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02/05/2014 | FRANCE | N°13NT01269

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 02 mai 2014, 13NT01269


Vu, I, la requête, enregistrée le 2 mai 2013, sous le n° 13NT01269, présentée pour Mme C... B..., demeurant..., par Me Boudriot, avocat ; Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003280 du 7 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005 ainsi que pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2008 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la déchar

ge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 0...

Vu, I, la requête, enregistrée le 2 mai 2013, sous le n° 13NT01269, présentée pour Mme C... B..., demeurant..., par Me Boudriot, avocat ; Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003280 du 7 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005 ainsi que pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2008 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- le changement de législation intervenue le 11 mars 2010 a révélé l'incompatibilité des dispositions antérieures relatives à la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge qui a été appliqué aux opérations litigieuses ;

- le régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge prévue pour les opérations d'achat-revente effectuées dans le cadre d'une activité de marchand de biens est incompatible avec les dispositions de l'article 13 C 1er alinéa point b) de la directive 77/388/CE dès lors qu'il ne prévoyait pas d'option pour ce régime dérogatoire ;

- le régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge ne prévoyant pas de possibilité de déduire la taxe acquittée en amont est incompatible avec le droit communautaire de sorte que les

dispositions de l'article 28 §3 point a) et annexe E n'étaient pas applicables ;

- l'administration n'était pas fondée à soutenir que son activité avant 2006 était celle d'un marchand de bien et qu'elle était occulte dès lors qu'elle n'a pas dissimulé la réalité et la nature des opérations effectuées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui conclut au rejet de la requête ;

le ministre soutient que :

- les opérations portant sur les terrains à bâtir qui ont fait l'objet des cessions litigieuses entrent dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et sont soumises de plein droit à la taxe conformément aux dispositions de l'article 257- 6 du code général des impôts dans la mesure où elles ne bénéficient pas de l'exonération prévue à l'article 13 de la directive 77/388/CE du 17 mai 1977 devenu directive 2006/112/CE, de sorte que les dispositions de l'article 257-6 du code général des impôts et les modalités de calcul de la taxe prévues par les dispositions de l'article 268 du code général des impôts sont conformes au droit communautaire ;

- l'administration était fondée à soutenir que l'activité exercée par la requérante était celle d'un marchand de bien avant 2006 et était occulte dès lors que celle-ci a commencé effectivement à exercer son activité de marchands de biens en 2004 et 2005 ;

Vu, II, la requête, enregistrée le 2 mai 2013, sous le n° 13NT01370 présentée pour Mme C... B..., demeurant..., par Me Boudriot, avocat ; Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100928 du 7 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- l'administration ne démontre pas que les opérations immobilières litigieuses caractérisaient une activité de marchands de bien ;

- elle peut se prévaloir, sur ce point, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la définition de cette activité figurant dans l'instruction 3 A-9-10 du 28 décembre 2010 ;

- l'administration n'était pas fondée à soutenir que son activité était occulte dès lors qu'elle n'a pas dissimulé la réalité et la nature des opérations effectuées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- les opérations immobilières litigieuses caractérisaient une activité de marchands de bien ;

- l'administration était fondée à soutenir que l'activité exercée par la requérante était occulte dès lors que celle-ci a commencé effectivement à exercer son activité de marchands de biens en 2004 et 2005 et non pas qu'à partir de 2006 ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la directive du conseil des communautés européennes n° 77/388/ CE en date du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 avril 2014 :

- le rapport de M. Monlaü, premier conseiller,

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

1. Considérant que les requêtes susvisées n° 13NT01269 et n° 13NT01270, présentées pour Mme B..., concernent la situation d'un même contribuable et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement ;

