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17/04/2014 | FRANCE | N°13NT00465

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 17 avril 2014, 13NT00465


Vu la requête, enregistrée le 11 février 2013, présentée pour la société à responsabilité limitée (Sarl) Sury en Vaux Automobiles dont le siège est route de Bannay à Sury-En-Vaux (18300), par Me Martin, avocat ; la Sarl Sury en Vaux Automobiles demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103746 en date du 11 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier au 30 novembre 2007 ;

2°) de prononcer

la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement ...

Vu la requête, enregistrée le 11 février 2013, présentée pour la société à responsabilité limitée (Sarl) Sury en Vaux Automobiles dont le siège est route de Bannay à Sury-En-Vaux (18300), par Me Martin, avocat ; la Sarl Sury en Vaux Automobiles demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103746 en date du 11 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période allant du 1er janvier au 30 novembre 2007 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 525 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- sur la régularité du jugement attaqué :

. le tribunal administratif d'Orléans n'a pas motivé la qualification de mandataire opaque ;

. le tribunal a opéré une dénaturation des faits en ne prenant pas acte de l'existence de mandats et de factures de commissions émises par la société et en précisant qu'il résulte de l'instruction que le client particulier français ne serait pas mis systématiquement en possession de la facture émise par le vendeur européen ;

. il a commis des erreurs de droit en précisant que la société aurait appliqué le régime de

marge prévu pour les revendeurs de véhicules d'occasion et en considérant que le principe de neutralité de la TVA ne trouvait pas à s'appliquer ;

- sur la procédure d'imposition : en écartant plusieurs contrats l'administration a implicitement mais nécessairement recouru aux dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales relatives à l'abus de droit sans accorder à la société les garanties prévues en la matière ;

- sur le bien-fondé de l'imposition :

. la société ne peut être considérée comme mandataire opaque, ni vis-à-vis de son mandant, ni vis-à-vis des sociétés étrangères dès lors qu'elle a agi dans le cadre d'un contrat de mandat, que le vendeur étranger a émis des factures au nom du mandant et que le mandant a reçu une facture de commission de la part du mandataire ainsi qu'une reddition des comptes ;

. la Sarl Sury en Vaux Automobiles n'a jamais appliqué le régime de la marge prévu pour la revente des biens d'occasion par l'article 256 V du code général des impôts, comme le soutient l'administration à seule fin de procéder à un redressement portant sur la base de la taxe ;

. la Sarl Sury en Vaux Automobiles n'avait pas à s'assurer que les vendeurs polonais ou espagnols des véhicules agissaient en tant qu'assujettis revendeurs ;

. le principe de neutralité de la TVA a été méconnu ;

- sur les pénalités :

. en ce qui concerne la majoration de 40 % pour dépôt dans un délai supérieur à 30 jours à la suite d'une mise en demeure, l'absence de réponse à la suite d'une mise en demeure facultative ne peut être sanctionnée ;

. en ce qui concerne l'amende de 5% prévue par les dispositions de l'article 1788.A.4 du code général des impôts, elle est contestée dès lors que la société, agissant en tant que mandataire transparent, n'a procédé à aucune acquisition ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 juillet 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget, qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- sur la procédure, l'administration n'a pas mis en oeuvre irrégulièrement la procédure de l'abus de droit ;

- sur le bien-fondé de l'imposition :

. l'existence d'un mandat ne vaut pas reconnaissance de la qualité de mandataire transparent ; il résulte des conditions d'exercice de l'activité et notamment des conditions de facturation, de comptabilisation, des modalités de règlement et de transport des véhicules que la Sarl Sury en Vaux Automobiles doit être considérée comme un mandataire opaque ;

. la société s'est placée sous le régime de la taxation à la valeur ajoutée sur la marge ; or elle ne pouvait ignorer la qualité de professionnels de l'automobile des précédents propriétaires belges des véhicules, le rôle des sociétés espagnoles ou polonaises se limitant à l'établissement des factures ;

. la taxation en France des opérations réalisées par la Sarl Sury en Vaux Automobiles étant établie, le principe de neutralité de la TVA n'a pas été méconnu ;

- sur les pénalités :

. les conditions d'application de la pénalité de 40 % prévue en cas d'absence de dépôt dans les 30 jours d'une mise en demeure étaient réunies ;

