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05/11/2015 | FRANCE | N°13PA00632

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 05 novembre 2015, 13PA00632


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...ont demandé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002 à 2004 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 0901448-7 en date du 13 décembre 2012, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 février 2013 et un mémoire en réplique enregistré le 24 octobre 2013, M.

et MmeB..., représentés par MeC..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901448-7 en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...ont demandé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2002 à 2004 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 0901448-7 en date du 13 décembre 2012, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 février 2013 et un mémoire en réplique enregistré le 24 octobre 2013, M. et MmeB..., représentés par MeC..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901448-7 en date du 13 décembre 2012 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge des impositions supplémentaires et pénalités litigieuses ;

Ils soutiennent que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu à l'ensemble des moyens qu'ils avaient invoqués en première instance et a méconnu les exigences de motivation prescrites par l'article L. 9 du code de justice administrative ;

- le tribunal administratif a méconnu le principe d'indépendance des procédures et les règles applicables en matière de charge de la preuve, dès lors qu'il appartient à l'administration fiscale, lorsque le bénéficiaire présumé des distributions a contesté les redressements opérés par le service, d'apporter la preuve du bien-fondé de l'imposition litigieuse ;

- la décision de rejet de leur réclamation préalable n'est pas motivée, dès lors que l'administration n'a pas répondu à leur critique se rapportant aux sommes réputées distribuées en provenance de la société Lmq ;

- les sommes mises en recouvrement sont supérieures à celles initialement notifiées ;

- ils n'ont pas régulièrement reçu notification de la proposition de rectification du 20 décembre 2005, les informant des conséquences de la vérification de comptabilité dont la société Lmq a fait l'objet;

- les frais de véhicules de la société Gemma Trans ne peuvent être regardés comme constituant des distributions, dès lors que ces frais étaient justifiés ;

- la reconstitution des recettes de la société Lmq est sommaire, dès lors que l'administration a retenu un montant de charges déductibles qui n'a pas été justifié, qui a été sous-évalué et ne correspond à aucune réalité ;

- le profit sur le Trésor devait être exclu du montant des sommes réputées distribuées ;

- les pénalités qui leur ont été appliquées n'ont pas été suffisamment motivées ;

- l'application de majorations pour manquement délibéré au titre des trois années d'imposition litigieuses n'a pas été visée dans les conditions prévues par l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er août 2013, et un nouveau mémoire enregistré le 25 février 2014, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B...sont inopérants ou ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Blanc,

- et les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public.

1. Considérant que les sociétés Gemma Trans et Lmq ltd., dont M. et Mme B...ont été les associés uniques et les seuls dirigeants, ont fait l'objet de vérifications de comptabilité au titre des exercices clos en 2002, 2003 et 2004, à la suite desquelles, le service a estimé que ces sociétés, qui exercent leur activité dans le secteur des transports, devaient être assujetties à l'impôt sur les sociétés en France, en dépit de l'adresse de leurs sièges sociaux, situés au Luxembourg ou en Grande-Bretagne ; que les rehaussements des résultats imposables de ces sociétés ont été considérés comme constitutifs de revenus distribués au profit de M. et Mme B...sur le fondement des dispositions du c de l'article 111 ou du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts ; que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 13 décembre 2012, par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ainsi que des intérêts et pénalités correspondants, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2002 à 2004, en conséquence de ces redressements ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que les requérants reprochent au tribunal administratif de ne pas avoir répondu à l'ensemble des moyens qu'ils avaient invoqués en première instance ; que s'ils font valoir que le tribunal ne se serait pas prononcé sur les modalités d'établissement du bénéfice de la société Lmq servant de base aux distributions litigieuses, il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif a suffisamment répondu à leur moyen tiré du caractère irréaliste de la reconstitution du chiffre d'affaires de la société Lmq, en considérant, aux termes du point 19 du jugement attaqué, que M. et Mme B...n'étaient pas fondés à soutenir que cette reconstitution, qui retient un montant forfaitaire de charges correspondant à 15 %, serait erroné, dès lors qu'ils n'avaient produit aucune pièce justificative des charges en cause ; qu'en outre, en précisant que cette reconstitution avait été réalisée " à partir des factures clients correspondant aux sociétés Heppner et Gemma Trans ", et non pas, ainsi que le laissaient entendre les requérants, par application d'un coefficient de marge, le tribunal administratif a suffisamment répondu, alors même qu'il n'y était pas tenu, à l'argumentation de M. et MmeB..., qui faisaient valoir que le service aurait retenu un taux de marge brute erroné ; qu'enfin, M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que le tribunal administratif aurait omis d'examiner leur moyen consistant à contester l'existence d'un établissement stable des sociétés Gemma Trans et Lmq en France, dès lors que les premiers juges ont expressément écarté, aux termes des points 5 et 6 du jugement attaqué, le moyen tiré du non assujettissement de ces sociétés à l'impôt en France en considérant que chacune d'entre elles disposait sur le territoire national d'un établissement stable par l'intermédiaire d'un bureau et d'un siège de direction ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les premiers juges, qui n'étaient nullement tenus de se prononcer sur tous les détails de leur argumentation, ont ainsi suffisamment motivé leur décision au regard des exigences prescrites par l'article L. 9 du code de justice administrative ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen invoqué par M. et MmeB..., tiré du défaut de motivation de la décision rejetant leur réclamation préalable, dès lors que ce moyen n'a été assorti d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le Tribunal administratif de Paris et écartée à bon droit par celui-ci ;

