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10/07/2014 | FRANCE | N°13NT01821

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 10 juillet 2014, 13NT01821


Vu la requête, enregistrée le 24 juin 2013, présentée pour la SASP Stade Malherbe de Caen, dont le siège est situé boulevard Georges Pompidou à Caen (14000), par Me Lemaitre, avocat; la SASP Stade Malherbe de Caen demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201592 en date du 7 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant, d'une part, au remboursement, à concurrence de la sommes de 109 907 euros de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au titre de l'année 2009, et, d'autre part, à la restitution, à concurrence des so

mmes de 228 971 euros, de la taxe sur les salaires mise à sa charge au...

Vu la requête, enregistrée le 24 juin 2013, présentée pour la SASP Stade Malherbe de Caen, dont le siège est situé boulevard Georges Pompidou à Caen (14000), par Me Lemaitre, avocat; la SASP Stade Malherbe de Caen demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201592 en date du 7 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant, d'une part, au remboursement, à concurrence de la sommes de 109 907 euros de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au titre de l'année 2009, et, d'autre part, à la restitution, à concurrence des sommes de 228 971 euros, de la taxe sur les salaires mise à sa charge au titre de l'année 2009 ;

2°) de lui accorder les restitutions demandées ;

3°) à titre subsidiaire, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles sur le fondement de l'article 267 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 3° de l'article 261 du code général des impôts, relative aux droits d'entrée perçus par les organisateurs de réunions sportives, qui méconnait les dispositions de l'article 371 de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006, est incompatible avec les objectifs de ladite directive et ne peut s'appliquer ;

- dans la mesure où l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée n'est pas fondée, le chiffre d'affaires lié aux droits d'entrée aux réunions sportives ne doit pas être inclus au numérateur du rapport d'assujettissement de la taxe sur les salaires mais seulement à son dénominateur ; dès lors qu'elle doit être regardée comme ayant été assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 2009 sur plus de 90 % de son chiffre d'affaires, elle est fondée à demander la restitution de la taxe sur les salaires acquittée à tort ;

- elle se prévaut de la doctrine de l'administration figurant dans l'instruction 3A-3-06 du 13 janvier 2006 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2013, présenté par le ministre chargé du budget, qui conclut au rejet de la requête ;

le ministre soutient que :

- la Cour de justice de l'Union européenne n'interdit pas les modifications ou les restrictions relatives à la portée des exonérations de taxe sur la valeur ajoutée maintenues dans le cadre de la " clause de gel " et apportées par les législations nationales postérieurement à l'entrée en vigueur de la sixième directive à condition toutefois que ces modifications ne soient pas contraires au principe de sécurité juridique et aux objectifs poursuivis par la directive ; l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée applicable à la seule perception des droits d'entrée aux manifestations sportives soumises à l'impôt sur les spectacles, seule visée par l'annexe X de la directive, doit être regardée comme ayant été maintenue dans les mêmes conditions que celles existantes avant le 1er janvier 1978 ; la loi de finances rectificative pour 1978, qui a eu pour effet de réduire le domaine de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux droits d'entrée des manifestations sportives, est conforme aux dispositions de l'article 371 de la directive 2006/112/CE et compatible avec l'objectif de suppression des exonérations prévu au 1 de l'article 393 de ladite directive ;

- le dispositif d'exonération d'impôt sur les spectacles introduit par l'article 1561 du code général des impôts n'a pas d'incidence sur le régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable aux manifestations sportives ; les droits perçus par les organisateurs de réunions sportives, soumises en principe à l'impôt sur les spectacles, sont en tout état de cause exonérés de taxe sur la valeur ajoutée et le fait que des exonérations d'impôt sur les spectacles puissent être accordées par les conseils municipaux en application des dispositions de l'article 1561 du code général des impôts ne conduit pas à soumettre les droits perçus à la taxe sur la valeur ajoutée ;

- les droits d'entrée aux manifestations sportives soumises à l'impôt sur les spectacles étant, en application de l'article 261 E, 3° exonérés de taxe sur la valeur ajoutée, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté les demandes de la SASP Stade Malherbe de Caen tendant au remboursement des cotisations de taxe sur les salaires qu'elle a versées au titre de l'année 2009 ;

- il n'y a pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne des questions préjudicielles posées par la SASP Stade Malherbe de Caen ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2014 :

- le rapport de M. Giraud, premier conseiller,

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

Sur les conclusions tendant au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée :