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme B..., qui a déclaré exercer officiellement l'activité de marchands de biens à compter du 12 avril 2006, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2008 à la suite de laquelle l'administration a estimé que l'intéressée devait être regardée comme ayant réellement débuté l'activité en question le 29 octobre 2004, date à laquelle elle a procédé, après division, à la revente de biens composant un ensemble immobilier acheté avec Mme A... ; que l'administration a, par une proposition de rectification du 30 novembre 2009 émise sur le fondement de l'article L. 66-3° du livre des procédures fiscales, d'une part, informé la requérante qu'elle faisait l'objet d'une procédure de taxation d'office conduisant à un rehaussement de la base d'imposition à la taxe sur la valeur ajouté calculée, en application du 6° de l'article 257 du code général des impôts, sur la marge bénéficiaire des ventes réalisées en 2004, en 2005 et en 2008 et a d'autre part, sur le fondement de l'article L. 74-1 du livre des procédures fiscales, informé l'intéressée qu'elle faisait l'objet d'une procédure d'évaluation d'office des bénéfices industriels et commerciaux réalisés en 2004 et 2005 conduisant à un rehaussement de la base d'imposition de l'impôt sur le revenu de ces mêmes années ; que Mme B... relève appel des jugements du 7 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Rennes a d'une part, rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des période courant du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005 et du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008 ainsi que des pénalités y afférentes, et, d'autre part, a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 et des pénalités y afférentes ;

Sur la recevabilité des conclusions relatives au rappel de taxe sur la valeur ajoutée concernant la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008 :

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une décision du 16 février 2011, le directeur départemental des finances publiques du Morbihan a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 4196 euros correspondant au rappel de taxe à la valeur ajoutée ainsi que des majorations et intérêts de retard afférents auxquels Mme B... a été assujettie au titre de l'année 2008 ; que le tribunal a, à bon droit, constaté que les conclusions de la requérante étaient devenues, dans cette mesure, sans objet ; que, par suite, les conclusions de la requête relatives à cette imposition sont dès lors irrecevables et doivent être rejetées ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée concernant la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2005 :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 257 du code général des impôts : "Sont (...) soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 6° Les opérations qui portent sur des immeubles, (...) et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels ou commerciaux (...)" ; qu'aux termes de l'article 35 du même code : "I. Présentent également le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'application de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes physiques désignées ci-après : 1° Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles, des fonds de commerce, des actions ou parts de sociétés immobilières ou qui, habituellement, souscrivent, en vue de les revendre, des actions ou parts créées ou émises par les mêmes sociétés (...)" ; qu'il résulte de ces dispositions que la reconnaissance de la qualité de marchand de biens, qui entraine à la fois l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée et l'imposition sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, est subordonnée à la double condition que les opérations d'achat de biens immobiliers, suivi d'une revente, soient habituelles et réalisées avec une intention spéculative, laquelle doit être appréciée à la date d'acquisition des biens ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la requérante a acquis, le 29 octobre 2004, pour un prix de 380 000 euros, un immeuble composé de deux maisons mitoyennes implanté sur un terrain de 3 196 m² cadastré en 5 parcelles référencées N1592 à N1596 ; qu'elle a revendu ce bien, après l'avoir divisé en cinq lots grâce à l'obtention, le 27 octobre 2004, d'une autorisation de lotir, par cessions intervenues respectivement le 29 octobre 2004, le 10 novembre 2004, le 20 novembre 2004, le 2 mars 2005 et le 30 mai 2005 ; que le montant total de ces reventes s'est élevé à la somme de 665 446 euros, générant ainsi une marge bénéficiaire d'un montant de 285 446 euros ; que la seule opération de division d'un bien immobilier unique en cinq lots suffit à caractériser l'opération ainsi effectuée comme présentant un caractère d'habitude ; que, par ailleurs, le nombre de ventes effectuées, leur fréquence sur une courte période, en l'espèce une période de 7 mois séparant l'acquisition du bien initial et la vente du dernier lot, ainsi que la marge bénéficiaire réalisée dénote l'intention spéculative de la requérante ; que si Mme B... soutient que ces cessions revêtaient un caractère limité et que la réalité de l'intention spéculative n'est pas démontrée, compte tenu de ce qu'elle projetait d'utiliser à des fins personnelles les biens achetés et qu'elle a été contrainte de revendre ceux-ci à la suite d'un différend avec son associé, de telles circonstances sont sans influence sur le caractère habituel et spéculatif de ces opérations ; que, par ailleurs, Mme B... n'est pas fondée à se prévaloir de la seule circonstance qu'elle aurait régulièrement déposée une déclaration au titre de l'imposition des plus-values pour soutenir que l'administration aurait, à tort, estimé que l'activité de marchand de biens ainsi exercée aurait un caractère occulte entrainant l'application des procédures de taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d'évaluation d'office des bénéfices industriels et commerciaux alors qu'elle n'a aucunement procédé à la déclaration des activités mentionnées ci-dessus en cette qualité réelle de marchand de biens, ; que dans ces conditions, au regard des caractéristiques des opérations ainsi réalisées, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que ce serait à tort que l'administration a considéré qu'en raison de sa qualité de marchand de biens, elle entrait dans les prévisions des dispositions des articles 257 et 35 précités du code général des impôts et a, en conséquence, assujetti lesdites opérations à la taxe sur la valeur ajoutée ;