4. Considérant que M. et Mme B...se bornent à prétendre que les sommes mises en recouvrement à leur encontre seraient supérieures à celles qui leur auraient été notifiées, sans assortir leur contestation d'éléments suffisamment précis pour en apprécier le bien-fondé ; qu'il résulte de l'instruction que les bases retenues par l'administration fiscale pour l'établissement des avis d'imposition émis à l'encontre des requérants le 31 août 2007 pour le paiement de suppléments d'impôts sur le revenu et de contributions sociales litigieux sont identiques à celles notifiées lors de la procédure de redressement contradictoire ; qu'ainsi, M. et Mme B...n'établissent pas une irrégularité de la procédure d'imposition à cet égard ;

Sur le bien-fondé des impositions :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; (...) " ;

6. Considérant, que les suppléments d'impôt litigieux auxquels M. et Mme B...ont été assujettis au titre des années 2002 à 2004 procèdent de l'imposition, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, du montant de recettes encaissées par les société Gemma Trans et Lmq, non portées dans leur comptabilité sociale et regardées comme appréhendées par les requérants ;

En ce qui concerne les rehaussements du résultat de la société Gemma Trans :

7. Considérant que le service a remis en cause en application de l'article 39 du code général des impôts le caractère déductible de frais de véhicule supportés par la société Gemma Trans au titre des exercices 2002 à 2004, au motif que ces frais ne pouvaient être regardés comme des dépenses professionnelles, mais des dépenses effectuées à titre privé par les requérants, se rapportant à un véhicule mercedes ML 400 CDI, immatriculé au Luxembourg ; que lors des opérations de contrôle dont elle a fait l'objet, la société Gemma Trans n'a été en mesure d'apporter aucun élément de nature à établir que ces dépenses auraient été exposées dans l'intérêt de son exploitation ; que pour justifier la réintégration de ces frais, le service a notamment relevé que le véhicule en cause ne pouvait être utilisé pour les activités de transport de marchandises exercées par la société, ni pour les déplacements à caractère professionnel de M. B...ou de son épouse, dès lors que ceux-ci n'étaient pas salariés de la société Gemma Trans ; qu'au regard de ces éléments, le service doit être regardé comme ayant suffisamment établi que les frais litigieux ne comportaient aucune contrepartie pour la société Gemma Trans ; qu'il était ainsi fondé à réintégrer le montant de ces dépenses dans les résultats de la société Gemma Trans au titre des exercices au cours desquels elles ont été exposées et à considérer les rehaussements en résultant comme constituant des revenus distribués au profit de M. et Mme B... ;

En ce qui concerne la reconstitution du chiffre d'affaires de la société Lmq :