. l'amende de 5 % prévue en matière d'acquisition intracommunautaire était bien due dès lors que la société a en réalité agi en qualité de mandataire opaque ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 27 janvier 2014, présenté pour la Sarl Sury en Vaux Automobiles, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2014, présenté par le ministre délégué chargé du budget, qui maintient ses conclusions à fins de rejet par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977, modifiée par la directive 94/5/CE du Conseil du 14 février 1994 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience du 27 mars 2014 :

- le rapport de M. Francfort, président-assesseur,

- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public,

- et les observations de Me Martin, avocat de la société Sury en Vaux Automobiles ;

Connaissance prise de la note en délibéré présentée le 7 avril 2014 pour la société Sury en Vaux Automobiles ;

1. Considérant que l'activité de négoce d'automobiles exercée par la société à responsabilité limitée (Sarl) Sury en Vaux Automobiles a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos les 31 décembre 2005 et 2006, élargie à l'année 2007 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration a notamment remis en cause, au titre de l'année 2007, le caractère transparent de l'activité de mandataire de la société et estimé que cette dernière ne pouvait se prévaloir du régime de taxation sur la marge applicable aux assujettis revendeurs de biens d'occasion ; que la Sarl Sury en Vaux Automobiles relève appel du jugement du 11 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a en conséquence été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier au 30 novembre 2007 ;

Sur les conclusions à fins de décharge :

En ce qui concerne la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité" ;

3. Considérant que la Sarl Sury en Vaux Automobiles soutient que l'administration aurait implicitement mais nécessairement invoqué ces dispositions pour l'assujettir à la taxe sur la valeur ajoutée selon les modalités applicables à l'activité d'intermédiaire opaque, sans pour autant lui accorder les garanties correspondantes en écartant, d'une part, les contrats de mandat liant la société aux acquéreurs des véhicules et d'autre part, les factures établies par les fournisseurs de ces véhicules au non des ses mandants ;

4. Considérant toutefois, d'une part, que les contrats de mandat versés à l'instruction ne suffisent pas par eux-mêmes, et dès lors que l'exercice effectif de l'activité professionnelle de la requérante ne correspond pas à une activité de cette nature, à établir la qualité de mandataire transparent de la Sarl Sury en Vaux Automobiles ; d'autre part, que si la société produit des factures établies par des sociétés espagnoles ou polonaises au nom de l'acquéreur final du véhicule, il résulte de l'instruction que ces factures, dont la société ne conteste pas qu'elles étaient fréquemment rédigées plusieurs mois après la livraison du bien, n'étaient pas présentées systématiquement au mandant de la société requérante et, qu'au surplus, ces factures des fournisseurs européens coexistent avec les factures de vente établies par la société requérante pour le même véhicule et seules acquittées par le mandant, pour un montant toutes taxes comprises comprenant à la fois le prix d'achat proprement dit du véhicule et la rémunération du mandataire ;

5. Considérant, dans ces conditions, que la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait à tort écarté comme ne lui étant pas opposables les contrats de mandat formés par la Sarl Sury en Vaux Automobiles ainsi que les contrats de vente, matérialisés par des factures, entre les mandants de la société et divers fournisseurs polonais ou espagnols, dès lors que l'administration s'est, en fait, bornée à requalifier, au vu des documents contradictoires qui lui ont été communiqués et dont la réalité et la sincérité ne sont pas contestées, l'activité de la Sarl Sury en Vaux Automobiles au regard du régime de taxe sur la valeur ajoutée selon les conditions concrètes d'exercice de celle-ci, lesquelles ne correspondaient pas à une activité de mandataire transparent ; que par suite la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait, à l'occasion des rehaussements contestés, fait application de la théorie de l'abus de droit au sens des dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés ont été établis selon la procédure de taxation d'office, en application des dispositions du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, dès lors que la Sarl Sury en Vaux Automobiles a omis de déposer dans le délai légal les déclarations auxquelles elle était assujettie au titre des mois de janvier à novembre 2007 ; qu'il incombe dès lors à la société requérante, en application des dispositions de l'article L. 193 du même livre, de démontrer l'exagération des impositions dont elle demande la décharge ;

S'agissant de la contestation de la qualité de mandataire opaque :

7. Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises " ; qu'aux termes du V du même article : " L'assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une livraison de bien ou une prestation de services, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien, ou reçu et fourni les services considérés. " ; qu'aux termes du III de l'article 256 bis du même code : " Un assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une acquisition intracommunautaire, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien " ; et qu'aux termes de l'article 266 dudit code : " 1. La base d'imposition est constituée : (...) b) Pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : - opérations réalisées par un intermédiaire mentionné au V de l'article 256 et au III de l'article 256 bis (...) " ;

8. Considérant, en premier lieu, que si la Sarl Sury en Vaux Automobiles se prévaut des contrats de mandat qu'elle faisait signer à ses clients à la recherche de véhicules en provenance d'autres pays de l'Union européenne, ces contrats sont par eux-mêmes sans effet sur la qualification des opérations réellement effectuées par la société au regard de la réglementation applicable à la taxe sur la valeur ajoutée, telle qu'elle résulte des dispositions précitées du code général des impôts ; que la circonstance que ces contrats respecteraient les formes d'un "mandat-type", annexé à un arrêté du ministre des finances et du commerce extérieur du 28 octobre 1996, est indifférente dès lors que cet arrêté ne vise qu'à préciser, dans un but de protection du consommateur, les informations dénuées de portée fiscale que les mandataires sont tenus de porter à la connaissance du public ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'un intermédiaire agit au nom d'autrui s'il met en relation deux personnes qui contractent entre elles ; qu'il en est de même pour l'intermédiaire qui contracte personnellement avec le tiers lorsque, soit le contrat mentionne expressément qu'il agit au nom d'autrui soit, en l'absence de contrat écrit, la facture est établie directement par le commettant ou par l'intermédiaire en faisant apparaître que celui-ci agit au nom d'autrui, soit enfin, en l'absence de facture, que les circonstances de droit ou de fait permettent d'établir que le tiers avait connaissance du fait que l'intermédiaire agissait au nom d'autrui ;

10. Considérant que, pour démontrer sa qualité d'intermédiaire transparent, la Sarl Sury en Vaux Automobiles se prévaut des factures rédigées par les fournisseurs espagnols ou polonais des véhicules au nom de ses mandants français ; que toutefois il résulte de l'instruction que la société requérante établissait pour le même véhicule une facture de vente, seule acquittée par le particulier acquéreur, alors que, par ailleurs, aucune mention n'apparaissait sur les factures établies par les sociétés étrangères ; que cette facture était établie pour un montant toutes taxes comprises comprenant à la fois le prix de vente proprement dit et la rémunération de la société requérante ; que si la Sarl Sury en Vaux Automobiles fait valoir qu'elle se bornait à avancer le prix du véhicule pour le compte de ses mandants, la facture de vente établie par elle à destination du client final ne comporte la mention d'aucun débours et donne lieu dans sa comptabilité à la passation d'une écriture de vente, cependant que la livraison des véhicules dans ses locaux est comptabilisée en tant qu'achat, alors qu'un intermédiaire n'est en tout état de cause jamais propriétaire du bien que son mandant lui a confié le soin de rechercher ; qu'il ressort encore de l'instruction que la Sarl Sury en Vaux Automobiles organisait seule le transport des voitures livrées à ses mandants depuis la Belgique, sans aucun concours des fournisseurs qui avaient rédigé les factures à destination des particuliers français ;

11. Considérant que, dans ces conditions, et alors même qu'elle a facturé à ses mandants le montant de commissions qu'elle a soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, la Sarl Sury en Vaux Automobiles ne justifie, ni qu'elle aurait mis en relation ses clients avec des fournisseurs d'autres Etats de l'Union européenne avec lesquels ils auraient contracté directement, ni qu'elle aurait contracté personnellement avec ces fournisseurs dans des conditions qui permettent de faire regarder la société comme agissant au nom d'autrui ; que l'administration a pu dès lors à bon droit appliquer aux opérations réalisées par la société le régime de taxe sur la valeur ajoutée prévu par les dispositions précitées de l'article 256 du code général des impôts relativement aux acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par des assujettis agissant en tant que tel ;

S'agissant de l'application du régime de la marge :

12. Considérant qu'aux termes du 2° bis du I de l'article 256 bis du code général des impôts : " Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti (...) ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en oeuvre des B ou C de l'article 26 bis de la directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 (...) " ; qu'aux termes du I de l'article 297 A du même code : " 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion (...) qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (...) " ; qu'aux termes de l'article 297 E du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs factures ou tous autres documents en tenant lieu " ; que ces dispositions, issues de la loi de finances rectificative pour 1994 du 29 décembre 1994, ont pour objet de transposer l'article 26 bis de la sixième directive du 17 mai 1977, issu de l'article 1er de la septième directive du 14 février 1994 ;

