La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/02/2015 | FRANCE | N°13VE00878

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 10 février 2015, 13VE00878


Vu le recours, enregistré le 15 mars 2013, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ;

Le ministre demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0805911 du 20 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a déchargé la société Partenaire des villes des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période allant du 1er janvier 2002 au

31 décembre 2003 et de l'amende infligée sur le fondement de l'article 1740 ter du code général des impôts ;

2° de remettre à la charge de la société

Partenaire des villes ces impositions et cette amende ;

Il soutient que :

- les factures étab...

Vu le recours, enregistré le 15 mars 2013, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ;

Le ministre demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 0805911 du 20 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a déchargé la société Partenaire des villes des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période allant du 1er janvier 2002 au

31 décembre 2003 et de l'amende infligée sur le fondement de l'article 1740 ter du code général des impôts ;

2° de remettre à la charge de la société Partenaire des villes ces impositions et cette amende ;

Il soutient que :

- les factures établies par les sociétés Apronet, CRB, CRBT, CBG et GRBF sont des factures de complaisance ; les chèques tirés pour leur règlement ont été rédigés à l'ordre de tiers qui les ont encaissés ; la société Apronet avait été liquidée et n'a jamais été inscrite au registre du commerce et des sociétés ;

- le jugement est entaché d'insuffisance de motivation car il n'indique pas les raisons pour lesquelles la décharge a été accordée pour les factures pour lesquelles la requérante n'a produit aucun justificatif ;

- la société ne pouvait ignorer que les factures n'étaient pas établies par ses fournisseurs réels comme le prouve le fait qu'elle n'a pas établi les chèques à l'ordre des auteurs des factures ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 janvier 2015 :

- le rapport de M. Skzryerbak, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Rudeaux, rapporteur public ;

1. Considérant que la société Partenaire des villes a fait l'objet d'une vérification portant sur sa comptabilité des années 2002 et 2003 ; qu'à l'issue du contrôle, l'administration a rappelé la taxe sur la valeur ajoutée déduite au titre de diverses factures et a infligé à la société Partenaire des villes l'amende prévue par l'article 1740 ter du code général des impôts ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES demande l'annulation du jugement en date du

20 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a accordé la décharge de ces impositions et de l'amende ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le ministre fait valoir que le Tribunal administratif de Versailles n'a pas indiqué les raisons pour lesquelles il a accordé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée portant sur les factures pour lesquelles aucun justificatif n'a été apporté ; qu'il ressort du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Versailles, après avoir relevé que l'administration ne contestait ni la réalité des prestations ni la régularité en la forme des factures, a indiqué que la société Partenaires des villes produisait la copie d'une partie des chèques qu'elle avait émis et qu'il ne résultait pas de l'instruction qu'elle les avait falsifiés ni qu'elle avait eu connaissance de leur falsification ; que, ce faisant, le Tribunal administratif de Versailles a implicitement mais nécessairement considéré que la production de ces pièces éclairait le comportement de la société pour l'ensemble des opérations litigieuses ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que le Tribunal administratif de Versailles a insuffisamment motivé son jugement ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

3. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts et de l'article 230 de l'annexe II à ce code alors en vigueur, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucun bien ou aucune prestation de services ou dont il ne peut ignorer qu'elle n'est pas le véritable fournisseur d'un bien ou d'une prestation effectivement fourni ; que dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que si l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que la facture ne correspond pas à une opération réelle ou que son auteur n'est pas le véritable fournisseur du contribuable, lequel ne pouvait l'ignorer, il appartient alors à ce dernier d'apporter toutes justifications utiles pour démontrer le contraire ;

