise de manière injustifiée fait suite à un retrait d'habilitation sûreté décidé par le préfet le 9 avril 2008 dont la Cour de céans à reconnu la légalité par un arrêt du 21 juin 2011 ; que, dès lors, en estimant au regard de ses seuls faits que le lien entre la demande de licenciement et la manière dont M. B...exerçait ses mandats, qui avaient seulement été renouvelés, ses fonctions de secrétaire du comité d'établissement ne constituant pas un nouveau mandat, était établi, l'inspecteur du travail a également commis une erreur d'appréciation ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé, d'une part, la décision en date du 6 décembre 2011 par laquelle l'inspecteur du travail de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi a refusé d'autoriser son licenciement, d'autre part, la décision en date du 17 avril 2012 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la santé a annulé la décision du 6 décembre 2011 mais refusé d'autoriser son licenciement ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société SERVAIR, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B...demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...le versement d'une somme de 1 500 euros à verser à la SERVAIR sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B...versera la somme de 1 500 euros à la compagnie d'exploitation des services auxiliaires aériens (SERVAIR) sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 13VE01636