13. Considérant, en premier lieu, que dès lors que la Sarl Sury en Vaux Automobiles, redevable assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, s'est entremise dans une acquisition intracommunautaire pour le compte d'autrui mais en son nom propre, cette société est réputée avoir personnellement acquis et livré le bien au sens du III de l'article 256 du code général des impôts ; que par suite la base d'imposition des opérations correspondantes est en principe constituée, en application des dispositions de l'article 266 du même code, par le montant total de la transaction ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, d'une part, que la société s'est prévalue au cours de la vérification de comptabilité de factures établies par des fournisseurs espagnols ou polonais qui comportaient expressément la mention de la 7ème directive communautaire n° 94/5/CE du 14 février 1994, relative au régime d'imposition sur la marge et, d'autre part, a procédé à des enregistrements comptables des opérations d'achat et de revente dont il résulte que seul le montant de la marge commerciale réalisée, qualifiée par la société de commission, a été en fait soumise à la taxe ; que l'administration était dès lors fondée, contrairement à ce que soutient la société requérante, à estimer que cette dernière avait entendu revendiquer le bénéfice du régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge prévu en matière de biens d'occasion par le I de l'article 297 A du code général des impôts et à en vérifier le respect des conditions d'application par la Sarl Sury en Vaux Automobiles ;

14. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions citées au point 12 qu'une entreprise française assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée a la qualité d'assujetti revendeur et peut appliquer le régime de taxation sur marge prévu par l'article 297 A du code général des impôts lorsqu'elle revend un bien d'occasion acquis auprès d'un fournisseur implanté dans un autre Etat membre qui, en sa qualité d'assujetti revendeur, lui a délivré une facture conforme aux dispositions de l'article 297 E du code général des impôts, ou n'est pas assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration peut toutefois remettre en cause l'application de ce régime lorsque l'entreprise française ne pouvait ignorer la circonstance que son fournisseur n'avait pas la qualité d'assujetti revendeur et n'était pas autorisé à appliquer lui-même le régime de taxation sur marge prévu par l'article 26 bis de la directive du 17 mai 1977 ;

15. Considérant qu'au cours de la période en litige, la SARL Sury en Vaux Automobiles soutient avoir acquis auprès d'entreprises espagnoles et polonaises des véhicules immatriculés dans d'autres Etats membres de l'Union européenne qu'elle a ensuite revendus à des particuliers en France ; qu'elle a maintenu lors de la revente de ces véhicules le régime de taxation à la marge, résultant des dispositions précitées ; que l'administration, ayant requalifié la SARL de mandataire opaque, soutient que le régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge ne pouvait pas s'appliquer aux véhicules facturés par les sociétés revendeuses et que l'intéressée ne pouvait ignorer que les opérations présentaient le caractère d'acquisitions intracommunautaires taxables sur l'intégralité du prix de revente à ses propres clients ;

16. Considérant qu'il résulte des factures et lettres de voiture afférentes au transport des véhicules, entièrement organisé par la Sarl Sury en Vaux Automobiles, que ces biens provenaient de Belgique et non des sociétés espagnoles ou polonaises avec lesquelles la société requérante n'a pu ni justifier de relations commerciales, ni même présenter de bons de commande ou de livraison correspondant aux factures établies par ces sociétés ; que la Sarl Sury en Vaux Automobiles disposait des cartes grises des véhicules qu'elle revendait, ainsi que de leur carnet d'entretien, et par suite avait en sa possession l'ensemble des éléments lui permettant de déterminer parfaitement l'activité de leurs précédents propriétaires, qui étaient des sociétés de financement, de location ou des professionnels de l'automobile situés en France ou en Belgique ; que les télécopies échangées avec le transporteur des véhicules font en outre apparaître que la Sarl Sury en Vaux Automobiles connaissait la provenance précise des véhicules, étant en relation suivie avec les véritables fournisseurs de ces biens, ainsi qu'il résulte de l'assistance administrative internationale mise en oeuvre auprès des autorités fiscales belges ; qu'il résulte ainsi de l'instruction que la Sarl Sury en Vaux Automobiles ne pouvait ignorer que les véhicules d'occasion qu'elle avait revendus au cours de la période en litige avaient pour origine des professionnels du secteur automobile belge ou français, sociétés de financement ou de location de voiture, dont les opérations réalisées sur ces véhicules avaient donné lieu à déduction de taxe, rendant inapplicable le régime de taxation sur marge lors de la revente de ces véhicules d'occasion ; qu'ainsi, bien que les factures délivrées à la société requérante par des entreprises espagnoles et polonaises aient mentionné des prix toutes taxes comprises, l'administration était fondée à remettre en cause l'application du régime d'imposition sur la marge appliqué à l'ensemble des véhicules d'occasion immatriculés à l'étranger pendant la période en litige et en conséquence à assujettir la Sarl à la taxe sur la valeur ajoutée sur la totalité du prix de vente des véhicules ;