4. Considérant que, pour refuser à la société Partenaire des villes le droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures des sociétés CBG, CRB, CRBT et GRBF, dont il n'est pas contesté qu'elles sont régulièrement inscrites au registre du commerce et des sociétés et assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée, l'administration a relevé que les chèques réglant ces factures avaient été encaissés par des tiers ; que, compte tenu de ces éléments, il appartient à la société Partenaire des villes de justifier que les auteurs des factures étaient les véritables fournisseurs des prestations correspondantes, dont la réalité n'est pas contestée ; que la société Partenaire des villes fait valoir que les chèques émis en règlement des factures rejetées par l'administration ont été établis à l'ordre des sociétés ayant délivré les factures et que celles-ci les ont modifiés avant leur encaissement ; qu'elle produit à l'appui de ses allégations, pour une partie des chèques, les copies qu'elle a conservées dans sa comptabilité et sur lesquelles figurent les noms des sociétés ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, ces documents ne permettent cependant pas d'établir que les chèques remis aux sociétés auraient été libellés à leurs noms et que ces dernières les auraient falsifiés ; que si la société fait valoir par ailleurs que les bénéficiaires des chèques n'étaient pas susceptibles de réaliser ces prestations de travaux et de nettoyage, elle n'apporte aucun justificatif de la réalisation de ces prestations par les auteurs des factures ; que, dans ces conditions, l'administration établit que ces factures sont des factures de complaisance et que la société Partenaire des villes ne pouvait l'ignorer ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration lui a refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur ces factures ;

5. Considérant que, s'agissant des factures de la société Apronet, l'administration fait valoir que cette société n'a jamais été inscrite au registre du commerce et des sociétés et qu'elle a été radiée du registre des métiers avant l'établissement des factures ; qu'il résulte cependant de l'instruction que l'activité de la société a été poursuivie par son gérant ; que la société Partenaire des villes a pu ignorer la liquidation de la société Apronet ; que, cependant l'administration relève que les chèques réglant les factures de cette société ont été encaissés par des tiers ; que la société Partenaire des villes n'établit pas non plus que ces chèques avaient été libellés à l'ordre de la société Apronet et que celle-ci les a falsifiés ; que si la société Partenaire des villes produit une attestation du gérant de la société Apronet indiquant qu'il a remis des chèques à des particuliers, soit contre espèces, soit en remboursement de sommes qu'il devait, cette attestation ne permet pas de justifier de l'identité du fournisseur de la prestation ; que, dans ces conditions, l'administration établit que les factures en cause sont des factures de complaisance et que la société Partenaire des villes ne pouvait l'ignorer ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration lui a refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée par ces factures ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur le droit à déduction de la société Partenaire des villes pour la décharger des impositions litigieuses ;

7. Considérant que, s'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Partenaire des villes, tant devant elle que devant le Tribunal administratif de Versailles, celle-ci n'a soulevé aucun autre moyen relatif au bien-fondé du chef de rectification mentionné au point précédent ; qu'il y a lieu en revanche d'examiner les moyens soulevés à l'encontre de l'amende infligée à la société sur le fondement de l'article 1740 ter du code général des impôts ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 1740 ter du code général des impôts alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises au I de l'article 1737 du même code : " Lorsqu'il est établi qu'une personne, à l'occasion de l'exercice de ses activités professionnelles a travesti ou dissimulé l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, ou sciemment accepté l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom, elle est redevable d'une amende fiscale égale à 50 % des sommes versées ou reçues au titre de ces opérations. Il en est de même lorsque l'infraction porte sur les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles. (...) " ;

9. Considérant qu'il résulte des faits mentionnés aux points 4 et 5 que l'administration établit qu'elle était fondée à appliquer l'amende prévue par les dispositions de l'article 1740 ter du code général des impôts ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est fondé à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a déchargé la société Partenaire des villes des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période allant du 1er janvier 2002 au

31 décembre 2003 et de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1740 ter du code général des impôts ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à la société Partenaire des villes la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0805911 du Tribunal administratif de Versailles du

20 novembre 2012 est annulé.

Article 2 : Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à la société Partenaire des villes pour la période allant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2003 sont remis à sa charge, ainsi que l'amende infligée sur le fondement de l'article 1740 ter du code général des impôts.

Article 3 : Les conclusions de la société Partenaire des villes présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

''

''

''

''

4

2

N° 13VE00878


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13VE00878
Date de la décision : 10/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions.


Composition du Tribunal
Président : M. BARBILLON
Rapporteur ?: M. Arnaud SKZRYERBAK
Rapporteur public ?: Mme RUDEAUX
Avocat(s) : ANGOTTI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2015-02-10;13ve00878 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award