Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 mars 2013 et 13 mai 2013, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER D'ARPAJON, dont le siège est 18 avenue de Verdun à Arpajon (91290), par Me le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
Le CENTRE HOSPITALIER D'ARPAJON demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n°1008089 du 28 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles l'a condamné à verser à M. et Mme A...la somme de 39 000 euros en réparation du préjudice subi à la naissance de leur fille Jeneuline et à verser la somme de 15 200,11 euros à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Essonne ;
2° de rejeter la demande présentée par M. et Mme A...et la CPAM de l'Essonne devant le Tribunal Administratif de Versailles ;
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- c'est à tort que le tribunal a retenu une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service au motif qu'il n'est pas allégué ni qu'une circonstance d'extrême urgence ait fait obstacle à ce que la sage-femme appelle un médecin ni que les médecins de permanence aient été pour des motifs légitimes dans l'impossibilité de se rendre au chevet de Mme A...alors qu'il y avait une extrême urgence vitale à pratiquer les manoeuvres destinées à extraire l'enfant ; la dystocie des épaules était totalement imprévisible ; Jeneuline avait un poids normal, était le cinquième enfant de la fratrie et sa mère ne présentait pas de diabète ;
- à titre subsidiaire, si sa responsabilité devait être retenue, elle ne devrait être engagée que sur le fondement de la perte de chance ; la sage-femme était expérimentée ; rien ne permet de supposer qu'un obstétricien aurait limité les risques de voir Jeneuline atteinte d'une paralysie du plexus brachial ; la perte de chance n'est pas établie ; il n'est pas certain que l'accident ne serait pas advenu en l'absence des manoeuvres qui sont en cause ;
- à titre subsidiaire, les indemnités accordées sont excessives ; une nouvelle intervention chirurgicale ayant pour objet d'améliorer la mobilité du bras gauche est prévue ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2014 :
- le rapport de Mme Orio, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public,
- et les observations de Me Birfet, avocat pour M. et Mme A... ;
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que JeneulineA..., souffre d'une paralysie sévère du plexus brachial gauche C5-D1 des suites de sa naissance le 11 juillet 2011 à 2h30 au CENTRE HOSPITALIER D'ARPAJON ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que si le CENTRE HOSPITALIER D'ARPAJON soutient, dans sa requête sommaire, que le jugement rendu le 28 décembre 2012 par le Tribunal administratif de Versailles n'est pas suffisamment motivé, il n'assortit pas ce moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Sur la responsabilité :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 4151-3 du code de la santé publique : " En cas de pathologie maternelle, foetale ou néonatale pendant la grossesse, l'accouchement ou les suites de couches, et en cas d'accouchement dystocique, la sage-femme doit faire appeler un médecin " ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque survient une dystocie pendant un accouchement se déroulant sous la surveillance d'une sage-femme, celle-ci a l'obligation d'appeler un médecin ; que l'absence d'un médecin dans de telles circonstances est constitutive d'un défaut dans l'organisation et le fonctionnement du service engageant la responsabilité du service public hospitalier, à moins qu'il ne soit justifié d'une circonstance d'extrême urgence ayant fait obstacle à ce que la sage-femme appelle le médecin ou que le médecin appelé ait été, pour des motifs légitimes, placé dans l'impossibilité de se rendre au chevet de la parturiente ;
4. Considérant que le CENTRE HOSPITALIER D'ARPAJON, qui n'allègue pas que le médecin de garde était dans l'incapacité de se rendre au chevet de Mme A...fait valoir, que compte tenu de l'extrême urgence de la situation, la sage-femme n'a pas eu le temps d'appeler ce gynécologue ; que, toutefois, si la dystocie des épaules est une urgence obstétricale imposant un traitement rapide compte tenu du risque à très court terme d'asphyxie néonatale et de séquelles neurologiques centrales irréversibles que cette asphyxie peut entraîner, voire de la mort néonatale, la rapidité de l'accouchement, l'absence de risque prévisible et le poids normal de l'enfant à naître invoqués par le centre hospitalier ne suffisent pas à justifier, dans la situation particulière de l'espèce où la sage-femme était assistée d'une aide-soignante et d'une infirmière, qu'un médecin, présent sur place, n'ait pu être appelé conformément aux dispositions précitées ;
5. Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction que la dystocie des épaules, qui constitue une complication redoutée de l'accouchement, peut conduire, même si l'enfant est extrait avec les manoeuvres appropriées réalisées dans les règles de l'art, à des lésions du plexus brachial consécutives soit à la dystocie elle-même soit aux forces exercées naturellement lors du processus de l'accouchement ; que, l'expert requis par le tribunal estime, que, au cas d'espèce, la sage-femme, expérimentée a " parfaitement procédé avec la manoeuvre de Mac Roberts et cette contre rotation ", manoeuvres à risques mais effectuées sans faute technique même si elle sont à l'origine des lésions et qu'il n'y avait aucun autre choix possible ; que, dans ces conditions d'urgence vitale, il ne résulte pas de l'instruction que la faute commise aurait entraîné pour l'enfant, née avec un score d'Apgar de 10, et pour ses parents, un préjudice distinct de celui qui aurait résulté de l'intervention d'un médecin ; qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER D'ARPAJON est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en litige, le Tribunal administratif de Versailles l'a condamné à indemniser M. et Mme A...et la CPAM de l'Essonne ;
Sur les conclusions de la CPAM de l'Essonne :
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées en appel par le CPAM de l'Essonne doivent être rejetées ;
Sur les frais d'expertise :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances particulières de l'affaire, de laisser les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 520 euros par ordonnance du président du Tribunal administratif Versailles en date du 18 mai 2011, à la charge du CENTRE HOSPITALIER D'ARPAJON ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER D'ARPAJON, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que les consorts A...et la CPAM de l'Essonne demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement n° 1008089 du Tribunal administratif de Versailles sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions du CENTRE HOSPITALIER D'ARPAJON est rejeté.
Article 3 : Les conclusions présentées par les consorts A...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les conclusions de la CPAM de l'Essonne sont rejetées.
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N° 13VE01003