17. Considérant, enfin, que la société soutient que le principe de neutralité de la taxe sur la valeur ajoutée aurait été méconnu au motif que la même opération aurait été imposée à la fois en Espagne et en Pologne auprès des sociétés facturières et en France ; que, toutefois, la circonstance, au demeurant non établie, que les sociétés facturières espagnoles et polonaises auraient été taxées sur la marge n'est pas de nature à affecter le bien-fondé du rappel en litige de la taxe sur la valeur ajoutée, les sociétés étrangères n'étant pas privées, si elles s'y croient fondées, de la possibilité de faire valoir leurs droits auprès des administrations dont elles dépendent ; que la circonstance invoquée que ces autorités espagnoles ou portugaises n'ont pas fait connaître leur analyse sur le régime applicable aux opérations en litige est sans incidence dès lors qu'il résulte de ce qui précède que les transactions en litige auraient dû être soumises dans leur globalité à la taxe sur la valeur ajoutée ;

En ce qui concerne les pénalités :

18. Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes " ; qu'aux termes de l'article L. 67 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. " ; qu'aux termes de l'article L. 247 du même code : "(...) Aucune autorité publique ne peut accorder de remise totale ou partielle de (...) taxes sur le chiffre d'affaires, de contributions indirectes et de taxes assimilées à ces droits, taxes et contributions" ; qu'enfin aux termes de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " 1. Lorsqu'une personne physique ou morale ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s'abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter cet acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement est assorti (...) d'une majoration de 10 p. 100. / (...) 3. La majoration visée au 1 est portée à / : 40 p. 100 lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai " ;

19. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'alors même que l'administration n'est pas tenue d'adresser une mise en demeure au contribuable qui n'a pas déposé dans le délai légal la déclaration de taxe sur la valeur ajoutée qu'il était tenu de souscrire avant de procéder à son imposition par voie de taxation d'office, si elle décide néanmoins d'adresser une mise en demeure à un contribuable dans cette situation, la majoration de 10 % prévue au 1. de l'article 1728 du code général des impôts peut, en application des dispositions du 3. de cet article, être portée à 40 % lorsque le contribuable n'a pas déposé la déclaration dans les trente jours suivant la réception de cette mise en demeure ;

20. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le service a adressé le 18 janvier 2009 à l'intéressée une mise en demeure visant les déclarations mensuelles de taxe sur la valeur ajoutée relatives aux mois de janvier 2007 à novembre 2007 ; que ces déclarations ont été déposées plus de 30 jours après la mise en demeure ; que dès lors c'est à bon droit que l'administration a assujetti la société au paiement de la majoration prévue par les dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts ;

21. Considérant d'autre part, que si la Sarl Sury en Vaux Automobiles conteste l'application de l'amende, égale à 5% de la TVA déductible, prévue par les dispositions de l'article 1788.A.4 du code général des impôts par l'unique moyen qu'elle n'a pas procédé à des acquisitions intracommunautaires, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que ce moyen ne peut qu'être écarté ;

22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Sarl Sury en Vaux Automobiles n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans, qui a répondu de manière motivée à l'ensemble des conclusions et moyens soulevés devant lui, a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la Sarl Sury en Vaux Automobiles demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la Sarl Sury en Vaux Automobiles est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl Sury en Vaux Automobiles et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Etienvre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 avril 2014.

Le rapporteur,

J. FRANCFORT Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT00465

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT00465
Date de la décision : 17/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Jérôme FRANCFORT
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-04-17;13nt00465 ?
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