6. Considérant, qu'aux termes du 3 de l'article 28 de la sixième directive du conseil des communautés européennes en date du 17 mai 1977 applicable aux rappels en cause de taxe sur la valeur ajoutée les Etats membres peuvent à titre de dispositions transitoires : " ... f) prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n'a pas eu droit à déduction à l'occasion de l'acquisition, la base d'imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d'achat " ; qu'il résulte clairement de ces dispositions que les opérations de la nature de celles auxquelles s'est livrée, en l'espèce, la requérante peuvent être soumises à un régime de taxation de la marge dérogatoire au régime de droit commun prévu par cette même directive ; qu'en raison de cette modalité particulière de détermination de la base d'imposition, laquelle était restée en vigueur en 2004 et en 2005, Mme B... ne peut se prévaloir des stipulations de ladite directive pour demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des mêmes années au motif que l'administration lui aurait fait application à tort d'un régime de taxation à la marge ;

En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2004 et 2005 :

7. Considérant, d'une part, que, compte tenu de ce qui précède, Mme B..., qui n'invoque pas d'autre moyen que celui tiré de l'absence d'activité de marchand de bien, n'est pas fondée à soutenir que ce serait à tort que l'administration fiscale aurait soumis les revenus tirés de cette activité à l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels et commerciaux ;

8. Considérant, d'autre part, que Mme B... ne peut utilement invoquer, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, l'instruction 3 A-9-10 du 28 décembre 2010, dès lors que ladite instruction, qui ne se livre d'ailleurs qu'à une interprétation des règles applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée, ne concerne que des impositions constatées au titre d'années postérieures ;

Sur les pénalités :

9. Considérant que Mme B..., qui n'a, ainsi qu'il l'a été précisé ci-dessus, aucunement procédé à la déclaration des activités mentionnées plus haut en sa qualité réelle de marchand de biens, n'est pas fondée à se prévaloir de la seule circonstance qu'elle aurait régulièrement déposé une déclaration au titre de l'imposition des plus-values pour soutenir que l'administration aurait, à tort, estimé que l'activité de marchand de biens ainsi exercée aurait un caractère occulte ; qu'en conséquence, la requérante n'est pas fondée à soutenir que ce serait à tort que l'administration lui aurait appliqué, sur le fondement de l'article 1723 du code général des impôts, une majoration de 80 % en raison du caractère occulte de son activité ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme B... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de Mme B... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Monlaü, premier conseiller.

Lu en audience publique le 2 mai 2014.

Le rapporteur,

X. MONLAÜ Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. CROIGER

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l' exécution de la présente décision.

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Nos 13NT01269, 13NT012702

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01269
Date de la décision : 02/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Xavier MONLAU
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : BOUDRIOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-05-02;13nt01269 ?
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