1. Considérant, d'une part, qu'en application des dispositions de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au 1er janvier 1978 issue de l'article 8 de la loi n° 66-10 du 6 janvier 1966, étaient exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée les affaires entrant dans le champ d'application de l'impôt sur les spectacles ; qu'aux termes de l'article 261 E de ce code, dans sa rédaction issue de l'article 33 de la loi de finances rectificative pour 1978, applicable aux impositions en litige : " Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 3° Les droits d'entrée perçus par les organisateurs de réunions sportives soumises à l'impôt sur les spectacles, jeux et divertissements. " ; qu'aux termes de l'article 1559 dudit code : " Les spectacles, jeux et divertissements de toute nature sont soumis à un impôt dans les formes et selon les modalités déterminées par les articles 1560 à 1566. Toutefois, l'impôt ne s'applique plus qu'aux réunions sportives d'une part, aux cercles et maisons de jeux, d'autre part. " ; qu'aux termes de l'article 1560 du même code : " I. Le tarif d'imposition des spectacles est fixé dans le tableau ci-après : (...) première catégorie : (...) B : Réunions sportives autres que celles classées en 3e catégorie : 8 %. (...) " ; qu'enfin, en vertu du 3e alinéa du 3° de l'article 1561 du même code, le conseil municipal peut décider que l'ensemble des compétitions sportives organisées sur le territoire de la commune bénéficie de l'exonération de l'impôt prévu aux trois premières catégories du I de l'article 1560 ;

2. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 371 de la directive susvisée du 28 novembre 2006 : " Les Etats membres qui, au 1er janvier 1978, exonéraient les opérations dont la liste figure à l'annexe X, partie B, peuvent continuer à les exonérer, dans les conditions qui existaient dans chaque Etat membre concerné à cette même date " ; qu'en vertu de l'annexe X partie B de ladite directive la perception de droits d'entrée aux manifestations sportives est au nombre des opérations que les Etats membres peuvent continuer à exonérer ; que ces dispositions s'opposent à l'introduction par les Etats membres de nouvelles exonérations de taxe sur la valeur ajoutée ou à l'extension de la portée des exonérations de taxe existantes postérieurement au 1er janvier 1978 ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que peuvent bénéficier de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue au 3° de l'article 261 E du code général des impôts, les droits d'entrée perçus par les organisateurs de réunions sportives entrant, en application de l'article 1559 du même code, dans le champ d'application de l'impôt sur les spectacles, jeux et divertissements ; que la circonstance que ces mêmes manifestations puissent, conformément aux dispositions de l'article 1561 du même code, être exemptées totalement, par délibération du conseil municipal de la commune sur le territoire de laquelle elles se déroulent, du paiement de l'impôt sur les spectacles est sans incidence sur le champ d'application de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée qui porte sur l'ensemble des recettes de billetterie perçues à l'occasion de ces manifestations, quel que soit leur lieu d'intervention ; qu'il s'ensuit que les dispositions susmentionnées de l'article 261 E, 3° du code général des impôts, qui n'ont pas pour effet d'introduire une nouvelle exonération de taxe sur la valeur ajoutée ou d'étendre la portée de l'exonération de taxe prévue au 1er janvier 1978 en faveur des " affaires qui entrent dans le champ d'application de l'impôt sur les spectacles ", ne méconnaissent pas les dispositions de l'article 371 de la directive susvisée du 28 novembre 2006, ni ne sont incompatibles avec l'objectif de ladite directive de suppression des exonérations de taxe sur la valeur ajoutée ; que la SASP Stade Malherbe de Caen n'est pas davantage fondée à soutenir qu'elles portent atteinte au principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée, lequel s'oppose à ce que des marchandises ou des prestations de services semblables soient traitées de manière différente du point de vue de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'ainsi, et dès lors que les opérations de vente de billets d'entrée aux matchs de football auxquelles la SASP Stade Malherbe de Caen s'est livrée au titre de la période en litige étaient expressément exonérées de taxe sur la valeur ajoutée par la loi, c'est à bon droit que l'administration a considéré que la taxe grevant les services et les biens ayant concouru à la réalisation de ces ventes n'était pas déductible et qu'elle a rejeté les demandes présentées par la société tendant au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée correspondant aux droits à déduction qu'elle n'a pu exercer au titre de l'année 2009 ;

En ce qui concerne l'application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) " ;

5. Considérant que la SASP Stade Malherbe de Caen n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des termes de l'instruction publiée au bulletin officiel des impôts 3 A-3-06 du 13 janvier 2006, qui ne comportent pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application ;

Sur les conclusions tendant au remboursement de la taxe sur les salaires :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 231 du code général des impôts : " Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires (...) à la charge des personnes ou organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 p. 100 au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (...) " ;

7. Considérant, qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, la totalité des droits d'entrée perçus par la SASP Stade Malherbe de Caen durant la période en litige était, en application des dispositions du 3° de l'article 261 E du code général des impôts, exonérée de taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration a dès lors pu légalement assujettir la société à la taxe sur les salaires sur le fondement des dispositions précitées de l'article 231 du même code, selon les modalités fixées audit article ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne des questions préjudicielles posées par la SASP Stade Malherbe de Caen, que cette dernière n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SASP Stade Malherbe de Caen demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête susvisée de la SASP Stade Malherbe de Caen est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SASP Stade Malherbe de Caen et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 19 juin 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Giraud, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 10 juillet 2014.

Le rapporteur,

T. GIRAUDLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. CROIGER

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01821
Date de la décision : 10/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Thomas GIRAUD
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : LEMAITRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-07-10;13nt01821 ?
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