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le service a procédé à une reconstitution du chiffre d'affaires de la société Lmq, qui n'avait produit aucune comptabilité lors des opérations de contrôle dont elle a fait l'objet ; que cette reconstitution, qui a été effectuée à partir des éléments obtenus dans le cadre du droit de communication exercé à l'égard de la société Heppner, en particulier, à partir du compte fournisseur de la société Lmq dans les comptes de sa société cliente, ainsi que des factures de sous-traitance établies par la société Lmq elle-même ; que le service a également pris en compte le montant des factures correspondant aux prestations fournies à la société Gemma Trans obtenues dans le cadre de la visite domiciliaire, effectuée en application de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales dans les locaux de l'entreprise, ainsi que les règlements effectués par cette dernière société, en se fondant sur les indications de ses relevés de compte bancaire ; qu'alors que la société Lmq n'avait été en mesure de produire aucun document commercial de nature à justifier le montant de ses charges d'exploitation, l'administration fiscale a néanmoins admis la déduction, pour la détermination de son bénéfice imposable, de charges de sous-traitance correspondant à 15 % de son chiffre d'affaires, par application d'un ratio moyen constaté dans la profession pour des sociétés de transport effectuant de la sous-traitance de transport routier ;

9. Considérant que contrairement à ce que font valoir les requérants, la reconstitution du chiffres d'affaires de la société Lmq n'a pas été faite de manière abstraite par application d'un coefficient de marge brut au montant des achats réalisés par cette société, mais en se fondant sur le montant de ses recettes, déterminé à partir des factures établies par celle-ci et des éléments recueillis auprès de ses clients ; qu'ainsi, en l'absence de toute pièce justificative valable, le fait pour le service d'admettre la déduction d'un montant, même seulement forfaitaire de charges déductibles, n'est pas de nature à vicier la méthode de reconstitution, ni à lui conférer un caractère sommaire ; que les requérants se bornent à prétendre que le taux appliqué par le service serait irréaliste, sans toutefois justifier, à partir des conditions d'exploitation de la société Lmq, que le montant des charges supportées par celle-ci aurait été supérieur, ni même établir quelle est la part de son acticité pour laquelle cette société aurait eu elle-même recours à la sous-traitance ; qu'ils ne sont, dès lors, pas fondés à contester le montant des charges retenu par le service, en dépit de l'approximation et du caractère forfaitaire de ce montant ;

En ce qui concerne le montant des revenus distribués :

10. Considérant que l'administration était fondée à imposer entre les mains de M. et Mme B...les recettes encaissées par les sociétés Gemma Trans et Lmq, non portées dans la comptabilité sociale, lesquelles doivent être réputées comme ayant été faites toutes taxes comprises et donc comme étant constitutives d'un profit sur le Trésor au titre de la taxe sur la valeur ajoutée ; que si l'administration a procédé à la réintégration extra-comptable, aux bénéfices de ces sociétés, des sommes correspondant aux montants hors taxes des recettes omises, puis a ajouté à ces bénéfices les sommes correspondant aux montants de la taxe sur la valeur ajoutée due sur ces recettes calculées hors taxes, cette décomposition n'a pas eu pour effet de remettre en cause le caractère de revenu distribué de la totalité des recettes ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la somme correspondant aux montants de la taxe sur la valeur ajoutée n'aurait pas dû être incluse dans la base d'imposition des requérants ne peut qu'être écarté ;

Sur les pénalités :

Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen invoqué par les requérants pour contester les pénalités litigieuses ;

11. Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L. 80 E du livre des procédures fiscales la décision d'appliquer les majorations prévues à l'article 1729 du code général des impôts est prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités ;

12. Considérant M. et Mme B...soutiennent que les propositions de rectification qui leur ont été adressées étaient dépourvues de la signature de l'autorité compétente ; que l'administration fiscale n'a pas contesté que ces propositions de rectifications ne comportaient pas la signature de l'inspecteur principal tenu de les viser et n'a pas été en mesure de produire les documents originaux correspondants ; qu'elle n'a pas ainsi apporté la preuve, lui incombant, que les pénalités en litige auraient été décidées conformément aux règles édictées par l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge des majorations prévues par l'article 1729 du code général des impôts qui leur ont été appliquées au titre des années 2002 à 2004 ;

D É C I D E :

Article 1er : M. et Mme B...sont déchargés des majorations pour manquement délibéré auxquelles ils ont été assujettis en vertu de l'article 1729 du code général des impôts au titre des années 2002 à 2004.

Article 2 : Le jugement n° 0901448-7 en date du 13 décembre 2012 du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme B...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal Paris centre et services spécialisés).

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- M. Blanc, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 5 novembre 2015.

Le rapporteur,

P. BLANCLe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13PA00632


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 13PA00632
Date de la décision : 05/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués. Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Philippe BLANC
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : CLEVERY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2015-11-05;13pa00632 ?
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